Fougères et plateau télé # Gamble

Car en dehors du boulot, en dehors des habituelles tergiversations concernant tour à tour le nombre de clous qu'il fallait pour restaurer une clôture, Beetle se rendait parfois dans cet endroit plutôt incongrus à l'intérieur de la ville.

C'était l'endroit parfait lorsqu'il étouffait, celui où il descendait presque paisiblement les nombreuses marches de l'échelle, fermait l'écoutille pour, une fois le pied atterrit sur la terre ferme, ouvrait la bouche pour gueuler un bon coup.

Il avait trouvé le bunker d'une hasard d'une promenade et les différents indices (conserves, packs d'eau ou filtre pour l'oxygène) dévoilait un ancien propriétaire sans doute un peu paranoïaque. Beetle s'était déjà demandé si ce dernier était vivant, avant de décider qu'il s'en foutait un peu : dans cette société où tous se marchaient sur les pieds, il était bon d'avoir un coin à soit, même si l'adresse était connue par de rares connaissances.

Alors, le bunker, il en avait fait un peu ce qu'il voulait. Il y avait un canapé qui était déjà là à l'origine et dont les ressorts étaient pourris (il rêvait de le sortir, mais étant donné la taille du trou et celle du canapé, il se demandait même comment on avait fait entrer l'objet en premier lieu). Y installer des fenêtres aurait été le comble du bonheur, mais il avait conscience que ce rêve était un peu absurde.

Débile même.

Ce n'était pas grand, assez petit pour faire 6 grands pas de large et 4 de long, mais quelque part, il aimait se sentir chez lui, s'allonger sur le canapé (s'affaler aurait été plus exact) et fa ire semblant de tenir la télécommande de la télévision de sa main droite. Dans ces moments, Beetle zappait, jusqu'à trouver un truc absolument passionnant, alors il regardait dans le vide pendant quelques heures, laissant son cerveau décompresser.

Le bunker était meublé et par meublé, comptez deux étagères, une remplie à ras bord de provisions (à moitié vide désormais) et un placard fermé dans lequel Beetle lui-même ramenait des denrées qu'il pourrait négocier dans le futur. Depuis quelques semaines, James avait commencé à rapporter des pots de toute sorte, des plantes vivaces, rampantes ou écarlates. Plutôt du genre à survivre sans lumière, évidemment, des fougères et des ficus qui poussaient vite en temps normal mais qui, ici, semblaient avoir adoré l'humidité ambiante et avaient doublé de volume en deux semaines.

Réfléchissant à l'heure qu'il devait être à présent, il bougea (non sans avoir arrosé les plantes) et remonta à la surface.

Il faisait beau, on reconnaissait bien ici le quartier des habitations, mais l'endroit dans lequel il se trouvait avait l'air désert à cette heure très précise de la journée. Qui aurait pu dire qu'un bunker se cachait dans le derrière d'une propriété ayant l'air totalement lambda ? Pas lui, en tout cas, s'il n'avait pas littéralement trébuché dessus le jour où il avait trouvé.

« J'ai...vraiment la dalle. »