le fracas derrière la porte (post-event) | Mum + Bunny

fracas
bunny + mum

La bouteille qu'il tenait en main, en un bruit sourd qui résonna contre les murs et dans l'immensité trop vide de la planque, venait se déposer sur le béton du sol, passée de pratiquement pleine à pratiquement vide en quelques minutes à peine. Bunny ignorait ce qui avait tant enrayé son enthousiasme ; depuis qu'il était revenu durant la bataille ; depuis qu'il avait été lavé de toutes ses cicatrices et de toutes les traces de ses péchés, Bunny était las.

Même le rhum n'avait plus les saveurs d'autrefois.
Même le corps de Lust n'avait pas étanché sa soif.
Même le rire de Diamond n'avait pas engagé le sien.
Bunny était plein d'une rage froide et il s'était planté là, debout, devant l'enveloppe visiblement à l'abandon de Mum.
A l'abandon car même s'il respirait il avait l'air mort.
Mort depuis que sa Déesse avait disparu - qu'il l'avait sue en sécurité.

« On l'a retrouvée. J'ai pensé que tu aurais aimé le savoir. »

Le ton railleur était mauvais, glacial, il était inutilement méchant et grave. Cela ne ressemblait pas à Bunny qui riait plus fort qu'il ne hurlait.

« Je me suis souvent demandé si vous baisiez, tous les deux. Je me disais que t'avais pas passé le pas parce que tu te sentais pas à la hauteur, ou quelque chose dans ce goût-là. »

Il passa sa langue sur ses lèvres. Son regard était froid.

« Moi je me la ferais bien en tous cas. »

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le fracas derrière la porte

Silence.
Les oreilles qui en bourdonnent.
Le sol froid qui engourdit les muscles. Quel jour est-on. Quelle heure est-il. Il s’en fiche, Mum, des réponses à ses questions. Il s’en fiche et il ne veut pas savoir.
Et le château. Et les chevaliers.
Et les enfants.
Et Arthur.
Pas de réponse. Il n’en veut pas.

On en a fait le tour, de cette pièce. Trop de fois.
On en a fait le tour, de ses pensées. Trop de fois.
Avoir envie de tomber dans le vide du sommeil mais ses yeux se ferment sans jamais le trouver. Pourtant, pour une fois qu’il peut dormir autant qu’il le veut, sans devoir se réveiller pour assumer ses responsabilités, il pourrait en profiter. Mais il reste bien éveillé. Trop éveillé. Ça le dérange.
Et Mum a besoin d’ordre pour dormir. Tout doit être rangé—

Le bruit de la bouteille le fait ouvrir les yeux. Il garde son regard sur le sol, remarque la silhouette qui s’y tient mais l’ignore. Qu’est-ce que tu veux ? De qui tu parles ? Pourquoi tu parles ?
Mais il comprend bien vite lorsque tu reprends. Ah, oui, Arthur.
(Arthur, Arthur, Arthur.)
Il s’en fiche, tu sais. Qu’on l’ait retrouvée. Parce que, maintenant, elle n’est plus seule. Forcément qu’ils l’ont retrouvée, Arcadia n’est pas si grande. Mais elle n’est plus seule. Plus en danger.
Il s’en fiche, tu sais. De tout ce que tu peux dire. Sur lui, sur elle. Ce ne sont que des mots, inutiles sûrement. Ça ne changera rien. Tu peux continuer à lui parler, à perdre ton temps. Parce que, pendant que tu es là, au moins, il est sûr que tu n’es pas près d’elle.

Alors, continue. Vas-y.
Amuse-toi bien, surtout.

Mum, lui, ne bougera pas. Ne répondra pas.
Le regard toujours fixé sur le sol, sur la bouteille. Comme si personne ne se tenait là.
Comme si lui n’était pas là.

Comme si rien n’existait.

Résumé:

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bunny + mum

La voix enrayée dans la gorge, Bunny avait les amygdales qui lui brûlaient de le vouloir tant se repentir devant ses pieds, à genoux suppliant qu'il ne s'attaque pas à sa belle. Mais Mum était immobile, impassible, mort devant lui, et Bunny se sentait seul, plus seul que jamais, dans l'immensité d'une pièce au plafond trop haut pour ses jambes pourtant pas en reste. Les acidités se battaient dans ses veines et à ses lèvres, sifflaient en ricanements sordides qui lui échappaient parfois. Ses mains étaient prises d'un fin tremblement qui témoignait de sa grande nervosité, de tout ça contenu en lui qui menaçait d'exploser à tout moment.

Une grande enjambée lui avait suffit à rejoindre le corps de Mum, sa poigne attrapant son col et le levant devant lui. Bunny n'était plus un homme depuis longtemps ; Bunny était un monstre et ne se regardait plus jamais dans les reflets des vitres ou des flaques.

« Si tu ne te défends pas au moins un peu je vais te tuer. »

Il lui asséna un coup de genou dans le ventre, le jeta au sol. Son corps pathétique, pitoyable, était affaibli, de toutes évidences. Ce n'était pas tant le coup qu'il venait de lui mettre mais le trop peu de nourriture qu'on lui apportait, les maigres rayons de soleil qui arrivaient encore jusqu'à sa peau et toute la lumière qui s'était échappée de lui pour ne laisser là plus qu'une carcasse vide et insipide.

L'ombre de lui-même ; Mum était déjà assassiné et Bunny pouvait bien s'acharner sur lui.
Il y comptait en tous cas, car sa main vint le rattraper, le relever. Sa poigne était plus ferme, sa voix plus douce.

« Elle arrive quand, la dernier étincelle qui fait que même les suicidés se débattent avant de mourir, dis-moi ? Je ne suis pas quelqu'un de patient. »

Un nouveau coup ; dans les côtes et asséné avec son poing cette fois.
Bunny ne ressentait aucune excitation et ça l'ennuyait profondément ; le frustrait ; péniblement.

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le fracas derrière la porte

Je vais te tuer, tu dis, alors que la violence s’inscrit dans tes traits, alors que tu ne sembles pas être des plus patients. Je vais te tuer, tu dis.
Fais-le, il pense.
Fais-le.

Fais-le et puis peut-être que ça ira mieux, qui sait ?
(Fais-le mais au fond, Mum sait qu’il n’a pas réellement envie de tous les abandonner. C’est qu’il ne pense plus très bien, il ne pense plus à tout ce qui arrive à le faire vivre. Dans cette pièce, il n’y a que toi et lui, et Mum a oublié comment on fait pour respirer seul.)

Et puis la douleur éclate et le souffle lui manque lorsqu’il suffoque sur le sol, les bras qui se serrent autour du corps par réflexe, serre la mâchoire alors qu’il n’émet qu’un sifflement peiné. (L’envie de se rouler en boule.) Tu sais, même s’il voulait se défendre, il ne pourrait sans doute pas.

Si tu savais, à quel point tu perds ton temps.
Tu auras beau lui parler, lui dire tout ce que tu veux, tu auras beau le frapper ; ça ne changera rien. Tu sais, cette dernière étincelle dont tu parles, ça fait longtemps qu’il ne l’a plus. Il en a marre, Mum. Alors, tu peux continuer autant que tu veux, et si par la même occasion tu pouvais le forcer à dormir un peu, ça l’arrangerait.

Tu n’es pas quelqu’un de patient.
Dommage. Darell était têtu. Mum l’est encore plus.
(Et ce ne sont pas quelques coups de poing, même bien placés, qui le feront changer d’avis.)

Cette fois-ci, lorsqu’il quitte le sol à nouveau, il te regarde.
C’est vrai que ce n’était pas très poli de sa part de faire semblant que tu n’existais pas.
(La respiration saccadée, la douleur vive, les paupières qui vacillent un peu. Ce n’est pas du jeu, tu sais, déjà d’ordinaire il ne ferait pas le poids contre toi, mais encore moins maintenant…)

Résumé:

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bunny + mum

Les jointures des mains déjà s'écorchaient sur son visage ; aux poings serrés la violence hurlait dans les muscles, veinés, tendus. L'acide à la place du sang, ça brûlait l'épiderme et la sueur commença à s'y mêler dans la nuque ; les odeurs mêlées étaient à vomir mais Bunny n'était pas écœuré.

Inépuisable, c'est le moral qui s'étiola avant le corps, la fatigue n'y était pas ; il se lassa. Pas pour longtemps cependant, car son impulsivité qui n'était plus à prouver pouvait reprendre les devants ; la violence menaçant de reprendre sa place à tout moment.

Bunny s'était éloigné, de quelques pas à peine, s'assit sur une chaise en face de lui, attrapa dans sa poche une clope qu'il alluma, et un grondement résonna.
Au travers de la gorge comme un animal.

« A une époque je crois qu'on se serait appréciés, toi et moi. »

Sa tête en arrière, le regard désespérément accroché au plafond. Il y cherchait des réponses à ses propres interrogations ; Mum pour réceptacle de sa frustration.

« J'étais une âme égarée et en peine qui avait besoin d'une mère j'ai cherché dans les filles une figure maternelle et bien sûr ce genre de manque ça se comble pas comme ça. La daronne que je voulais c'était quelqu'un comme toi. »

Il ricana, d'un rire sordide qui étira la commissure de ses lèvres.

« Quand je vois toute l'énergie que tu mets à protéger ces gamins je me dis que j'aurais aimé que ma mère se batte comme ça pour me garder près d'elle. »

Abandonné à un milieu précaire et laissé là car il était juste une forte tête. Il aurait aimé qu'on l'aime, il attendait qu'on le regarde et Bunny n'a récolté rien d'autre que du mépris. Mais si ça avait été Mum, aurait-il baissé les bras ? Lui qui était prêt à prendre tous ces coups pour ceux à qui il avait juré ; aurait-il abandonné Alistair ?

« Mum c'est un bon nom, mon con. Un très bon nom pour la pute sacrificielle que t'es. »

Il tendit le paquet de clopes, baissa le regard.

« T'en veux ? »

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le fracas derrière la porte

Ça éclate. Un peu d’écarlate.
Ça pulse sous les tempes.
Cette violence sous tes doigts qui rampe.

Mal mal mal.
Ça fait mal.
Tu appuies où ça fait mal.
Mal mal mal.
Mais cette douleur. Au fond, elle est bien plus supportable.
Que celle qu’il ressent chaque heure. Celle qui encore et encore l’accable.

(Parce que, cette douleur-là, il sait qu’elle finira par disparaître définitivement.
Contrairement à celle qui le prend au cœur dès que les pensées déraillent un peu trop longtemps.)

Mum, il prend un temps pour respirer, pour laisser la douleur s’échapper, pour te regarder t’éloigner.
Le cœur battant. Tu sais, cette violence, au fond, ça lui fait peur car ce n’est pas un sentiment qu’il connaît.
À part celle de son frère.
À part celle de tes pairs.
Tu sais, cette violence, au fond, il se demande si peut-être il la mérite.
Après tout, peut-être que c’est le cas. Peut-être que ce n’est que le fruit de sa conduite.

Il t’écoute. Se redresse. Assis contre le mur. Ignore les battements qui frappent dans ses oreilles. Pose les yeux sur toi.
S’il te plaît.
S’il te plaît ne lui fais pas ressentir de la peine pour toi.
Il en serait capable, tu sais.
Il en serait capable…
Tellement capable…

S’il te plaît.
S’il te plaît.
Tais-toi.

(Passe la main sous le nez. Retrouve le dos de la main recouverte de sang.
Il espère que tu n’as rien cassé. Dissimuler aux yeux des enfants tous les hématomes que tu lui as sûrement offerts sera déjà assez embêtant.)
Et peut-être que c’est l’ombre fugace d’un sourire qui s’est inscrit, un instant. Lorsque tu prononces ses mots qu’il est le premier à gronder lorsqu’il les entend dans la bouche des petits. Parce que tu n’as pas tort, surtout après ses derniers événements. Peut-être qu’il en aurait ri.
Qui sait ?
Peut-être qu’au fond, on se connaît.

La cigarette, il l’accepte, peut-être avec une seconde d’hésitation.
Il te laisse l’allumer avant de la porter à ses lèvres. Avant de respirer.
(Il y a du sang sur le tube. Il tente de l’ignorer.)

Au fond, tu sais, il ne te comprend pas, Mum. Il ne comprend pas pourquoi tu lui dis ça.
Que veux-tu qu’il te réponde ? Que veux-tu qu’il te dise ? Quels mots souhaites-tu qu’il te prononce ? Peu importe, ils ne seront probablement pas sincères, pas après tout ce que tu as fait, pas après tout ce que vous avez fait. Si tu cherches des mots réconfortants, sache que tu ne les mérites pas.
Si tu cherches des mots réconfortants, sache qu’il est déjà trop occupé à se les prononcer pour lui-même pour avoir la force d’en trouver pour toi.

Alors, il te regarde.
L’air de dire que veux-tu que je fasse.
Que veux-tu de moi.
Je n’ai rien à t’offrir.
Vous m’avez tout pris.

Résumé:

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L'indifférence de Mum le rendait plus amer qu'il ne l'avait pensé au départ.
Le rendait plus malade de sa propre haine, plus gangréné encore.
C'était à devenir fou, le silence.

C'était pour ça que Bunny n'avait jamais cessé de cogner.
Il préférait le bruit des coups que le bruit de sa solitude.
Et Mum, en cadavre pathétique devant lui, n'était pas d'une bonne compagnie.
Mais d'une compagnie quand-même.

« Ca va, pas la peine de crier. »

Ironisait son mutisme, pour combler le vide.
Bunny avait le visage triste.
Les poings serrés. La gorge lourde.

« T'endors pas. Conseil d'ami. »

Repartait de la pièce, amer.
N'avait réussi à déverser aucune frustration, aucune colère.
Quoiqu'il avait moins envie de cogner au dehors ; Bunny avait surtout envie de se cogner lui-même.

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