C’était la mâchoire crispée sous son casque que Garance menait sa moto le long de la route de feu jusqu’aux quartiers des pirates. La mission s’était bien déroulées, sans encombres notables, et pourtant c’était une frustration enragée qui sculptait ses traits en une expression plus dure encore que le marbre impassible qui l’habitait d’ordinaire. Pressée de rentrer et d’en finir, elle avait la main un peu lourde sur l’accélérateur et gardait le regard fixe et imperturbable sur l’horizon devant elle. Elle arriva un peu plus tôt que les autres, fit aussitôt son rapport à Bones et prit congé de tout ce beau monde pour une heure ou deux pour aller décompresser de cette journée de merde dans le minivan qui lui servait de chambre. Dans le calme de son antre, sa colère se fit moins fougueuse –elle était toujours là, agitée sous la surface, mais c’était une colère tiède, et bientôt froide, qui lui aveuglait moins l’esprit et lui permettait de réfléchir plus clairement ; dans un sens, c’était une colère plus dangereuse encore. C’était la première mission de groupe qu’elle avait dû remplir avec l’abruti fini qu’on avait renommé Acid, et quand bien même il avait fait le travail attendu, l’énergumène avait trouvé intelligent de tenter par de la pousser à bout par tous les moyens possibles.
L’autorité était un concept que Garance comprenait ; elle ne se pliait pas à n’importe laquelle et faisait le travail qu’on lui demandait tant qu’il n’entrait pas en confrontation directe avec ses principes les plus fondamentaux ou ses intérêts. Mais depuis qu’elle était passée lieutenante, c’était elle, l’autorité, et elle découvrait tout juste les joies des postes à responsabilités quand l’un de ses subordonnés avait décidé de se torcher avec le respect qu’elle exigeait. Elle avait rongé son frein tout le long de la mission, parce qu’elle était professionnelle, et un ego malmené n’était pas une assez bonne raison pour interrompre son travail, même s’il s’agissait du sien. Mais la mission était désormais terminée, et il était temps de rappeler à ce cher Acid à qui il avait affaire.
Elle troqua sa combinaison de motarde contre quelque chose de plus léger et confortable avant rejoindre les autres qui s’adonnaient déjà aux festoyades habituelles du soirs entre les carcasses réconfortantes de tôle et d’acier ; ça lui donnait un air moins menaçant de porter autre chose que l’épais cuir noir lui avait-on déjà dit –on n’imaginait pas tout ce qu’elle pouvait dissimuler dans un short en jean et un top en coton fin. Sans surprise, elle trouva l’origine de sa colère en train de boire aux côtés de Bunny. Un sourire plus doux étira ses lèvres quand elle se fraya un chemin jusqu’à eux –on la connaissait souvent plus détendue et amicale le soir quand tout le monde se réunissait ainsi, et elle le savait– et elle se pencha en avant juste à côté de lui pour attraper une bière et lui glisser au passage un petit mot écrit plus tôt.
« Retrouve-moi derrière la décharge dans vingt minutes. Et viens seul. »
Quiconque la connaissait suffisamment bien saurait que le sourire charmeur qui étira ses lèvres quand Acid leva les yeux vers elle n’était pas bon signe. Mais de toute évidence, le jeune homme n’avait pas encore tout à fait saisi le genre de personne qu’elle était.
code - misha
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Ven 10 Avr - 1:02
une lame sous la gorge
w/ Gasoline
Acid tient sa bière et la lève bien haut. À la gloire des pirates et à la santé de Bones. Une mission rondement menée alors on s'éclate, ignorant du drame qui arrive. Acid, lui, il est content. Première mission avec la nouvelle lieutenant, Gasoline de son doux nom.
Elle est belle et surtout, elle parait inaccessible. Et elle l'est sûrement, mais ça, Acid n'en a eu que faire. Appliqué dans la mission autant que pour la faire chier. Les yeux à peine rougissants pour une fois ont parcouru son corps avec délice. Il n'a pas arrêté, n'a pas remarquer la fureur qui grondait dans les prunelles de la jeune femme.
C'était d'autant plus amusant, plus compliqué, le jeu était plus corsé, que la belle était muette. Pas un mot pas un souffle de voix et dans la tête d'Acid des tas de questions débiles et peu recommandables fusaient. Il est malin le garçon, des fois, pas toujours, pas là.
Il a les yeux éclatés quand elle se glisse dans son dos et un long frisson remonte le long de sa colonne vertébrale. Mais étrangement, ce n'était pas de l'excitation ou autre sensation stimulante mais plutôt une peur froide, la même que celle qui nous saisit quand on croise le regard sans âme d'un serpent.
Avec un clin d’œil appuyé à son compatriote de tablée, Acid cache le mot et porte la bière à ses lèvres. Mais Bunny ne l'a pas vu, personne ne l'a vu et personne ne peut le prévenir qu'il est en train d'aller se jeter dans la gueule d'un cobra qu'il a asticoté toute la journée.
Quand enfin Acid parait derrière la décharge, ses yeux brillent et ses doigts à demi gourds tiennent une clope qu'il glisse entre tes lèvres.
- Passer la journée avec moi ne t'a pas suffi ? Tu veux aussi ta nuit Ga-so-line ?
Sa voix est rauque alors qu'il s'approche, un sourire de loup sur les lèvres. Étirant doucement le prénom de celle qui va, il s'imagine, lui faire passer une excellente nuit.
Une fois le message discrètement passé, Garance avait salué toute la bande d’un hochement de tête agrémenté d’un sourire satisfait, et s’était éclipsée entre les voitures désossées pour boire sa bière en paix derrière la décharge où elle s’improvisa un siège d’un scooter abandonné ; déguster le calme avant la tempête. Quand Acid se pointa enfin, elle l’observa sans bouger de sa position –à moitié avachie, accoudée sur le guidon– et un sourire carnassier qu’elle peinait à réfréner étira ses lèvres ; il avait précisément l’air d’imbécile trop heureux qu’elle avait prédit. Les hommes étaient des idiots, et un peu trop prévisibles.
« Passer la journée avec moi ne t'a pas suffi ? Tu veux aussi ta nuit Ga-so-line ? »
Elle ne répondit pas tout de suite, se contenta de le toiser lentement de haut en bas sans rougir de scruter la moindre parcelle de son corps –comme un prédateur sonde sa proie. Ce ne fut qu’en relevant les yeux vers lui qu’elle se fendit d’un ricanement silencieux et sortit carnet et stylo de la poche de son short.
« Il faut croire que je ne me peux plus me passer d’une compagnie si agréable. »
Garance déplorait souvent que le sarcasme soit moins lisible qu’auditif. Elle porta sa bière à ses lèvres et en but une gorgée avant de la poser plus loin, en équilibre sur le dos d’une carrosserie rouillée à côté, et changea de position sur son siège pour lui faire face –elle ne se leva pas encore et usa de sa propre cuisse pliée contre elle comme d’un dossier pour écrire de plus belle sur son carnet froissé.
« Avant qu’on commence, t’es toujours aussi insupportable en mission où j’ai eu droit à un traitement de faveur aujourd’hui ? »
code - misha
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Sam 18 Avr - 0:58
une lame sous la gorge
w/ Gasoline
Le briquet claque maladroitement à quelques centimètres à peine de son visage, manque de griller quelques poils se ses sourcils avant de finalement, enflammer le bout de sa clope. Acid rend son sourire à la belle il la détaille comme elle le détaille, persuadé qu'ils ont la même idée en tête. En temps normal, il aurait peut-être repéré la lueur dangereuse dans ses prunelles - mais l'aurait ignorée - mais là, tout alcoolisé et défoncé - surtout - qu'il est, il ne la voit pas.
Sa seule préoccupation est de se demande s'il reste des chewing-gums dans sa poche et si l'haleine de tabac froid la dérange. Après l'apocalypse, on est plus à ça prêt mais sait-on jamais. Les filles sont parfois exigeantes. Alors que son cerveau poursuit ses élucubrations sexistes, qu'il remarque qu'elle lui tend un papier.
Trop habitué à ignorer le sarcasme à l'oral, il ne le décèle pas à l'écrit et sourit. Il se dit qu'elle en rajoute pour être drôle, pour être taquine, parce qu'il est bien connu que sa compagnie est agréable. Son propre esprit est narquois et moqueur mais il ne le réalise pas, occupé à penser avec sa queue.
Elle lui fait face et il se fend de son plus beau sourire.
Son mot lui arrache un rire et il écarte les bras en reculant de quelques pas vacillants. Il revient vers elle, amusé.
- Je suis comme ça tout le temps, mais ce qui compte c'est qu'on fasse le taf non. Je t'ai tant insupporté que ça ... on dirait pas pourtant.
Il s'avance, vient se placer face à elle. Il tire la clope de ses lèvres et souffle la fumée sur le côté, dévisageant la jeune femme avec arrogance. Il se penche vers elle, leurs visages à quelques centimètres l'un de l'autre, sans réaliser qu'il s'offre aux crocs du serpent.
- Sinon, tu ne m'aurai pas donné rendez-vous ici ...
Un rire s’échappa des lèvres d’Acid tandis que sa silhouette oscillait à chaque pas ; sur le principe, Garance était un peu contrariée de devoir faire ça alors qu’il était clairement sous alcool et autres. Mais elle était pragmatique, et la piqûre qu’était le fait de déroger à l’honneur des choses bien faites n’était à ses yeux pas plus dérangeante que celle d’un moustique comparé à celle du manque de respect qu’elle avait essuyé toute la journée. Le jeune homme s’approcha d’elle, toujours plus près, jusqu’à ce que leurs visages ne soient qu’à un sursaut l’un de l’autre et elle continuait de l’observer dans une attitude détendue. De la gorge aux genoux, du bas-ventre aux yeux ; tant d’ouvertures s’offraient à elle. Les réflexes qu’on lui avait inculqués de force depuis l’enfance revenaient à la charge comme si elle avait quitté la salle d’entrainement la veille.
Elle ne répondit pas tout de suite à la provocation d’Acid ; elle se permit tout d’abord de venir lui voler sa cigarette du bout des doigts pour y cueillir à son tour le poison volatile qui alla lui enfumer les poumons à la première inspiration. De l’autre main, elle fit nonchalamment glisser le bout de ses doigts le long des lignes de son visage, remontant depuis la mâchoire jusqu’à se perdre dans ses cheveux. Son sourire se fit vicieux tandis qu’elle affirmait sa prise dans ses mèches brunes. C’est sûrement le moment du film, Acid, où tu t’imagines qu’elle va t’attirer à elle dans un baiser torride.
Garance leva les yeux vers lui, et de la main qui tenait toujours la cigarette, elle leva un index contre ses lèvres comme pour lui dire de garder un secret ou lui intimer de ne pas faire trop de bruit avant d’écraser la clope sur la peau de son bras. Le début des hostilités. Sans lui laisser le temps de réagir, Garance étira sa jambe d’un geste sec et brutal pour lui décocher un coup de pied dans le bas-ventre, mais sans lâcher sa prise dans ses cheveux, l’empêchant de se rétracter ; ce ne fut qu’au second coup qu’elle écarta les doigts pour le repousser violemment en arrière avec l’espoir qu’il soit assez déstabilisé pour tomber sur le dos et la laisser finir le travail vite fait bien fait. Elle se leva enfin, à son tour, et son visage n’avait plus rien de charmant –figé dans l’expression froide des assassins alors qu’elle dardait un regard sévère et méprisant au possible sur le jeune homme.
Voyons si tu comprends mieux le langage des poings que celui des stylos.
