1Tu habites à Arcadia Bay ou tu étais juste de passage ? Nyneve était sans doute de passage, sans réellement savoir si elle serait restée. Avant, rien n'avait de place et elle ne savait vraiment où fuir ses propres problèmes.
2Tu faisais quoi avant la tempête ? Nyneve chantait. Nyneve était cantatrice avant sa première tempête. Ensuite, tout a été réduit en poussière. Puis qu'était-elle vraiment ? L'ombre d'elle-même, une âme en peine... Nyneve ne saurait dire.
3Quels dégâts a-t-elle fait dans ta vie ? Si certains voient l'événement comme la chose la plus terrible de leur vie, ce n'est pas le cas pour la jeune femme. La tempête lui a permis de cesser de lutter contre un adversaire qu'elle ne saurait pas vaincre. Pourtant, elle y a perdu quelques êtres chers, la frontière l'empêchant de renouer avec son passé.
4Que faisais-tu lorsque la Tempête a frappé ? Nyneve apprenait à toucher. Nyneve apprenait à lire de nouveau. C’est que tout était calme lorsque le monde a décidé de se soulever et qu’elle se souvient de chacun des sons transperçant ses oreilles, trop bien même.
5Tu quitterais tout pour retrouver ta vie d'avant ? [ ] OUI [X] NON
Si c'était pour elle seulement, pour retourner bien avant l'accident, sans doute vendrait-elle un peu plus qu'une âme au diable et pour eux aussi. Mais s'il fallait simplement retourner quelques secondes avant le grand fracas alors Nyneve préfère garder ce qu'elle a trouvé là.
6Pourquoi et comment as-tu rejoint les Knights ? Elle a été soulevée des gravas de son passé par l’innocence même. Elle se souvient simplement qu’on lui a prononcé un nouveau nom, une évidence. On est venu les chercher, elle et l'enfant.
Et puis naturellement, on lui a proposé de rester. Et tout aussi naturellement, elle s’est entichée de l’endroit qui l’a vu renaître.
7De quelles activités es-tu en charge ? Nyneve éduque du mieux qu’elle peut, transmet ses savoirs pour que les enfants puissent grandir en sécurité. Nyneve veille à rester polyvalente, veille à ce que tout soit en ordre et qu’on ne manque de rien, panse avec affection les plaies de ceux qui se laissent approcher.
Elle est aussi récemment devenue une oreille pour ceux qui auraient peur de se confronter à ceux qui pourraient encore juger ce qui leur serait donné de voir. Elle est après tout devenue si douée pour écouter.
8Comment se passe ton intégration au sein du groupe ? Elle est sans doute aimée des tout petits. Quand est-il vraiment des autres ? Nyneve se fait légère et n’ose vraiment imposer sa présence, elle préfère être l’ombre de ceux qu’elle n’ose vraiment confronter.
9Que penses-tu des autres groupes qui s'organisent ? Elle envie sans doute l'organisation qui se construit chez les Greens, mais est convaincue qu'ici on pourrait faire mieux : bâtir des rêves avec plus de douceur et de liberté.
Elle est prise d'affection pour les vagabonds.
Elle méprise les pirates sans réellement comprendre leurs intentions.
Elle a trouvé la carte ce matin, déposée entre le paillasson et le seuil de la porte. A-t-il seulement pensé qu’elle aurait pu ne pas se rendre compte de sa présence ? Le monde se réduit petit à petit à présent et sans doute le simple espace qui constitue le couloir de son vieil appartement n’existera plus demain. Alors, elle avait haussé les sourcils, pris entre ses doigts les mille excuses écrites en lettres trop fines pour qu’elle puisse déchiffrer quoi que ce soit. Il sait pourtant. Anastasya se rappelle encore les malédictions prononcées par sa mère : l’amour la rendra aveugle avait-elle dit. Elle n’était pas si loin de la vérité.
Anastasya surligne l’écrin des mélodies interminables. Le rouge est porté à ses lèvres. On pourra voir encore jusqu’au dernier rang s’envoler les dernières notes teintées de vermillon. Après ça, il n’y aura plus rien, non.
Alors elle chante une dernière fois. Et les lumières éblouissent. Et les premiers maux s’installent.
Quand le rideau se fermera, personne ne remarquera les sanglots s’enfuyant sur ses joues délicates. Il ne s’agit sûrement là que de quelques perles perdues entre les artifices éparpillés avec soin.
Elle n’a pas pu se résoudre à jeter les grands manteaux, les pierres qu’elle avait reçues avec quelques mensonges ou quelques promesses jamais réalisées. Elle n’a pas jeté les mille pigments enfermés dans les carrés qui forment ses palettes autrefois choyées. Elle a chaque jour continué d’effectuer les mêmes gestes comme pour ancrer la splendeur de sa beauté maîtrisée dans sa rétine. Bientôt, elle n’existerait plus. Bientôt, elle deviendrait un mirage, un fantôme qui tente de préserver ce qu’elle était là.
Elle a tenté de se rebeller, innocemment. Anastasya se souvient avoir emprunté chacun des livres de la bibliothèque logée juste au pied de son immeuble. Anastasya se souvient des migraines s’installant à chaque fois, pour lui rappeler qu’il faudrait bientôt y renoncer.
Et puis les caractères ont pris de l’ampleur, son ouragan aussi. Dans le tumulte, elle se surprend à écouter sa propre voix se briser. Anastasya renonce à chanter. Anastasya laisse la mort s’éprendre de ses poignets, si seulement elle pouvait de nouveau voir les fauteuils carminés et les yeux s'emplissant d’admiration juste pour elle. Elle qui a bâti sa vie sur des superficialités, la voilà à présent mise à nue.
Elle ne se souvient plus vraiment qui l’a trouvé là et ça n’a jamais eu d’importance. Elle entend encore les sirènes et les échos des instruments affolants. Elle pouvait encore entendre.
Elle pouvait encore sentir les pulsations de son propre cœur par-dessous le coton. Il faudrait s’y accrocher.
Elle a pris ses plus beaux vêtements, gardée les mascaras et les étoiles à accrocher au bout de ses oreilles. Elle a gardé tout ça, juste pour elle, juste pour ne pas perdre l’architecture qu’elle avait pris soin de construire. Juste pour ne pas perdre ce qu’elle était et serait à jamais.
Le noir s’est installé au milieu de son salon, au milieu de son miroir, au milieu de chacune de ses lectures alors qu’elle garde encore ses souvenirs intacts. Il faut lutter contre ses propres démons, les doux murmures qu’elle entend à présent aussi bien que chacun de ses pas. Il faut lutter contre les douleurs du cœur qu’elle sent aussi bien que chacune des textures nouvelles qui frôlent ses doigts.
Il faut lutter contre ce qui fait rage, comme si tout ne serait jamais comme avant.
Et c’est sans doute vrai, n’est-ce pas ?
Elle a vécu la tempête comme si elle en était responsable. Elle a entendu chacune des branches se briser comme s’il s’agissait de ses propres os. Elle a entendu à des notes broyées sortir d’entre sa mâchoire. Elle a senti le vent mordre chacun de ses membres alors qu’il fallait s’enfuir à tâtons, se dire que tout finira là et que le monde se voilerait du même noir que celui qui gâchait sa vision.
Alors, il fallait se l’avouer : elle n’y verrait jamais plus et ce serait encore ses derniers cauchemars.
Et la nuit revint.
Et tout se calma.
Elle fut sauvée, repêchée du lac par des mains trop candides pour être refusées.
Et s'il fallait guider Arthur jusqu'à Avalon pour expier ses péchés alors elle le ferait.