Je leur avais dit que j'arrêterais. Je crois même que je leur avais promis, quelque chose comme ça. Ils étaient content, ça leur donnait l’impression que c’était déjà fait, les promesses. Mais au final, la seul raison pour laquelle je n’en fume plus qu’une de temps en temps, c’est parce que mon stock n’est pas infini, et que je ne sais même pas si je vais pouvoir quitter Arcadia Bay.
Pour le moment,ironiquement, ce n’est pas une question que je me pose. Et le café… Trop cher… Qu’est ce que je donnerais pour fumer devant mon café le matin…A la place, j’essaye de me lever le plus tôt possible, avant les autres. Ca aussi, c’est ironique. Même quand on décide de sortir des clous, on se rend compte que tout le monde mène une routine, et que c’est pas forcément pour se maintenir en bonne santé, physiquement ou mentalement. A la différence de ma routine d’avant, celle là, je la fait pour moi. Je n’ai pas écouté les avis pour savoir le meilleur vendeur de donut’s sur mon trajet, ni les types
d'étirements à la mode, à faire le matin pour être en forme, pour “bien commencer le travail”.
Il faut que je fasse des efforts pour discuter un peu plus avec les gens du quartier. Ils savent tous que je ne suis pas d’ici, et le climat de paranoïa ne vas pas aider mon refus de m’intégrer rapidement. Je vais essayer de les aider du mieux que je peu avant de reprendre mes questions. Il vas falloir la jouer fine, et j’ai toujours été plus à l’aise avec la techniques et les chiffres qu’avec les gens. Les chiffres n’ont besoin de rien, et ils ne mentent pas. Allez, au diable, la raison, ce matin je m’en grille une.
Combien de temps on peut tenir décemment avec seulement quatre chemises? Je devrais me chercher d’autres fringues, mais ça aussi, c’est un combat. Comment ils font, les gens normaux, ceux qui ont grandir pour eux et pas pour les autres, pour choisir leurs vêtements? Ou alors je prend une chemise, mais rouge, ou avec des formes bizarres. Non, ça aussi, c’est débile, on dirait quelqu’un qui a peur de l’eau et qui met juste un pied dans la rivière histoire de se convaincre qu’il pourrait nager s’il le voulait. Je crois que ce sera plus simple d’aller discuter avec les autres que de trouver quelque chose à porter qui me plaise. Tu parles d’un héros, quelqu’un qui a plus peur d’un style vestimentaire que de ce qui se passe dehors. Enfin, dehors, c’est bientôt dedans, si je ne bloque pas la poutre et l’arbalétrier en bois au dessus de mon lit…
Je vais leur parler et ils vont me regarder avec leurs yeux pleins d’incompréhension, se demander vraiment que je suis. J’ai vraiment le bon timing, moi, a paraître bizarre dans ce genre de contexte. c’est surprenant que personne ne m’ai cherché des noises d’ailleur. Ca c’est parce que je fait profil bas. Mais si je fais profil bas, je n’avance pas! Ah! Déjà éveillé depuis 10 minutes et j’ai un mal de crâne à compiler mes questions. C’est ça, se sentir vivant? C’est ça, le chaos dans lequel il a grandit? Pas étonnant qu’il n’ait pas toujours été un modèle. Et raison de plus pour que je m’y mettent, parce que si je veux le retrouver, il vas me falloir plus qu’une clope.
Il a toujours été “bien” et “sans histoire”. Walter, l'aîné, était déjà à l’école parfois décrit comme “trop scolaire”. Il a grandi dans les traces laissées par son père pour devenir ingénieur dans la domotique. C’était un domaine prometteur, en adéquations avec ses compétences, c’était le “futur”, lui avaient dit ses proches, sa famille, ses professeurs. Il n’a pas choisit son travail, au final, tout comme il n’as pas vraiment choisi sa fiancé.
Elle était jolie, elle avait des points communs, il y a un age ou il faut du serieu, préparer des projets, commencer à être adulte. Ce n’est pas qu’il n’éprouvait rien pour elle, mais c’est surtout qu’il n'avait jamais réfléchi à avoir le choix. Il avait toujours agi par mimétisme, pour suivre les règles, ne pas faire d’histoire, là où son frère n’avait jamais cessé de faire maladivement le contraire de ce qu’on attendait de lui. C’est ce qu’il s'était dit à chaque fois que son père avait haussé la voix, quand Thomas le défiait tandis que Walter les regardait sans rien dire de l’autre côté de la table. “Tu devrais suivre son exemple!”
Mais se réfugier dans son travail, éviter les polémiques, laisser aux gens qui ont de l’autorité la charge de penser pour soi, ça ne l’as pas empêcher de se retrouver devant la tombe de son père, avec les quelques membres de la familles, avec cette impression horrible que l'intérieur de son crâne était en train de déchirer dans tous les sens, comme du papier aluminium. “Il a toujours été fier de toi”, avait dit son oncle., qu’il ne connaissait quasiment pas du reste. Sa mère était déjà partieelle aussi, il y a quelques années. Il était donc seul, devant le cercueil qu’on recouvrait de terre, par un soleil de plomb. Le modèle était détruit, la marche à suivre s’en allait, et il fallait penser et agir par soi même, maintenant.
Comment avait il pu vivre, sans jamais un seul instant imaginer qu’un jour, son propre lui, la petite voix dans sa tête, ne parviendrais pas à forcer le blocus pour lui dire: “Et maintenant? Tu vas continuer de vivre comme ça pour faire plaisir a qui?”
Sa tante avait commencer à dire du mal de Thomas. De toute façon, ça faisait bien cinq ans qu’on avait plus de nouvelles, mais il aurait pu faire un effort pour venir. Au final, c’était pourtant la personne qu’il ai connu de plus proche qui méritait qu’il s’en inquiète, il aujourd’hui, le constat était là. Lui, le fils prodige, jamais un débordement, froid, tiède, sans saveur, on lui expliquait que lorsqu'on faisait le bilan, il était “mieux” que son frère, alors qu’il ne l'avait jamais ni soutenu, ni cherché quand il avait quitté Chicago du jour au landemain… Qu’il ne connaissait plus, pour dire vrai. Et pourtant, contrairement, à ces collèges, sa fiancée, cette tante, cet oncle, son monde tout entier, c’était son frère qui le connaissait le mieux…
“On est les mêmes chiens, mais toi, t’es bien éduqué, tu manges dans la bonne gamelle. Mais en vrai, on est les mêmes chiens, c’est juste que tu préfères ton collier parce que tu flippes de ce que tu pourrais faire si tu l’avais pas.” C’est ce qu’il avait dit avant de partir.
En rentrant, le discution avec sa compagne lui est parut vide, des plus creuses, sans aucune saveur, un blanc impécable et sans tache. Et il ne pouvait pas l’en blâmer. Son travail devint un lieu de vie qui subit le même constat… Des relations superficiels, et pour combien de temps encore? Pourquoi?
Au milieu du chaos des questions qui se déversait par centaines dans son esprit, il entrepris de chercher son frère. Une tâche compliquée, mais il parvint à trouver une adresse pour la vaccination d’un chien, un husky du nom de Bulle, avec le nom de famille volontairement mal orthographié, et un des surnoms que Thomas se donnait à l’époque où il enchaînait les 400 coups et que la police le ramenait chez leurs parents. Alors que ses proches commençaient à lui communiquer leur agacement, quand à toutes ces questions qu’il se mettait à poser, sur sa soudaine volonté de demander pourquoi on voulait vraiment les choses que l’on demandait, pourquoi on sacrifiait souvent nos rêves d’enfants, le besoin de chaos se faisait de plus en plus fort, et dévorait tout comme un torrent d’une violence sans pareille. Avait il vraiment choisi sa maison? Aimait il vraiment ce jus de citron avec un peu d’eau? Pourquoi ces couleurs si calmes, pour les draps du lit? C’était vraiment ses goûts? Pour la voiture, pour, ses vêtements, pour tout ce qu’il touchait au quotidien, ou ne touchait pas…
Walter prépara alors sa valise de voyage professionnel.
Il déposa un matin humide de la fin d’Octobre une lettre de démission dans la boite postale de son quartier. Et une lettre pour sa compagne, et sa famille. Le plus dur ne fût pas de l’écrire, mais de la poster. Mais le sentiment de liberté une fois le geste effectué en valait la peine. Il était pour la première fois de sa vie en train d’essayer d’être vraiment lui même.
Il n’y avait rien derrière lui qu’il ne sentait le besoin de prendre avec lui en dehors du minimum. Ils diront qu’il a craqué, mais c’est ce qu’ils diront pour se conforter dans leurs existences tièdes, leurs vies sans saveur, où le temps est un ennemis à combler. Une seule adresse pour commencer les recherches. Arcadia Bay. Pour lui, la tempête avait commencé à l’intérieur de lui avant même qu’il ne démare.
Ce que tu veux le plus au monde, consciemment ou non, c'est quoi ? Walter cherche son frère cadet Thomas. Il ne l’as pas revus depuis plus de cinq ans, et ne dispose que de vieilles photos pour le retrouver. Il ne connais pas le pseudonyme qu’il aurait pu prendre, et démarre dans le vide, une enquête personnel qui est plus importante pour lui que de sortir d’ici.