tu ne voleras point ϟ bambi (end)

Si on lui avait dit un jour qu’il adorerait aller au bowling, Ecstasy aurait certainement ri au nez de cette personne. Le bowling ? Et puis quoi encore ! Ce truc de de naze là ?! Pourquoi irait-il foutre les pieds là-bas ? Y a tellement d’autres endroits plus amusants… Et puis. Et puis il y a eu la tempête. Arcadia Bay, la désintox, et les vents qui ravagent tout sur leurs passages. Et maintenant, l’Happy Hour est devenu un lieu de refuge pour beaucoup d’entre eux. Un endroit où les différences n’existent pas, où il n’y a ni Pirates, ni Chevaliers, ni Greens, mais seulement des âmes esseulées en quête de compagnie.

Et pour Ecstasy, le lieu est à la fois une pause appréciable dans ce quotidien chaotique, tout comme  une opportunité de nouveaux clients. Car il n’oublie jamais ce pour quoi il a été recruté. Hope et les espoirs perdus. Mais ici, il doit être prudent, très prudent. Le patron n’accepterait probablement pas ses petites entremises, lui qui veille tant à ce que l’endroit reste neutre et sans source de conflits.

Alors il fait profil bas, prend une gorgée de se grenadine et scrute les personnes autour de lui. Pas d’alcool ce soir-là, il doit garder l'esprit lucide. Il reconnait quelques visages. Des regards se croisent. On le reconnait aussi. Certains hésitent sûrement à l’approcher. Pour différentes raisons. Pour savoir si c’est bien lui la star de télé-réalité, pour se moquer un peu ou pour… ou pour lui demander  s’il aurait pas quelque chose d’intéressant au fond de ses poches. De l’Espoir ou n’importe quelle autre pilule.

Ses yeux scrutent ainsi tout ce qui se trouve autour de lui, à travers le restaurant et les pistes de bowling, à travers les tables et les fauteuils sauvés de la tempête, à travers les conversations et les éclats de rire. Et là, parmi ce bouillonnement joyeux, des cheveux clairs qui accrochent son regard. Une crinière qu’il ne connait que trop bien. Et un sentiment de honte qui l’envahit aussitôt alors que son nez se réfugie instantanément dans son verre.

Bambi. Bambi est là. Bambi est juste là. A quelques mètres. Et il se tient entre lui et la sortie. Impossible de lui échapper. A part peut-être d’aller se réfugier dans les toilettes ou sous une table. Ce à quoi il songe sérieusement quand les souvenirs de leur dernière rencontre lui remontent à la surface… Les précieux livres volés.

Mon dieu. Le libraire va l’assassiner, là, tout de suite, maintenant, sous les regards incrédules de tous les curieux. Parce que personne ne viendra le défendre et le sauver. Bambi sera libre de lui trancher la gorge sans que quiconque n’ait quelque chose à y redire. Ecstasy sombre-t-il un poil dans le mélodrame ? A peine. Mais il est absolument persuadé que sa fin est proche désormais.

résumé:

S’il ferme les yeux très fort, Ecstasy disparaitra-t-il ? Il aimerait tant que ce soit aussi simple. Redevenir un enfant qui pense pouvoir disparaître aux yeux du monde simplement en s’occultant les pupilles. Mais la réalité est toute autre, toujours plus violente, toujours plus douloureuse. Et elle ne tarde pas à s’abattre sur ses épaules, tel un couperet qui tombe brutalement sur sa nuque. Un frisson de crainte lui parcoure l’échine alors qu’il entend son nom clamé si fort. La voix de Bambi est unique, il la reconnaitrait entre mille, il n’a pas besoin de lever les yeux pour savoir que c’est lui qui vient de l’interpeller. Et il ignore tout autant les autres regards qui se sont tournés vers eux, se demandant bien pourquoi le libraire s’adresse à lui de cette manière.

Mais il y aussi cette note étrange dans le creux de ses mots. Quelque chose qu’il n’a jamais perçu jusque-là dans la façon dont il a de lui parler. Une certaine fébrilité peut-être ? Il n’est pas tout à fait sûr. Et ça l’intrigue. Alors quand son regard daigne enfin se faire courageux et se fixer sur, et qu’il le voit là, juste un peu plus loin, debout à côté de sa table, il sait désormais qu’il n’y a plus aucun moyen d’échapper au châtiment qui l’attend.

Et il l’appréhende plus que jamais en entendant les derniers mots de Bambi. Mais ses jambes ne veulent pas répondre à l’appel. C’est étrange d’ailleurs cette façon de garder la distance. Mais Ecstasy n’est pas encore assez fou pour se lever de lui-même et aller vers son bourreau. Alors il se contente de rester prostré, de rentrer un peu ses épaules et de replonger son nez dans sa grenadine.

« On a rien à se dire… »

Il parle dans sa barbe. Sans être tout à fait certain que l’autre puisse l’entendre. Et sirote ses dernières gorgées. Peut-être pourrait-il tout de même essayer de prendre la poudre d’escampette… Alors il se laisse glisser doucement de la chaise, daigne lancer un nouveau regard en biais à l’attention de Bambi.

« Et c’est Ecstasy maintenant. »

Surtout pour lui, surtout pour Bambi, pour ce sans-cœur. Caleb, ce doux souvenir, il le réserve pour ceux à l’importance toute particulière. Et ainsi étouffer sa mémoire parfois douloureuse, d’une vie désormais mise entre parenthèse.

résumé:

De la surprise. Un bref sursaut. Des yeux qui s’écarquillent et qui restent scotchés sur Bambi. Le libraire n’a absolument rien compris de ce qu’il venait de lui dire n’est-ce pas ? Et au lieu de se moquer, de l’envoyer balader, ou de prendre toute autre décision raisonnable, Ecstasy n’ose plus bouger. Pire encore, il se sent s’enfoncer à nouveau dans sa chaise alors qu’il regarde impuissant Bambi s’approcher de lui et prendre place à sa table.

Tout cela ne tourne pas rond. Sa façon de parler, de se déplacer. Ce même petit quelque chose qu’il a ressenti lorsqu’il s’est fait interpeller, Ecstasy le sent encore. Mais il n’arrive simplement pas encore à mettre le doigt dessus. Alors que c’est pourtant si simple de deviner dans les iris clair de l’autre que les vapeurs d’alcool brouillent son esprit.

Et il reste pantois. La parole coupée. Stupéfait de se faire sermonner de cette manière plutôt que de subir la même colère froide que la dernière fois. Et tout se brouille encore plus. Mais où veut-il en venir bon sang ?! Et il voudrait protester, dire quelque chose d’intelligent, remettre Bambi à sa place. A peine ouvre-t-il la bouche qu’il la referme aussitôt. Tandis que son regard se perd sur cette main partiellement brunie… Ne comprenant pas bien de quoi il l’accuse.

Et d’ailleurs… cette tâche. C’est si… étrange. De l’encre ? Bizarrement, ça ne ressemble pas à l’image du libraire qu’il s'est construite. Celle d'un homme soigné, aux ongles toujours impeccables.

« … Quoi ?! »

Oui voilà la seule chose censée à dire. Parce que rien n’a de sens et que c’est trop pour qu’Ecstasy fasse dignement fonctionner ses quelques neurones.

« Je t’ai dit de m’appeler Ecstasy d’abord ! »

Sans l’avoir vu venir, il se sent désormais à fleur de peau. Comme un gamin à qui on refuse un caprice. Et qu’on puni par la suite. Alors ça gronde. Ses sourcils se froncent, ses lèvres se pincent, et ses bras se croisent sur sa poitrine.

« Je t’ai jamais rien fait. C’est toi qui t’en prends à moi sans raison ! Et m’accuser de tes mains sales ?! N’importe quoi ! Tu te prends pour qui ?! »

Ca sort. Enfin. Rien de très glorieux mais il se défend, il essaie tout du moins. Mais se défendre de quoi au juste ? C’est comme combattre un ennemi invisible. Et Bambi est bien plus fort à ce jeu-là que lui. Sauf que là… Oh mais oui, c’est donc ça.

« T’es bourré ?! »

Qu’il demande sans somation après avoir enfin compris l’attitude si décalé du libraire.

résumé:

C'est donc ça. Il en est certain à présent. C'est l'alcool qui embrume ses yeux, qui s'immisce dans ses paroles. Et c'est pour ça que tout est si peu clair dans l'esprit d'Ecstasy car la logique de Bambi est désormais engluée dans le verre de trop qu'il a dû boire avant que leurs regards ne se croisent. Maintenant, le voilà coincé avec lui et ses accusations. Sans oublier la condescendance dont le libraire fait preuve à son égard. Il n'est qu'un gosse qu'on doit remettre dans le droit chemin et Bambi - dans toute sa supériorité - l'écrase de son intelligence. Et lui fait la morale tout bonnement injustifiée.

« Mais de quelle âme généreuse tu me parles ?! Hein ? J'avais juste besoin d'un livre, UN SEUL FOUTU livre. Et ne me demande pas de pas m'énerver, je m'énerve si j'veux ! »

Et son petit poing s'abat mollement sur la table. Comme pour tenter de marquer un peu plus ses propos, mais sans grande conviction. Il se sent toujours frêle face à Bambi. Il y a comme cette auréole qui trône au dessus de sa tête, qui lui rappelle que cet homme ne fait pas totalement parti du commun des mortels et qu'il est dans ses droits de le martyriser lui, l'être aussi misérable qu'est Caleb Alderson, petit prince de la télé-réalité.

Mais le ton a changé. L'atmosphère est devenue plus lourde. Ses mains encore. Et de nouveaux les salissures, les tâches noires au bout de ses doigts. Le regard d'Ecstasy est perplexe, se perd dans les paumes tendues vers lui. Et son cœur se serre bien malgré lui en voyant l'expression si peinée de Bambi. Il est troublé dans cette face de lui qu'il n'a jamais vu, qu'il ne pensait même pas qu'elle puisse exister.

« Je comprends pas Bambi, je comprends rien... Je... Je suis désolée mais, mais je t'ai rien fait moi. Et si je dois te rendre tes deux livres alors... » Lui aussi il s'affaisse sur sa chaise, il n'ose plus le regarder et regrette presque aussitôt la fin de sa phrase qui sort malgré tout « Alors je te les rendrais. »

Non, il ne veut pas. Il veut les garder précieusement. Les lire et les relire. Corner un peu plus les pages. Humer la couverture. Apprendre par cœur chaque ligne. C'est son petit trésor. Ne l'a-t-il pas mérité ?

« Tu... Tu devrais peut-être aller te passer de l'eau sur le visage, ça te ferait peut-être du bien. » Pour l'aider à retrouver ses esprits « Et en profiter pour te laver les mains. » Parce qu'il ne réalise pas les ombres qui se sont imprégnées sur son épiderme ne disparaîtront plus. « Je peux t'accompagner si...si t'as besoin. » Et ça, il s'en mordrait presque la langue d'avoir encore une fois parlé trop vite.

résumé:

Alors voilà, il a fait preuve de politesse et maintenant il est contraint de rendre ses précieux livres. Bambi a saisi au vol sa proposition sans même y songer une seconde fois. Et Ecstasy est déçu. Triste même à l’idée de se séparer de ces quelques pages qui l’ont accompagnées ces dernières semaines. Il aurait dû encore plus en profiter, lire et relire jusqu’à son saoule ces deux ouvrages, abîmer les pages de ces livres pour les rendre illisibles. Car à présent, il ne les aura plus sous les doigts. Et c’est fou comme il s’y est attaché. Il a comme l’impression de perdre un être cher alors qu’il ne s’agit que de deux objets inanimés. Mais Ecstasy ne possède plus rien dans ce monde, il se demande même s’il a déjà véritablement possédé quelque chose dans le passé. Et le libraire lui arrache déjà le peu qu’il détient…

« Hé mais ! Fais attention ! »

Mais trop tard. Bambi s’affale sur la table. Et lui, il se relève brusquement sans trop réfléchir. Pour lui venir en aide mais sans trop savoir comment. Sa main s’est tendue vers lui, pour finalement rebrousser chemin. Il se sent gauche, maladroit. Il hésite, bafouille, se mord la lèvre embêté par son manque de confiance en lui. Avant que ses sourcils ne se froncent d’incompréhension. Et ces doigts qui l’attrapent, qu’Ecstasy dévisage sans comprendre. Il voudrait dire quelque chose, mais Bambi l’en empêche parce que le voici qui trébuche à nouveau. S’attrapant vainement au pauvre corps frêle du Pirate qui vacille. Mais sans savoir comment il y parvient, il tient bon. Attrape plus fermement les épaules du libraire, le met face à lui. Le dévisage un instant. Cherche dans son regard des réponses qu’il sait qu’il ne trouvera pas.

« De quel livre tu me parles ? Je croyais qu’on parlait des livres que je t’ai… euh, que je t’ai "emprunté". Alors c’est quoi ce livre que tu veux me rendre ? »

Est-ce vraiment nécessaire de comprendre le charabia d’une personne alcoolisée ? Alors Ecstasy soupire, se résigne. Pour une fois, c’est à lui de faire preuve de maturité. Il doit au moins essayer.

« Tu habites à la librairie ? Je te raccompagne si tu veux… Tu pourras t’y reposer, ça te ferait du bien. »

Encore faut-il parvenir à faire deux pas en avant sans que Bambi ne s’emmêle les pinceaux… Et pour cela, Ecstasy fait glisser un de ses bras sur ses épaules, tandis qu’il passe le sien derrière son dos pour tenter de le maintenir un tant soit peu. Cette promiscuité le met un instant mal à l’aise mais il balaie rapidement sa gêne. Parce qu’il y a plus important. Parce que pour une fois, il peut se rendre utile.

résumé:

Sa gorge se serre. Il déglutit. Et tout son corps s’est tendu contre celui de Bambi. Il aimerait tant que cela soit plus que de simples paroles, qu’il ne soit plus aussi transparent et insignifiant à ses yeux. Que plus jamais il ne lise dans les yeux de Bambi ce jugement qu’il n’a jamais compris. Et que tout ne soit plus que passé jusqu’au nouveau commencement de cette nuit.

Mais il ne sait que trop bien que l’alcool perturbe tout. Que Bambi n’est pas vraiment lui-même et que demain, les souvenirs s’évaporeront de sa mémoire troublée. Alors il est touché Ecstasy, touché d’entendre ces quelques mots du libraire. Mais blessé aussi, parce que tout ça n’est qu’une illusion qui cessera bien assez vite.

Et il ne dit rien. Baisse simplement les yeux. Et regarde où il met les pieds. Tout en tenant fermement contre lui le corps gracile de Bambi. A eux deux, ils ne doivent pas peser bien lourd sur la balance. Deux petits fagots de paille qui pourraient se briser au moindre coup de vent. La scène doit être hilarante d’extérieur et Ecstasy espère simplement ne croiser aucun Pirate qui trouverait là une nouvelle raison de se moquer. Mais ils atteignent enfin la porte qui les mènera à l’extérieur, où dehors, l’obscurité leur offrira une meilleure discrétion. Et sa main se tend pour l’ouvrir.

Et se stoppe tout aussi nette. Elle reste là, en suspend. Doigts fébriles qui défient l’apesanteur.

Un silence.

Ses lèvres qui s’ouvrent, qui se ferment. Et les mots qui ne veulent pas sortir.

« Qu’est-ce… »

Sa voix s’étrangle. Alors que la douleur saisit sa poitrine en pensant à ce petit frère perdu. Si semblable et pourtant si différent de lui. Petit frère auquel il n’avait pas pensé depuis longtemps. Et cela en est d’autant plus violent.

« Qu’est-ce que tu viens de dire… ? »

Sûrement des paroles en l’air. Ou encore un de ses coups pour lui en faire voir de toutes les couleurs. C’est de Bambi dont il s’agit. De ce foutu libraire. Et comment pourrait-il savoir quoique ce soit hein ?!

Alors c’est plus fort que lui. Il s’éloigne, il le lâche. Et ses yeux apeurés le dévisagent.

« P-pourquoi tu me… tu me parles de lui ?! »

Ca n’a pas de sens. Toute cette soirée n’en a aucun. Mais la panique s’empare désormais de lui. Parce qu’il a peur d’être mis à nu, que Bambi a décelé en lui l’imposteur qu’il est. Et comment ?! Putain de mystère…

résumé:

Il hoquette. Et c’est comme si l’air se coinçait dans sa gorge. Parce que c’est surréaliste. Invraisemblable. Bambi qui se permet de parler de lui et qui ne voit là aucun outrage, en quoi est-ce normal ?! Personne ici ne se l’est permis. Oh oui bien sûr qu’on lui parle de sa famille, c'est devenue monnaie courante, après tout, ils ne sont qu’une seule et même entité. Mais de cette façon, dans ces termes… jamais. Parce que l’image dorée et souriante de sa famille dissimule la triste vérité, un frère qui n’accepte pas l’autre. Et jusque-là, le spectacle permanent offert par les Alderson lui a toujours offert un abri confortable, une douce couverture face au réel.

Alors Bambi ne peut pas. Il ne peut définitivement pas parler comme ça. Et quand bien même il pourrait... il n’en a tout simplement pas le droit. Qui est-il pour juger ? Qui est-il pour donner son avis ? Ses poings se serrent, sa mâchoire se crispe. Il lui suffirait de trois fois rien pour faire vaciller Bambi et qu’il s’écroule là, à ses pieds. Mais Ecstasy faire preuve de violence ? Ca ne lui ressemble tellement pas… Tomberait-il si bas ? Serait-il finalement un véritable Pirate ?

« Tais-toi ! »

Sa voix est faible, les mots sont incertains. Mais ses poings se serrent toujours plus fort, l’air à nouveau rentre dans sa poitrine alors qu’il tente de se réapproprier l’espace, lui qui s’était ratatiné sur lui-même.

« S’il te plaît, tais-toi ! »

Politesse de façade. On reste fidèle à soi-même mais pas trop quand même…

Et il la prendrait bien cette main tendue. Quelques instants plus tôt, il ne se serait même pas posé la question. Mais avec lui, avec ce foutu libraire, les choses ne peuvent jamais être simples… Et pourquoi donc ne peuvent-elles jamais l'être ?! Et ce ton mielleux, ça sonne si faux à ses oreilles. Cette musique, Ecstasy l’a entendu maintes et maintes fois. Et trop souvent il s’est laissé hypnotiser par ces quelques notes.

« Je devrais te laisser tout seul ici… »

Oui, après tout ça, c’est ce qu’il devrait faire. L’abandonner, lui cracher au visage, et tourner les talons. Mais même épuisé, même au bord des larmes, il ne s’y résigne pas. Trop gentil encore une fois. Trop bon trop con, comme on dit souvent…

« Ne me parle plus de mon frère, ne me parle plus de livre. Me parle plus du tout… Contente toi de me détester en silence. »

Et il attrape la main, repasse son bras autour de lui, pour l’emmener dans la nuit noire dehors.

résumé:

Il n’écoute pas. C’est plus simple ainsi. Les mots glissent sur lui, il ne cherche plus à les déchiffrer, à en voir les contours dans cette brume trop opaque. Et Ecstasy accueille l’air frais avec soulagement, la nuit avec douceur. Tant pis s’il doit encore trainer Bambi, sa conscience au moins sera tranquille. Mais il a hâte de pouvoir s’en libérer, de faire cesser ce tourment et de retourner auprès de ceux qui ne sont aussi compliqués. Les Pirates ont au moins cet avantage de moins se poser de questions, ou tout du moins, d’être moins mystérieux. Ils ne parlent pas en énigmes, ne passent pas par quatre chemins, Ecstasy l’a appris à ses dépens. Mais il se rend compte désormais que cela a aussi du bon, que la franchise blesse les âmes fragiles mais qu’elles les endurcies au passage.

Et les pas se font lourds, maladroits. Ils avancent maladroitement. Son petit corps tient bon pour tenir celui si fin de Bambi et qui pourtant se montre bien lourd à cet instant. Le silence l’enveloppe, seul son souffle qui se fait erratique brise son mutisme. Et la librairie se dessine enfin à l’horizon. Encore quelques mètres, juste quelques mètres…

« On est arrivé. »

Il lâche l’évidence parce qu’il n’est pas certain que la vision de Bambi soit aussi nette que la sienne, que ses sens lui aient fait réalisé qu’ils ont enfin rejoint son foyer. La maudite librairie se dresse devant eux mais pour une fois, Ecstasy ne la trouve plus si féérique. Lui qui l’avait admirée puis crainte, elle lui laisse désormais un sentiment bien froid.

« Ca va aller pour la suite ? »

Il n’a pu s’empêcher de faire glisser cette question sur le bord de ses lèvres. Mais il secoue la tête comme pour la chasser, c’est qu’il n’a pas besoin de connaitre la réponse, ce n’est plus ses affaires. Et il s’écarte de la masse chaude que lui offrait le libraire, dans l’espoir de la voir tituber jusqu’à l’entrée et que la porte se referme derrière elle.

résumé: