inspire jusqu'aux yeux rouges pour voir la vie en rose ✚ (acid)

au cimetière des voyages, à l'abri des carcasses métalliques, hante paisible le fantôme d'enfant sage. les cils lourds d'indolences sont perlés de fatigue - et peut-être un peu de pluie - car il faisait gris aujourd'hui. pas un temps pour filer au vent alors la bécane attend sagement dehors, et au cœur des fragments de train on se languit
du retour des rayons.

ces wagons là n'iront nulle part - ils ont déchaussés leurs rails depuis longtemps.

il y en avait un presque au creux de la végétation dans lequel Caprice se rendait parfois adolescent, en compagnie des premiers insouciants rencontrés.

désormais Mésange y revient souvent, et l'idée d'un semblant de chez soi à même le symbole des départs ailleurs lui plaît.
à même le sol les affaires éparpillés,
de valises jamais faites
et comme un oisillon rassemblerait
maladroitement les brindilles
on éparpille les matelas, plaids tissés et oreillers
que la lumière faufilée par l'unique ouverture
éclabousse tendre.

on n'entendait rien que l'ondée crépiter sur les toits d'acier, et c'était le signe que la spirale infernale attendrait. qu'elle l'attendait quelque part -
on ne pensait pas qu'elle viendrait d'elle-même
troubler le calme.

froisse la surface du visage qui émerge des drapés en discernant les pas battre le gravier - là dehors, le vent se lève. et Mésange s'extirpe du nid, débraillé et du désordre jusqu'au rose des cheveux - se redresse pour s'asseoir en tailleur au perron du wagon, ainsi
on est les yeux dans les yeux
avec son poison préféré.soupiré revêche, et le dos revient s'affaler dans les couvertures, tandis qu'il laisse une jambe dépasser du wagon et pendre désinvolte dans le vide. inspire, comme si l'éveil se trouvait dans l'air pluvieux.au travers des intonations brumeuses, la voix se fait un peu effrontée. toujours on se montre à la hauteur de ton nom, Acid, même si au fil des mois passés on a presque oublié ce qui motive la vive insolence quand tu l'approches. sûrement qu'il y avait de l'animosité à l'origine - l'accueil chez les Pirates électrique en partie à cause de toi. mais suite aux étincelles le feu a pris et elles sont surtout espiègles, ces braises-là.

sauf que regarde le ciel, Acid.lentement la tête s'incline, et Mésange rouvre les yeux pour de bon pour les lever vers la grisaille, visible depuis l'encadrement du wagon. avant de laisser les regards s'incliner jusqu'à toi.ah - encore une once de raison dans ses synapses trop facilement exaltée - il faut croire
que tu n'as pas balayé tout le bon sens,
Acid, il en reste des parcelles

alors Mésange est docile
(pour le moment).

Acid je sais que tu penses qu'on respirait mieux là-haut, l'air des plateaux (d'argent), soi-disant pur au sommet - tu te trompes. je serais mesquin, je te dirais : si tu avais été plus assidu en cours, tu saurais ! que plus tu montes et moins les poumons se gorgent, et bien vite, l'oxygène vient à manquer. les synapses somnolent et le cerveau frôle la nécrose, un peu plus et les cœurs s'arrêtent.

je sais. que c'est pour cette raison que tu ne voulais pas de moi à ta hauteur au début. mais tu constates avec le temps que sous les os ça bat, ça respire, peut-être un peu plus fort que tu voulais le croire. est-ce que ça t'agace toujours ? pourtant, aujourd'hui, tu m'as encore rejoint. parce que c'est étanche et chaleureux. t'es vraiment un parasite. ce sont les virus qui ont un faible pour la chaleur humaine, pas vrai ? je serais mesquin, j'aurais lancé ça avec dédain, les airs graves. mais je souris, tu vois bien.

malgré l'absence de manières et la façon dont tu imbibes déjà les lieux. je t'observe faire comme chez toi sans broncher, même si dans un coin de l'esprit, de lointaines réminiscences me soufflent que ça ne se fait pas. que je devrais me faire farouche et ramasser derrière toi le pull qui traîne, et puis te dire de fumer dehors. mais j'aime trop désobéir à ces petites voix pour faire quoi que ce soit - elles se contentent d'un soupir. et vulgaire avec ça. sans te quitter du regard, allongé au creux des draps.

lueurs complices, dans tes yeux, dans les miens - une étincelle - lorsque la pierre crisse et que tu allumes ce que tu tiens au bord des lèvres. garde tes fringues, tu vas chopper la mort sinon. je ne rentrerai pas dans ton jeu, Acid, ce serait trop facile ; préfère rester immobile, pour vérifier si tu es si déterminé que ça. écoute, tends l'oreille - il continue de pleuvoir, ça ne te donne pas envie d'être paisible ? - ce n'est pas un temps pour les départs de feu. l'atmosphère lourde d'eau, c'est une météo à se prélasser je trouve. et le dos fait comme un roulis tendre alors que je m'installe plus confortablement sous l'éclaircie de tes œillades. une main passe sur mon ventre, couvert encore, du bout des doigts, découvre en relevant lentement le coton blanc du t-shirt. tu veux que je te prête les miennes ? après tout, on n'est pas sorti aujourd'hui,
sec, on n'a pas trempé dans le vice.