D'une prison à l'autre... Fiche du gentil Scarf

Bon, il serait sage de commencer par lister ses qualités, cela nous assurera de lire en guise de premier paragraphe un texte court. Il est au moins honnête, et c'est indéniablement une vertu, mais il n'est pas de ceux qui le sont trop. Il sait se taire quand la vérité blesserait, et de toute manière préfère se taire en tout temps. Admettons que la discrétion est également une qualité pour ne pas trop accabler le pauvre hère plus tard. Tiens, notons qu'il est capable et débrouillard, plus que la moyenne sans doute, et c'est bien sa vertu la plus importante par les temps qui courent. Il reste malgré les défauts que l'on évoquera plus tard assez serviable. Pour peu qu'il ait une bonne bouille et une certaine politesse, Tavish refusera rarement de laisser son prochain patauger dans la gadoue très collante qui envahit les grolles et colle aux chaussettes, la pire. Cette liste est déjà probablement exhaustive, trouvez-lui des qualités vous-mêmes, ce serait gentil.

Pour ce qui est des défauts, il en accumule, mais ils ne le rendent pas nécessairement invivable. Déjà, il est méfiant et vigilant, trop même, et craint à tout instant de se faire piéger au centre d'un règlement de compte à grande échelle qui ne le concerne pas, ou plus simplement d'être la victime d'un vil larcin. Ceci explique qu'il porte en permanence son lourd manteau de velours, trois saisons sur quatres, qui le fait paraître plus solidement bâti qu'il ne l'est réellement, et qu'il y cache même une dague longue. On peut ajouter que l'existence des pirates ne l'aide pas à se détendre et qu'il se tient près à en estropier un qui se montrerait trop aventureux, qu'il serve d'exemple ou d'avertissement. Parlant d'avertissement, son visage en est un. Sa machoîre cachée derrière une épaisse écharpe qui lui valut son surnom, ses yeux froids et sourcils froncés malgré lui ne le présentent pas au premier regard comme un sympathique gaillard. Pour en revenir à son comportement en société, il faut admettre qu'il se caractérise par sa tension. Prêt à partir au quart de tour, prompt à interpréter n'importe quelle injonction comme une aggression, j'appuie le fait qu'il n'inspire vraiment pas confiance, et ce malgré lui puisqu'il n'est en somme ni malintentionné ni cruel.  Tavish est aussi rancunnier, vraiment, et ce à tel point qu'il dévore la vengeance à peine bouillie en casserole s'il en a l'occasion, et rend au centuple le mal qu'on lui fait. Malgré les apparences et ce qu'il tente de se dire à lui-même, il se sent profondément seul, mais s'il est aussi honnête avec les autres qu'il le doit, il ne le sera jamais avec lui-même. Que ce soit amicalement ou sentimentalement, il ne fait aucun effort pour aller vers l'autre et en souffre profondément, exacerbant ses autres problèmes comportementaux. La racine de beaucoup de ses maux reste et demeure qu'il se replie et réfugie trop souvent dans ses livres quand la réalité de sa vie l'énerve. Il deviendrait progressivement bien plus calme et agréable s'il prenait le temps de parler aux autres, ne serait-ce souhaiter une bonne journée aux inconnus, ou formuler ses remerciements de manière à ce qu'ils ne restent pas piégés dans son foulard pour l'éternité. Sur un sujet moins grave, on peut dire de lui (et même apercevoir) qu'il est le genre de type à hurler avec toute la véhémence accumulée dans l'univers depuis sa création un "TA GUEULE!" inspiré et retentissant, frappant comme le tonnerre les tympans innocents comme coupables, si un quelconque malotru l'empêche de dormir ne serait-ce que pendant dix pauvres minutes. Enfin, il tente d'être aussi rationnel qu'il est déjà cynique, mais son aversion à réduire tout phénomène à un système cause-conséquence fermé le handicape grandement.

En vrac:
Il est peu de choses qu'il apprécie autant que le calme, et comme le calme n'est plus, il doit se rabattre sur la marche. Marcher, c'est presque une passion en réalité. Arpenter et serpenter des rues dévastées, celles que personne n'occupe de manière générale, vivre comme une ombre survolant la réalité physique en se perdant dans ses songes, oubliant les dangers qui guettent chacun pour quelques instants et prétendant que le bruit n'existe plus. À intervalles réguliers, il prend le temps de méditer sur la plage, si du moins il parvient à y trouver la solitude, presque devenue en cette ville damnée un refuge. En sa qualité d'apprenti mystique, il aime interpréter les mouvements purement anthropiques en terme d'énergies, positives, négatives, destructrices et constructrices, et les évènements naturels commes des réalités matérielles inertes et dépourvues de ces vecteurs métaphysiques. Il lui est venu en observant les divers mouvements de foules qu'il les abhorre de tout son être. La foule est pour lui une entité stupide et manipulable, dont l'énergie, bonne ou mauvaise, ne peut que se réveler destructrice. De là vient peut-être une légère misanthropie.
De manière surprenante, il est presque incapable, du moins sans faire des efforts surhumains, de regarder quelqu'un dans les yeux pendant un laps de temps dépassant deux pauvres secondes, sans vraiment qu'il puisse trouver de cause à cette manie de détourner rapidement le regard.
Bien qu'il ait trempé dans des affaires de trafic dans sa prime jeunesse, il n'a jamais, au grand jamais ingéré quelconque substance illicite, sinon de l'alcool. Convaincu que l'homme doit s'accomplir dans la sanité de corps et d'esprit, il fuit les troubles pouvant impacter les deux. S'accomplir étant pour lui le fait d'accumuler des vertus, certains diront chevaleresques, et de les partager en actes concrets au monde. Parmi celles-ci, il place l'honnêteté dans les plus importantes, avec le respect de l'autre et l'amabilité, nécessaires au bon fonctionnement de tout groupe social. Dans les qualités moindres, il donne au moins une petite importance à la bravoure, la diligence et la discipline, cette dernière étant couplée dans son esprit à la maîtrise de soi.
Quiconque lui sert la main, bien que cela ait peu de chance d'arriver, remarquera que les siennes sont fermes et lourdes. Des mains dignes d'un laboureur de champ, bien qu'il n'ait jamais eu l'occasion de travailler la terre. Il en est puérilement fier.
Pour rester dans la sémantique de l'enfance, Il ne peut pas dire non à un gosse, et puisqu'il ne sait ni ne veut mentir, ces derniers l'embarassent énormément. Une sorte d'instinct paternel infondé prend le dessus quand il en aperçoit un, et sa priorité dans l'instant présent devient bien souvent de veiller à ce qu'aucun malheur qu'il ne peut prévenir ne leur fauche leurs mondes fantasmés, calqués sur le sien.
Il n'a certainement pas un égo surdimensionné ni un forte opinion de lui-même, alors les flatteries rebondissent le long de son crâne sans jamais pénétrer ses oreilles, mais pour peu que l'on fasse miroiter quelques gains réels et matériels, il est possible de corrompre ses bonnes intentions le temps d'un soir.
Il est effectivement fils de quelques descendants d'immigrés écossais, comme son nom semble l'indiquer.

Il a comme tout un chacun des petits secrets inavouables, qu'il n'avouera donc jamais ne pas les avoir avoués à quiconque, car il faudrait qu'on le questionne sur le fait qu'il les a avoués, et donc connaître préalablement leur existence sinon leur nature.

_La mer le calme. Il y voit une mystique et une poésie profonde. En perpetuel mouvement mais ne se déplaçant jamais, l'infiniment fine couche d'eau qui sépare le monde des bêtes terrestres et des créatures marines est captivante. Il est un amalgame d'élément et de brins encore plus petits de matière, et parmi ceux-là, tant forment de l'eau. Trois petits noyaux, les électrons qui les accompagnent, de ça part la vie, et de la vie la civilisation. On lui a dit que l'homme est poussière et qu'il redeviendrait poussière, lui voit que l'homme est eau, et que l'eau l'appelle. Quand il se penche et contemple de l'eau claire à ses pieds, l'image dans l'eau claire à ses pieds se penche et le contemple; il n'est plus si certain qu'il soit le premier à s'être penché.

_Ses études de lettres furent très brusquement interrompues alors qu'il avait encore 21 ans par une triste affaire de drogue. Lui en vendait pour son profit stupide sans être dans la misère avec un ami, et un client les avait aggréssés à proprement parler pour avoir sa dose sans pouvoir la payer. Bléssé au foie par un couteau des plus banals, le vieux pote de Tavish tombait au sol, et le libraire ne sait même pas aujourd'hui si le dit ami s'en est sorti, puisque lui à repris l'outil pour viser la gorge, plus directement. Il fut rapidement arrêté bien sûr, et marchanda le fait de plaider coupable pour crime de second degré pour peu qu'on abandonne les charges de trafic de stupéfiants. Reste cependant qu'il passa treize longues années en prison (c'est d'ailleurs là qu'il a obtenu ses deux cicatrices au visage), qu'il parvint à rendre en toute somme vivable en ne s'occupant des affaires de personne et en ne rendant ni demandant aucun service. Il parvenait même à se procurer moult écrits pour passer le temps, et quand il ne lisait pas s'occupait avec ses co-détenus à se muscler, en parvenant à considérablement limiter le nombre de rixes dans lesquelles il s'engageait malgré lui.

_Ses parents et son frère lui on fait savoir qu'ils ne voulaient plus rien entendre de lui, et bien qu'il traite ça intérieurement comme une étape mineure de sa vie, l'obligation de couper tous les ponts avec sa famille explique peut-être encore en partie sa morosité.

_L'une de ses plus grandes craintes est qu'un habitant le reconnaisse et sache lier son visage au crime qu'il a commis plus tôt dans sa vie. C'est plus ou moins infondé puisque personne en réalité ne connait vraiment sa gueule, mais si les dossiers de la mairie sont intacts, on peut probablement remonter à son casier judiciaire.

_S'il y a une personne qu'il cherche plus que toutes les autres, c'est un ami dévoreur de livres comme lui avec qui débattre ou au moins discuter pendant des heures, allongé chacun dans un lit et une bouteille d'alcool léger à la main, la moitié dans l'estomac. Il n'en fera bien sûr part à personne tant c'est embarassant à formuler. Une autre qu'il cherche certes moins est un élève à qui enseigner la philosophie, un disciple en quelque sorte à la manière des grecs à la différence près qu'il respecte plusieurs écoles.

_Les quelques livres qu'il a réussi à sauver et transporter sont très majoritairement des essais philosophiques, des contes vieux comme le monde à morales évidentes, quelques traités d'économie politique, et des ouvrages de ses auteurs préférés, notamment Victor Hugo pour des raisons semi-évidentes.

1Tu habites à Arcadia Bay ou tu étais juste de passage ? Le bonhomme habitait déjà Arcadia Bay, mais n'avait certes pas eu le temps de s'y attacher profondément.

2Tu faisais quoi avant la tempête ? Tavish était devenu un honnête libraire, et en sa qualité de libraire hantait la bibiliothèque municipale. Les années de sa vie qui précèdent cette affirmation ont déjà été évoquées.

3Quels dégâts a-t-elle fait dans ta vie ? En plus d'avoir subi des blessures mineures et en ce sens, bien vite guéries, la perte de siècles de savoirs contenus et intemporalisés lui a mis un violent coup au moral. N'étant pour autant pas devenu nihiliste, encore moins fou à lier, il lui reste une sorte d'amertume rance, entre la colère contre le monde et le deuil difficile.

4Que faisais-tu lorsque la Tempête a frappé ? Comme tous les travailleurs, il travaillait, à la bibliothèque bien entendu si l'on parle seulement de lui. De ce qu'on peut en déduire, il devait ranger des livres par ordre alphabtique du nom de l'auteur ou avoir passé des heures à faire l'inventaire des prêts et reçus.

5Tu quitterais tout pour retrouver ta vie d'avant ? [  ] OUI   [X] NON; Sa vie d'avant était des plus plates et ennuyeuses, et les évènements récents lui donnent un temps libre considérable pour se replonger dans des bouquins. Il préférerait néanmoins retourner à son quotidien tranquille, mais certainement pas en "quittant tout".

6Exerces-tu un métier ou des activités particulières dans ce nouveau monde ? Occupant une belle partie de ses journées à lire, il parvient à coupler cette activité avec l'action de troquer les ouvrages qu'il parvint à sauver, ou même des fiches de lectures résumées qu'il écrit lui-même. Dans son intimité la plus sacrée, il rédige la chronique de l'évolution de la société fermée d'Arcadia Bay, en ayant déjà fait le calcul qu'un tel texte pourrait significativement gagner en valeur au fil des années. Tout ce qu'il y consigne est bien sûr limité à sa perception finie du monde, mais il prête une oreille plus qu'attentive aux discussions qui ne lui sont pas ouvertes, et il est peu recommandable de confier des secrets s'il se tient à moins de deux mètres accroupi dans l'ombre, faisant mine de fixer l'horizon. Sinon, il aime se considérer comme une sorte de milice à lui seul qui patrouille et s'assure que les commerces voisins au sien ne soient pas importunés, du moins quand il se promène.

7Pourquoi n'as-tu pas rejoint une communauté de survivants ? >Il préfère très franchement se débrouiller en ne comptant que sur ses capacités autant que faire se peut. Tant qu'il ne sera pas forcé par le destin, il y a peu de choses qu'on le convainque d'en rejoindre une.

8Que penses-tu des groupes qui s'organisent ? De manière surprenante, il se méfie des Greens presque autant que des Pirates, et les deux constituent la raison principale de sa tension interne devenue presque naturelle. S'il voit les Pirates comme des parasites nuisibles et incapables de raison, les Greens sont plutôt perçus comme une secte d'illuminés dont il est préférable de ne pas croiser le chemin. Il ne pense pas de mal des Knights, même s'il ne leur confierait une tâche importante que si l'entiéreté de la population de la ville avait déjà refusé de lui porter assistance. Le désordre est pour lui le pire des défauts qu'un groupe social de quelconque origine puisse porter, et il n'est pas même certain que le leur tiendra si personne ne tape du poing sur la table (ronde?) pour y imposer un peu de rigueur et de discipline. Si celà venait tôt ou tard cependant, il pourrait être tenté de rejoindre leurs rangs ne serait-ce que pour protéger les enfants, qui ne méritent pas de souffrir des conditions actuelles de la ville.


La liberté, une idée vague dont il n'avait su apprécier la juste valeur seulement lorsqu'il en fut privée. Tavish finissait enfin par la retrouver, déferré quelques minutes seulement auparavant et se promettant intérieurement de devenir le plus honorable des citoyens. Loin d'être stupide et ne manquant jamais de ressort, il était à l'époque plus qu'optimiste quant à son avenir. Arpentant tranquillement les rues de Little Rock, il croisait au hasard des chemins un père et son fils. Le fils était tout ce qu'il y a de plus normal, jeune et vigoureux, mais le père fronçait avec une force rare les sourcils et rapprochait avec cette fermeté douce, paternelle, sa progéniture en la tirant par le bras. Là seulement, le meurtrier refoulé en Tavish se rappelait à sa mémoire. Plus que ça, le visage d'un policier qui avait participé à son arrestation plus de dix années auparavant se calquait presque parfaitement avec ce qu'il avait jugé être un inconnu. Figé sur place, il fut frappé par une réalité perturbante. Pour tous ceux qui l'ont connu, il était infame. Quiconque reconnaissait son visage n'y voyait qu'une menace, quand bien même il ne leur aurait porté aucun préjudice, ni tenté seulement de le faire. C'était le seul signe du destin qu'il lui fallut pour qu'il parte au loin, abandonnant tout repère et fuyant à Arcadia Bay, la mer et la tranquilité de la région l'ayant conquis. L'ironie du sort voulut qu'une deuxième prison ne le prive de sa douce, sainte libertée.

Je suis gentil. Vraiment. Au moins aussi gentil que Diogène de Sinope était méchant avec Alexandre le Grand, de manière inversée donc. Mais ça veut toujours dire que je suis gentil. Et je suis mauvais avec photoshop, mais c'était pas nécessaire de le préciser j'imagine. Désolé si les montages sont pas bôs, c'est l'intention qui compte, comme disait Socrate à Platon quand il lui a offert une paire de chaussette relativement usées à l'équivalent grec précédant Noël il y a longtemps. C'est d'ailleurs cet affront qui lui valut la peine de mort. C'est écrit dans mon livre.