Jackpot ⇄ Bambi

Lawson,

Je ne pensais pas avoir à t'écrire une lettre un jour, et pourtant me voilà. J'espère que tu excuseras ces mots précipités et mal arrangés, mais je n'avais pas de papier à gaspiller pour faire rédiger un brouillon.

L'hiver semble bien loin maintenant ; le printemps nous accueille avec bras ouverts et chaleur. Il y a aussi bien longtemps qu'on ne s'est pas vus. Pas que je tienne à te revoir. Ou te tenir à distance. Fuck ignore tout ça. Comment vas-tu ? Ça se passe bien dans le monde des pirates ? Vous vous préparez à passer l'été dans la carrosserie des voitures ?

Enfin. Je t'écrivais parce qu'en faisant le ménage de la librairie j'ai retrouvé un sweatshirt qui t'appartient. Tu veux bien prendre rendez-vous qu'on se voit venir le récupérer ? Je peux me déplacer aussi.

En espérant que cette lettre te trouve en forme,

Eli

P.S. : J'ai donné à Georges un morceau de papier, pour être sûr d'avoir une réponse.

Ouais cool.
Je m'en bats les couilles tu peux le brûler. On m'a dit que c'était pas bien d'écrire ça.
Bah... En vrai tu t'en fous de tout le reste et moi aussi donc mets le pull dehors y'aura bien un chien errant pour le prendre.

Salut.

Lawson,

Ce sont les Greens qui seraient mécontents de t'entendre. Enfin, te lire. Whatever. Je te croyais pas au-dessus des conditions matérielles de cette existence. Loin de moi l'idée de jouer aux pessimistes, mais les saisons sont cycliques. Si le beau temps nous réchauffe en ce moment, dans six mois ce ne sera plus le cas. Et dans six mois à ce rythme je crains que nous soyons encore coincés dans une bulle étrange qui nous empêchera de nous procurer des sweatshirts derniers cri fraichement cousus par des enfants au Bangladesh. Tu crois que le capitalisme est mort avec la tempête ?

Alors non, je ne mettrai pas le pull dehors en attendant qu'un chien errant essaie de le bouffer.

Récupère ce qui t'appartient à la fin, c'est pas si compliqué.
Et sauve la planète.

Écologiquement,

Eli

Lawson,

Eh bien bravo t'as vu clair derrière mon jeu tu veux une médaille ?

Pour information, j'ai bien essayé une fois de dormir dedans une nuit où il faisait assez froid pour passer par-dessus le malaise qu'il m'inspirait. Si tu t'es déjà demandé s'il est possible de s'étouffer dans un hoodie trop grand pour soi, figure toi que le tien m'a presque étranglé. J'ai du mal à croire que j'ai pu m'entortiller assez pour arriver à un résultat pareil seul, alors je penche pour la thèse de l'enchantement vodou. Compte tenu des fucking baleines dans le ciel et de ta haine envers moi, je vois pas en quoi ce serait des foutaises.

Alors j't'en prie, récupère ce vêtement maudit. Par sympathie pour ce pauvre George qui multiplie les allers-retours entre nous, je ne l'ai pas inclus en pièce jointe encore. Mais dans la prochaine, il y sera. Prends le. Et si vraiment tu n'en veux plus, donne le à un autre de ces géants parmi vous les pirates qui ne risque pas de s'y étrangler, comme, je sais pas, Acid, par exemple.

Et tu l'embrasseras de ma part

Bisous,

Eli