Bad dream || solo

Iel ne viendra pas.

Voilà seulement une quinzaine de minutes que tu attends, Mylendra, et une petite voix murmure déjà dans ton oreille que tu perds ton temps.
Pourtant, tu resteras.
Tu as confiance en George, ta lettre a été transmise.
Tu t'efforces d'avoir confiance en tes mots, ils ont su le.a toucher.
Tu espère, d'un regard vers le ciel couvert, qu'iel a compris,
qu'iel n'est pas juste une mauvaise personne de plus sur qui tu as eu tort de te reposer.

Le froid de janvier mord la peau même au travers des vêtements de laine, les nuages grondent d'un air menaçant, la pénombre s'étend sur la ville telle une couverture silencieuse.
Et ton cœur, Mylendra, ton cœur se laisse
inlassablement attirer par cette chaleur enténébrée,
si facilement envelopper dans cet édredon des nuits agitées,
comme s'il ne s'agissait que d'un bâtiment en ruines de plus.
Réduit en morceaux, abandonné au milieu des vestiges de cette ancienne vie.
Tu te dis, parfois, qu'il a implosé, ce jour-là.

Tu te dis, parfois, que tu es morte avec elle, ce jour-là.

Tu ne vis plus, Mylendra.
Tu survis, tout au plus, comme tous les autres autour de toi.
Et tes pâles tentatives de te sentir en vie, tu les regretteras.
Tu les regrettes déjà.
Mais tu ne t'en étonnes plus.
Vous étiez les deux morceaux d'une seule et même âme, après tout.
Tu l'as abandonnée, laissée là-bas,
et elle t'appelle.
Elle a besoin de toi.

C'est toi qui a besoin d'elle.

À quoi bon te mentir ? À quoi bon écumer les paires de bras ?
Et tenter de te reconstruire, panser ton cœur avec de nouvelles fleurs, de nouveaux visages, de nouvelles épines ?
Et t'y piquer.
Réouvrir tes plaies.
Faire un trou béant dans ton âme, n'y laisser qu'un vide paradoxalement empli de questionnement.
Pour elle ? Pourquoi a-t-elle disparu ? Pourquoi toi ? Pourquoi n'est-tu pas capable d'exister comme un humain fonctionnel ? Pourquoi ellui ? Pourquoi t'es-tu laissée charmer par son venin ?

Iel ne viendra pas.
Et ta colère grandira, Mylendra, et tes questions ne disparaitront pas. Tu te perdras
dans les affres de tes tourments,
dans les abîmes de son mystère,
dans les tréfonds de votre misère,
tu te demanderas ce qui ne va pas chez toi.

Qu'est-ce qui ne va pas, chez toi ?

Mais tu patientes, Mylendra. Cette foi, en l'univers, en l'humanité, qui anime ton esprit, refuse de le quitter. Elle te perdra, un jour, tu sais.
Elle t'a peut-être déjà perdue.
Tu as tant donné de ta personne au cours de ta vie, qu'à présent même ta solitude semble s'effacer ; et pourtant, tu mets toujours un point d'honneur à t'acharner.
À essayer.
À rendre les humains qui t'entourent heureux, du mieux que tu le peux.
Peut-être ce trait pourrait-il être ta plus grande force, s'il ne constituait pas si amèrement ta plus grande faiblesse.
Tu veux toujours - trop - y croire.
Pourtant, le temps passe.
Le temps passe bien trop vite.
Le tonnerre retentit et une larme glisse le long de tes joues.
Comme une goutte de pluie chaude sur ta peau gelée.
Que fait-elle ici ?

Que fais-tu encore ici, Mylendra ?
Iel ne viendra pas.