Dans le miroir cassé, sa figure plissée par les années et la colère. Une balafre encore rougeoyante scindant sa joue. Cali applique en grimaçant l'onguent qu'on lui prescrit pour traiter l'horreur. Ça ne partira jamais, sa peur. Jamais elle n'a laissé apparaître sur elle les marques traitresses.
Celles criantes de vérité
Celles qui exposent toute sa vulnérabilité.
Et elle aimerait bien qu'il n'y ait aucune exception à la règle, que cette blessure obéisse à l'omerta qu'elle leur impose depuis toujours lui semble-t-il. De la patience, qu'on lui a dit. On fait du mieux qu'on peut, qu'on lui a assuré.
Mais ce n'est jamais assez pour elle.
Cela ne l'a jamais été.
Elle lance un regard mauvais à son reflet avant de se détourner. On étouffe ici. Elle a besoin de prendre l'air. Loin de son regard.
Le soleil débute sa lente descente dans le ciel. Ce soir, repos. Mais elle a besoin de s'occuper, se rendre utile, ou pas, qu'importe. Tant que ses idées sont détournées, tant qu'elle puisse évacuer la rage qui bouille en elle, cette envie de tout brûler.
Faute de mieux, elle marche. Marche à s'en briser les talons, marche et on se pousse de son passage, parce que l'on connait Calico – et personne ne souhaite lui servir de paratonnerre.
Par malheur, elle devait le croiser ce soir-là. Par malheur, sa silhouette lui a inspiré immédiatement une vague de frustration. N'importe qui d'autre se serait déclaré trop fatigué pour dealer avec ça à ce moment précis. Mais pas Cali.
Ce sont ses trippes qui la poussent à la confrontation
elle ne connait de toute façon que l'escalade et jamais la descente.
« Rotty ! »
Le nom est prononcé, non, craché comme si elle avait mieux à faire. On sait pourtant bien que non.
Elle s'avance à pas rapides. Se plante devant lui. Le toise comme si elle pouvait lire toutes les réponses possibles sur son front.
« Le château. Comment s'est déroulé la mission ? »