Il y a l’odeur du bois mouillé.
La capuche rabattue toute la matinée.
Et l’eau qui s’est immiscée sous les semelles trouées.
Nugget n’a jamais aimé la pluie et les effluves de la terre trempée. Elle avait bravé les nuages sombres juste pour s’arrêter à l’église comme chaque matin ; les gouttes d’eau qui ont roulé contre les vitraux et sonné en écho entre les murs, à leur propre rythme, comme les secondes d’une horloge.
La végétation qui en semblait si heureuse mais la monotonie des gouttes l’ont bien vite énervée et, se sentant mal à l’aise dans sa veste fermée et ses chaussettes mouillées, Nugget était retournée dans cet endroit où elle loge. La petite cabane dans le seul arbre encore vivant de l’ancien jardin de la maison, l’échelle est toujours abîmée et l’eau s’infiltre à l’intérieur, un peu de mousse et la peur que le bois finisse par pourrir et mourir comme tout le reste dans cette ville.
Nugget n’a jamais aimé la pluie alors elle l’avait utilisé comme excuse pour ne pas se rendre à la poste, la routine qui s’est installée l’ennuie et parfois, rester dans les couvertures raccommodées et se réchauffer à la lueur d’une bougie, c’est suffisant pour la fille.
(Même si, bien souvient, dans la journée, elle a— tant culpabilisé.
Culpabiliser de ne pas être utile, d’être là à se reposer sans même le mériter.)
La journée passée à lire et lire et lire et relire toutes les pages du journal intime pour tenter, en vain, de comprendre ce qu’il s’est passé. Pourquoi quatre mois ont-ils été rayés. Oubliés. Inexistants.
Angoissants.
Mais les réponses ne sont pas dans le journal.
Elles ne le seront jamais et ça fait toujours aussi mal.
Toujours aussi peur d’y penser.
Toujours aussi peur de découvrir la vérité.
Et puis le lendemain quand elle s’est réveillée, la pluie s’est arrêtée—
Mais il y a toujours l’odeur du bois mouillé.
Et Nugget a une journée à rattraper.
Elle s’est endormie dans ses habits d’hier qu’elle décide de garder alors elle a juste vérifié le contenu de son sac avant de sortir. Descendre l’échelle en évitant les barreaux trop abîmés et, au sol, atterrir—
ah mais—
ah—
Nugget trébuche, glisse, s’étale dans la boue et l'herbe trempée au pied de l’arbre à cause— à cause—
à cause d’une fleur qui a poussé là, juste en dessous de l’échelle.
Elle n’était pas là hier, la fleur, Nugget n’aurait pas pu la rater, juste là, au milieu de l’herbe sauvage qui n’est plus tondue depuis longtemps, à flirter avec le tronc d’arbre, à se moquer d’elle.
Et pendant— une seconde—
c’est l’angoisse qui remonte dans la gorge
parce que la fleur n’était pas là hier et
elle n’a pas pu pousser en une nuit.
C’est l’angoisse qui remonte dans la gorge parce que Nugget d’un coup elle se demande
si elle n’a pas encore disparu quatre mois, laissant le temps à cette fleur de pousser là, sans même lui demander son avis.
