on aurait dit la fin d'un film ⊚ Almace & Cursed (end)

Trois bouteilles vides, on roulait vite.
On aurait dit la fin d'un film.

Darell a toujours passé les fêtes de fin d’année en famille.

Toujours.

Évidemment, sauf l’an dernier.

Il y a trop pensé, ces derniers jours. Beaucoup trop.
Plus que d’habitude. L’absence s’est faite plus évidente.

Écouté les envies de fuite et les murmures de l’esprit qui creusent encore un peu plus fort le vide entre les côtes, les mains gelés, les jours trop longs pourtant si courts et les sourires qui se font sans même savoir s’ils sont sincères. On a parlé sans écouter les mots qui sortaient de la bouche.
On a hoché la tête à des questions qu’on a pas écouté.
On s’est laissé porté, comme toujours, par les autres, on est resté au loin, à regarder.

Regarder la vie à nos pieds.

La joie qui suffit à illuminer la nuit toute entière.

Les lumières qui brillent et les couleurs sur les joues.

Entendre les rires, les siens parfois, ceux des autres, et puis tirer les mains, se laisser emporter dans ses moments de joie sans y songer, sans laisser les pensées l’étouffer, retirer un peu toute la pression sur les épaules quand elle est venue, arrêter de réfléchir et rigoler rigoler rigoler—
Essoufflé, Mum, à la fin de toutes ses soirées.

De plus en plus fatigué.

Et pourtant finalement si léger—

La vie est si belle.

Mais Mum s’est entêté à garder les yeux fermés pour ne pas la voir.

Pour ne pas admettre qu’il arrive à s’amuser sans elles.


Alors à la fin des festivités—
il s’était de nouveau enfermé. Repoussé les lumières colorées qu’il ne pense pas mériter. Prêt à dormir, peut-être pour toute cette nouvelle année qui sait ?
Mais tu n’as pas été du même avis, Cursed. Pas du tout.

Ah, il vous connaît trop.

Est-ce les enfants, qui vous rendent tous si têtus ? Qui vous apprennent à insister autant ?
Mum ne peut rien leur refuser, ni aux enfants, ni à vous tous.
Peut-être que vous arriverez à le faire courir à sa perte. (Ne fait-il pas déjà tout pour vous ?)

Il voulait juste

dormir

mais il t’a suivi.

Tu n’as pas eu à insister très longtemps parce que— Mum savait que c’était perdu d’avance.

Alors il t’a suivi, sans grande conviction— peut-être que le regard fatigué qui observe les environs, sur le chemin, cherche un moyen de s’enfuir avant d’arriver à destination mais il vous connaît trop et tu sembles lire trop bien dans les pensées, Cursed.
Et quand vous êtes arrivés—

—Mum a reconnu la silhouette qui les attendait.

Et il t’a juste regardé, Cursed, l'air de dire tu l’as fait exprès avoue.


Darell a toujours passé les fêtes de fin d’année en famille.

Et peut-être que ce ne sera pas si différent pour Mum.

Résumé:

Prenez pas en compte le commentaire sur Alma juste:

Spoiler:

Résumé:

Trois bouteilles vides, on roulait vite.
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Il sait très bien, Mum, qu’il n’a pas le choix.
Alors c’est sans un mot qu’il t’a suivi, fait taire les envies de fuite, et qu’il s’est assis. Lancé un coup d’œil autour de lui. Avant de regarder Almace.

Un haussement d’épaules.

Et puis de regarder Cursed qui lui vole sa canne, tente de les garder tous les deux ici. Les yeux se font un peu plus amusés— mais il ne le laisse pas transparaître, peut-être pour ne pas donner l’impression qu’il se moque.
Il écoute les ordres et puis,

la mauvaise foi.

Il comprend bien ce que tu essaies de faire, Cursed.

Mais tu vois, ce n’est pas ça, ce n’est pas à cause d’Almace qu’il fait la tronche ce soir et c’est encore moins volontaire. Ça ne l’a jamais été.

C’est juste que

tout se fait trop lourd.

L’absence et les regrets et la culpabilité.

L’envie de s’éloigner un peu de la réalité.

Que cette nouvelle année commence plus doucement que les autres, sous les grosses couvertures et les rêves qui n’ont jamais fait aucun sens. Pourtant, ils en ont plus que cette réalité.
Il n’en veut pas.

Toujours pas.

(Et les envies de fuite sont toujours si grandes.)

Ce n’est pas de votre faute, à aucun de vous deux, s’il souhaite s’enfuir ce soir. Ce n’est pas toi Almace et le froid que tu lui offres dès que vous vous croisez, ni toi Cursed et les souvenirs de ce début de novembre chaotique.

Le regard se baisse un instant.

Il se sent mal à l’aise dans cette carcasse qui semble si vide.
Dis, Cursed, tu le penses vraiment que c’est agir en adulte responsable, de s’amuser comme si de rien n’était ? Comme si rien d’autre n’existait ?

Comme s’il n’avait pas juste envie de ne rien voir de cette nouvelle année ?
Comme s’il n’angoissait pas, de ne pas être capable d’imaginer ce qui nous attend ?

Tu penses que c’est plus responsable de juste

fermer les yeux

et s’imaginer qu’Arcadia sera clémente avec nous pendant que l’on trinque ?

Mum est fatigué de faire semblant. Ce soir plus que les autres soirs.

Pourtant, ce soir, il a bien envie d’y croire, un peu.

Sans savoir oublier tous les secrets que l’ont cache— l’arme sur la tempe et les larmes et la porte qui reste encore et toujours fermée. Tout se fait trop lourd sur les épaules quand il vous regarde, qu’il y pense un peu trop, qu’il doit juste arrêter de réfléchir et juste
faire

semblant

encore et encore.

Et espérer.

Et Mum qui veut juste dormir.

Mais il ne peut rien vous refuser, pas vrai ?

Peut-être que finalement— ce serait plus simple de lâcher prise et de faire comme s’il s’amusait et espérer que tout se passera bien. Qu’il arrête d’y penser. Qu’il arrête de penser.
Et sourire un peu.

(N’est-ce pas ce qu’il a toujours fait ?)

Alors il a posé les coudes sur la table. Lancé un regard vers Cursed.

« Moi je veux bien être de bonne humeur si tu me ramènes un verre et une cigarette, » une pause, « non, deux cigarettes. »

Il y a un sourire aux coins des lèvres.

Sans savoir s’il est sérieux ou non.

À se dire que peut-être les pensées seront plus simples à ignorer une fois embrouillées par quelques verres d’alcool.

Résumé:

Spoiler:

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Il y a maintenant deux cigarettes sous son nez.
Le manque est là, il l’est toujours, mais pourtant, il les glisse pour l’instant dans sa poche sans plus de cérémonie. À se dire, peut-être— que ce sera là son échappatoire, prétendre aller fumer dehors pour s’enfuir plus vite mais Mum

n’est pas si idiot que ça.

Il sait à quel point c’est voué à l’échec.

Mais l’idée reste là, encore un peu. Tout en essayant de la chasser— il n’y a pas de raison de fuir d’ici, n’est-ce pas ? Malgré tout. Il n’y a aucune raison.

Alors, il n’a esquissé qu’un sourire.

« Évite de leur donner plus d’idées qu’ils n’en ont déjà, je t’en prie, » (pourtant, il ne veut pas que ça s’arrête, toutes leurs idées innocentes qui amènent un peu de couleur sur la toile si sombre). « Ils me font déjà bien trop tourner en bourrique. »

Parce qu’il ne peut rien leur refuser.
Peut-être qu’il serait temps de poser les premières barrières. Les limites.
Et pourtant, il se trouve là, assis autour de cette table ronde miniature, alors qu’il ne souhaitait que se cacher dans les ombres du château. Il répète les mêmes schémas, incapable de refuser.
Il devrait, parfois.
Mais peut-être que cette fois-ci—

il ne regrettera pas.

Il l’espère.
(Ne lui faites pas regretter d’avoir accepté de s’amuser à vos côtés.)

Mum a trempé les lèvres dans l’alcool à la seconde où le verre s’est posé sur la table.

A été tenté de tout avaler pour s’enivrer plus vite.

Pour enfin s’arrêter de penser. Arrêter de cogiter.
Il n’apprécie pas grandement fumer à l’intérieur alors il ne t’a pas suivi, Cursed, mais tu rends le manque un peu plus fort. Et au lieu de vouloir l’oublier— il se concentre dessus.

Ça lui permet d’oublier l’autre manque.
Celui qu’il ne pourra jamais combler.

Il vous écoute, encore.
Mum a pour habitude de ne faire qu’écouter. Les mots restent un peu trop coincés.

Pourtant, quand il entend les théories d’Almace, c’est spontané.

« C’est mignon, » il dit, simplement, avec une nouvelle gorgée d’alcool.

Savoure la brûlure dans la gorge.
Le corps qui se réchauffe un peu dans les froids toujours plus présents.

Il a appuyé le visage dans sa main. Dissimule un début de sourire, quand il entend vos histoires.

Il adore vous écouter.

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Mum a toujours été ainsi.
Aussi loin qu’il s’en souvienne, il n’a toujours fait qu’écouter.

Même avant.

Certains diront que ce n’est que de la curiosité. Mum répondra que c’est sa façon d’aimer. Sa façon d’apprécier la présence des autres. Sa façon de vouloir aider les autres à se sentir à leur place. Comment penser faire partie de la famille si personne ne s’écoute ?

Alors Mum écoute.

Capte les détails.

Il adore les détails. Ça l’aide à façonner une meilleure image de vous. Ça l’aide à mieux vous connaître. À se dire qu’on se ressemble tant, en réalité, et pas seulement dans les fonctionnements, dans les gestes évidents.
(À se dire, qu’on aurait pu s’entendre si bien, même si la tempête n’avait pas tout renversé.)

Au milieu de la fumée et de la bouteille d’alcool, au milieu de nous trois,

vous savez,
il y voit tant de beauté.

Nous formons un bel ensemble. Et Mum adore vous écouter alors son silence continue de s’allonger, de peur de briser ce qu’il trouve beau ici, laissant l’alcool imbiber un peu plus les poumons jusqu’à terminer le verre et finalement—

Finalement, il se répète. « C’est vraiment mignon, » voilà tout ce qu’il trouve à dire, dans son léger sourire, dans les anecdotes que l’on raconte.

Pourtant quand tu le regardes, Almace.

Mum comprend rapidement que c’est à son tour. Ah— il a du mal à parler du passé, ce soir ça pourrait lui sembler impossible quand le vide se fait trop fort, ça pourrait lui sembler trop douloureux.
Mais.

Mais il ne peut rien vous refuser, pas vrai ?

Le silence s’est un peu allongé.
Alors il s’est servi un verre qu’il a un peu trop rempli.
Mum n’a pas réfléchit longtemps. Il ne veut pas trop y penser, aux anecdotes qui ont parsemé sa vie, il ne veut pas ouvrir trop de portes qu’il tente de maintenir fermées parce que tout est déjà bien trop triste alors— alors il parle de ce qui lui semble le plus évident.

Ce dont il se souvient, en premier.

« C’est marrant, j’ai une histoire similaire à la tienne, » à croire qu’on se ressemble vraiment tant que ça. « Quand j'étais ado, j'ai voulu impressionner une jolie fille, » il commence en buvant la moitié de son verre, déjà. « Donc j'ai pris un skate et j'ai voulu faire des figures devant elle, faire le mec quoi. Bah je suis tombé et je me suis cassé le poignet, » il marque une pause, son sourire s’est fait plus sincère. « Elle avait bien ri. »

Il omet peut-être quelques détails.

Que cette jolie fille, ça faisait déjà une paire d'années qu'il l'a connaissait, qu'ils étaient déjà proches sans oser s'approcher de trop près, qu'il n'avait jamais fait de skate de sa vie avant ce jour-là, qu'il lui avait dit regarde ce que je sais faire, qu'elle lui avait répondu mais tu sais pas faire de skate (elle le connaissait déjà trop bien),
et lui qui ne l'avait pas écouté, qui avait tout balayé d'un

t'inquiète je gère.

« Le pire c'est que ça a marché. Elle était venue me voir à l'hôpital, » avec une boîte de chocolat et les joues toujours douloureuses d'avoir autant ri. (Les joues un peu rouges aussi.)

Il omet peut-être le détail le plus important.
C'est cette même jolie fille avec laquelle il s'est marié des années plus tard.
En effet, elle avait bien ri.
On en rigolait encore.

Il en rigole encore ce soir, Mum Darell.

« Quelques jours plus tard, je lui avais donné rendez-vous au cinéma, à cette jolie fille, mais la projection était tardive. Alors j’ai fait le mur. Avec un bras dans le plâtre, c’était compliqué, mais j’ai réussi à aller chez elle et j’ai lancé des cailloux sur sa fenêtre, » il se souvient, encore, qu’il avait du mal à viser parce que c’était son bras droit, dans le plâtre. « Sauf qu’elle m’a jamais répondu. »

(Il a baissé les yeux, un instant.
Tenté d’abandonné. D’arrêter de raconter. Les souvenirs ont beau être loin, si loin, ils font toujours un peu trop mal parce que c’était

elle

et
⠀⠀et
⠀⠀⠀⠀et Mum respire un peu et ça va mieux.)

« Pour éviter de réveiller ses parents, je suis retourné chez moi pour l’appeler depuis le fixe et lui expliquer, on avait pas de portables à l’époque. Et en voulant faire le mur une deuxième fois, mon père m’a surpris. J’ai jamais pu la rejoindre. Elle est allée au cinéma toute seule du coup. »

Il y a comme un rire coincé dans la gorge. Face au ridicule de la situation.

« Pour se venger, elle m’avait raconté la fin du film au téléphone. »

Finalement, il a allumé une cigarette, lui aussi.
Débloqué la gorge avec un peu de fumée.

Un sourire, finalement. « On est bête quand on est jeune. »

(Ça ne s’arrange pas en grandissant.)

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On aurait dit la fin d'un film.

Les pensées s’adoucissent, brouillent, laissent rentrer un peu de lumière.
Ce sont les sourires plus sincères mais toujours un peu compliqués. Les histoires qu’on se raconte comme si on se connaissait depuis une éternité.

Peut-être est-ce le cas.

Il a l’impression de vous connaître depuis toujours.
Ça ne fait qu’un an, mais parfois, l’année lui a semblé si longue, si compliquée. Et c’est une nouvelle année qui commence seulement et Mum— ne sait pas vraiment à quoi s’attendre et peut-être que, simplement, il faut juste

ne pas y penser.

Et juste apprécier le moment présent. Avec vous.

Alors il y a les sourires. Les réveils.

Le ton taquin.

« Si ça peut te rassurer, Cursed, » peut-être que ça ne te rassurera pas vraiment, « mon épouse était plus grande que moi. »

Le sourire vacille un peu. Mum le cache en portant son verre à ses lèvres.

On se soigne tous de la même manière, ce soir.

Enfumer les poumons et noyer les pensées. Encore rattrapés par le passé. Les voiles devant les yeux et ses souvenirs qu’on ne sait oublier. (Et vous savez quoi—
peut-être qu’on se sent un peu plus léger à livrer ces détails. Ou bien, est-ce seulement l’alcool qui fait effet dans le sang. Il n’en a aucune idée, Mum.)

Alors, il a tenté d’éviter de s’enfoncer un peu plus dans les passés qui n’existent plus.

(Même s’il y est encore trop coincé, le dos tourné,
à regarder ce qu’il a abandonné, encore et encore, en boucle, comme si ça pouvait les faire revenir, comme si ça pouvait tout soigner. À regarder, sans oser se retourner, vers l’avenir incertain, vers les questionnements et les angoisses.
Il préfère se réconforter dans un passé qu’il connaît par cœur,
plutôt que de se perdre dans un futur qu’il n’arrive même pas à entrevoir.)

(C’est Arthur— qui regarde devant elle.

Et Mum qui regarde en arrière. C’est ainsi qu’ils fonctionnent.
Pourquoi changer ?)

Mais il a quand même fait cet effort.

Il a trop pensé au passé, cette dernière semaine. Encore plus ce soir.

Il a simplement terminé son verre, tiré sur sa cigarette, puis il s’est penché sur la table. Comme si on voulait se dire un secret. « J’espère que vous avez pris des bonnes résolutions. »

Mum pourrait dire qu’il en a pris des centaines qu’il ne tiendra pas— mais la vérité, c’est qu’il n’y a même pas pensé. On n’y pense plus maintenant.

Et dans l’alcool et la cigarette qui se consume,

et nos discussions,

l’envie de fuir se faire moins évidente.

Un peu brouillonne, un peu floue. Peut-être—

Peut-être que Mum a juste envie de rester.

Avec vous.

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C’est peut-être le sujet qui fâche un peu.

Le sujet qui force à revoir ses défauts à corriger. Le sujet qui n’est qu’une blague, au fond, on le sait tous, ce n’est que pour se donner bonne conscience et se donner des objectifs que l’on ne tiendra qu’une semaine, tout au plus.

A-t-on encore le droit aux bonnes résolutions
alors que c’est la fin du monde ?
Mum ne se souvient même pas de celles de l’an dernier.

Il ne se souvient pas du mois de décembre entier de l’an dernier. (Et ça ne l’inquiète pas vraiment.)

Alors on écoute simplement les mensonges que l’on choisit de prononcer tous ensemble. On tire un peu sur la cigarette, hausse un sourcil lorsque tu parles d’Arthur et d’armes à feu dans la même phrase.
(Essayer d’ignorer tout le malaise qu’il ressent dès qu’on évoque un flingue—)
Mais il oublie vite face au reste.

(On verra ça plus tard. Peut-être pas.
Peut-être qu’on oubliera simplement.)

« Quoi, tu jures encore devant les enfants ? » l’air choqué, faussement outré, (il le savait déjà, en réalité). Et puis Almace qui renchérit— « Hein, toi aussi ? » (il tire sur sa cigarette, secoue la tête d’un air grave). « Pas bien. Pas bien du tout. »

Et toi, Mum ?
Ah, et toi ?

Où est-ce qu’on va, cette année ? Droit dans le mur, encore ? Ne serait-ce pas plus sage ?

Que voulez-vous entendre ?

Qu’il ne souhaite que retrouver les sourires chez les autres, autant chez les enfants que chez vous, que chez Arthur ? Qu’il ne souhaite qu’un peu plus de joie sincère au sein de nos murs, plus de couleurs, plus de musiques, plus de chants et plus de cœurs qui battent fort fort fort ?
Que tout ce qu’il souhaite, c’est garder cette famille, la rendre heureuse si heureuse, autant que possible lorsque notre monde court à sa perte, autant que possible lorsque même lui a du mal à garder les sourires. Tout ce qu’il souhaite c’est qu’on regarde tous les nouveaux levers du soleil et qu’on se dise, chacun, que c’est une victoire de plus.

Tout ce qu’il souhaite, c’est y croire un peu.
Retrouver de l’espoir. Croire en cet avenir incertain,

assez, pour détourner les yeux du passé un instant.

Pouvoir y croire assez fort pour réussir à offrir un peu de cet espoir aux autres.

Vérifier que tu ne tentes pas une nouvelle fois de prendre la porte de sortie, Cursed.
S’assurer que tes secrets ne soient pas trop lourds à porter, Almace.

Ce sont des envies qu’il ne saurait prononcer.

(—sans passer pour un idiot.)

« Mmh… » (est-ce qu’il réfléchit vraiment ou fait-il semblant ?) « Continuer à ne pas dire de gros mots devant les enfants, » ce ne sera pas compliqué. C’est ce qu’il fait déjà depuis des années. « Et aller dormir dans un lit au lieu de m’endormir n’importe où, aussi. Mon futur moi m’en remerciera sûrement. »

(Il y a un sourire.)

Ah mais sa résolution, la vraie—

continuer à rêver.

Toujours. Sans s’arrêter. Plus fort encore. Jusqu’à se confondre avec la réalité. Jusqu’à ne plus savoir distinguer ce qui est dans sa tête et ce qu’il se passe réellement sous ses yeux. Continuer à rêver, pour ne plus voir cette réalité.

Ainsi, tout sera si simple.
Ainsi, il arrivera à sourire plus facilement.

Ah— n’est-ce pas une bonne idée ? Se passer un voile devant les yeux, se donner l’impression de marcher à tout jamais dans un rêve étrange, se dire que ce n’est pas grave, ce n’est pas la réalité. Ainsi, plus de sérieux, plus de douleur, plus de tristesse, n’est-ce pas le meilleur des plans ?

C’est absurde.

Tellement absurde que même Mum en rit, d’un coup, sorti de nulle part. C’est spontané. Décalé. (Une façon de faire disparaître des larmes invisibles.)
Quelques éclats au travers de la fumée.

(C’est sincère, mais pas pour les bonnes raisons…)

« Ohlala. On y croit vraiment à ses résolutions ? » (cache les vraies raisons de ses sourires. Observe son verre vide.). « Dans deux jours, on aura oublié. »

Ah—

mais n’est-ce pas notre plus grand atout,
de savoir mentir si bien ?

Résumé:

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C’est l’esprit qui tangue un peu.
Les rires au bout des lèvres (et l’impression d’avoir des larmes au bord des paupières). C’est la fatigue, il dira, et peut-être que ce ne sera pas totalement un mensonge.

C’est compliqué de lutter lorsqu’on fatigue autant.

Alors Mum s’est juste resservi un verre. Il s’est dit qu’il en avait besoin. (Pas forcément qu’il le méritait.)

Oublier la lucidité.

Ah, c’est là que tu te trompes, Cursed— quand il oublie, il ne fait pas semblant.
La mémoire ne peut fonctionner correctement lorsqu’on dort autant, lorsqu’on confond ses souvenirs avec des morceaux de rêves, à se demander est-ce vraiment arrivé. Est-ce que, demain, lorsqu’il repensera à notre soirée, confondra-t-il ses souvenirs-ci avec des rêves trop étranges ?
Qui sait ? Il en serait bien capable.

L’alcool réchauffe à l’intérieur.

(Les mains sont toujours aussi froides.)

La fête du renouveau.
Comment dire ?
Comment dire qu’il se souvient à peine des premiers jours, trop occupé à fuir, à se dissimuler dans le territoire des religieux, trop occupé à se forcer forcer forcer à penser à autre chose, à ne vouloir que

dormir

et s’enfuir si loin d’ici.

À avoir mal dès que son regard se posait sur les enfants.
À organiser les parties de cache-cache les plus longues jamais jouées.
Et les greens…

c’est vrai, pour eux, il est celui qui a trahi les siens.

Mum est peut-être trop gentil,

trop passif,

il ne fait que sourire et il prend sur lui. Il esquive les conflits. Il repousse les reproches à plus tard.
Il n’est pas capable— de donner tout son ressenti.

Alors voilà. C’est toujours la même histoire.
Ce n’est jamais de lui qu’il parle. (Il a déjà trop ouvert la boîte de Pandore pour ce soir.)

« Je me demande juste si les enfants se seraient autant amusés s’ils étaient restés au château, » il ne peut le nier, Mum. Il a vu les sourires, il a entendu les rires, il les connaît par cœur, il sait quand ils s’amusent sincèrement.

Et au château,

au château il fait juste froid.

(Alors il a cherché un peu plus de chaleur dans son verre jamais assez plein.)

Il a juste haussé les épaules face à Almace. « Les Greens ne s’occupent que de la forme, » (il n’a pas vu, Mum, ce qu’ils ont fait en avril. Il n’a pas pu le voir.)

Il a esquissé comme un sourire.

« On fera comme eux, l’an prochain. Mais en mieux. On leur vole toutes leurs idées et on leur montre comment on fait les choses bien, » le ça se voit qu’ils ne savent pas s’occuper d’enfants reste bien trop silencieux. « On leur fera voir qui sont les boss ici. »

C’est accompagné d’une gorgée d’alcool, brûle un peu la langue, se rend compte qu’il a déjà presque fini son verre un peu trop vite. Il a besoin de chaleur ce soir, Mum, plus que jamais.
Il s’est redressé sur sa chaise. Tiré sur la cigarette.
Ah. N’est-ce pas une bonne soirée ?

(Il suffit d’ignorer tout le reste. Il fait ça si bien.)

« Je n’ai pas le temps de m’embêter avec toutes ses histoires de groupe ou de clans. Même les enfants ne sont pas aussi fatigants. »

Ou bien n’est-ce que pour garder une certaine neutralité, un peu entachée depuis avril.
Mais vous savez, c’est quoi, le pire ? Il arrive à leur trouver des excuses, aux pirates. Est-ce qu’il serait capable d’en trouver aussi aux greens ?

C’est n’importe quoi.
C’est juste trop de gentillesse.

Résumé:

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Il y a quelque chose qui change, soudainement. L’ambiance n’est plus la même.
Il y a un peu trop de sérieux.

Un peu trop de menaces.
Un peu trop de violence dans les gestes.

Quand exactement, a-t-on dévié aussi fort, a-t-on perdu nos innocences que l’on tente de garder intactes ? Quels mots, Cursed, t’ont donné ses idées-là ? Était-ce nous ou bien d’autres ? Est-ce l’alcool qui mélange tout ou bien

est-ce que ce sont tes intentions depuis le début ?

Mum a sursauté lorsque le premier poing a frappé la table. Il a juste fermé les yeux en écoutant le reste. Il n’apprécie pas tes mots, les discours que tu tiens. Les valeurs que tu souhaites transmettre. Les chevaliers ne sont pas là pour ça. Nous ne sommes pas là pour ça.

Nous ne sommes pas des chefs de guerre.

Nous sommes des chefs de famille.

Nous n’attaquons pas, nous protégeons.

(Et Mum— ne supporte pas la violence. Il— il ne veut pas———.)

Cursed, nous ne sommes pas ici pour nous battre. Mais pour nous enfuir, de cette bulle, pour partir, pour dire adieu à cette ville et ne plus jamais y reposer les pieds.

S’il te plaît.

Ne déforme pas nos discours, ne les laisse pas te murmurer les mauvaises idées, ne les laisse pas te guider aveuglément. Écoute Almace, pour commencer.

Mais pourtant— pourtant, ce n’est pas ici qu’il doit tenter de t’en convaincre. Pas au beau milieu du bowling alors qu’il y a déjà un peu trop d’alcool dans le sang. Alors que toi aussi, tu sembles divaguer dans la chaleur de ton verre.
Alors que nous sommes censés nous amuser.
Alors que ce ne sont pas des mots qu’il souhaite entendre.

Et Mum a juste— souhaité tout arrêter. Ne parlons plus de ça. « OK, plus d’alcool pour toi, c’est fini, » il attrape ton verre, verse son contenu dans le sien. Sans te demander ton avis. « Hop là. »

Puis, il porte son verre à ses lèvres, et lorsqu’il le pose à nouveau sur la table, il est vide. (Mum— regrette à l’instant où le verre claque contre le bois.)

(Pourtant, Mum sait très bien, que c’est à lui que revient le rôle de te prouver le contraire, Cursed.
C’est lui qui doit vous guider. C’est lui qui doit vous empêcher de vous jeter dans la gueule du loup.
C’est lui qui devra tenter de t’enlever ses idées-là.
Il le sait. Ça arrivera, un jour ou l’autre. Peut-être plus vite qu’il ne le pense.

Mais pas ce soir.

Un jour. Un jour, nous devrons parler, Cursed.)

Lorsqu’il relève les yeux, c’est sur toi, Almace, qu’il les pose. Il s’est fait inquiet, d’un coup— parce que tout part en vrille et il n’arrive pas à l’empêcher, alors, alors—

alors que doit-il faire…

(Il sait, Mum, qu’il ne pourra jamais tout réparer. Laissez-le essayer, au moins.)

« Toi aussi Almace, plus d’alcool. »

Il a récupéré le troisième verre, vide, et il a tenté de les garder hors de votre portée.

« Bon. Soyons des adultes raisonnables, OK ? » peut-être bien est-il le moins raisonnable de nous trois. « Il faut qu’on arrive à rentrer après, quand même. »

Et c’est déjà mal parti.

Alors, Mum a sourit. C’est plus sincère qu’il ne le pense.

Il passe une main sur son visage, quand l’alcool fait un peu trop son effet, les joues un peu rouges et lorsqu’il regarde ses doigts— il y voit les couleurs, toutes les couleurs qu’il avait oublié d’effacer.
Le maquillage maintenant étalé sur ses joues.
Comme trop souvent.
(Son sourire s’est mué en rire, sans même qu’il n’y fasse attention.)

« J’ai la tête qui tourne. »

Qu’il dit, simplement.

Alors qu’il écrase sa cigarette entre ses doigts.

Résumé:

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Les pensées sont un peu embrouillées et les mains tremblent (il les cache sous la table).
Mum ne sait même plus s’il est censé bien tenir l’alcool. Il sait, que ses soirées chez les Greens se sont bien trop souvent terminées de la même manière : avec un verre à la main.

Pour arrêter de réfléchir un peu plus facilement.

Pour s’endormir sans avoir le temps de compter les secondes.

Alors, au fond, ça le fait rire.

Il doit rire. Il faut rire. Il faut, il faut, il faut. (Il a l’impression qu’aucun de vous deux ne veut le faire à sa place. Ce n’est pas grave— après tout n’est-ce pas lui, le clown des chevaliers ?)

(Pourtant, le sourire est bien vrai, lorsque tu reviens avec une nouvelle bouteille.) « J’ai aussi peu d’autorité que ça ? »

Nous sommes tous si têtus.

Aucun de nous ne veut s’avouer vaincu. Mais Mum, il se souvient— de quelques bribes dans le passé qui l’empêchent de répondre aux provocations. Tu vois, ça ne tenait qu’à lui, il l’aurait bu, la bouteille. Pour ne pas être celui qui perd.

Mais un voix dans l’arrière de la tête le retient.

Et il a toujours cette mauvaise manie de tricher pour laisser les autres gagner.

Tu reparles encore des Greens—
et c’est quand Almace répète ses mots, que Mum a un sourire étrange.

Et finalement, ce n’est pas avec sincérité, lorsqu’il dit ; « C’est leur problème. »

Non, c’est plutôt l’image que vous renvoyez. C’est plutôt ce que vous souhaitez entendre, peut-être. C’est plutôt une façon de s’enfuir de ses propres envies, de ses propres pensées, de ce qu’il voulait vraiment dire (il ne sait même plus, en réalité).

C’est encore une façon de mettre fin aux discussions.

Parce qu’il voit, en face de lui, le noir qui se broie, le silence qui se fait.
Tu as l’alcool triste, Almace ? Il t’a pourtant dit d’arrêter de boire.
Parlons d’autre chose. Prenons un peu d’air frais. C’est vrai qu’il fait étouffant, ici.

Alors, Mum, il s’est levé. Il a pris un instant, pour garder un équilibre précaire quand il se rend compte que sa tête tourne vraiment, avant de pousser sa chaise plus loin et de redresser le col de son manteau.

« Venez, on rentre. »

On rentre. Il ne faut pas oublier le chemin jusqu’au château.
Ça nous fera un peu de bien, de l’air frais, trop frais. Ça nous réveillera un peu.

« Tiens, » il te désigne la bouteille d’un coup de tête, Cursed, « tu peux la boire sur le chemin si tu veux. »

L’une de ses mains a trouvé l’épaule d’Almace.
Sans un mot, Mum, il t’a adressé d’autres regards, Cursed. Un appel à l’aide silencieux, pour notre cher cuisinier qui ne semble pas apprécier comment la soirée se déroule. Pas pour l’aider à se lever ou à marcher, non juste—

faire oublier

tout le noir des pensées.
(Puisque l’alcool ne semble pas aider.)

Résumé: