Event 1 — RENFORTS #Groupe 5 (Extérieurs)

La nuit est traversée en direction du foyer sous le joug d’une humeur lourde, et d’un esprit préoccupé. Pellinor n’est pas porteuse de bonnes nouvelles : ses pérégrinations n’ont fait que confirmer les soupçons d’Arthur. Tout cela ne présage rien de bon, il n’en faudra déployer que davantage de prudence – et à raison.

Comme pour appuyer ces sombres conclusions, un grand vacarme retentit, lui faisant prestement abandonner le chemin qu’elle suivait pour se diriger vers la source du bruit, le cœur encore battant de ce sursaut violent.

L’inquiétude s’épaissit.
Un tel boucan à une heure pareille, cela n’a rien de normal.

Sa main vient couvrir quasi intégralement le faisceau de sa lampe torche, laissant filtrer une lueur suffisamment faible pour discerner où poser les pieds sans être particulièrement repérable. Elle n'a toutefois que le temps d'esquisser une paire de pas avant de se sentir s'enfoncer anormalement dans le sol. L'étonnement la fige sur place, et elle se risque à écarter un doigt de sa lampe pour bénéficier d'un peu plus de lumière.

Le tableau qui lui apparaît lui arrache un petit hoquet à peine audible, mi surpris, mi frustré. Pouvoir mieux distinguer où le bruit l'a menée lui permet rapidement de comprendre où elle est, et surtout pourquoi les environs ne sont désormais plus qu'une vaste étendue de boue. Pellinor serre les dents pour s'empêcher de bougonner à voix haute quelque chose sur l'état de ses chaussures et le temps que cette citerne a nécessité pour être remplie. Elle se remet en marche lentement, d'un pas prudent, bien décidée à ajouter cet incident à son rapport déjà bien peu positif. Tout cela lui semble relever davantage du sabotage que du pur accident.

Un petit groupement de silhouettes lui apparaît alors au loin, et les interrogations redoublent. Sont-ce des gardes du château attirés par le vacarme ou, plus inattendu – et plus dangereux –, les responsables de ce gâchis d'eau ?

Le rayon de sa lampe, toujours extrêmement tamisé, lui permet de repérer une autre silhouette, plus éloignée, plus diffuse, plus … animale. Pellinor pense l’identifier, avec grande surprise, comme étant celle d’un petit pachyderme.

Ce qui se passe ici commence définitivement à lui échapper, et ce n'est pas pour lui plaire.

En quelques enjambées aussi déterminées que le lui permet la boue, elle fond sur le groupe de gardes présumés tout en retirant la main qui couvrait sa lampe torche et la leur brandit en plein visage afin de les éblouir. Au diable la discrétion, puisqu'il n'est plus possible de faire le moindre pas au milieu de ce champ de bataille sans émettre de répugnants bruits de succion.

Sa première constatation est que ces trois individus trempés ne sont absolument pas des gardes. Leurs visages lui sont parfaitement inconnus, et leurs vêtements ruisselants lui indiquent qu'ils étaient déjà présents sur les lieux lorsque la citerne a déversé son contenu.

Sa deuxième constatation est que tout cela commence à faire beaucoup de perturbations pour une même soirée. Son agacement augmente d'un cran et, fronçant des sourcils, elle les apostrophe sans cesser de promener le faisceau de sa lampe dans leurs yeux.

— Vous êtes qui, vous ?

Les questions qui se bousculent dans son esprit commencent à se teinter d’appréhension. Si ces intrus sont des saboteurs pris sur le fait, leur supériorité numérique aura rapidement raison de ce qu’elle pourrait entreprendre pour les arrêter.

Gagner du temps en tentant de les sonder lui semble être, pour le moment, la solution la plus indiquée.

— Je vous préviens que si c’est à vous qu’on doit la bestiole que je viens d’apercevoir, je risque de perdre patience.

Et comme les choses vont rarement seulement par paire, la troisième constatation se fait, tardive mais terrible, à force de scruter des traits humides qui lui semblent désormais bien plus que familiers. Le cœur lui remonte dans la gorge alors que le nom lui échappe dans un souffle :

— Oryon ... ?