méfiance rassurante (࿏) bloody mary & blackbear

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« Je suis musicien ».

Les mots soufflés comme des notes,
Ne dénotent pourtant pas : en rien.
Ils sont soupirés avec une telle assurance,
Que cela la laisse un peu sote.
Ah... ce n'est pas simple pour Terrence.
Musicien. Hein ?

Alors elle attend la suite de l'histoire, sans le presser, écouter le silence laissé entre les phrases. Les moments de battements sont importants, les pensées s'affirment, les mots se forment, et voilà que Blackbear revient à bégayer. Bloody Mary ne dit rien, et continue de patienter ; ne se moque pas. En vérité, elle ne pense pas grand-chose de ça. C'est ainsi. Elle en a rencontré des gens différents, celleux venant s'échouer dans ses bras pour une nuit au prix d'or, d'autres qui avaient besoin de parler et d'être écoutés. Des tordus aux plus vulnérables. Des jeunes assoiffés de tout découvrir, et des vieux fatigués de vivre. Alors quand le bégaiement reprend, et qu'elle se concentre pour comprendre Blackbear, elle ne juge pas. Au fond, peut-être qu'elle s'en fiche tout simplement.

Papa lui a appris la flûte traversière,
Ah... la voilà de nouveau en pleine mélancolie,
Parce que vois-tu, Blackbear, son père,
A lui (à e-i-lle) ne lui a jamais rien appris.

Terrence se souvient, encore, de la menace qui éclate dans ses oreilles. Et du froid soudain, qui s'étend dans sa poitrine. Il veut aller chercher un fusil pour le descendre.

Mais toustes les deux savent bien
Que celui qui aurait tué l'autre,
Ce n'est pas son géniteur, hein ?
Terrence n'aurait pas hésité d'avoir son sang sur les mains.
Il n'avait pas hésité du tout.
Et les deux savaient qui était le plus terrorisé.
Si l'aîné n'était pas intervenu, désespéré,
Son père, Bloody Mary aurait fini par tuer.
Souvent, lea voilà regretter, ne pas être aller
Au bout de cette idée.

Bloody Mary se renferme dans son silence réconfortant, un sourire se contente d'être présent. Signe qu'iel a bien écouté, mais porteur de tristesse. Que peut-iel répondre ? Tant mieux. Quand Blackbear renchaîne sur Calico, elle finit par soupirer doucement. Le sourire reste, figé sur son visage émacié et blanc. On voit les pommettes, les os rouler sous sa peau, des yeux qui se mettent à briller.

« Tu veux que je m'en aille ? »

Finit-elle par demander, d'une voix douce, qui cache la fatigue. N'est-ce pas ce qu'il veut ? Ce grand garçon un peu gauche ? Il ne la veut plus à ses côtés.

Arès tout, iels ne sont que deux inconnus,
Qui ont parlé pour la première fois;
Du moins, c'est ce qu'il croit ?
Ne se souvient-il pas de Marie ? Du rouge de sa robe, et de la flamboyance de ses cheveux ? Des paillettes mises dans la vie de Calico ?
Elle s'en rappelle.

Et de Phaner qui vient empêtrer dans leurs discussions, à poser ses sales mains sur Calico.
À lui embrasser la main, sans y avoir été autorisé

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Spoiler:

13

résuméPas grand chose si ce n'esque Blackbear dit à BM qu'iel n'est pas le problème et qu'iel part s'iel le veut. Lui veut juste que tou.te.s deux puissent se sentir à l'aise. Découvrir Marie ne le dérange pas. Ça l'effraie mais il pense que ça peut être une bonne chose.

Autant dans l’élocution que dans le choix des mots, la maladresse envahit sa parole et infeste la conversation de quiproquos. Bien que sa présence soit inquiétante, elle n’est plus aussi dérangeante que tout à l’heure. Pourtant, c’est affolé qu’il tente de la rassurer, avec un rire très discret pour répondre autant à sa question qu’à son sourire prévenant.

Non, non ! Je- Vous f-faîtes co-comme vous vou-vou-voulez.

Son rire coincé dans cette réponse reste jaune puis finit par disparaître avec les expressions de son visage, camouflée par les mèches tombantes en raison d’une tête affaissée. Il n’est pas sûr s’il peut aller plus loin alors qu’elle a émis l’intention de ne pas vouloir autant se dévoiler qu’il le voulait.
Il voudrait lui dire qu’il aime apprendre à la connaître, quelqu’un qui essaye d’être, avec lui, plutôt sympathique pour lui accorder du temps dans ses réponses, déjà. Blackbear apprécie pouvoir démystifier la personne qu’il a devant lui. Il ne peut pas dire qu’il est à l’aise avec elle mais les courts moments passés ont rendu la situation un peu plus facile à aborder. Toutefois, pas au point d’être serein à l’idée de se présenter plus, ce pourquoi il n’en a pas beaucoup dit. Mais il faut bien que quelqu’un fasse un premier pas dans l’histoire.

J’étais pas vo-votre but (en) a… arr-arr-arrivant ici. Il faut pas que vous per-per… (…) vot’ temps. Veux ju-juste être honnê… te.

Plutôt que lui relever une deuxième information à son sujet, il fait tout de même un pas en avant en exprimant la bienveillance qui l’anime, en dépit d’un sourire qui s’est malheureusement déjà estompé. Cela dit, ce n’est qu’au profit de pupilles marécageuses qui veulent simplement l’embourber dans de la confiance. Même si le marais n’est pas beau, il est un havre pour de nombreux animaux. Pourtant, c’est compréhensible de ne pas vouloir rester ici ; qu’on peut y perdre son temps parce qu’on ne voit pas l’intérêt. On ne fait que s’embourber et ce, inutilement.

Mais jamais Blackbear ne compte faire du mal.
Même s’il n’est pas à l’aise et que, par addition à son physique, il ne peut pas non plus apporter plus de confort à une atmosphère, il essaye de prouver que « tout va bien ». Bien sûr qu’il préfère être seul. Mais certaines fois, il doit bien fournir un effort pour espérer être un moment aidé.
Peut-être que cette âme, qui ne lui paraît pas si insensible non plus, pourrait-elle aussi faire un pas pour lui, un jour ?

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Dis, grand garçon, que veux-tu ?
C'est ce qu'elle se demande, Mary,
Que veux-tu ?
Et dans tes silences, n'oses-tu point lui dire,
Ce que tu veux ?

Qu'elle se lève, se détourne dans la lumière déclinante, et jamais ne revienne ? Elle ne sait plus lire en toi. D'habitude, elle est si douée pour saisir ce que les autres cherchent à lui prendre. De son corps, de son temps, de son amour. Tu t'embrouilles dans les mots et dans tes pensées, grand garçon, et dans tout cela, elle voit les soupirs de ta naïveté. Celle qui se bute à tes lèvres, aux regards confus qui vont et viennent ; s'agit-il d'un appel à l'aide ? Vois-tu, Mary, elle sait.

Tous les murmures que les gens ne veulent écouter,
Ils sont pourtant là, il suffit de faire attention...
Mais la plupart du temps, ils sont si fatigués,
de leurs vies, de leurs journées, les voilà à regretter
D'avoir pris un peu de sa peine - elle est si lourde à porter.
Alors quand ils s'en rendent compte, ils arrêtent tout.
Et à Bloody Mary, on reprochera tous les vices.
C'est plus facile de lui faire porter la croix,
Sa fleur, ce n'est point le lys,
Ce n'est ni la rose.
C'est la fougère.

(un nuisible, comme elle)

Alors tu sais, elle tend l'oreille pour écouter tout ce que tu ne dis point ; les mots sont avortés, mort-nés dans tes incertitudes. Bousculés entre les lèvres, cassés, dépouillés, déchirés, des bouts qui se perdent et s'effilochent dans l'air. Tu lui dis que tu veux être honnête, et Mary, elle a bien envie de te croire.

Mais tu sais, elle ne fait plus confiance.
Ce n'est pas qu'il ne veut pas, Terrence.
C'est qu'à force, il ne relâche plus sa vigilance.

Ses épaules s'affaissent, se haussent, ses mains se serrent autour de ses genoux. Il (elle) ne sait plus vers où ce petit jeu le (la) mène. C'est la fatigue dans tous ses membres, c'est la lassitude au fond de sa tête ; elle aurait bien aimé continuer de parler.

T'écouter, malgré les mots qui te font défaut.
Et des faux, elle en est usée.
Pour une fois.
Des fautes, tu continues d'en faire, et tu continueras.
Ce n'est pas grave, elle ne t'en voudra pas.
Alors c'est à Bloody Mary de répondre, d'un ton un peu las, presque sans émotion :

« Je ne perds pas mon temps, et c'est à moi de décider comment le perdre. »

Bloody Mary posa son front contre ses genoux, elle y cacha son visage. Elle ne devint plus qu'un amas de boucles rousses, un chaos de feu, du désordre à ne plus savoir quoi en faire. Ils deviennent définitivement trop longs. Ah. Les mains sont si blanches, comparées au feu de ses cheveux, et la peau tire sur les jointures, les articulations ressemblent à un celles d'un pantin mal fichu.

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Spoiler:

14

résuméBlackbear ne sait pas comment remonter le moral à Marie donc il lui offre des pierres pour faire des ricochets. Il se dit qu'elle aime passer du temps avec les enfants donc peut-être s'adonner à juste ça, ça peut lui changer les idées.

De la même manière que l'autre mais aussi à sa manière, elle finit par échouer le sourire plus courageux que le sien, dans des bras lovés, plus réconfortants que les siens. La voir dans cet état, la voir aussi sensible, ne facilite, en réalité, en rien les choses. Il voudrait réparer mais ne veut certainement pas la brusquer. Comme Marie l'a si bien dit, elle est seule maîtresse de son temps et il n'a absolument rien à lui dire.

Éventuellement, il pourrait lui souffler quelques notes mais c'est aussi plutôt égoïste, compte tenu que ça lui permet davantage de s'évader qu'autre chose. Alors il joue simplement un soupir face à son manque de capacités.

Blackbear, il n'a déjà que très peu de mots à fournir, complets ou non. Ainsi, des ressources, il en a encore moins parce qu'il n'est pas celui qui soigne les maladresses de langage. Il peut soigner les blessures des enfants par quelque chose qui va un tout petit peu piquer puis un pansement. Même, leurs chamailleries, il peut s'en charger. Mais quand ça concerne le monde des adultes, il se doit de fuir.

Non, qu'elle ne s'en aille pas, même s'il le fait.
Ce n'est que pour un temps qu'il quitte la place qu'il a occupé, sur cette épaisse pierre. De toute façon, on le voit, qu'il n'est pas allé bien loin mais encore aurait-il pu la prévenir que de s'affairer à on ne sait quoi d'important pour que ça lui prenne autant de temps.

Même, elle aurait pu partir ou plus que se demander pourquoi allouer autant de temps à ce mystère, se montrer curieuse au point de découvrir ce qu’il fabrique.

Mais qu’importe la distance, que tu l’aies rejoint ou non, il est toujours là alors ne t’enfuis pas. Ne l’abandonne pas. Lui ne le fera pas si tu penses que ça vaut quelque chose de rester.

Certainement pas de l’argent, non, il n’a pas ça. Même, la somme paraît modique quand il lui présente quatre pierres, plutôt plates. Ça a l’air même pauvre, comme excuse, pour avoir fui plus qu’un instant. C’est une offrande ridicule qu’il lui fait.
Presque comme un échange de cartes ou de billes entre gamins. Il ne la voit pas comme ça mais si elle est si proche des enfants, elle comprendra qu’il en est un aussi et qu’il ne peut que sociabiliser qu’ainsi. Jacinto parle comme un enfant et sait leur parler, mais pas aux adultes.

Blackbear offre de son temps et elle peut gaspiller celui des deux comme elle l’entend. Si elle se fiche de la notion du temps, alors elle peut arrêter vieillir avec lui, un temps.
Briser les mauvais souvenirs. Rajeunir. Juste se distraire à faire ricochets.

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Tu devrais t'en aller, Bloody Mary.
Tu n'es pas le (la) bienvenu ici.
En vérité, l'es-tu seulement quelque part ?
N'as-tu plus d'endroit à toi ?
C'est que c'est devenu les rares.
Mais ça ne te donne plus trop d'é-moi.
Et toi, que fais-tu encore là ?

Bloody Mary fronce les sourcils, lorsque la grande silhouette de Blackbear lui revient. Il a les mains pleines de cailloux, et il ressemble, tellement, mais tellement à un enfant. Il a cette simplicité dans le regard et les gestes, cette façon d'exprimer sa spontanéité sans user des mots. Alors d'abord, elle se demande ce qu'il veut qu'elle foute avec autant de cailloux. Puis, quand il lance le premier galet dans le lac, et que celle-ci danse sur l'eau au loin, elle comprend.

L'on dirait un gamin, qui sait qu'il a fait une bêtise
Mais il ne sait pas exactement quoi.
Alors il cherche à se faire pardonner, et balise,
Peut-être un peu de ne pas trouver le pourquoi.

Bloody Mary se redresse alors, c'est un bonhomme de papier que l'on déplie. Et à côté de Blackbear, elle semble si petite — ce n'est pas si déplaisant. Il n'a pas l'habitude de devoir lever la tête pour parler aux autres — c'est presque charmant.

Est-ce que les ricochets remontent dans le temps ?
Et au bout de leurs sautillements, que trouveront-ils ?
À la fin de chemin, n'y a-t-il pas une fin ?
Bloody Mary s'en fiche et, elle bat des cils.
C'est que pour elle, le temps, c'est même plus un remontant.
Les souvenirs sont amers, du vin qui a tourné au vinaigre.
Les rappels douloureux, une brûlure au creux des reins.
Alors le soupir qui traverse les lèvres, il est aigre.

Elle avale sa salive, et dans la main de Blackbear, elle vient chercher un galet. Sans un mot, elle lance le caillou, ne se soucie pas de le faire ricocher. Au contraire, elle veut le lancer loin, et le voir disparaître. Alors quand il tombe dans l'eau, le son la satisfait quelque peu. Soupir. Les épaules s'affaissent, et c'est là qu'elle demande à Blackbear :

« Tu n'as jamais pensé à apprendre le langage des signes ? Tu sais ? Pour ton bégaiement, ça serait plus pratique. »

La question est un peu naïve, à la hauteur de son étrange ami. Intrusive et maladroite, mais elle est sans arrière-pensée (pour une fois). Est-ce que c'est suffisant ? Pour lui enlever cet air de chiot battu ? Comme si, Blackbear était encore convaincu qu'il avait fait quelque chose de mal. En a-t-il seulement, envie ? Ce grand gaillard un peu gauche ?

Que Bloody Mary reste ici,
A perdre son temps -
Mais ça, c'est à elle de le dire -
En sachant que pourtant,
En ces lieux, elle n'est pas la bienvenue.
Et que sa venue provoquera les « on dit ».

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15

résuméÀ sa question, il lui répond en langue des signes espagnol donc je doute que BM comprenne mdr. Mais il lui explique pourquoi en anglais parlé. Finalement, il estime que ça serait mieux pour eux deux qu'il lui parle par l'écrit.

Le scepticisme accapare son faciès. Ah, c’est qu’elle laisse les autres jouer mais Marie, elle, ne joue pas. Ou en tout cas, elle ne joue pas à ces jeux. Ils ne sont pas assez intéressants pour elle. Les minutes dédiées à cette infructueuse recherche ne l’aident pas à aller mieux. Mais plutôt que délaisser bêtement encore quelque chose, il jette une des pierres contre le lit d’eau, la laissant flotter quelques temps sur le drap avant de s’enfoncer. C’est un premier jet. C’est un test. Peut-être qu’il l’interpellera, ce pourquoi il la regarde après avoir effectué un lancer plutôt harmonieux sur le lac. Toujours assise, elle finit pourtant par se mouvoir pour, de nouveau, presque l’égaler en centimètres.

Marie est une gentille personne. Ce n’était pas son objectif et elle est maîtresse de son temps mais elle le dédie à un inconnu qui ne fait que trouver des jeux pour conjurer un mauvais sort dont quelqu’un pourrait la sortir plus facilement que lui. Elle s’y essaye, se munissant d’un projectile puis, soupire.
Marie reste toujours pudique. Elle ne se dévoile pas. Pourtant, Jacinto, il aimerait tant l’écouter. Son chant est envoûtant mais il est sûr que connaître sa vie la rendrait moins intimidante. Si elle n’est pas expansive, la curiosité est un joli défaut que son voisin lui attribue également.

Un joli défaut et non pas un vilain puisque d’accoutumée, la curiosité est bien plus piquante. La vilaine curiosité ne cherche pas à comprendre mais à analyser voire décortiquer pourquoi il n’est pas comme les autres. Or, la pirate semble avoir une tout autre vision : pourquoi les autres ne veulent pas le comprendre ?

En quelques signes, il lui prouve qu’il est capable de parler une autre langue. Mais pour beaucoup de gens, même en Espagne, elle est incompréhensible. Marie ne comprendra certainement pas à quel point il lui est reconnaissant de reconnaître ses difficultés plutôt que les lui reprocher. Alors, en une tentative plus risquée, il reprend son langage à elle, qu’il maîtrise moins bien.

(C’est) p-pas p-p-po-po… (ss)ible. Les gens m’éc-cout’rait (en)core moins.

La phrase s’étant relevée anormalement fastidieuse après avoir fait une démonstration plus brillante dans la langue des signes, il souffle puissamment d’exaspération. Ça ne doit pas être facile non plus pour elle de décortiquer ses mots.
Elle ne veut pas le décortiquer puisqu’elle lui propose plutôt des remèdes plutôt qu’une manière d’être comme les autres.

Alors Blackbear facilite les choses et de son lourd manteau, il extirpe un calepin corné qu’il emporte un peu partout, muni d’un stylo à bille accroché à la manière d’un marque-page. Après avoir passé plusieurs pages couvertes de mots raturés, il gribouille – non sans s’agacer sur l’encre qui tombe à sec - d’autres pattes de mouche avant d’arracher la feuille, laissant à Marie une autre manière de le contacter. Pour les deux, la communication sera sans aucun doute plus facile. De plus, peut-être osera-t-elle être moins pudique ?

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Les mains s'agitent devant Bloody Mary,
D'abord, la voilà à reculer d'un pas,
C'est qu'il n'aime pas être surpris,
Ou les gestes qui arrivent sans crier gare.
Ce n'est pas de sa faute, c'est juste qu'elle s'égare
Elle a appris depuis longtemps pourtant,
À ne plus réagir face aux sons, rien d'étonnant ;
Mais les mains s'agitent devant Bloody Mary,
Et elle ne comprend pas la forme, le fond si.

Même si elle ne sait pas ce qu'il lui dit, Bloody Mary hoche lentement la tête en signe d'écoute. Elle est simplement curieuse de savoir ce qu'il aurait pu dévoilé, dans les signes que ses mains ont dessinés. Elle range les siennes dans les poches de son pantalon, et le corps tourné de trois quarts, elle continue son examen. Blackbear reprend la parole, et les mots encore se butent contre ses lèvres. Si elle fronce les sourcils, c'est davantage parce qu'elle reformule les embryons de phrases. On peut la voir remuer les lèvres, reformer les mots comme pour si elle assemblait les pièces d'un puzzle.

« Ce n'est pas écouté qu'ils doivent faire, c'est te regarder. »

Le sourire est taquin, mais sans moquerie. À Blackbear de l'entendre comme il le souhaite ; Bloody Mary usait souvent de mots cryptiques que seule elle pouvait comprendre. Des bouts de mystères jetés ici et là, sans jamais en train dévoiler. Et à aucun moment, elle ne pense satisfaire sa curiosité.

Mais voilà que le grand garçon,
Se met à sortir un simple crayon,
Et un bout de papier à gribouiller,
Des lettres un peu abîmées.

Bloody Mary s'avance de nouveau, regarde par-dessus l'épaule de Blackbear et recule à nouveau. Elle attrape le papier, et ne sait pas trop quoi en faire. La chose à laquelle Terrence pense d'abord, c'est qu'il veut qu'iels s'écrivent des lettres. Froncement de sourcils, pour une fois, elle est prise aux dépourvus. Au bout d'un moment, elle prend malgré tout le stylo et le papier. Elle se rassoit, se serre de ses cuisses comme table d'appoint et galère à écrire.

L'on dirait que le stylo va percer,
D'un instant à un autre, à regretter,
Les bouts de phrasés.
La voilà à s'appliquer,

Mais même si son écriture est lisible, certains diraient même jolies, elle fait des fautes. La faute à l'école qu'elle a quittée trop tôt. Elle se pince la lèvre inférieure, mais elle finit par tendre le papier à Blackbear, et sur celui-ci, voilà ce qu'elle a marqué :

Bloody Mary, carcasse de voiture.
Au cas-où, Blackbear voudrait lui écrire.
Parce que c'est bien de cela dont il peut s'agir ?

Elle se relève en même temps, et cache à nouveau les mains dans ses poches. Ses yeux s'en retournent au lac, et sa poitrine se gonfle quand elle respire l'air un peu froid. Ça pique dans la cage thoracique.

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résuméEn vrai c'est pas grand chose, il s'attendait pas à ce que Mary lui écrive son adresse mais il est content alors il dit qu'il le fera. Voilà. En fait, c'est pourri comme réponse jpp. Si t'as besoin que je modifie, tu me dis !

Qu'importe le support, communiquer reste difficile. Les gestes ne miment pas assez bien le ton. La plume n'inscrit pas noir sur blanc la motivation. La voyant perturbée par ce bout de papier, il essaye de lui indiquer par voix et mains la marche à suivre. Marie s'empresse avant d'y apporter sa touche personnelle, d'une écriture aussi tendre que la sienne mais moins brouillonne. Ce n'est pas ce qu'il voulait dire. Les mots veulent rectifier l'erreur mais, une fois qu'elle lui transmet à nouveau le papier, remplie de fautes de grammaire et d'orthographe, Jacinto n'a plus l'intention de dire quelque chose. Il sourit innocemment à la lecture.

Oui.

Après tout, il n'y a pas besoin de corriger. Marie n'a peut-être pas compris ou il s'est, sans aucun doute, mal exprimé. Toutefois, même si ce n'était pas l'échange prévu et que le résultat n'est pas le même, lire ces mots, ça lui fait plaisir. Il n'aurait pas cru qu'elle indiquerait son adresse, signature que le revoir ne la dérange pas.
Les surprises peuvent faire du bien.

Elle était là pour Calico mais maintenant, elle est aussi là pour lui. Marie est bienveillante. Maîtresse de son temps, elle l'alloue généreusement aux autres. Tout n'est pas compréhensible mais peu importe ce qu'ils sont, Marie écoute les mots butés, regarde les gestes étrangers et lit les minuscules mots. Elle leur donne de l'importance, qu'importe leur nature. Blackbear serait assez intéressant à ses yeux, même quand il n'a que des pierres à apporter ?

J'veux e-e-ess-ess(a)yer de v(ous) parler. Plus.

Si le plissement de ses paupières s'explique par la difficulté à sortir sa pensée, c'est aussi parce qu'il a peur de voir les répercussions. Certes, Marie est gentille mais il n'est pas certain qu'elle détienne la vérité sur son compte. Tout le monde le considère comme nocif alors pourquoi pas elle ?

Il aimerait tant lui demander ce pourquoi elle reste, ce qu'elle trouve d'intéressant si ce n'est le soleil couchant sur le lac. Cela dit, Blackbear n'a jamais le courage de poser ces questions de vive voix et se réfugie dans l'aisance de l'écrit, qui n'est pour lui, dépourvu des non-dits.

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Pour une fois, Bloody Mary n'avait pas compris ce qu'on attendait de lui.
D'habitude, il était doué pour décrypter les intentions,
Celles qui lui demandent en vérité, tant d'attentions.
Peut-être que pour une fois, c'était un geste spontané,
Et que dans le silence, les signes avaient été brouillés.

Malgré tout, par habitude - ah elle revient souvent —, elle s'adaptait à Blackbear. Le ton était plus doux, plus posé, et elle se montrait plus patiente. Même maternelle, mais sans être intrusif. Elle sait, Bloody Mary, que celleux qui on du mal à communiquer ont plus de choses à dire. Il faut simplement tendre l'oreille, percevoir les murmures qui recouvrent les merveilles. Et enfin, quand le grand garçon vient lui avouer la vérité, iel se contente de sourire.

« Tu pourras m'écrire alors. »

Si simplement. Elle ne répondra pas forcément tout le temps, ou elle mettra de longues semaines. Pour Bloody Mary, le temps s'est dissous dans ces années enfermées ici. S'il n'y avait pas le changement des saisons, elle ne saurait plus affirmer où iels en étaient.

« Tu as besoin que j'écrive ? demanda-t-elle alors. Je veux dire, c'est plus simple pour toi si j'écris et que tu écris en retour ? Ou je peux continuer en retour ? »

Elle ne sait plus trop où donner de la tête, Bloody Mary. Ce n'est pas mal, ce foutu soleil qui décline dans le lac ; l'on dirait qu'il va se faire avaler, attirer par les profondeurs pour apparaître dans un nouveau monde. L'eau se ride sous le souffle du vent, et l'heure dorée se reflète sur sa surface. Un miroir tremblotant, étincelant, et les nuances de roi des cieux qui dégorgent sur le lac. Cela lui rappela l'Irlande.

Ce pays plein de contes et de légendes,
Où l'on croisait fées et sorcières pas si grandes,
Mais aussi des monstres et d'autres géants,
Alors que le whiskey est respiré par le vent.

De l'Irlande, Terrence se souvient des soirs où son père rentrait de l'usine, les bottes et le pantalon boueux. Sa mère épuisée, et les fois où il avait son petit frère sur les genoux, pendant qu'il lui apprenait à lire. Mais tout cela ne lui manque pas.

Trop de choses se sont passées pour qu'iel soit désolé·e;
Trop de choses l'ont brisés pour qu'iel en soit attristé·e,
Surtout dans le fracas et la colère de son départ précipité.
Son père, Terrence le sait, il aurait pu le tuer.

(aurait dû)

Bloody Mary inspira, puis elle contempla le soleil étendre ses doigts dorés sur la surface du lac, et elle plissa les yeux devant tant de flamboyance.

« Et dans ce cas, qu'as-tu à raconter ? »

Ajouta Bloody Mary. Oh, ce n'était une invitation à se confier que si Blackbear le désirait. Depuis longtemps, iel avait appris que les mots, les gens les déforment selon leur besoin.

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résuméLes paroles en italiques, c'est lui qui écrit. Après, il ne voit pas quoi lui raconter parce qu'il trouve que c'est pas intéressant et surtout, il a peur de décevoir s'il se dévoile. Par contre, il se demande comment Marie peut se montrer si pudique mais si courageuse donc... Il lui pose simplement la question.

Des kilomètres, il peut en écrire autant qu'on le désire. Décrire l'environnement dans lequel on se trouve, les personnes qu'on peut y retrouver. Il peut tout esquisser et travailler minutieusement chaque portrait, excepté celui qui n'a pas de silhouette mais qu'une ombre ; le sien.

C'est un malentendu de plus quand on pense qu'il peut avoir à raconter. Le concernant, ça n'intéresse personne et il ne veut pas l'ennuyer, cette personne. Ça se résumerait en une ligne alors que ses interrogations pour elle s'enchaînent en plusieurs vers, justement parce qu'il ne la connaît pas et qu'il se révèle être curieux. Il n'a rien pour raconter, il lui faut de quoi raconter. S'il a transmis son adresse en premier, c'est pour avoir matière et raconter à la suite. Initier les choses, Jacinto veut bien oser mais n'en a, réellement, pas l'audace.
Il n'est qu'un lamentable artiste, pas une muse. C'est derrière sa toile qu'il reste. Il ne s'exposera pas, autant par peur que par pudeur. La muse laisse exprimer ses envies alors que le peintre, le sculpteur (qu'importe) suit simplement les courbes qu'on lui a autorisées.

Vous pouvez m'écrire, seulement si vous le voulez.

Neutralité innocente, le grand bonhomme reste obéissant mais en réalité, surtout à l'écoute de ce qu'on pourrait appeler une interlocutrice dans cette drôle de conversation où des coups de crayon remplacent la parole.
À l'écoute aussi parce qu'il n'a rien à raconter hormis que le soleil couchant se reflète tendrement contre le miroir naturel.

C'est à toi de lui en dire plus. Ce n'est plus par méfiance qu'il s'interroge sur toi. C'est davantage une curiosité timorée qui l'empare. Alors que ta curiosité, Marie, elle est bien plus audacieuse. En dépit que tu cherches madame Blackwood, l'audace te fait camper ici.

La moue dubitative, ce n'est pas qu'il la croit aussi menaçante qu'auparavant mais c'est bizarre, qu'elle n'ait pas fui sous l'intimidation d'un canon. Un couard armé comme lui aurait-il à apprendre d'une si grande dame ?

N'avez-vous pas peur de moi ? D'habitude, ce sont les enfants qui ne me fuient pas. Et encore.

Un profond soupir s'extirpe du colosse. Son aura des premiers instants, intimidante, lui convient davantage que celle du reclus. Elle lui permet d'éviter le monde sans qu'il ne se pose de questions sur lui. Il ne veut pas qu'on le découvre. C'est une de ses nombreuses peurs. Parce qu'est-ce qu'on ferait, si on savait ce qu'il est ?

Les enfants touchent un bout de la vérité. Il apprécie échanger avec eux, plus à l'aise. Mais il n’est pas aussi à l’aise que toi, Marie.
Il n'a rien à t'apprendre mais il a plutôt tout à apprendre de toi.

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Ah. Pourquoi ces deux messieurs-là,
Voulaient tant en savoir sur elle ?
Tu vois, Blackbear, Mary n'est pas réelle.
L'image que tu vois, elle est sur-mesure,
Un peu moins dans la démesure,
Surtout dans la demi-mesure,
Afin de sied à l'image rassurante que tu cherchais.
Parce qu'au fond, Terrence est bien laid.
Et surtout, il est cruel.

Iel n'en dévoilera pas plus, c'est un combat de longue haleine pour réellement la connaître. Pour l'instant, l'échange n'est pas déplaisant, et iel peut bien rester là. Elle détendit ses épaules, avant de tourner la tête vers lui. Ses yeux vont du mot, au visage de Blackbear. Bloody Mary soupira.

« Je l'ai proposé, c'était bien parce que je le voulais. J'ai juste du mal avec le temps. »

Le temps qui se perd, s'affole, va trop vite ou trop lentement. Les bouts de sa vie qui sautent, derrière un battement de cil. Iel se rappelle de son voyage entrepris, du but derrière celui-ci. Et désormais, il n'était que chaos, imprévisible, des fragments éclatés dans tous les sens. Iel contemple Blackbear quand il écrit, de ma façon dont il tient son stylo à la manière dont son profil se découpe dans l'horizon. Elle soupira, puis elle regarda par-dessus son épaule.

Ah. C'est donc cela, songea-t-elle,
Et là voilà qui de plus belle,
Elle prend la feuille, semble ne pas comprendre.
La comédie est revenue, le diable est sur scène.
Et rends le papier, non sans un peu de peine.

Bloody Mary haussa un sourcil, il sembla détailler encore plus Blackbear. Puis, il haussa les épaules. Quand il parle, sa voix était plus grave, plus autoritaire :

« Voyons pourquoi j'aurais peur de toi, parce que tu es grand ? Elle penche la tête sur le côté. Je te dépasse en talons. Et les enfants ? Ils devraient avoir peur de moi, mais pourtant, ils ont l'air de m'adorer. Haussement d'épaules. Les monstres, sont ne sont ceux t'accusent d'en être un. Tu le sais, non ? Ce que ça fait. »

Blackbear ne voulait pas se dévoiler, pourtant c'était Bloody Mary qui continuait. Elle ne voulait rien dire, non pas par mépris, parce qu'iel ne faisait plus trop confiance. On ne sait jamais.

« Je crains plus ton arme que toi-même. »

Haussement d'épaule. Une arme, ce n'était pas dangereux ; ce qui l'était, c'était ce que les hommes décidaient d'en faire. Et Bloody Mary le savait, on pouvait faire de tout une arme. Iel observa ses mains, soudain silencieux, soudain un peu fatigué.

« Tu peux m'écrire, si tu veux, répéta-t-elle. Je ne sais pas si je répondrai toujours. Mais tu peux. »

Une assurance, cela n'était pas une promesse - Bloody Mary ne promettait jamais rien. Les gens le prétendaient, mais il n'y avait jamais de promesses soufflées au bord de ses lèvres minces. C'était sa porte de sortie, une façon de le leur faire à l'envers.

Et l'envers du décor,

Ah, il était bien laid.

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18

résuméBon il sait que ça sert pas à grand chose mais montre que son fusil est pas chargé. De toute façon, il l'éloigne complètement de la discussion parce qu'il est rassuré quand Marie lui dit que non, elle a pas peur. Ça l'encourage à un peu se dévoiler, si seulement ça intéresse Marie mdr

Le fusil posé délibérément à terre dans un souci d’armistice, d’une douce voix devenue plus haute, les mots sont bien entendus. La peur des armes ou plutôt de ceux qui les portent est compréhensible.

Blackbear voudrait bien dire qu’il n’est pas comme eux et qu’il ne ferait certainement pas de mal. Les cartouches ont beau êtres vides pour éviter tout incident mais il y a bel et bien une chasse à l’homme. Il la porte parce qu’il a justement peur des hommes. Alors à la peur, il réplique par la peur. Alors, non, il n’est en rien différent. Alors pourquoi ne serait-il pas lui aussi un monstre ? Et pire que les autres pour être rejeté lui-même par les monstres ?

Juste pour rassurer, il démonte le chargeur pour prouver qu’avec, on tirerait simplement à blanc. Il sait bien que ce n’est pas suffisant pour se défaire de la méfiance mais ça peut déjà être ça.
À toi, Marie, il ne présentera (plus) d’armes. Que le canon soit dirigé vers toi ou en ta faveur. Il ne te donnera pas le fusil. Les armes n’ont pas lieu d’être entre vous. Il doit apprendre à dompter sa peur du noir. Noire et mystérieuse, tu es. Mais un fusil, ce n’est pas une lampe torche.
C’est avec les mots qu’on peut mieux se connaître.
Aujourd’hui, Blackbear ne chasse pas.
Il ne veut pas te méconnaître.

Connaître quelqu’un, c’est par autant de franchise, même si elle n’est pas facile à entendre. Il comprend qu’on ne peut autant lui écrire.
Même si la parole est égoïste, elle est véritable. Parce que c’est évident, on n’a pas le temps pour l’inconnu. Blackbear ne se dévoile pas alors pourquoi devrait-elle y prêter du temps ?
Mais Blackbear ne fait pas peur.
Alors, Blackbear, ne prends pas peur.

J’ai ça parce que je chasse pour les animaux du zoo. Je pourrais, un jour, vous les montrer si vous voulez. Quand vous aurez le temps.

À toute allure, les mots se déroulent sur le papier, qu’il échange à nouveau comme une discussion commune. Pour lui, il est plus facile de communiquer ainsi parce qu’on lui en donne l’opportunité. Ne pas faire peur, cela veut-il dire qu’il a également l’opportunité d’en dire un peu plus ?

À défaut de ne pas avoir assez d’audace et d’estime pour sa personne, c’est ainsi qu’il étend sa personne aux animaux. S’il n’est pas un monstre alors il est un animal.

Méfiance rassurante « I need something to sedate me
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Bloody Mary se pencha un peu, se rapproche délicatement. Son épaule frôle celle de Blackbear, et ses yeux se posent sur le bout de papier. Froncement des sourcils, ses lèvres remuent lorsqu'elle lit ce qu'il lui a écrit. Chasser pour les animaux du zoo ? Ah. Peut-être reste-t-il des prédateurs, elle n'en sait trop rien. Ce n'est pas le plus important ici, c'est l'ouverture.

Pour elle, c'est un cadeau avec une drôle d'allure.
Et malgré toute son imposante carrure,
C'est lui qui semble craindre de la décevoir.
Mais de quoi ? Ils ne se connaissent pas encore,
Et pendant que le soleil laisse sa nuit choir,
Bloody Mary essaye de lui donner un peu tort.

Un sourire qui revient appuie les angles de son visage, et elle hoche la tête. Pas besoin de mots, n'est-ce pas ? Elle ne le dit pas, ce « d'accord », qui reste pendu à sa bouche. Il est pourtant là, entre elleux, vaporeux. Bloody Mary se redressa un peu, et elle promena ses yeux sur le lac. L'on dirait qu'il engloutit l'aube dorée dans ses profondeurs ; c'est que le soleil semble disparaître dans son horizon. Elle aurait plein de contes et de légendes à raconter. Mais pas maintenant. Un autre jour, avec les enfants. Iels aiment ses jolies histoires.

« Avec les enfants, lâcha-t-elle, je suis sûre que ça leur ferait plaisir, non ? »

Bloody Mary pensa un instant à Little Fang, et son visage à la candeur entaché. Elle se rappela des autres gamins, Light, Fortnite, Ness et (cette peste de) Pissenlit. Il ne faut pas faire trop confiance aux adultes, c'est ce qu'elle tente de leur apprendre un peu. Ils sont les premiers à poignarder quand on a le dos tourné.

« Tu as appris à jouer de la musique comment ? Et chanter ? »

Ce sujet-là a de la matière, c'est ce qu'elle se dit bien ; il est plein de légèreté. Surtout, il est le premier lien qui se forme entre elleux. Bloody Mary aurait des choses à dire, sur son amour de la musique et de la chanson — souvent, en contradiction avec la boisson.

Mais est-ce que cela, seulement, elle en parlera ?
Cette époque est trop lointaine, et depuis un moment,
Le rideau s'est fermé définitivement sur le cabaret.
Bloody Mary a fait son deuil ; plus jamais, elle ne m
ontrerait sur scène. Chantalle était une performance de genre, un trompe-l'œil sur sa véritable nature. Quand on a le visage baigné de lumières, des bijoux sur la peau, et la joie dans les viscères, c'est si simple de continuer à faire semblant. Parce que tu vois, Blackbear, en ce monde tout est une question de performance. Le genre en est une comme une autre. Faire peur fait aussi partie de ce jeu-là.

Être dévoré ou dévorer,
Être tué·e ou tuer.

Il faut toujours frapper le premier.
Faire semblant de ne pas être terrorisé.

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Spoiler:

19

résuméMarie lui parle d'amener les enfants au zoo mais tous n'ont pas cette chance avec, selon Blackbear, le désastre des chevaliers. Pointe d'amertume. Il aimerait qu'on s'occupe mieux d'eux mais lui n'en est pas capable. Il repense à son père, à sa mention, pensant qu'il aimerait être comme lui.

Plusieurs enfants se sont déjà rendus à la nouvelle ménagerie. Que ce soit pour nourrir l'espoir ou nourrir d'autres êtres. Mais bien entendu, on ne songe qu'aux enfants greens.

Ceux sont les seuls concernés.
Ça ne devrait pas être le cas.

Une énième pointe de jalousie grandit en la bête et cela peut se lire sur son visage un brin agacé. Mais c'est vers le lac qu'il projette cet égarement. Marie n'est plus génératrice d’autant de de jalousie. Elle n'est en rien responsable du manque d'ordre des chevaliers et de l'environnement désastreux qu'ils procurent aux plus jeunes.
Qu'on puisse leur procurer de la joie à l'instant, oui, mais il ne pense pas que les chevaliers puissent apporter du bien aux enfants.

Sur cette pensée amère, il continue encore un peu à grincer des dents. Plus si visiblement déjà puisque Blackbear est du genre à prétendre qu'il n'y a aucun souci. Alors il acquiesce, simplement, en dépit de tous les obstacles qui puissent exister entre le vœu et la réalité.

Puis qui offrirait à un enfant la vision des balles perçantes ? C'est aussi ça, le zoo. C'est aussi ça, Blackbear. Lui non plus n'est pas irréprochable alors c'est pour ça qu'il est plus jaloux qu'exaspéré.
Du moins c'est ce qu'en pense les gens et ce qui l'amène à penser ainsi.

Mon père m'a appris. Il m'a aussi appris à chasser. C'est quelqu'un que j'aime beaucoup.

Musicien et chasseur, son père était pourtant irréprochable. Il suit simplement le bon exemple. Tout le monde appréciait son père ainsi alors pourquoi lui, on n'ose même pas lui accorder un soupçon de sympathie ?

Marie est là aujourd'hui. Marie s'intéresse.
Il n'aurait pas osé, d'habitude, coucher ces mots ; avouer qu'il a simplement copier un modèle. Qu'on a juste pris les partitions et qu'on les a joués et il n'y a pas d'autres secrets palpitants là-dedans.

Jacinto, c'est un peu ça. Intimidant voire effrayant au premier abord mais sinon dénué d'un quelconque quelque chose alors on lui assigne n'importe quoi, même si c'est mauvais.

Et actuellement, il a détruit les seules choses positives que Marie lui rattachait. Va-t-elle voir autrement, maintenant que le prodige est parti ?

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C'est peut-être tes silences,
Qui font de toi un garçon parfait,
Du moins, c'est ce qu'il pense,
Terrence, le monstre dans la peau de Mary.
D'habitude, la créature est volubile, ainsi
Elle peut occuper la place, on le sait ;
Elle n'existe que pour les rêves.

Illusion.
Hallucination.

Pourtant, avec toi, elle accepte les silences. Ils vont et viennent, une vague lente sur le rivage de vos émotions. Si elle tend le cou pour lire ce que tu écris, elle a le bon sens de laisser ton stylo marquer un point. Elle n'oubliera pas, pourtant, que plus tôt, tu l'as menacé. Ce n'est pas suffisant pour qu'elle se détende. Tu vois, tu as beau être grand, et tes mots bégayants — comme tu bafouilles tes propres sentiments —, elle se méfiera toujours de toi.

C'est comme ça.
On ne sait jamais.

Et tu vois, parler de la chasse, ça lui rappelle tous ces crétins qui se prennent pour des héros. On leur donne un pistolet, et voilà qu'ils se croient tout permis. Elle se demande, Marie, si tu as déjà senti le canon d'une arme sur ta tempe.

Lui oui.

Et ses mains, graciles, d'une légèreté aussi douce qu'un rêve n'ont jamais tenu une arme. Du moins. Pas de celle qui crache le feu des dieux. Tu ne le sauras jamais, Blackbear, combien sa peau blanche est imbibée de sang.

« Je n'aime pas la chasse, souffla Bloody Mary en faisant la moue. Moi, ce n'est pas mon père qui m'a appris. »

Son père le traitait de fragile et de pédale. Son grand frère l'imitait. Pourtant, celui qui s'était jeté sur leur géniteur pour sauver - tu sais, l'enfant dans la matrice - leur mère, c'était bien Terrence. Quand il s'était tenu au-dessus de l'épave, son père et lui, ils avaient compris.

L'un des deux aurait dû mourir ce soir.
Et celui qui n'avait pas hésité longtemps,
C'était le monstre au coeur noir,
Sans son frère, plus de père.
Bloody Mary soupire, et s'enfonce dans les souvenirs. Fredda lui manque.

« C'est une amie, une mère qu'il aurait aimé avoir en amante. Elle était très difficile, mais elle m'a appris à chanter, et à danser. Et toute sorte de choses que les mamans font avec leurs enfants, s'occuper de soi, apprendre à s'habiller et se maquiller. Elle jouait du piano, et je devais arriver à la suivre. »

Sourire de Bloody Mary, sans promesse, si ce n'est cette imitation de poupée délicate. Iel lève la tête vers le ciel, puis attrape un briquet dans sa poche. Iel tend son paquet de cigarettes à Blackbear. Il n'en reste que deux. On croit souvent que Mary tuerait pour de l'alcool.

Mais ce ne sera rien comparé à la nicotine,
Allez, ce n'est qu'une cigarette,
De celles qui t'assassinent,
Te font craquer les poumons,
Jusqu'à ce que tu emplisses ta tête,
De toute sorte de chansons.

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20

résuméAu fil de la conversation, Blackbear commence à comprendre que Marie ne lui montre qu'une façade qu'elle n'est pas réellement et lui confie sa pensée sans jugement. Il reste conciliant. Il accepte la cigarette et évite de la déranger davantage, pensant avoir déjà fait bien du mal.

La chance ne sourit pas à tous. Et il ne se range pas de ce côté. Toute sa prétendue malchance, il ne la doit qu'à lui-même pour n'avoir accompli aucun effort.

La communauté green essaye de rattraper un monde aux règles désormais révolues. C'est une sorte de deuxième chance pour le cancre d'aussi se rattraper désormais et maintenant, apporter une pierre à l'édifice.

La deuxième chance ne surgit pas toujours. Marie est-elle chez les pirates pour cette raison ? Loin de découper le monde sous un prisme manichéen, les âmes égarées dans ce petit groupe ne sont pas souvent des personnes prêtant leur main mais qui devrait davantage la tendre.

Je ne pense pas que vous êtes celle que vous prétendez être. Celle qui est devant moi.

Il est certain que Marie n'est pas du genre à appeler à l'aide. Au canon on réagit normalement par la détresse. Implorer ou exploser, mais rien n'est contenu. Et cette dame au grand calme contient au moins une autre personne. Plusieurs même, si elle doit se modeler à tous.

Mais ce n'est pas grave. Je comprends que vous soyez aussi alerte. C’est nécessaire.

Sans être usée, il comprend sa stratégie. Le besoin de se faire discret à en devenir anonyme. L'impression d'être traqué par tous. Pas étonnant que la chasse ne soit pas tant appréciée.

Marie n'aime pas la chasse.
Mais, Marie, elle chassait plusieurs rêves que la Tempête a interrompu, comme pour beaucoup d’autres personnes ici.

Alors Marie, peut-on dire que tu vis encore si devant une arme à feu, tu as l'anomalie de rester si banale ? En tout cas, dans ce concentré de poison que tu lui tends, c'est l'extinction qu'on retrouve. Blackbear l'accepte simplement. Ça fait des années qu'il fume dans le but de lentement s'intoxiquer.

Blackbear survit parce qu'il ne sait pas s'il aime la vie, pleine de potentiels (dangers).
Alors il ne peut que comprendre comment Marie (ré)agit. Il accepte, tout comme la cigarette qu'elle lui tend, en un doux sourire.

Il ne lui dira plus rien.
La vie n'est pas facile pour Marie et inutile de la lui compliquer.

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Ah. Qu'il est naïf de croire en sa bonté,
Prétendre qu'elle est plus que cela,
Un monstre d'apparat, qui a pour qualité,
Sa seule beauté, rêve dispersé, ici et là.

Il ne le sait pas encore, ce grand garçon aussi haut que large, que Marie s'habille de tous les masques. Elle peut se faire succube et nonne à la fois. Pourtant, il y a peut-être un peu plus d'elle qu'elle le croit. L'échange est doux, et Terrence se plait à rêvasser. Le crépuscule de feu se reflète dans ses boucles. Et le lac ressemble à de la lave. Si ce n'est le vent, qui ride de temps à autre la surface. Et c'est face à Blackbear qu'elle se tourne, lit les quelques lignes. Il a plus d'adresse dans l'écriture des mots (maux) que dans ceux qui volent.

Ses yeux qui suivent les expressions de Blackbear, et comment il se concentre pour penser. Ils dévalent ses épaules, s'arrêtent à ses mains. Il pourrait lui briser le cou si facilement. Sa gorge se contracte. Terrence n'oubliera pas ; la carabine pointée sur sa jolie tête. Mais voilà, dans sa vie tumultueuse, à dormir dans une voiture qu'iel partage avec des inconnus, il a appris. Ne jamais montrer sa peur, et ne jamais y répondre.

« On ne se connait pas, lâcha Marie avec douceur et sa rousseur, dissimule dans les boucles quelques oeillades de poupée. Mais on peut apprendre. L'un de l'autre. »

Proposition, lancé avec une douce passion. Et voilà que lea jouvenceaurelle se relève. Sa silhouette se déplie, s'étire. Et même pour elle, Blackbear est grand. Rare. Suffisamment pour qu'elle puisse l'apprécier un peu plus que les autres de son espèce.
Parce que les hommes, elle les aime uniquement en laisse.
Mais toi, oh pour toi, elle ne se montrerait pas aussi ogresse,
Besoin de douceur, et de se rassurer sur sa propre existence ?
N'est-ce pas ce que tout ce silence, il crit à Terrence ?
Parce que vois-tu, grand ours trop immense,
S'il y a bien un monstre capable de te comprendre,
C'est celui que tu as menacé de ta carabine,
C'est celle qui veut réduire, ce putain de monde en cendres,
La différence, c'est que son altruisme, elle l'assassine.
Mais il persiste, parfois, dans de discrets élans de bonté.
Et à toi, elle veut bien, un peu s'éprouver :

Parce que voilà, les mains dans le dos, la mésange rousse fait mine d'être sage. Le sourire appuie la maigreur de son visage. Tend la peau de son cou, et fait rouler ses clavicules. Oui, facile à briser si tu posais les mains dessus.

« Tu m'écriras, hein ? »

Ne gaspille pas ce qu'elle te donne par crainte de ce qu'elle te pourrait te prendre. Une telle amitié, elle ne l'offre rarement en gratuité. Mais avec toi, Blackbear, Marie la Sanglante tel'a proposé. Sans arrière-pensée, juste en souvenir de ce soleil plein de fragilité. De ce crépuscule tendu de poésie.

Ou depuis longtemps, Bloody Mary,
Se complait à penser que pour une fois,
Iel n'a pas d'ennemi.
N'est-ce pas ?

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Spoiler:

» overdrive. ((ft. Bloody Mary.))
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