i was just passing through ─ Dove.

Elle a coutume de dire qu’elle n’est que de passage, bien souvent, à juste titre. Dove est un électron libre. Elle vole au-dessus des autres comme son surnom le laisse entendre. Cette petite colombe, blanche comme neige, belle comme un cœur ; s’envole vers d’autres horizons au moindre aléa. Difficile de trouver une créature plus volage qu’elle tant son désir de liberté est incommensurablement supérieur à tous les autres. Certains sont guidés par l’amour, d’autres par la haine, d’autres par la bouffe - chacun son délire qui sommes-nous pour juger – Dove elle ? Elle veut être libre de faire ce qu’elle veut. Elle n’a pas toujours été capable de satisfaire cette envie, mais elle n’en veut à personne pour cela. Pas rancunière pour un sou la petite dame.

Elle reste malgré tout à l’écoute des autres, partant du principe que toutes les expériences sont bonnes à prendre, elle ne rechigne pas à faire vivre une conversation, à partager ses pensées, son point de vue et j’en passe ; sans jamais prendre l’initiative d’engager toutefois, comme si cela lui était interdit… ou peut-être qu’elle n’en a tout simplement pas envie. Parfois ses paroles sont douces comme du velours, parfois aussi caustiques que de l’acide, Dove ne passe de pommade à personne, lorsqu’elle a quelque chose à dire, elle le dit, sans ambages ; elle déteste qu’on tourne autour du pot. Sincère, parfois à l’excès, de temps en temps, un petit mensonge peut faire du bien ? Pas de son point de vue.

Si parfois elle maquille ses paroles de sarcasme, c’est aussi, car elle est très taquine. Elle aime jouer sur les mots, provoquer des malaises, les laisser planer dans l’air et se gausser intérieurement de son méfait. Son péché mignon étant d’observer les réactions des gens lorsqu’elle les laisse dans l’embarras. Oui, parfois c’est une petite emmerdeuse ; comme quoi elle n’est mature que jusqu’à une certaine limite ; qu’elle se fixe elle-même par-dessus le marché. Et le pire dans tout cela ? On lui donnerait le bon dieu sans confession lorsqu’elle nous cajole de son mélodieux accent transalpin pour se faire pardonner de ses fautes. Et elle en profite bien.

Dove a des plaisirs simples, elle se satisfait de peu ; sans doute la conséquence de ses origines modestes, elle n’a jamais eu d’ambitions grandiloquentes, mais n’a jamais reculé devant rien ni personne pour faire ses preuves cependant. Déterminée, véritable bourreau de travail, dans le milieu dans lequel elle travaillait, il fallait manger ou être manger, le talent seul n’aurait jamais pu l’emmener là où elle le voulait si elle ne s’était pas bougé le cul un minimum.  

Quant à sa vision du monde… c’est compliqué. Celle-ci est en perpétuelle évolution. Enfant, elle voyait un monde monochrome. Un monde teinté de noir et blanc. La méchante maman qui lui faisait vivre des leçons interminables, qui l’essoufflait volontairement. Le gentil papa, qui était là pour la dorloter, lui cuisiner ses plats préférés. Et puis les premières nuances de gris s’installèrent. Maman n’était pas si méchante que ça. La figure paternelle de prime abord si angélique… se fissura avec le temps.

Vint ensuite l’apparition des couleurs. Vives et aveuglantes dans un premier temps. Le rouge de la colère, le bleu de la peur, le vert du dégoût – les épinards et les brocolis, mais quelle horreur ! – le soleil jaune qui l’aveuglait lorsqu’elle sortait pour prendre l’air entre deux leçons. Elle en perdit vite ses repères… l’apparition des nuances ne fit que compliquer l’affaire.

Le rouge n’était pas que colère, il était aussi passion. Le bleu de sa peur était aussi celui de la mer qui l’apaisait. Le vert de son dégoût était aussi celui de l’herbe sous ses pieds nus, dans laquelle elle adorait gambader. Et aujourd'hui elle essaye tant bien que mal de composer avec toutes ces couleurs, toutes ses nuances... tout était si simple lorsqu'elle n'était encore qu'une gamine.

Ses parents avaient coutume de dire qu’en grandissant, elle commencerait enfin à comprendre le pourquoi des questions qui la taraudaient. Ils avaient raison, mais n’avaient pas précisé une chose cependant : une question en amène forcément une autre. Dans un cycle sans fin. Et ça, Dove n’y avait pas été préparée.



Pianiste de talent, mais également de renom (au niveau de ses pairs surtout), elle est lauréate de nombreux concours en Italie et même en Europe. ─ elle aime particulièrement le classique et le jazz, mais est aussi éclectique dans ses goûts musicaux ─ plutôt café que thé ─ plutôt pizza que… bah tout en fait, cliché italien, mais elle s’en bat les co… restons polis ─ elle n’était de base que de passage à Arcadia Bay, dire qu’elle a le seum de devoir s’éterniser est un euphémisme, elle ne manque d’ailleurs pas une occasion de le faire remarquer ─ elle trimballe partout avec elle le violon qu’elle devait offrir à son amante, sait-on jamais elle sortira peut-être un jour de ce merdier ─ elle survit comme elle peut, mais ne connaissant absolument personne au départ, c’est compliqué ─ elle dort n’importe où ─ elle négocie comme elle peut avec les rares personnes avec qui elle a fait connaissance pour une douche, un repas, ou bien un logis ─ parle avec un accent italien très prononcé ─ elle trouve parfois le moyen de faire la touriste, autant profiter du séjour ici hein ─ son surnom lui vient de sa rivale, et comme peu de gens utilisent des noms propres ici bah autant en faire de même ─ elle refuse purement et simplement de s’associer au moindre groupe, prétextant qu’elle n'est ? « Que de passage » ? Bonne réponse ! ─ elle entretient donc des relations cordiales avec à peu près tout le monde, mais évite un petit peu les pirates quand même ─ elle a toujours voulu composer des musiques pour les jeux vidéo, mais n’a jamais osé ─ elle a perdu sa console portable dans la tempête, gros seum ; sa valise aussi, un malheur n’arrivant jamais seul ─ elle sait parler anglais, italien et baragouiner quelques mots en français.

1Tu habites à Arcadia Bay ou tu étais juste de passage ? Juste de passage. Elle devait se rendre à Portland, mais avait décidé de faire un petit road trip sur la côte ouest, voyageant pour la première fois aux USA, elle avait envie d’en profiter un peu.

2Tu faisais quoi avant la tempête ? Elle était dans la chambre de son hôtel à écouter de la musique à fond dans les oreilles. Ce n’est qu’en décidant d’en sortir qu’elle se retrouva nez à nez avec ce cataclysme.

3Quels dégâts a-t-elle fait dans ta vie ? Physiquement, rien de bien grave, une côte fêlée, quelques ecchymoses superficielles pas la mer à boire donc. En revanche, elle a perdu toutes ses affaires, mais s’est accrochée au violon qu’elle devait offrir à son amante comme si sa vie en dépendait. Et celui-ci a miraculeusement survécu à l’apocalypse. La seule embellie de son séjour à Arcadia en gros.

4Que faisais-tu lorsque la Tempête a frappé ? Bah… elle a couru pour sauver son cul. Rien de plus, rien de moins.

5Tu quitterais tout pour retrouver ta vie d'avant ? [X] OUI.

6Exerces-tu un métier ou des activités particulières dans ce nouveau monde ? Rien de spécial, elle essaye de survivre du mieux qu’elle le peut, négocie pour le moindre petit confort. Elle ne peut pas s’appuyer sur son statut de musicienne, ici, ça ne sert à rien. Mais elle aimerait bien montrer ce dont elle est capable, ça n’arrangerait peut-être pas la situation, mais un peu de musique pourrait donner du baume au cœur des survivants ? Possible.

7Pourquoi n'as-tu pas rejoint une communauté de survivants ? Elle estime toujours n’être que de passage. Elle n’a aucunement l’intention de s’éterniser. Mais plus le temps passe, plus elle semble être à court de solutions… et commence lentement mais surement à songer sérieusement de rejoindre un groupe, ne serait-ce que pour échapper à cet horrible sentiment de solitude, auquel elle n’est pas DU TOUT habituée.

8Que penses-tu des groupes qui s'organisent ? Elle respecte l’organisation des greens, le civisme des chevaliers et craint le groupe des pirates. Elle ne saurait comment réagir si on lui rackettait son cadeau par exemple. Ou son collier, ça la rendrait folle.



À cette heure-ci j’étais normalement censée faire un peu de ménage dans la maison. Je fus interrompu par la sonnette qui résonna dans mon vestibule. Me demandant qui pouvait bien me rendre visite en plein milieu de l’après-midi, je m’empressai d’ouvrir la porte, espérant qu’il ne s’agissait pas d’un vendeur prêt à me tenir la jambe pendant plusieurs minutes, comme c’était souvent le cas dans cette petite ville de France.

Mais non.
Rien de tout cela.
Je tombai nez à nez avec un visage que je n’avais pas vu depuis si longtemps que je me demandai alors si je n’étais pas en train de rêver.

─ Bonjour Isabelle, ça fait longtemps… dit-elle de son mélodieux accent italien. Je n’en croyais pas mes yeux, mais… c’était bien elle ?
─ T… Tia ? C’est bien toi ? Elle acquiesça.
Et dans un sourire perdu aux coins de ses lèvres, elle demanda d’un ton ingénu :
─ Je… Je peux entrer ?
─ Oh oui bien sûr ! Dis-je dans un rire nerveux avant de m’écarter pour la laisser passer. Il me fallut ensuite quelques secondes pour reprendre mes esprits avant de prendre à nouveau la parole : excuse-moi ma puce, j’étais censé faire un peu de ménage, mais finalement ça attendra.
─ Je… encore une hésitation, bien que cela ne se lisait pas sur son visage, sa voix la trahissait, elle était gênée : je peux repasser plus tard si tu veux ?
─ Non non non ! Tu rigoles ou quoi ? Installe-toi ma chérie, tu veux un petit café ?
─ Oui, merci, sans sucre s’il te plait.

Comme d’habitude. C’est en tout cas ce que je pensais avoir répondu. En réalité, j’avais gardé le silence. Cela faisait tellement longtemps que je ne le l’avais pas vu. Il y avait… quelque chose de différent chez elle. Et pourtant j’avais aussi l’impression de ressentir une sensation familière en sa présence ; sans que je ne fusse capable de mettre le doigt dessus dans un premier temps. Elle tenait dans sa main une sorte de carton avec une poignée. Sur ce carton, il y avait des décorations, ça ressemblait beaucoup aux petits contenants en pâtisserie que les boulangeries donnaient aux clients.

Je nous préparai alors un café et vins ensuite m’installer en face d’elle. Sans ambages, comme à l’accoutumée, Tia, qui semblait être plus à l’aise, ouvrit le carton. Dévoilant les pâtisseries à l’intérieur. J’avais donc vu juste.

─ Elles ont l’air délicieuses dis-donc, je suis gâtée !
─ Elles le sont. Forcément, c’est ma frangine qui s’en est occupée.
─ Rita ?
─ Oui, elle s’est installée avec son mari et papa, à Marseille. Elle a monté sa boulangerie-pâtisserie et apparemment les affaires marchent bien. Elle a toujours été douée pour ça. Comme je passais la voir et que je savais que tu n’habitais pas loin… elle s’arrêta de parler quelques instants puis leva les yeux vers moi. Et c’est dans un grand sourire qu’elle me dit alors : je me suis dit que je devais passer une tête… j’avais envie de te voir.

Et c’est en la voyant sourire ainsi que je pus enfin mettre un nom sur cette sensation que j’avais en la voyant. C’était un amusant mélange entre l’embarras et la nostalgie. Elle et moi étions gênées, pour des raisons évidentes, compte tenu de ce qui s’était passé entre elle… et ma propre fille. Et cette nostalgie que je ressentis, elle venait des mêmes raisons pour lesquelles nous étions embarrassées. Mais il y avait véritablement quelque chose de différent chez elle.

Je ne pouvais l’expliquer clairement. Mais dès lors qu’elle avait posé le pied chez moi… l’atmosphère avait changé. Mais elle n’avait plus rien à voir avec la morosité qu’elle imposait aux autres par sa présence auparavant. Non bien au contraire. Autour d’elle émanait une telle douceur, que je me demandais si j’avais réellement à faire à la même personne. La façon dont elle s’exprimait, le velours de ses paroles, j’avais l’impression qu’elle m’enlaçait, alors qu’elle ne me touchait même pas. Et je me rendis compte alors que ce sentiment de nostalgie… me ramenait en réalité avant les événements qui avaient tout fait basculer. Tia avait muri, certes… mais elle dégageait de nouveau cette douceur qui la caractérisait.

─ Comment va Emma ?
─ Elle… elle va bien. Elle m’appelle tous les jours, elle n’oublie jamais sa mère. Elle semble s’éclater à Portland. Elle a trouvé sa place dans un orchestre et apparemment ils comptent partir en tournée nationale l’année prochaine. Une année 2020 qui risque d’être chargée donc.
─ Elle s’est remise au piano ?
─ Non… elle a décidé de se mettre au violon. Elle m’a dit à de nombreuses reprises qu’elle n’avait plus envie d’y jouer et qu’elle avait trouvé son bonheur ailleurs.
─ D’accord… merci.

C’est à ce moment précis.
Lorsque je vis cette légère moue de mécontentement se former sur les lèvres de mon invitée… que je compris enfin pourquoi elle était là réellement.  
Et tous les souvenirs doux-amers que nous avions partagés, tout me revint en tête en un éclair, si bien que j’eus l’impression d’avoir été frappé par la foudre.

Il y a encore quelques années. Emma et Tia étaient considérées comme de grandes rivales pour les concours de musique classique. Leur instrument de prédilection ? Le piano. Que ce soit en Italie, ou bien partout en Europe, à chaque concours, elles se tiraient la bourre avec une intensité incroyable. Je me souvenais encore des petites taquineries que nous envoyâmes respectivement. Entre Tia et Emma, entre moi et Andrea, sa mère.

C’était une grande rivalité, mais jamais elle n’avait été toxique. Elle aida simplement nos deux filles à s’épanouir… et je pensais que cela allait encore durer… je ne voulais pas que ça s’arrête, j’avais l’impression de vivre dans un rêve. Mais les rêves, comme chacun le sait, ce sont pour les enfants.



Tout bascula lorsqu’Andrea tomba gravement malade.
Le diagnostic ne soufra d’aucune ambigüité, un cancer en phase terminale, il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre. Chacun réagit différemment à ce genre de nouvelle, Tia elle, se plongea encore plus intensément dans la musique. Et petit à petit, elle commença à prendre ses distances avec Emma en se réfugiant dans le piano.

Doucement, mais surement, une distance se créa entre elles. Tia se transforma en un bourreau de travail et Emma n’arriva tout simplement plus à suivre. Elle comprit vite alors que pour continuer de rivaliser avec Tia, pour maintenir cette relation qu’elle avait avec sa rivale, elle devait travailler encore plus dur qu’elle, la solution était simple. Mais elle eut beau essayer, elle n’y arriva pas.

Face à ce monstre qui ne vivait plus que pour la musique, face à cette bête féroce qui s’accrochait désespérément, à l’unique chose qui pouvait la relier à sa mère… ma fille fut ébranlée par sa propre faiblesse et finit par se briser en morceaux. Je fus confuse lorsque leur relation s’envenima. Emma et moi étions incapables de comprendre pourquoi Tia se faisait autant souffrir pour atteindre ses objectifs.

Et un jour, Emma confronta sa rivale. Elle lui hurla qu’elle ne comprenait pas pourquoi elle s’accrochait désespérément à cet instrument qui était la source de tout ce mal. Les couleurs de son jeu avaient disparues, laissant place à un jeu méthodique, monochrome, robotique… aux antipodes de ce qu’elle était réellement. Dans l’esprit de ma fille ainsi que le mien… Andrea avait transformé sa fille en un monstre. Et lorsqu’elle eut fini de hurler tout son désarroi, Tia eut un rire sarcastique.

À cet instant, non seulement elle ne considérait plus ma fille comme sa rivale, mais je crois même, qu’elle ne la voyait même plus comme une pianiste. Elle lui tourna le dos, et lui dit alors qu’elle ne pouvait pas comprendre. Tia coupa ses liens avec elle, avec moi. Et nous ne la revîmes plus que de loin, comme si d’un coup, elle était devenue inaccessible.

─ Tu sais Isa… elle m’affubla alors du surnom qu’elle me donnait auparavant, et reprit : ça n’a jamais été une souffrance. Le piano. C’était ma seule échappatoire. La seule chose qui m’apaisait. Je suis désolé que vous ayez dû à en pâtir, ça n’a jamais été mon intention. C’est juste que… je vis alors des larmes perler le long de sa joue, elle essuya son visage d’un rapide coup de manche avant de reprendre d’une voix tremblante : je suis une pianiste Isa. C’est ce que je suis. Ce n’est pas ce que ma mère a fait de moi… elle m’a seulement aidé à réaliser mon rêve.

C’était donc ça.
Nous avions tout compris de travers. Tia n’avait jamais été le prisme des désirs de sa mère. Et toutes ces leçons qu’elle lui donnait… c’est sa propre fille qui lui avait demandé cela. C’était elle qui avait pris l’initiative de commencer la musique, elle qui l’aimait profondément. Et tous ces sourires qu’elle affichait lorsqu’elle gagnait ses concours… ce n’était pas du soulagement de ne pas avoir déçu sa mère… c’était juste des sourires d’une compétitrice ravie de sa propre victoire.
Décidément. Quelle idiote je faisais.
Quelles idiotes nous étions. Emma et moi.

─ Je vais rendre visite à Emma, Isa. J’ai besoin de la voir. Non, j’ai ENVIE de la voir. Et la prochaine fois que je viendrai te voir, je ne serai pas seule.
─ Avec plaisir ma puce… mais je serais toi, j’apporterais un beau cadeau pour ma fille. Une pâtisserie ne risque pas de l’amadouer.
─ Oh… t’en fais pas pour ça. J’ai déjà tout prévu.
─ Bon c’est bien. Allez, file petite colombe ! Tu voles de tes propres ailes cette fois !
─ Merci encore Isa. À la prochaine.
─ Bon voyage. Et n’oublie pas de prendre des vêtements légers ! Il fait chaud sur la côte ouest, surtout en été !

─ Wesh t'es qui ?
─ Alors déjà parle mieux frérot.
─ ...
─ Nephi', bijour à tous. Je reprends le RP après quelques mois de pause. Love u guys <3.