(END) Hot Mess // Leon

Hot Mess

Ft. @Bambi

Un désavantage parmi tant d’autres de l’apocalypse est bien le manque d’Internet. Du moins, aux yeux de Leon qui auparavant utilisait principalement cette ressource pour les quelques recherches qu’il réalisait sur le terrain, afin d’identifier des animaux qui lui étaient alors inconnus lorsqu’il n’avait pas la possibilité de s’offrir un Atlas ou une Encyclopédie animale complète en plusieurs dizaines de volumes. C’est qu’il n’a pas la science infuse, Leon, car même s’il pense s’y connaître plus que la plupart, il y a encore des trous, des blancs et des noirs, des souvenirs qu’il a peut-être oublié et des informations qu’il n’a alors jamais connues.

De là, il ne reste qu’une seule chose à faire.
Retourner voir dans ces bons vieux bouquins.
Bons vieux bouquins qui eux n’ont pas disparus.

Ce n’est pas là la première fois qu’il se rend dans cette petite librairie et ce ne sera probablement pas la dernière non plus. Il y vient non seulement pour quérir des informations concernant les animaux qu’il peut prendre en photo mais également pour s’offrir des romans ou autres livres fictionnels, afin de s’occuper les soirs, lorsqu’il ne fait aucune livraison ou lorsqu’il ne peut aller prendre des photos pour x ou y raison. Comme souvent, il paye grâce aux livraisons qu’il effectue pour les uns et les autres. Le voilà donc qui passe la porte de la librairie avec un enthousiasme peu commun pour la chaleur qui règne en dehors mais également en dedans de la boutique.

- Salut ! fait-il au libraire en une exclamation enthousiaste, bien trop enthousiaste comme toujours. Leon n’a jamais souffert de la chaleur, il faut avouer. Dis-moi, je cherche un bouquin sur la faune locale, les oiseaux locaux ce serait encore mieux en fait. J’ai pris un piaf en photo avant-hier et j’arrive pas à savoir c’est quoi, c’est un gros passereau d’une vingtaine de centimètres avec le dos noir, la tête rouge et le ventre jaune, j’aimerais juste l’identifier parce que je sens que je vais pas en dormir de la nuit, tu vois ? Il balance ces explications sans s’attendre à ce que le libraire puisse l’identifier pour lui, il ressent juste le besoin de parler pour ne rien dire. Il a d’ailleurs son appareil photo entre les mains, les clichés de ce fameux oiseaux sous les yeux. Tu comprends, avant, avec Internet c’était beaucoup plus facile si j’avais pas d’atlas ornitho sous les yeux mais maintenant, il y a plus de connexion. Et puis dans tous les cas, avec ou sans connexion, mon portable est mort et mon ordi doit toujours être sous les décombres de mon hôtel donc je pourrais rien chercher, en fait... Le site Oiseau.net, c’était bien pratique, ça me manque de ne plus pouvoir aller dessus, en vérité, tu peux pas imaginer.

Il redresse enfin les yeux de son appareil, tout en acquiesçant avec bien peu de conviction à la discussion sur la météo. La chaleur ne l’a jamais dérangé, d’autant plus lorsqu’il a une idée fixe dans l’esprit : retrouver le nom de cet oiseau en l’occurrence.

- Ouais, il fait chaud, approuve-t-il sans réellement le songer. D’ailleurs, je crois me souvenir qu’on voulait te parler de... Ça va ?

Voilà seulement qu’il remarque qu’Eli ne semble pas au meilleur de sa forme, avec son air pâlot et ce qui ressemble à une début de migraine, un visage soudainement fatigué et une grimace douloureuse qui traverse ses traits. Leon se stoppe immédiatement dans son flot incontrôlé de paroles, se questionnant un moment pour savoir si ce n’est pas là de sa faute (ce ne serait pas la première qu’on lui ferait ce genre de remarque). Mais finalement, une autre explication probablement plus logique lui vient à l’esprit.

- Ça va ? s’inquiète-t-il à nouveau en s’approchant du jeune homme. Il fait chaud, c’est ça ? J’espère que tu fais pas une insolation ou une déshydratation, fait-il avec une pointe d’inquiétude dans le fond de la voix. Leon n’a jamais su gérer ce genre de soucis, ce genre de problème. Et c’est qu’il panique facilement en vérité, donc il espère que cet état ne se dégradera pas plus. Tu veux de l’eau ?

Sans vraiment attendre sa réponse, il sort sa gourde d’eau de son sac à dos pour la lui mettre de force entre les mains. C’est tout juste il ne le forcerait pas à boire directement.

Hot Mess

Ft. @Bambi

Il peut parfois être naïf, Leon, mais il n’est pas foncièrement idiot. C’est qu’il lui est bien aisé de remarquer que Bambi n’est pas vraiment - si ce n’est pas du tout - au meilleur de sa forme. La première explication logique qui lui vient à l’esprit est évidemment une insolation, un coup de chaud, de la déshydratation. Ne se plaignait-il pas de la chaleur quelques secondes plus tôt ? Et qui irait s’imaginer de lui-même que cet état est la cause de la découverte récente d’un livre magique qui porte son nom et son histoire entre ses pages ? Pas Leon, en tout cas. Beaucoup trop terre-à-terre pour que ce genre de pensées puissent seulement lui traverser l’esprit.

- Non ça va pas, répond-il d’un ton sec alors qu’il insiste pour qu’il porte sa gourde à ses lèvres afin de ne boire ne serait-ce qu’une gorgée. Bois un peu, ça ira déjà mieux, fait-il d’ailleurs avec cet espoir au fond de lui.

Et ça marche, il boit sous le regard approbateur de Leon qui le gratifie même d’un large sourire bienveillant. Avant qu’il ne s’évanouisse, ce sourire. En même temps que Bambi ne se décide à chuter droit vers le sol de sa boutique. Il tente tant bien que mal de le rattraper gauchement, Leon, avant que sa chute ne soit fatale. Il l’allonge comme il le peut à même le sol, les mains tremblantes et la mâchoire claquante de panique. Leon n’a jamais été doué pour gérer les émotions trop fortes, et le stress se trouve malheureusement pour lui en haut de la liste.

- Je fais quoi ? J-J-Je fais quoi ? questionne-t-il en boucle, les paroles à moitié bégayées dans le fond de sa gorge. De stress, il passe une main dans ses cheveux tout en répétant inlassablement ces dernières paroles. Il capte difficilement que Bambi l’interpelle, il n’avait déjà pas vraiment capté qu’il était toujours conscient il faut avouer. Je fais quoi ?! lui demande-t-il donc comme s’il s’agissait là de la meilleure personne à qui demander en ce moment-même. Va... Va... Va...? “Chercher un médecin” ?! Ok j’y vais !

Il se relève comme une fusée avant de se précipiter à l’extérieur de la boutique, toujours en paniquant. Mais il s’arrête subitement après quelques pas en-dehors, regardant alors la devanture de la boutique puis les alentours. Il n’y a personne dans le coin, malheureusement. Finalement, il revient rapidement sur ses pas, sans n’avoir prévenu personne.

- Mais, je te laisse pas tout seul en fait, explique-t-il donc en revenant dans la boutique où la chaleur règne presqu’aussi forte qu’ à l’extérieur.

Légèrement plus calme mais les mains toujours tremblantes, il se rapproche alors de l’alité, avant de décharger son sac à dos pour le poser au sol, sous les jambes de Bambi qu’il soulève alors. Il s’agit dans son esprit d’un drôle de malaise vagal ou du moins de quelque chose qui y ressemble.

- Ma gourde... se plaint-il en retrouvant cette dernière au sol, non-loin de la tête d’Eli. Tiens, il en reste un peu...

Il lui présente à nouveau sa gourde d’eau, une lueur inquiète dans le fond de ses pupilles.

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Ft. @Bambi

- Tiens, il en reste un peu... qu’il fait, Leon, en penchant alors sa gourde à moitié vidée vers le visage d’Eli. C’est à l’instant même où il remarque que Bambi s’est endormi - évanoui dans son esprit - que l’eau se met à couler du goulot, aspergeant alors le visage de l’alité. Rah zut !

Il redresse sa gourde en catastrophe, et il peste dans ce langage toujours étonnamment vierge de tout juron, il peste et il se maudit d’avoir été aussi stupide, de l’avoir laissé seul ne serait-ce qu’un court instant, de n’avoir finalement prévenu personne à l’extérieur. Et il tremble aussi, de ne pas savoir quoi faire, de ne pas savoir comment s’y prendre. Bambi est là, allongé à même le sol de sa boutique sans qu’il ne puisse rien faire d’utile. Il se sent impuissant. Il se sent inutile.

Il déglutit difficilement, Leon, sans même oser le toucher de crainte de le voir se briser entre ses doigts, comme s’il n’était qu’une statut en porcelaine. Sa voix se bloque dans le fond de sa gorge, il n’aime pas les images qui apparaissent et disparaissent tout aussi soudainement derrière ses paupières. Il est bien tenté, durant à peine quelques secondes, de le secouer dans l’espoir de le réveiller, mais une petite voix - probablement celle de la raison - lui souffle qu’il s’agit là d’une mauvaise idée, d’une idée des plus stupides, bien plus stupide encore que celle de lui renverser de l’eau sur la face.

Il ne pense à rien, Leon, pas même à vérifier un pouls ou une respiration. Mais à travers le flou de son esprit et de ses mains tremblotantes et excessivement prudente, il parvient néanmoins à accomplir une action. Doucement, il le bascule sur le côté, tente tant bien que mal de placer l’une des mains de Bambi sous sa joue - la mauvaise - sans même s’occuper de ses jambes. Dans cette position latérale de sécurité on ne peut plus bancale, il finit fatalement par basculer, Eli, sur le ventre avant que Leon ne le retienne à nouveau et décide de le maintenir manuellement dans cette position, immobile et sans même savoir quand il va alors se réveiller.

Et le voilà donc qui attend assis sur ses talons, une main sur l’épaule de Bambi pour éviter qu’il ne bascule. De son autre main, il rabat quelques mèches folles de ses cheveux vers l’arrière, soufflant lui-même pour tenter comme il le peut de calmer sa propre panique. Ses dents claquent, ses mains tremblent, son esprit est entièrement vidé.

Seuls ses yeux finissent par s’accrocher à ces taches noirâtres.
Ces taches noirâtres qui maculent les doigts et les paumes de Bambi.

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Ft. @Bambi

Il se bouffe les ongles jusqu’à la peau, Leon, alors qu’il attend sans un mot qu’Eli ne se réveille, les yeux rivés sur ces tâches noires qui parsèment ses mains et ses doigts. Il se demande bien un court instant ce qu’elles peuvent bien être, ces tâches étranges, mais il n’y voit finalement que des tâches d’encre et son esprit s’en détourne bien rapidement pour se concentrer sur l’alité qui doucement se réveille de son court sommeil. Il ouvre les yeux au même instant où Leon commence à s’attaquer à sa peau, à se faire saigner à force d’en arracher avec les dents. C’est qu’il se sent bien inutile, à juste rester ici avec la crainte de le laisser seul, sans pouvoir aller chercher une quelconque aide. Personne ne semble vouloir rentrer dans la boutique à cette heure-ci, comme si tout le monde avait préféré se terrer chez-lui en proie à cette chaleur infernale qui ne le dérange que peu.

- Eh, vas-y doucement, lui enjoint-il lorsqu’il le voit déjà essayer de se relever, alors qu’il ne s’est réveillé que quelques secondes auparavant. J’ai pas envie que tu retombes.

Pourtant il le repousse, Bambi, il repousse sa main qu’il l’aide encore à se maintenir. Il ne dit rien et se laisse docilement faire, mais il garde tout de même ses bras à proximité si jamais l’alité ne s’évanouissait à nouveau sous ses yeux.

- Tu t’es évanoui à cause de la chaleur, lui explique alors Leon qui pense toujours tenir là l’explication correcte et exacte. C’est qu’il peut être buté parfois, quand il pense tenir le bon bout. Ça a duré juste quelques minutes mais bon...

Soudainement sa voix monte dans les aigus lorsque la panique à nouveau l’enlace et lui crispe l’estomac. Il reste lui-aussi assis à même le sol, le regard figé vers le sol à la manière d’un enfant perdu, si bien qu’il ne remarque la mouvement peu subtil que fait Bambi pour tenter de masquer ces marques sur ses mains. Il redresse les yeux vers lui lorsqu’il lui sort cette ineptie - selon lui. Je vais bien. Leon secoue alors la tête de droite à gauche, car c’est qu’il est aisé de déceler le mensonge dans ces mots. Il peut être naïf, Leon, mais il n’est pas idiot non plus.

- Non, tu... Tu t’es évanoui à cause de la chaleur, lui répète-t-il alors, d’une voix à peine soufflée mais sûr de lui. J’aimerais bien te donner à boire mais... j’ai plus d’eau dans ma gourde.

Il fixe sa gourde désormais entièrement renversé sur le sol, se frotte ses cheveux en vrac et en défait même quelques uns de sa queue de cheval. Il a toujours sur le visage cet air perdu et enfantin qui ne sait comment réagir correctement face à une situation similaire. Il a fait comme il a pu, Leon, sans pour autant savoir s’il a bien fait, s’il n’a pas juste fait qu’empirer la situation.

- Tu veux que je t’amène à l’hôpital ?

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Ft. @Bambi

Il est peut-être des plus perdus, Leon, et pourtant il essaye bien de faire ce qu’il peut, de faire de son mieux pour aider sans même être sûr d’être le plus efficace ni même le plus qualifié. Reste encore sa panique palpable dans toute la boutique, de sa voix qui tremblotent encore et ses ongles qui saignent sans qu’il ne s’en rende encore compte. Et pourtant il essaye bien de faire bonne figure - peine perdue - car c’est Eli qui a là besoin d’aide et de soutien, Eli qui semble perdu et déboussolé depuis sa perte de conscience. Du moins, c’est de cela qu’il s’est tout seul convaincu, Leon. Tout comme de son explication qu’il juge béton - la chaleur qui les écrase depuis le début de cette journée de canicule.

Il renifle un peu, regardant alors l’alité tourner des yeux tout autour de lui, chercher à nouveau ses repères et ses points fixes. Dans son esprit, l’hôpital est un bon compromis car qui oserait laisser seul quelqu’un qui vient de s’évanouir sous ses yeux impuissants ? Pas Leon en tout cas, sûrement pas lui car c’est qu’il est bien content d’y reprendre ses esprits lorsqu’il se retrouve assommer par ses crises d’épilepsie. Mais ce n’est apparemment pas l’avis d’Eli. Alors il pince des lèvres et fronce les sourcils, Leon, il n’apprécie pas être mis en tord ou voir ses propositions - qui lui semblent pleines de bons sens - refuser. Et pourtant l’autre lui assure, juste du sommeil et c’est qu’il est bien loin de s’en satisfaire, il voudrait bien le prendre par le col et l’y traîner de force, jusqu’à ce foutu hôpital. Mais il se contente de souffler du nez à sa demande, alors qu’enfin il se redresse lui-même, se remet debout sur ses deux jambes plus ou moins bien ancrées à même le sol.

- Ok ok... soupire-t-il avec un infime ton agacé dans le fond de sa voix, alors qu’il saisit par le même temps le bras d’Eli pour tenter comme il peut de le soulever et de le relever, doucement et sans de brusques mouvements. Et le voilà enfin à nouveau debout alors il lui demande : Ça va ?

Mais qu’importe la réponse à cette question stupide, une réponse qu’il s’imagine positive même car quelle idée serait-ce d’y répondre par un non bien senti. Qu’importe donc la réponse à cette question, il mène lentement l’alité jusqu’à l’arrière-boutique, jusqu’à la vision bénie d’un lit. Il le laisse choir sur le matelas avec toute la délicatesse qu’il est actuellement capable de fournir - c’est-à-dire bien peu - avant de bêtement regarder autour de lui, air idiot sur les traits et perdu plus qu’il ne semble normalement l’être.

- C’est joli ici... balance-t-il stupidement après inspection complète de l’endroit, une phrase idiote en décalage complet avec ce qu’il est habituellement : sans-gêne et impoli. Tu veux que je reste quand même un moment ? Dans le doute ?

Bien futile proposition, il se doute.
Eli n’a-t-il pas déjà rejeter toutes les précédentes ?

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Ft. @Bambi

Main frottée contre son bras, le stress doucement s’apaise et s’étouffe dans le fond de sa sa poitrine, car il ne semble plus vouloir s’évanouir, Eli. Il reste là, assis sur ce matelas sans que son poids ne l’entraîne vers le bas, sans que ses yeux ne se ferment et ne se révulsent une fois encore. Et pourtant, il demande quand même, Leon, il demande s’il ne veut pas qu’il reste encore un moment, le temps que le malaise passe et si jamais un nouvel évanouissement devait avoir lieu. Mais il se doute par avance que la réponse sera un non, car n’a-t-il pas refusé toutes ses propositions jusuqu’ici, Eli ? Et c’est donc ce mot qu’il attend, un non ferme et définitif, il s’apprête même déjà à repartir. Pourtant, c’est bien autre chose qui parvient jusqu’à lui, car il peut rester s’il le souhaite.

Il saute donc sur l’occasion, Leon.
Et surtout sur une chaise qui se trouvait là.
Et sur laquelle il s’assoit.

- Alors je reste, annonce-t-il simplement une fois assis.

Et enfin il baisse les yeux, et remarque ses doigts ensanglantés. Il cligne des yeux quelques secondes, surpris de les voir dans cet état comme s’il ne parvenait à se souvenir de ce qu’il leur a fait subir plus tôt, à les ronger jusqu’à la peau. Alors sans un mot, il se met à sucer l’un de ses doigts, tente comme il peut d’arrêter le saignement. Puis il hausse les épaules, tout simplement avant de croiser ses bras sur son torse et de laisser Eli se reposer.

Quelques minutes passent, quelques dizaines de minutes peut-être. Oh il tente de bien de veiller, de rester éveillé, de surveiller. Mais finalement, une fois le stress désormais entièrement retombé, une fois l’adrénaline partie de ses veines, il finit par à son tour s’écrouler, menton sur le torse et bras toujours croisés l’un au-dessus de l’autre. Sa respiration s’approfondit, s’allonge, se calme, siffle légèrement également.

Finalement, il est bien aisé de s’endormir.