All the other real ones that I destroy [PV : Sweetie/début septembre/Terminé]

Fin de matinée ou début d’après-midi, il n’arrive toujours pas à le dire. Il n’a toujours pas pris la peine d’apprendre à lire l’heure en fonction de la position du soleil, tiens. À la place, il déroule des routines plus inutiles. Il sort de la décharge, muni de plusieurs outils. Non pas pour le travail puisqu’il a dû délaisser son travail de mécanicien, désormais engagé comme gros bras. Bref, une autre histoire. Il est équipé d’outils qu’il sait mieux manier. À la sortie de la décharge, grâce à un rétroviseur pas trop brisé, il en profite pour passer avec délicatesse son peigne rescapé et gomine ses beaux cheveux d’un tas de crème. Il s’applique cette routine comme un réconfort nostalgique donc y passe un sacré temps.

Faire ça en public, c’est vraiment risqué mais sa condition de pirate lui laisse peu d’intimité. Il jette tout de même quelques œillades pour la préserver. La dernière lui hurle au danger. Un grand truc roux, à quelques mètres. Et merde, il range tout le matériel dans ses poches. Si un pirate l’y prend, aujourd’hui serait une nouvelle semaine de bizutage.
Et par-dessus le marché, il fallait que ça soit ce type. Bloody Mary, un de ses nouveaux collègues. Depuis qu’il est pirate, il ne l’a jamais vraiment abordé parce qu’il n’y voyait aucune raison. Mais ses pas, aujourd’hui, se rapprochent vers lui. Il vaut mieux faire bonne figure, encore, et le saluer, au moins. C'est un collègue maintenant.

Mais Sweetie n’a pas le temps de décocher l’esquisse d’un sourire ou saluer de la main que l’individu soupire à son arrivée. Qu’il se rassure, il n’est pas mal accueilli. C’est même plutôt l’inverse. La procédure, c’est d’être aussi aimable :



Un ton sec et méprisant avant de finir par éclater de rire et frapper l’épaule de Bloody Mary. C’est très audacieux alors qu’il le sait très bien : On n’entend pas de bonnes choses sur Marie la Sanglante. Mais on n’entend pas de très bonnes choses non plus sur Sweetie. Alors Sweetie ose. Entre collègues, entre personnes mal aimées, c’est comme s’ils étaient déjà amis donc la taquinerie peut fonctionner ? Est-ce que c’est pour ça qu’il est si proche et que sa main passe de l’épaule à la main de Bloody Mary. Lukas est bien trop familier. Il s’autorise beaucoup trop de choses, comme voler les clés.

Tout aussi impunément, il saute par-dessus la portière, sans même l’ouvrir. Cliché ambulant vantant autant sa masculinité que son agilité, il retombe parfaitement sur le dossier et tourne les clés. Vraiment ? Ce n’était même pas une blague ? La voiture démarre. Il rit doucement et redresse ce sourire vers Bloody Mary.



Son bras enlaçant le dossier passager, il invite son interlocuteur à s’asseoir à ses côtés. L’attitude de Sweetie est bien trop confiante alors qu’il n’est même pas dans sa voiture. Il est si confiant qu’il ne voit pas que le panneau de bord affiche que le réservoir n’est pas si vide que prétendu.

Ça va, en fait. Il n’est pas le seul. Sa taquinerie est bien acceptée. C’est répondu par un tendre sourire, de quoi parfaire encore plus le sien. C’est aussi répondu par une pique secondaire mais bien moins virulente que la sienne. Et c’est justement parce que Bloody Mary frappe bien moins fort que lui que ça plaît à Sweetie.
Ça lui laisse l’occasion de répliquer. Il se sent vu et écouté et ça lui plaît.



Sa main caressant la boîte de vitesse, il se retourne juste après vers son partenaire pour continuer ce jeu. Mais ce dernier se contente juste de s’en griller une, bras sous la vitre baissée.
Changement de vitesse fulgurant pour ne pas qu’on entende son mépris, il le camoufle sous le grondement puissant de la voiture.



Il n’aime pas la clope et pas non plus qu’on l’appelle sweetheart mais a-t-il vraiment son mot à dire ? Il n’a pas d’ordre à donner mais si son commentaire était plus audible, ça sonnerait tout comme. Or, il n’a pas son mot à dire. Ce n’est pas à lui, cette voiture, ou ce rôle de pirate. Alors il laisse Bloody Mary dire, en ronchonnant sous le vacarme du moteur. Il préfère qu’on le qualifie à nouveau d’impressionnant et joue de ces talents de chauffard.
Brusque demi-tour et même pas un regard précautionneux lorsque le bolide précipite sa marche-arrière, Sweetie concentre son regard au-delà du pare-brise. Il ne pense qu’à ça : Regarder vers l’avant sans prendre aux gardes aux conséquences.



Si la précédente critique a été enfouie sous le lourd grondement du moteur, cet ordre est, cette fois-ci, bien audible. Puisqu’il ne regarde pas Bloody Mary, ça a l’air indiscutable. Quoique.



Une ultime fois, il se moque gentiment du passager, trop bien habillé pour remplir des jerrycans. Cela dit ses pouffements ne sont pas légitimes : La belle chemise cintrée de Lukas n’est pas mieux adaptée et il risque lui aussi de la tâcher avec ces tuyaux fuités. C’est du vécu.



Ce n’est pas comme si encourir la possibilité de goudronner ses habits lui paraisse une partie de plaisir. Même, il en a presque des frissons. C’est pourquoi il tient ce marché au bout d’un doigt et d’un regard menaçants vers Bloody Mary.
Son freinage est d’autant plus cinglant mais peut-être pas aussi soudain que son déshabillage. Déboutonnant sa chemise, il la replie tout de même. Il la laisse seule, tout comme Bloody Mary, dans le véhicule, tandis qu’il se rend vers les pompes, quelques mètres plus loin, équipé de deux jerrycans vides.

Il a beau donné des ordres, personne ne l’écoute. Tout le monde le regarde, par contre. Il ne peut jouer que de ça ; son physique. Son dos nu s’éloignant de Bloody Mary, il cherche à l’attirer une nouvelle fois, pour confirmer l’attention qu’il lui porte.

S’armant d’un des pistolets disponibles, il accomplit l’ingrate tâche tout en soupirant. Il faut vraiment en arriver là pour pouvoir attirer l’attention d’une personne ? Au moins, les talons ne prennent pas longtemps à claquer longtemps et ne se font pas désirer. C’est presque comme s’ils avaient compris que Lukas devait être le centre de l’attention. Et pourtant, ce dernier ne peut s’empêcher de jouer la comédie ; la personne désintéressée.



Le corps toujours orienté vers les réservoirs qu’il remplit, seule sa tête poursuit la démarche de l’individu perché sur ses talons. Il ne dit pas plus, son regard critique se contente de répondre. Il hausse un sourcil aux diverses tactiques entreprises par Bloody Mary pour soulever un vulgaire bidon qu’il venait justement de finir de remplir. À shooter dedans. À l’examiner. À tenter de le soulever. À le faire tomber.
Lukas repose le pistolet contre le présentoir lorsqu’il est appelé à l’aide, par ces yeux de biche papillonnant plusieurs excuses. Il soupire et écarte légèrement son collègue, pour attraper la jerrycan malmenée ainsi que la dernière qu’il venait de remplir, dans la main gauche.



Toujours et encore des ordres.
Il désigne la destination d’un hochement de tête et se place derrière Bloody Mary. Même si son but prétexté et de blinder le coffre de ces réservoirs, cela lui permet aussi de tracer Bloody Mary, l’analysait. Peut-il y avoir vraiment un pirate qui lui porte autant d’intérêt ? Bien curieux, il remplit donc sa promesse en remplissant en un temps record le coffre mais aussi le réservoir de la voiture. C’est seulement maintenant qu’il remarque que faire le plein ne lui a pas pris beaucoup de temps et qu’effectivement, Bloody Mary a éventuellement cherché un prétexte pour le rencontrer.

L’âme compétitive, il répond volontiers à cette rencontre, quand bien même le grand roux est pourtant affublé des pires noms. Il affuble en tout cas Sweetie des meilleures louanges.



Son air est plutôt sérieux, et non pas uniquement parce qu’il s’applique à reboutonner proprement sa chemise. Toujours dans le rôle conducteur, il tient encore le volant et décide du trajet que prend la discussion. Feu orange sur sa route, lui répond par un feu rouge. Fin de la rigolade, qu’il passe aux aveux.



Certain de cela, Sweetie se rapproche pernicieusement du passager. Son bras entoure la tête du siège, afin de former une sorte de cage, afin que la vérité ne l’échappe pas. Bloody Mary ne lui échappera pas et il n'a pas peur d'être confronté seul à lui.

Aussi surprenante qu’une clé de bras, sa manière de ceinturer de plus belle le passager à son siège n’a rien d’extrêmement rassurant et pourrait ennuyer Bloody Mary. Mais on parle bien de Marie la Sanglante. Elle ne fronce pas un sourcil lorsque le jeune homme en face d’elle cherche à la défier. Pire, elle riposte avec une finesse des plus hostiles. Maintenant retenu dans une certaine promiscuité, Sweetie se retrouve, tout compte fait, lui aussi au piège, lorsque l’autre homme s’apprête à enserrer son large cou autour de ses longs doigts. Et pourtant il le regarde faire.
Il le regarde corriger, tout ce qu’il a pu faire et dire, remettant col et point sur les i. Ce n’est pas vraiment lui qui attend quelque chose, c’est plutôt Sweetie, à priori. L’autre croit rêver.



Il s’arrête au milieu, se rendant compte que ce qu’il s’apprête à dire n’est pas vrai. Du moins, ça n’avait pas le goût du mensonge mais plutôt de la nescience. C’est effectivement lui qui s’est porté volontaire pour le conduire jusqu’ici. L’appel à l’aide n’était pas non plus impérieux. Aussi hébété qu’embêté, Sweetie regarde sur le côté, cherchant à se justifier du mieux qu’il le peut.



Sincères, ses prunelles bleutées se figeant contre les autres, il soutient le regard mais déjoue la prise l’étouffant comme une cravate. Par réflexe, il redresse lui aussi son col de chemise qu’il a de toute façon, fait attention de bien présenter lorsqu’il s’est rhabillé. Ce petit réflexe le fait lever le menton, surplombant son interlocuteur une fois tous les deux assis, le sourire satisfait. Bloody Mary venait effectivement de le glorifier et le hisser au rang d’homme de la situation. Son bras toujours autour de l’appuie-tête, il le libère, lui aussi, pour frapper sa paume contre le sélecteur de vitesses, le regard toujours porté vers l’autre pirate, pas encore sur la route.



Des fossettes ravies, il décide que ce sera la conclusion de ce court face-à-face et préfère poursuivre vers une route plus pacifique. Plus puissamment encore, Sweetie fait turbiner le moteur pour faire filer droit la voiture vers une nouvelle destination qu’il ne précise même pas à Bloody Mary. Il pourrait, finalement, même l’embarquer contre son gré. Bloody Mary n’est certainement pas au courant de ce que prévoit Lukas pour leur itinéraire, l’objectif maintenant rempli.
À vrai dire, le playboy reste extrêmement flou sur ses intentions. Après des frappes sur les épaules, un strip-tease inopiné, un coup de main entre collègues et cette espèce d’altercation à la limite de la promiscuité, ce que souhaite entretenir Sweetie avec Bloody Mary reste toujours aussi confus, en dépit de cette remise au point.

Ces contrées ne sont pas inconnues. Elles sont juste trop délabrées pour qu’on ne veuille pas les inspecter. Ses pupilles médusées fixent pourtant son passager. Pourquoi s’attend-il à de la beauté dans les paysages d’un Arcadia Bay ruiné ?
Pourquoi s’attend-il à plus de la part de Sweetie, autre que son physique ?
Une écrasante majorité de personnes ne l’aborde d’ailleurs que pour ça ou tout simplement pour des banalités. Capharnaüm l’a peut-être fait mais ça sonnait vraiment comme pour nourrir son propre intérêt et pas égayer l’autre homme. Présentement, il ne peut donc être que conquis, sachant que Bloody Mary l’affuble d’une qualité exceptionnelle. De concert avec la vitesse du véhicule, sa gaieté est aussi étincelante qu’il en aurait presque des rougeurs, se frottant l’arrière du crâne et abandonnant donc à moitié sa conduite. Il ne fait plus attention.



Plus fort encore que le vrombissement du moteur, le garçon se met à rire à gorge déployée de sa propre blague. Il ne fait plus attention.
Il ne remarque pas qu’il dérive légèrement mais pernicieusement du bord gauche de la route. Il ne remarque pas non plus son co-pilote se rapprocher plus dangereusement encore. Si la vitesse lui provoque des palpitations, la promiscuité renouvelée réveille en Lukas des frissons tout le long de sa nuque et de son échine. Il ne sait comment interpréter cela. Il prend du temps à rencontrer une nouvelle fois le regard de son voisin, qui s’est finalement rangé à sa place, assez rapidement. Il ralentit pour freiner son cœur.



Ses fossettes ne sont plus apparentes puisque son sourire en est crispé. Il ne sait vraiment pas décrire la sentation qu’à provoquer Bloody Mary en lui ? Était-ce de la gêne, du dégoût ou du régal ? Il secoue vivement la tête et se reconcentre sur la route. Il n’arrive plus à briser la glace comme il venait de le faire jusque-là. C’est même pendant deux bonnes minutes qu’il ne parle finalement plus, aussi bavard qu’il est, pourtant.

La chose la plus bruyante, maintenant le moteur calmé, c’est peut-être ce voyant rouge qui se fait de plus en plus intense. Sans dire un mot, Sweetie finit par s’arrêter, toujours aussi brusquement par contre. Plus promptement par contre, il s’extirpe du véhicule et finit par soulever le capot du véhicule. Une fine fumée blanche s’en échappe mais elle ne couvre pas les multiples jurons derrière.

Il faut simplement laisser libérer la fumée du capot pour qu’il puisse analyser. Lui aussi échappe la fumée, en soupirant, une fois son regard libéré des problèmes mécaniques. Bloody Mary à ses côtés désormais, il n’a cependant pas précisé qu’il devait sortir et applique un regard désapprobateur, les bras de nouveau croisés. Cependant, ce n’est pas parce que ce pirate est à blâmer mais parce que Bloody Mary aurait maintenant toutes les raisons de lui en vouloir pour cet accident. Il aurait donc préféré qu’il ne voit pas l’envers des coulisses.
Mais, curieusement, Bloody Mary en aurait presque cure, de l’état dans lequel se retrouve sa bagnole pourtant maltraitée par un chauffard. C’est même lui qui vient à détendre l’atmosphère grâce à une blague qui a le don de faire réagir de nouveau Sweetie, par rapport aux dernières minutes de leur balade en voiture.



Rictus plutôt timide avant de reprendre calmement le flot de la discussion mais il doit avouer que la blague de Bloody a pourtant plus d’effets qu’il n’en montre ; minimisant à la fois l’accident et l’incident entre eux. Il reprend plus facilement son aise, en se déplaçant, se retrouvant donc désormais assis sur un tronc échoué, donc bien plus bas que son partenaire. Ce changement de taille pourrait le rendre honteux, si bien qu’il camoufle son visage derrière ses grandes mains. Mais il n’en est rien, il ne fait même pas le rapprochement. En réalité, son rire est plus fort et c’est cela qu’il camoufle.



Sur les dernières explications, l’ancien mécanicien y va beaucoup plus expéditivement, devinant que cela ne peut pas intéresser une personne déjà peu inquiète pour sa propre voiture.



Rapidement, il désigne de la tête le chemin menant vers la ville, maintenant bien loin. Mais elle change rapidement de direction, se positionnant à sa gauche, comme inviter son compère à réduire l’écart de hauteur entre eux, à nouveau.

Même s’ils sont taquins, quelques fragments des paroles voisines le chatouillent légèrement, sans qu’il ne réagisse, néanmoins. Pourtant, il ne peut pas s‘empêcher de soulever son interrogation sur un mot qui ne semble rien à faire là.



Il se croirait en présence de Capharnaüm, de part cet échange constant de brimades. Du moins, avec Bloody Mary, ça ne reste que de l’ordre de l’espièglerie, c’est beaucoup plus doux et presque amical. À la suite de ce commentaire, il aurait donc bien bousculé son voisin. Or, avant de commettre une telle indélicatesse, leurs regards se croisent. En dépit de sa hauteur, l’autre pirate lui apparaît très menu, presque comme si la couche de vêtements représentait la peau sur ses os. Il se ravise donc, et se montre plus doux, en réduisant une nouvelle fois l’écart entre eux.
Amical, vraiment ? Le sourire malicieux, il compte en tout cas, garder le côté agressif du contact. Instantanément, il attrape le port de tête du roux et fixe son vis-à-vis, le regard amusé.



Il lâche délicatement le menton de son prisonnier mais ne le ménage pas pour autant puisque sa main gauche, aussitôt, se dépose contre la cuisse de l’autre homme, remontant peu à peu. Elle est invasive mais peut être éliminée. Si la personne en face n’est pas d’accord, il se retire. Pourtant, son discours ne laisse pas l’occasion de savoir que c’est possible.



Au moins, il ne va en tout cas pas plus loin. Mais il n’accorde pas non plus le temps à son adversaire de réagir puisque sa main s’extirpe. Ce n’était après tout qu’un échantillon de son champ des possibles que Bloody Mary souhaitait découvrir.



Il maintient la suite volontairement. Peut-être pour justement séduire la princesse en face de lui. Ou plutôt, parce que la suite est plus chaotique. Sa voix faiblit mais s’aggrave, à la fin de cette phrase, comme si elle ne devait pas être dite, qu’elle serait taboue même pour lui.

C’en est presque à croire qu’il attendait presque ce mouvement, en réalité, pour déclencher quelque chose, voire plusieurs, bouleversant tout. Alors que le brun s’attendait à ce qu’un murmure lui réponde, c’est presqu’une intimidation qu’il se mange en pleine face, de quoi lui faire écarquiller les yeux. La stupeur s’accentue lorsque sa propre main est reposée pour celui qui se voulait être une proie.

Pourtant, n’était-ce pas si évident, que Bloody Mary n’était bien évidemment pas une princesse en détresse parmi tous les pirates ? La clope au bec et la provocation de ses bottes, écrasant tout ce qu’il voulait avec sa taille de géant. Pourtant, c’est désenchanté que le preux chevalier finit, grimaçant au murmure qu’on lui offre. Il le transforme assez rapidement, pourtant, en rire embarrassé. Ça se voit, qu’il n’est pas à son aise mais pour le prince qu’il est, il reste extrêmement courtois.



Pour autant, sa main reste sur la cuisse de ce grand homme. Or, elle ne le caresse plus de la même manière.
C’est plus comme s’il appliquait une pommade, comme s’il voulait faire passer la pilule. Comme si tu étais si essentiel, Lukas.

Après quelques secondes, il retire sa main. La situation est terriblement gênante qu’il s’en relève, allant simplement plus loin. Il prétexte qu’il doit juste aller pisser dans les fourrés. Mais il y reste peut-être bien trop longtemps, pour méditer. Et pour gagner du temps, faisant les cents pas dans cette orée d’un bosquet, mains sur les hanches et expirant tout le malaise éprouvé.
Il est coincé. Lui qui vient de prétexter qu’il devrait rester longtemps ici alors que clairement, au bout de dix minutes, ça lui suffirait pour inspecter à nouveau le moteur : Il vient clairement de s’embourber.

Chaque pas triture un peu plus le problème mais finit aussi par torturer son esprit. Chaque plan pour s’échapper pourrait, bien entendu, fonctionner, mais il n’est pas sûr que dans tous les cas, Bloody Mary lui pardonne. Certain de plaire à cette personne, il ne veut pas rater l’opportunité.
Chaque pas a beau être un piège à loup, aucun ne se referme contre lui puisqu’il n’a pas décidé d’exécuter le plan. Ce sont plutôt les appâts qui marchent sur ce genre de proie, qui finit par accourir lorsqu’on l’appelle à l’aide. Enfin pas vraiment mais c’est toujours une bonne occasion pour jouer la bonne image.

Ses perles tressaillissent lorsqu’elle croise de nouveau cette personne, plus rougeoyante, qu’il y a quelques minutes. Pris par la détresse, il s’arme d’une grande rapidité pour passer devant Bloody Mary, nécessitant pourtant de premiers soins plus qu’urgents. Cela aurait de quoi rendre le blessé encore plus rouge, mais cette-fois, de rage, de voir que Lukas aurait pris une fois de plus, la fuite.
Mais son retour est uniquement tardif, qu’il excuse en agitant quelques bouteilles d’eau de petit format.



Non, il n’a pas à la tendre. Dans la hâte inconséquente, Lukas le fait. Les quelques bouteilles d’eau s’écoulent à toute vitesse sur la paume encore rougeoyante du pirate. Même si la brûlure semble être superficiel, cela ne peut suffire mais en dépit des mots, Sweetie n’a pas d’autre pommade à passer. De toute manière, les mots ne sont pas forcément les bons remèdes, quand Sweetie les prescrit. Bien qu’il ne le sache pas, ses instincts de sauveteur le pousse uniquement à agir, pas à réfléchir. Ce pourquoi, d’ailleurs, il n’a pas récupéré de tissu dans la voiture.

Déglutissant ses regrets, une nouvelle fois au cours de cette journée, l’espion se déshabille devant les mêmes yeux, mais pour une raison différente. Plutôt que servir ses intérêts, cette tactique pourrait bien aider un autre.
Avec tout de même deux secondes de deuil pour sa chemise, il en arrache une manche depuis l'épaulière, donc complète, pour en construire un bandage de fortune sur le poing qu’il reprend.

Ne pouvant se rendre à l’hôpital de par la distance mais aussi la réputation qu'il s'est forgé, le jeune homme se garde d’abord d’infliger tout un sermon à Bloody Mary. Ses narines inspirent fortement, pour contrer une expiration agacée et frustrée. Il ne dit mot et se contente de regarder, yeux baissés, la ligature qu’il compose soigneusement.

Inclinant tantôt vers le bas, récupérant ainsi vers le haut, il est bien trop concentré à réaliser le bandage plutôt qu’autre chose. Les jérémiades n’atteignent pas ses oreilles ou plutôt il ne préfère pas les entendre pour le moment. C’était une mise en garde qu’il a formulé et même si c’était en partie un mensonge, on ne l’a pas écouté, une fois de plus. C’est surtout ça qui le fait serrer des dents à chaque son, qui le fait serrer aussi davantage le bandage. La dernière parole dépasse les bornes. Sa langue dépasse la barrière de ses dents et claque sèchement contre son palais.



À cette dernière question cinglante, le nœud de fin corsète la paume blessée, sans ménagement. Le mauvais infirmier, non conciliant, relâche aussi le bras qu’il tenait jusque-là. La chemise de toute façon foutue, il n’en avait rien à faire de la laisser à terre, sur le coup. Mais il la récupère tout de même, maintenant dos à Bloody Mary. Comme s’il y avait encore la moindre chance. Il la serre fortement entre son poing. Quel idiot optimisme. Il manque d’être plus sec, encore. Lui jeter les haillons en pleine gueule et lui hurler d’aller se faire une attelle avec ça, on verra s’il s’en sort mieux ; s’il n’est pas, comme il le prétend, une princesse en détresse. Le sauver, tu parles.
Mais il jette sa chemise à l’arrière de son épaule, tout comme l’éponge.



Légèrement n’est pas un euphémisme. En réalité, l’espion n’a montré qu’un échantillon de ce qu’il vient de ressentir. Comme une vague de cauchemardesque nostalgique. Ils n’avaient peut-être rien en commun mais les situations, avec un niveau de gravité différent tout de même, se recoupaient trop bien pour que Sweetie ne s’énerve pas.

Sans lui, à priori, ils pourraient y arriver mais se sont retrouvés plus ou moins atteints. Et lui aussi. Mais ça, ils s’en fichent bien. Ils ne le voient pas. Aucune reconnaissance, presque même des reproches lorsqu’on porte secours. Il se demande même bien pourquoi il les a aidés.



Pourquoi tu agis comme ça, Bloody Mary ?
Pourquoi tu ne me reconnais pas, Bush ?
Pourquoi tu les aides, Sweetie ?
Et il ne va pas chercher à savoir pourquoi. Ça l’a déjà assez bien conduit à des pertes donc, toujours fuyard, il a déjà tourné les talons mais quitte le bosquet.

Acceptant, avec amertume, la déchirure, il a aggravé et continue d’aggraver les choses. Le zéphyr de sa chemise pleure encore. La seconde manche qu’il récupère, il la lance vulgairement à l’intérieur de la voiture. Il s’accommode de guenilles, pour chemise, mais au moins, à coupe déjà plus régulière. Contrairement à ce qu’il a pu laisser croire aujourd’hui, il n’aime pas être ainsi dénudé ; non pas par pudeur mais par goût des vêtements.

Même lorsqu’il reboutonne, le dernier bouton de col de son vêtement, il n’applique aucun regard à celui qui l’a rejoint. C’est peut-être pour cette raison que Bloody Mary s’inquiète de ne pas être assez intéressant à ses yeux. Mais contrairement à tout à l’heure, Lukas ne compte pas se ruer sur lui au moindre souci.



Une seule fossette fait son apparition, sourire de biais. Il est à moitié sincère et range, comme ses mains, le restant de vérité dans les poches de son jeans, adoptant une attitude trop nonchalante, pied posé contre la carrosserie. La douloureuse part de vérité, c’est qu’il ne peut qu’être d’accord avec la première partie : Il a juste voulu l’impressionner mais a définitivement joué au con.
Ça ne l’agace pas, donc, mais, comme souvent, Sweetie est déçu des gens dont il se rapproche. Il attend beaucoup trop d’eux, peut-être. C’est un paradoxal mélange entre son insouciance et son arrogance. Ce duo est probablement aussi la cause d’une grande pitié qu’il éprouve et par laquelle il est motivé lorsqu’il rejoint à nouveau Bloody Mary, devant lui. Il a beau le dominer de quelques légers centimètres, ça ne l’empêche pas de poser ses grandes mains sur ces fines épaules, de manière à le détourner du coffre dans lequel il inspecte.



Mais son attention n’est jamais purement orientée vers autrui. Il aurait donc bien ajouté une gaffe qu’il ait bien pu commettre aujourd’hui, afin de détendre l’atmosphère et minimiser mais il ne trouve pas. Et pourtant, il en a bien commis, des erreurs. Juste qu’il ne les remarque pas et qu’on est encore bien trop conciliant avec lui.

Toutefois, elle pourrait être bien plus visible, si Sweetie n’était plus aussi rayonnant pour leur faire de l’ombre. Si Sweetie montre sa part d’ombre que Bloody Mary tient par le bout des doigts.

Considérant le jeu de séduction mené par son compère, quelques minutes plus tôt, l’espion veut décidément bien croire que les apparences sont bel et bien trompeuses. Mais, derechef, Sweetie se fait berner. À vrai dire, il était juste curieux en l’approchant mais chez les pirates, c’est bien une coutume que tout le monde se partage.
C’était loin d’être une boîte de Pandore : Bloody Mary faisait aussi parler de lui pour ça, bien plus que Sweetie encore qui est, pourtant, devenu loin d’être irréprochable.

Oh, Sweetie est en réalité si faible. Il ne faut pas lui en dire plus. Une fois, mais pas deux, il ne manquera sa chance. Toujours aussi audacieux dans les contacts que ça le rend entreprenant, son avant-bras enjambe le plus émacié, afin de se poser contre le coffre maintenant refermé. Ses doigts défilent dessus, comme la caresse infligée tout à l’heure mais mal calculé. Maintenant, elle est plus délicate, plus minaudière car assoiffée. Il rectifie donc juste la position mais fixe les perles bleutées sans indiscrétion. Il a certainement des questions, ça oui.



Ce n’est pas vraiment une question, c’est même autoritaire.
Le ton de Sweetie est assez ambigu puisqu’assez pressé mais aussi terriblement désireux, comme s’il voulait puissamment une chose ; instinct non inné mais qu’il a bâti avec l’éducation que les pirates lui ont inculquée.
Bloody Mary est-il si drogué à la boisson pour vouloir cacher ses bouteilles et ne pas les partager ? Pourtant, Sweetie l’a bien et les a bien vues, tout à l’heure, lorsqu’il a récupéré les seuls cadavres de bouteilles d’eau présents. Il n’irait pas non plus jusqu’à mordre pour obtenir une lichette de liqueur mais il ne comprend pas pourquoi Bloody Mary lui cache cet aspect alors qu’il vient justement de lui proposer un deal pour une espèce d’interview entre eux. Et dissimuler un premier indice ou un catalyseur de la conversation ne respecte pas cette clause.
Enfin, faudrait-il encore que Sweetie soit au courant des lignes du contrat puisqu’il semble si aveuglé par la vue de l’alcool qu’il vient de créer un énorme malentendu entre eux.