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et nous serons les rois de l'épave [ft. Spiza]

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Ashley
vagabond
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Métier Eboueur
Avatar Benedict - Violet Evergarden [Merci Mum, Sylvie et Toba <3]
Ashley
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Dim 21 Fév - 17:37
et nous serons les rois de l'épave


Il y a des journées qui ne finissent pas.
On fait la liste de ses responsabilités (manger, arroser les plantes, se promener, se nettoyer – peut-on vraiment parler d'une douche si le pommeau est une bouteille ?), et on les respecte, une à une, comme un rituel à accomplir pour mériter de rejoindre son lit, le soir. Mais le lit refuse.
La situation est cocasse, au début ; il n'y a aucune raison pour que le sommeil se fasse si capricieux. Ca fait deux ans que je dors sur le sol et c'est maintenant que ça me dérange ? On connaît la chanson ; on se tourne, on se retourne, on réfléchit, et on secoue la tête d'embarras en repensant aux erreurs du passé. A force, le moindre bruit devient diversion ; on se relève pour aller boire, on se rallonge, maintenant il faut aller pisser, on s'énerve parce que si je m'endors pas là je vais encore me lever à une heure pas possible et quand le sommeil vient enfin, il s'enfuit presque aussitôt, lorsque le soleil, tel un parent blasé, vient déposer un « c'est l'heure » sur les paupières. Là, dans ce réveil, il y a un sentiment étrange, un constat inavoué parce que merde, j'ai dormi, c'est bon : aujourd'hui, c'est hier, et je suis crevé.

C'était une de ces journées pour Ashley, qui n'avait pas vraiment envie de se demander pourquoi il n'avait pas réussi à dormir. Les réponses potentielles s'avéraient trop nombreuses, et il avait craint que les lister ne le fasse se lever du mauvais pied.
Assez mal renseigné sur l'heure (il espérait toujours trouver une montre en état de marche, ainsi que quelqu'un de plus avisé que lui – qui confondait toujours petite et grande aiguille – pour pouvoir la régler), il s'était déplacé vers ces vieux immeubles qui ne lui disaient trop rien. Il ne s'en méfiait certes pas assez pour fuir la zone à tout prix ; mais il n'appréciait pas l'ambiance des lieux, et il n'y restait vraiment que car les pilleurs usuels ne prenaient que le nécessaire, laissant traîner les jolis objets. Ashley aimait les jolis objets. Il ne se l'expliquait pas vraiment (et il n'aimait pas faire de la psychologie de comptoir, lui qui ne connaissait rien au caractère humain) ; mais il y avait un je-ne-sais-quoi de marquant dans les photos déchirées, dans les boucles d'oreilles en toc, dans les trousseaux de clés égarés.

Le jeune homme n'avait pas marché longtemps, car il était avant tout paresseux ; mais aussi car, à la fin de la journée, il fallait les transporter, les sacs poubelle, qu'ils soient pleins de débris ou de reliques. Pas jusqu'à la décharge, non ; trop éloignée (sur l'échelle de la flemmardise d'Ashley) et dangereuse, elle lui inspirait aussi peu confiance que ses habitants. Les sacs contenant les « déchets » (idée désormais bien subjective à Arcadia, il était le premier à en faire l'expérience), il lui arrivait de les entasser près du coin qu'il s'était approprié après la tempête. Autrement, s'il n'avait pas le courage de se les coltiner, il tentait de les laisser à l'abri, au rez-de-chaussée de certains immeubles notamment (histoire de conserver son semblant de travail).
Quant à ses jolis objets, il en peuplait ce qui lui servait d'habitation. Lorsqu'un tri s'avérait nécessaire, il conservait le surplus dans une vieille valise dont la fermeture éclair avait cédé.

Ashley n'était jamais véritablement concentré ; cette fois-ci ne faisait pas exception. Armé de vieux gants et d'un t-shirt (noué autour de son cou en guise de masque – parce qu'il avait fait l'expérience de la poussière dans le nez et ne souhaitait pas la retenter), il soulevait des fragments d'anciens murs, des câbles arrachés, des morceaux de plastique dont la provenance était difficilement identifiable. Pour cette activité, le jeune homme refusait de s'aventurer à l'intérieur des bâtiments ; il n'avait pas survécu à la tempête pour ensuite s'amuser à crapahuter dans des cages d'escalier en ruines. Ramasser les débris ne le dérangeait pas, car ce n'était pour lui pas un effort en soi ; et l'immensité des dégâts avait un côté réconfortant (jamais il ne pourrait tout ramasser seul, et c'était tant mieux ; il était l'unique responsable, et par conséquent, l'unique bénéficiaire, de cette espèce d'occupation qu'il avait trouvée pour remplir ses journées). Mais de là à se mettre en danger, faut pas pousser.

Il se stoppa face à un bout de tissu. Le vagabond n'était pas encore tombé sur des vêtements dans le petit coin qu'il déblayait ; généralement, mieux valait se rapprocher d'un immeuble, voire plus simplement y pénétrer, pour trouver des ressources utiles dans le genre. En le soulevant, il découvrit un manche, puis fit glisser son regard sur une structure en métal tordu : un parapluie. Enfin, il ne parerait plus grand chose, vu son état ; et Ashley n'était pas couturier. D'autant que, les jours de pluie, il les passait à somnoler, sur le carton qui lui servait de lit.
Sur le point de reposer l'objet (il préférait ne pas le jeter, ça prendrait trop de place), un mouvement attira son œil. Quelqu'un ? Quelqu'un. Merde.

Il tourna complètement son visage vers l'inconnu ; d'abord pour le cerner mieux, et puis pour signifier qu'il l'avait vu. Mais il n'était pas très proche, et Ashley éprouvait des difficultés à discerner son expression. L'étranger ne semblait pas adopter une posture hostile, et n'avait pas vraiment l'air d'un géant ; pour autant, le stress commençait déjà à monter, et les possibilités à fuser. C'est moi qu'il regarde ? Est-ce qu'il voit que je le vois ? Si c'est pas moi qu'il regarde, il regarde qui ? Est-ce qu'il va trouver ça bizarre que je le regarde, du coup ? Mais s'il veut me parler et que je le regarde pas, c'est pas un peu malpoli ? Et s'il voulait me tuer ? Ca se trouve je lui plais ET c'est pour ça qu'il veut me tuer, mais du coup je fais quoi, c'est pas du tout une façon d'aborder quelqu'un qui te plaît, en plus je le connais même pas, c'est quoi ces histoires ??

« Euh. Yo. »

J'ai pas parlé assez fort il va jamais m'entendre, je savais bien qu'il fallait que je dise rien, en plus c'est lui qui me regarde c'est lui qui doit parler, pourquoi c'est toujours à moi que ça arrive ces horreurs ?

« J'ai. Un parapluie. »

Merde.


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Dim 21 Fév - 21:52

—— ft. ashley

L'EPAVE ET SES ROIS

Il n'avait pas quitté les frontières des terres des Greens depuis un moment. À moins que ça ne faisait que quelques jours. La notion du temps semblait être un concept abstrait pour le cerveau du polonais, récemment. Les journées se ressemblaient, et même quand elles ne s'apparentaient pas, elles paraissaient être balancées dans une pièce de sa mémoire avec les autres, en un tas inextricable. Aussi, il ne savait plus si la neige était tombée il y a quelques jours ou il y a deux semaines, ne savait plus quand il avait réussi à suivre la trace d'une mésange charbonnière dans la neige sans lui faire peur. Quelques jours plus tard, il aurait oublié la date de ce jour là.

En attendant cet oubli, Spiza profitait de sa journée. L'explorateur avait pour objectif de fouiller les immeubles qui mordaient le ciel à l'horizon. Il s'y était déjà aventuré, et avait pris peur en voyant l'état des escaliers dans certains habitats : la surface des marches fissurées laissait penser que le moindre faux pas ferait disparaître une personne dans les abysses du plancher.
L'hiver n'aidait pas aux explorations. La boue, la neige, et les intempéries rendaient les trajets dans la nature plus ardus. Le blond avait donc décidé de changer de zone et s'était aventuré dans le paysage urbain.
Le rythme de vie qu'imposait la catastrophe qui avait englobé la ville convenait à Spiza. Il aimait que la société soit différente, il aimait qu'on lui demande d'explorer pour vivre et non pour gagner de l'argent. Il appréciait que le code vestimentaire soit plus libre, qu'on se coiffe de la façon dont on le souhaite. L'insouciance d'une liberté feinte lui rappela les protagonistes de films qu'il regardait à l'époque : ils grimpaient aux murs, escaladaient les ruines, exploraient jusqu'à tomber sur quelque chose d'incroyable, alors qu'ils n'avaient jamais vraiment cherché. Certains jours étaient plus laborieux pour lui, et il pouvait s'éreinter à marcher pendant des heures sans réussir à trouver quoi que ce soit d'utilisable. L'optimise le poussa à trottiner, lui susurra à l'oreille qu'aujourd'hui serait le bon jour.

Ce n'était pas le bon jour. Il avait escaladé avec légèreté un grillage, s'était accroché en voulant en descendre et la manche de son coupe-vent noir s'était déchirée en un craquement de tissu fendant par la même occasion son cœur. Son bras avait été griffé, mais rien de très gênant et il avait continué son exploration comme si son cœur n'avait pas chuté jusqu'à ses pieds tant il était déçu d'avoir abîmé son manteau. Ses récoltes n'étaient pas des plus brillantes, il poussait dans un sac en tissu quelques trouvailles, tel un sac à main qui ferait plaisir aux fashionista des Greens —pour peu qu'iels aimaient les besaces en peau de crocodile. Il mit la main sur un livre illustré pour enfants et glissa un skateboard rouillé sous son bras. Rien de bien utile pour le groupe, mais le plaisir d'un ou deux individus suffisait à donner un sens à ses recherches.

Malgré l'humidité de l'extérieur, la poussière accumulée dans les pièces du rez-de-chaussé de certains bâtiments s'élevait à chaque fois qu'on ouvrait la porte, chatouillait le nez de Spiza qui devait en être à son cinquième éternuement. S'il étouffait l'éternuement dans son coude, le bruit résonnait parfois dans le silence d'un bâtiment et un frisson courait le long de son dos. La solitude lui faisait parfois froid dans le dos, mais il était bien trop réservé pour demander de l’aide à qui que ce soit. Il ravalait donc son sentiment, dans le même temps qu’il avalait les mots, et ignorait ses propres pensées.
La journée avait probablement bien avancé, bien qu’il n’en savait strictement rien, les nuages cachant l’astre solaire dans le ciel et l’empêchant de deviner l’heure. Alors qu’il posa sa main sur une écharpe, encore épinglée au sommet d’un porte-manteau, il lui sembla entendre du bruit à l’extérieur. L’éclat de sa bulle de solitude lui confirma qu’il était temps de rentrer et il survola les marches d’un escalier solide, avant de se glisser vers la sortie d’un pas léger, les foulées avalant les mètres qui le séparaient de l’extérieur. Son cœur, qui s’était arrêté le temps de quelques secondes, rappela son existence en tambourinant contre sa cage thoracique, le sang pulsant dans ses oreilles. Les bruits étaient de provenance humaines, ou animales en tout cas.
L’explorateur n’avait pas croisé un être humain durant ces explorations depuis bien longtemps, et la curiosité l’emporta sur la prudence. Trois pas. Il sortit du bâtiment, se découvrit en pleine lumière du jour, les bras ballants, le sac de tissu et le skateboard coincés sous ses aisselles. Spiza avait revêtu l’écharpe un peu plus tôt et il l’abaissa pour découvrir son visage, dans une tentative inconsciente de communiquer son pacifisme. Il resta planté, les pieds enracinés dans le bitume. Comme souvent lorsqu’il rencontrait quelqu’un pour la première fois, son cerveau lui parut vide de toute pensée. Le jeune homme devant lui lui parut plus jeune, mais il avait appris à ne pas se fier aux apparences. La voix de son interlocuteur s’éleva dans les airs, le regard du polonais se dirigea vers le parapluie en question.
— Il pleut pas, répondit-il, contractant ses abdominaux pour que sa voix porte, avant de pincer ses lèvres entre elles en se rendant compte que l’homme avait sûrement tenté de le menacer. Sa bouche s’ouvrit, prête à libérer quelques mots, mais rien ne sortit et les engrenages de son cerveau s’activèrent dans un grincement que personne n’entendit sauf lui. La zone des Greens se trouvait dans le dos de l’homme au parapluie, et à moins de réussir à escalader sans encombre un muret qui fermait l’accès à une ruelle à sa gauche, Spiza ne voyait pas comment se dépêtrer de cette situation. Il raidit son dos dans une tentative de paraître plus grand — ça ne fit aucune différence. Il pouvait aussi essayer de sauter sur son skateboard et dépasser le blond, mais c’était très facile de mettre des bâtons dans les roues d’un skater pour le faire chuter. Somme-toute, la situation le paralysa et il fut bientôt aussi bien implanter dans le bitume que les végétaux qui avaient repris leurs droits sur le trottoir et la route. En voulant remonter son écharpe pour cacher son visage, dans une tentative inconsciente de se fermer à son interlocuteur, il oublia son skateboard coincé sous son aisselle : l’objet tomba dans un fracas, fit froncer les sourcils de Spiza qui se précipita pour rattraper l’objet. Il fit tomber le contenu de son sac par la même occasion, dut fléchir les genoux et s’accroupir pour ramasser le maigre butin de sa récolte.
— Le sac à main est pas pour moi, il crut important de préciser, relevant les yeux vers le blond alors qu’il rapatria ses affaires sous ses bras dans une panique qui contrastait avec la lenteur détachant ses syllabes.

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Ashley
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Métier Eboueur
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Ashley
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Lun 22 Fév - 17:26
et nous serons les rois de l'épave


Quelle idée de parler quand on n'a rien à dire.
Ashley, parapluie en main, tornade en tête, était figé et liquéfié à la fois. Il ne tremblait pas, mais il avait cette sensation d'alerte dans tous ses membres qui lui rappelait l'époque où il devait présenter des exposés, au lycée. Il le savait, sa gorge allait bientôt se serrer, il parlerait trop vite et sans reprendre son souffle, ce qui le forcerait à faire une pause pour inspirer longuement et lui donnerait, pour sûr, l'air stupide ; ensuite sa bouche deviendrait sèche, et alors le bruit de sa langue tapant contre son palais pourrait se faire entendre. Son interlocuteur, en face, avait presque l'air d'un examinateur, désormais.
Il savait tout ça, et pourtant, il n'avait jamais appris à faire autrement. Face à des inconnus, c'était toujours la même rengaine (au moins ici n'avait-il pas eu à subir l'anticipation de la rencontre, une ennemie redoutable dans sa vie d'adulte). Comme d'habitude, c'était à son corps de compenser, avec sa voix un peu nasillarde et son expression perpétuellement perdue, absente ; deux caractéristiques qui, à défaut de camoufler sa gêne, l'aidaient à se faire comprendre sans passer pour un abruti – du moins c'est ce qu'il estimait.

« Il pleut pas », répondit l'autre, d'une voix suffisamment forte pour qu'Ashley hausse une fraction de seconde ses sourcils quasi-absents.

Il fallut une pause au vagabond pour, déjà, comprendre qu'on lui avait répondu. Sa propre phrase lui avait paru tellement absurde qu'il s'était attendu, avant cette réplique, à ce que la personne s'en aille sans piper mot. Il ne lui en aurait pas voulu – à dire vrai, il aurait peut-être même été un peu soulagé. Au lieu de ça, la parole lui avait été retournée, de la plus factuelle des manières ; non, en effet, il ne pleuvait pas. Ben je sais qu'il pleut pas, glandu, je serais pas là sinon- puis une seconde pause. A nouveau, un semi-haussement de sourcils ; l'étranger avait-il pensé qu'Ashley lui proposait une protection ? Alors que le ciel était – relativement – clair et le parapluie, troué et déformé ? En même temps, le « glandu » en question pouvait-il vraiment le voir, de là où il se tenait ? Et puis, comment interpréter un parapluie tendu autrement ? La frustration de ne pas s'être fait comprendre se mêla à de l'incrédulité. La situation était stupide – Ashley était stupide (et, dans un léger élan de condescendance propre à son tempérament, il se demanda si cet homme, en face, ne l'était pas un peu aussi).

Il n'eut cependant pas le temps d'approfondir cette réflexion, puisque après un court moment où l'inconnu semblait vouloir ajouter quelque chose sans vraiment y parvenir, un choc se fit entendre, sortant Ashley de ses pensées. C'était le skateboard que ce type gardait sous son bras ; suite au sursaut initial, le vagabond ne put s'empêcher de penser à la classe que ça devait avoir, un mec qui skate dans une ville en ruines. Non mais le talent qu'il faut pour faire ça, avec tout le bordel qu'il y a, et vu la période de l'année – soit il se rend pas compte, soit c'est un génie !! Ou bien venait-il de le ramasser et ne savait pas spécialement en faire, tout était possible ; mais, trop tard, l'adolescent somnolant en Ashley s'était réveillé. Pas assez pour bondir sur l'interlocuteur – qui fait ça ? –, mais pour allumer une étincelle dans le regard du blond, c'était suffisant.
L'homme en face se baissa rapidement pour ramasser le skate, ce qui renversa quelques objets entassés dans le sac en tissu sobre qu'il portait. Coup dur. L'empathie n'était pas le point fort d'Ashley, mais pour avoir vécu des situations similaires, il ne pouvait que se dire que tu gères peut-être bien, mais moi, je serais en panique.

« Le sac à main est pas pour moi », ajouta alors la voix, un peu moins forte mais toujours aussi bien articulée.

Était-ce une justification ? Ça y ressemblait étrangement, et cela confirmerait une chose : l'étranger n'était pas plus à l'aise dans cette situation que lui. Mais si ce n'était pas une justification ? Que voudrait-il alors dire ? Était-ce ça, la sensation qu'il avait ressentie lorsque Ashley lui avait parlé du parapluie ? Une espèce de confusion, l'impression d'être face à un élément qu'il faut analyser, interpréter. S'il est pas pour toi, il est pour qui ? T'essaies de me dire qu'il y a quelqu'un d'autre dans le coin ? Pourquoi tu l'appelles pas directement, dans ce cas ? Tu veux m'en faire cadeau ? C'est vrai qu'il est pas mal... Mais tu vois bien que j'en ai déjà, des sacs (c'est peut-être pour ça que tu veux me le larguer ?) - tu pourrais pas être plus clair ??
Sans relever l'ironie de cette dernière pensée, le vagabond fit une nouvelle pause (pas qu'il ait vraiment bougé depuis le début, cela dit – il se contentait simplement de se figer un peu plus, contractant ses épaules et plissant légèrement les yeux, comme dans un western nanardesque). Était-ce son tour de répondre ? Il n'était pas doué pour deviner ces choses-là. L'expression disait « jamais deux sans trois » ; fallait-il attendre que l'autre prononce une troisième phrase ? Ils feraient quoi, les gens, à ma place ? Peut-être valait-il mieux reprendre depuis le début, et se présenter poliment ?

L'idée d'aider l'homme ne traversa pas l'esprit d'Ashley (et me mettre en danger ? Tu me prends pour un bleu ?), qui constata que le parapluie était toujours entre ses mains. Il était sans doute temps de le reposer, puisque visiblement, personne n'en voulait ; après une vague hésitation, il le jeta mollement à sa droite, comme il avait l'habitude de le faire dans sa quête de jolis objets. Seulement voilà, le manche était en métal ; et, dans une dernière tentative d'emmerder le monde, il buta contre un morceau de fer, avant de venir perturber l'équilibre fragile d'une pile de gravats, qui s'effondra dans un petit nuage de poussière – et un grand fracas. Le jeune homme laissa échapper un « putain ! », qui tenait plus du réflexe que de la véritable exclamation, puisque ni ses mains, ni ses oreilles ne furent heurtées – que ce soit par l'acte ou par le bruit. Il releva la tête vers son interlocuteur et se dit ok, il va rien comprendre, faut que je m'explique.

« Euh. En fait t'as raison, il pleut pas, mais à la base je me suis dit que t'en voudrais peut-être quand même, parce que y'a des gens doués par ici qui retapent des trucs et s'en servent, et moi je sais pas faire, donc généralement, ces trucs-là, je les vire, mais du coup visiblement bah t'en veux pas, et donc je voulais juste le reposer, et en fait ça s'est cassé la gueule... »

Comme prévu, il avait prononcé cette phrase d'une traite. A la fin, sa voix avait un peu diminué, pour se briser sur le dernier mot ; il avait fini son explication, mais il comprenait bien qu'elle n'éclaircissait pas grand chose, alors il restait en suspens, comme pour reprendre ou recommencer. Il inspira profondément, relâchant un soupir qu'il voulait discret mais qui ne fit que mettre l'emphase sur le silence qui s'était installé. C'est pour ça que je dis jamais rien, il pensa encore une fois, comme pour se justifier auprès d'une personne invisible en train de le juger - et de nouveau dans une ironie des plus complètes, puisqu'il était jusqu'à présent la personne qui avait le plus parlé des deux.

« Ah et euh, c'est gentil pour le sac, mais j'en ai déjà plein. Des sacs. Donc. Non merci ? », ajouta-t-il avec l'espoir d'avoir bien compris la proposition de l'inconnu.

Son regard s'arrêta, cependant, sur un autre élément, qui lui parut nettement plus intéressant. C'était – de ce qu'il arrivait à entrevoir – un livre, dont la couverture semblait être illustrée par un dinosaure (ou bien était-ce un dragon ?) ; peut-être s'agissait-il d'un livre pour enfants ?
La fille d'Ashley n'avait jamais vraiment accroché aux dinosaures, à sa grande déception. Ni aux dragons, pour le peu que ça change. Elle prenait peur face aux grosses bêtes aux cris trop puissants et aux noms à faire pleurer les linguistes ; par contre, quand il s'agissait de ramener des araignées dans la maison, elle se montrait tout de suite nettement plus brave.
Le vagabond parvint presque à ignorer le pincement habituel qu'il ressentait en pensant à Lena ; et, avec un intérêt nouvellement piqué (mais de manière toujours aussi maladroite), il reprit la parole.

« Par contre, le livre que tu as, là, en fait, si tu cherches à t'en débarrasser... »

A nouveau, un suspens ; car il n'arrivait absolument pas à imaginer comment demander ce qu'il souhaitait demander.

« Enfin j'ai perdu tous mes bouquins et j'essaie d'en ramasser et du coup si t'en as pas besoin enfin voilà hésite pas quoi. »

Et dans un élan de lucidité, il réalisa que, peut-être, la politesse voudrait que l'on se présente avant de demander quelque chose (pour quelle raison ; mystère). Il n'avait pas franchement envie de faire plus ample connaissance, mais si cela lui permettait d'obtenir le fameux livre, il pouvait bien y mettre les formes.

« Moi c'est Ashley. Je suis un Vagabond. Si jamais tu te demandes. »



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Lun 22 Fév - 20:33

—— ft. ashley

L'EPAVE ET SES ROIS

Les deux hommes semblaient avoir été composés de la même faculté à provoquer des catastrophes au moment où il s'agirait de se tapir dans un coin en espérant qu'on les oublie. Le regard du polonais s'était plongé dans son sac pour vérifier que tout y était à présent bien installé, et il s'apprêta à se relever avec toute la nonchalance dont il pouvait faire preuve quand un bruit retentit dans le silence ambiant de la rue. Sous l'impulsion d'un réflexe instinctif, il se releva d'un bond, les sourcils froncés, et chercha aussitôt la provenance du bruit. Le blond venait donc de déclencher le second strike de leur rencontre ; bien que ni l'un ni l'autre ne se trouvait au bowling. Spiza n'avait pas eu le temps de comprendre ce qui se passait, mais sa réflexion fut à peine entamée qu'elle fut coupée par la voix de son interlocuteur. Ce dernier prit la peine d'expliquer ce qui venait de se passer.
Comme l'expression le dit : c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes, ce que l'esprit de Spiza semblait vouloir appliquer dans toute situation. Il ne changeait jamais vraiment, réitérait ce qui semblait être les mêmes erreurs, s'enfermait dans ses habitudes et en jetant la clé pour ne plus qu'on vienne l'en délivrer. Cette fois, il entreprit, comme il était d'usage dans son cerveau, de balayer toutes ses craintes et de juger que l'homme devant lui était quelqu'un de bon. Ses épaules retombèrent, inconsciemment relevées et tendues par le caractère étranger de la situation.

L’incompréhension qui suivit tendit à nouveau ses muscles. Les mots de l’homme venaient de bousculer ses pensées. Il pinça ses lèvres entre elles, ravalant sa réponse. La nécessité de corriger l’étranger ne se fit pas plus pressante que ça, il pouvait après tout penser que Spiza avait voulu lui offrir un sac à main, le polonais n’était pas dérangé par l’idée qu’on puisse penser qu’il était généreux. Après tout, il l’était peut-être — il n’en était pas certain. L’interlocuteur sembla en conclure que l’explorateur était prêt à lui offrir ce qu’il souhaitait. Il renifla. Son nez n’avait pas encore oublié l’omniprésence dérangeante de la poussière à l’intérieur des bâtiments. Puis, son regard s’abaissa, resta un instant sur la couverture du livre qui ressortait tout juste du sac en tissu. Ses pupilles ne parvenaient pas à rester en place, il posa à nouveau son regard sur l’homme qui n’avait pas de sourcils, il s’en rendait compte à présent, peu importe ce que son cerveau pouvait conclure de cette information.

Son cœur, qui fatiguait de ces montagnes russes émotionnelles, reprit sa course sonore après la demande de l’homme. Les comportements imprévus éveillaient toujours une panique chez le polonais qui se laissa un moment aller à la panique, les mots s’entrechoquant dans ses pensées. Sa main se referma sur la tranche du livre pour l’extirper du sac alors qu’il réfléchissait encore à la suite de ses actions — bien que cette action fut assez parlante, il allait donner le livre. Il donnait dès qu’on lui demandait, docile, lisse comme une pâte à pain qu’on étale au rouleau de pâtisserie. Aussi, ses jambes s’activèrent, gobant les mètres qui les séparaient précipitamment, comme s’il avait en horreur l’idée de faire attendre son interlocuteur plus de trois secondes. Pourtant, ses pensées n’étaient toujours pas ordonnées, et il n’était pas certain que donner n’importe quoi à n’importe qui fut indiqué pour un explorateur.
(Mais l’homme était bon. La pensée le rassura.)

Et sa bouche, mécanique, restitua une réponse qui sembla, pour Spiza, appartenir à un autre esprit que le sien.
— Tiens, je suis pas sûr que ce soit la meilleure lecture, ceci dit.
Le livre s’étendit dans l’air comme un drapeau blanc, ponctuant la phrase du polonais. Il rajouta ensuite, parce qu’il était de coutume que des présentations soient mutuelles : Moi, c’est Spiza. Je suis chez les Greens.
Son regard était resté rivé sur le livre, comme s’il était effrayé de croiser le regard du vagabond. C’était probablement le cas. Il déglutit, trouva finalement le courage de lever les yeux, ou plutôt la curiosité d’observer sa nouvelle rencontre sans être à dix mètres de distance. Sa première observation fut qu’il n’avait, effectivement, pas de sourcils. Il ne sut toujours pas quoi faire de cette pensée et la balaya. Il s’éclaircit la gorge.
— T’es tout seul ? interrogea-t-il, presque étonné malgré le manque d’expression de son visage. Il avait toujours admiré le courage des vagabonds, et leur choix — mais ce n’était peut-être pas un choix — de se débrouiller seul. Lui n’avait pas pu assumer une telle décision. Les engrenages de son cerveau s’activèrent à nouveau alors qu’il leva une main, la paume ouverte vers Ashley, pour lui signaler d’attendre. Son autre main, frénétique, fouilla un instant au fond de son sac duquel il sortit un petit pot de miel.
— J’en ai trouvé plusieurs, le reste c’est pour mon groupe, il précisa en descendant son autre main pour la poser sur son sac et le serrer contre lui dans un geste possessif, mais tu peux le garder. C’est pas si facile d’en trouver alors que ça se garde super longtemps.
Il tendit le pot de miel, seconde salve de drapeau blanc.

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Ashley
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Ashley
Ashley
Mar 23 Fév - 17:48
et nous serons les rois de l'épave


Ashley dut se faire violence pour ne pas avoir un mouvement de recul après que l'autre l'eut rejoint en seulement quelques enjambées – oui, après que. Dans cette scène, presque surréaliste, qu'il n'aurait jamais pu imaginer deux ans auparavant (deux personnes, dans un décor en ruines, quasiment figées, fendant parfois le silence des lieux de paroles qui se voulaient prudentes ; un peu comme deux proies, dans un documentaire animalier, cherchant à savoir si l'une n'était pas un loup qui montrait patte blanche), la soudaineté de l'acte l'avait surpris ; mais pas immédiatement, non. Il lui avait fallu intégrer, d'abord, l'idée du mouvement, et lorsque cela fut accompli, l'inconnu était déjà là, devant lui, ce qui rappelait au vagabond des jumpscares tout droit sortis de films à la The Grudge.

Cet homme était, évidemment, nettement moins terrifiant que la fillette du long métrage (quoique, au vu de la situation, même un lapin aurait pu s'avérer dangereux), aussi le cœur d'Ashley ne rompit pas sa course habituelle (enfin, si l'on pouvait qualifier d' « habituel » le rythme soutenu que ses battements avaient adopté suite à la rencontre). Il se surprit d'ailleurs à être content ; sa requête avait été acceptée. Il se serait bien demandé ce que fout un adulte avec un livre comme ça, de toute façon, s'il ne s'était pas rappelé qu'il était lui-même un homme supposément mature à la recherche d'objets pour gosses. Son interlocuteur était-il également parent ? Non, il aurait gardé le bouquin, sinon ; suivant cette logique, le blond ne s'attarda pas à demander si l'autre était sûr, si ça ne le dérangeait pas, s'il n'en avait pas besoin – si l'objet avait été précieux, il aurait refusé, tout simplement (il était amusant d'observer la façon dont un type aussi peu doué socialement pouvait se permettre de rendre chaque interaction à ce point binaire).

« Tiens, je suis pas sûr que ce soit la meilleure lecture, ceci dit », annonça l'étranger en lui tendant le livre.

Ashley tenta de s'en emparer d'une main ferme ; mais son stress difficilement contenu lui faisait désormais oublier des informations basiques, comme la façon dont les doigts sont censés se refermer afin d'agripper quelque chose. La forme de l'objet n'aidait pas (à la différence d'autres ouvrages littéraires, les livres pour enfant étaient généralement plutôt fins, et celui-ci ne dérogeait pas à la règle) ; il fallut donc quelques secondes au vagabond pour parvenir à serrer correctement la main et ainsi saisir sa demande à la couverture cartonnée. Il espéra que l'autre n'avait rien remarqué tout en inspirant, dans une tentative ratée de reprendre le contrôle sur ses émotions. La suite s'annonçait laborieuse.

En réfléchissant à la remarque de l'homme, il se décrispa légèrement, suffisamment pour afficher un sourire (un sourire ? Plutôt un rictus). Au moins l'un d'entre eux était capable de faire de l'humour (ou bien était-il sérieux ?) ; Ashley comptait cependant répliquer. Lui qui n'avait jamais fini un bouquin, pas même pour les cours – je dirais même mieux : surtout pas pour les cours –, il se surprenait à être investi dans ces petites histoires qui ne demandaient pas que l'on y consacre des heures d'attention, et dont la clarté faisaient frémir les plus grands écrivains. Pas de fioritures, de grandes descriptions, de dialogues à dormir debout ; mais des aventures, des jeux, une morale utile (le blond se surprenait souvent à repenser à la chenille qui n'avait pas eu de dessert parce qu'elle n'avait pas bu sa soupe – il y avait derrière cette conclusion, il en était persuadé, une vérité que peu s'avéraient capables d'accepter sur ce monde).

Mais avant qu'il ne puisse entamer ce débat capital, l'autre enchaîna en se présentant à son tour. Un Green ? Ashley n'en avait que peu croisé, et il avait encore du mal à les analyser. Leur organisation lui filait des frissons dans le dos, et ils semblaient représenter à peu près tout ce qu'il fuyait. Il ne les considérait pas comme des mauvais bougres, non ; mais il avait du mal à ne pas les réduire à de simples fanatiques, lui qui jugeait à peu près tout et n'importe quoi.
Quant à ce surnom, Ashley peinait à le comprendre. Était-ce là son prénom ? « Speesa » ? Non, puisqu'il appartenait à un groupe – les Greens, en plus. Cela devait être quelque chose d'un poil plus concret. Pizza ? Il est peut-être fan de bouffe. Il n'avait pas vraiment une tête à être fan de bouffe. Pour un ou une ado surexcité-e, il aurait pu comprendre ; mais, maintenant que Pizza s'était rapproché, ses traits fermes ne renvoyaient pas vraiment l'idée de convivialité et de partage que le vagabond se faisait des soirées italiennes. Mais alors, comment diable s'appelait-il, déjà ?

« T'es tout seul ? »

L'interrogation résonna comme un rappel à la réalité. Le Green avait croisé son regard en lui tendant le livre, et maintenant que la conversation avait été engagée, il semblait vouloir la poursuivre. Une issue que n'importe quel être humain aurait pu envisager ; n'importe lequel, mais pas le déblayeur, décidément toujours plus surpris à chaque intervention. Il plissa les yeux ; ben oui, je suis tout seul, tu vois quelqu'un d'autre ici ? Il ne cherchait pas vraiment à faire preuve de condescendance ; mais pour lui, il semblait certain que la question avait déjà une réponse. Il était Vagabond ; oui, il était tout seul. Et si j'étais chez les commerçants, je serais pas là, pensa-t-il comme s'il s'agissait d'une évidence – là où, en vérité, sa réflexion ne reposait pas sur grand chose.

Il n'eut de toute manière pas le temps de prononcer une réponse, puisque déjà Ibiza soulevait la main dans un geste réclamant l'attente. Un vague mélange de vexation et de frustration envahit Ashley, qui n'appréciait pas de se faire couper (même lorsque, en vérité, il n'avait encore rien dit du tout). Comme un gosse, il détourna alors le regard, juste le temps de ranger le livre auquel il s'accrochait jusqu'alors dans son sac en bandoulière (celui des jolis objets). L'autre sembla faire de même, mais pour en sortir quelque chose.

« J'en ai trouvé plusieurs, le reste c'est pour mon groupe. C'est pas si facile d'en trouver alors que ça se garde super longtemps. »

Le vagabond, toujours comme un gosse, vit sa curiosité piquée et releva la tête vers ce que le Green lui tendait. Du miel ? Il s'étonna du cadeau ; en effet, il avait pour habitude d'obtenir ce qu'il demandait, justement parce qu'il le demandait, son estime de lui-même surpassant sa gêne sociale. (Le sac à main d'avant, c'était sans doute pour compenser le parapluie cassé qu'Ashley avait lui-même tendu). Mais qu'on lui propose plus que ce qu'il n'avançait ? Non, ce n'était pas nouveau, c'est sûr ; il en avait croisé, des personnes généreuses, et s'était souvent demandé mais comment elles font ? Mais là, quand même, sans le connaître, alors qu'il appartenait à un groupe, et qu'il s'agissait de denrée alimentaire !

Sans réellement payer attention au reste et avec un peu plus de dextérité qu'il n'en avait fait preuve pour le livre, il attrapa le pot, presque rassuré que l'autre ne retire pas sa proposition en se foutant de lui. En plus de ça, Ashley apprenait quelque chose, lui qui n'avait aucune idée du temps de conservation des aliments (il se nourrissait quasi exclusivement de conserves froides, de toute façon). S'il avait été un peu plus décent, il aurait refusé, jugeant l'offre trop bonne ; ou bien il se serait confondu en remerciements, et aurait enchaîné sur une proposition de marchandage. Mais, comme cela a été établi, le vagabond ne faisait pas partie des commerçants (ni des généreux, pour le coup). Ainsi, il bafouilla un « merci » fort poli, et agrémenté d'un peu de reconnaissance, certes (car il était capable de reconnaître que partager de la nourriture, dans ces temps difficiles, était admirable), mais dénué de réciprocité – accepter ce pot de miel ne représentait, pour lui, pas un engagement à retourner la faveur, comme cela aurait pu être le cas pour d'autres.

En vérité, le blond pensait déjà, tandis qu'il rangeait le présent, à l'opportunité que ce type au nom étrange personnifiait.
Cela allait sans dire, Ashley aimait être seul – ou plutôt, il n'aimait pas être accompagné, en témoignaient la sueur qui perlait dans son dos et l'étrange timbre de voix qu'il avait, à son grand dam, adopté depuis que Visa était entré dans son champ de vision. Mais ce qu'il aimait encore moins, c'était travailler ; et même s'il se persuadait encore que ramasser les débris et les déchets n'était pas vraiment un travail, puisqu'il le faisait pour lui et lui seul, il avait déjà songé, lors de ses insomnies les plus folles, à trouver un sous-fifre pour l'aider. Une sorte de robot muet et efficace, que le vagabond pourrait envoyer à sa guise grimper là où Ash n'osait même pas lever les yeux ; porter les sacs poubelle pleins sans effort ; et, à deux, soulever les lourdes armoires renversées dans l'espoir de, peut-être, mettre la main sur un butin inestimable (genre des slips propres). Bien sûr, il n'était pas mécano, alors le projet (comme tous les autres) était tombé à l'eau ; mais la donne pouvait peut-être changer.

Reparti dans sa rêverie, il constata un problème ; même ce Green, visiblement fort sympathique, ne pourrait décemment pas accepter ce genre de proposition. Il avait probablement du travail ailleurs – à fournir pour son groupe, par exemple. Et même si ce n'était pas le cas, ce n'était quand même pas un robot muet, ce qui n'enchantait pas vraiment le jeune homme.
Mais qui ne tente rien n'a rien ; encore une fois, le pire qu'il pourrait annoncer serait un refus, ce qui ne changerait rien au statu quo. Et pour une fois qu'une idée germait dans sa tête...

Alors il tendit la main. Beaucoup trop tard, vu le temps qui s'était écoulé depuis que Cisailles s'était présenté ; mais ça, Ashley n'en savait trop rien. C'était cool, de serrer la main.
Puis il réalisa qu'une main gantée n'était peut-être pas des plus agréables à serrer ; il s'empressa alors de le retirer, avant de réitérer sa proposition, tout ça dans une gestuelle presque comique à observer.

« Enchanté Pizza ! » (il était revenu vers sa première interprétation du nom, puisqu'elle lui semblait la plus probable) « C'est... super gentil de ta part de me filer ça, en fait. Désolé, je mets du temps à réagir, parce que comme tu l'as dit, je suis tout seul, enfin je vois pas grand monde. »

Il avait accroché sur son visage le plus beau sourire qu'il avait pu – qui, par conséquence, ne ressemblait pas à grand chose, mais laissait dévoiler ses dents imparfaites de personne ayant échappé au supplice de l'appareil dentaire. Sa résolution de rester silencieux ne tenait jamais bien longtemps, puisqu'il se sentait constamment obligé de commenter, expliquer, justifier, chacune de ses paroles.
De l'autre main (celle qui était toujours gantée), il se frotta les cheveux, essayant d'avoir l'air détendu. Tout ce qu'il accomplissait était une compilation de ce qu'il pensait être commun lors de conversations.

« Erm, tu fais quoi par ici ? ajouta-t-il avant de se racler la gorge. Enfin, à part distribuer du miel aux gens que tu connais pas ! »

Sans imaginer que sa blague pouvait être mal prise, il continua.

« Moi je nettoie un peu, comme j'ai rien d'autre à faire. C'est pépère. Et puis ça occupe. Généralement je ramasse ce que les gens veulent pas. Genre le parapluie. Mais j'en voulais pas non plus. C'est pour ça que je l'ai reposé – enfin, jeté. Enfin je pense que t'avais déjà compris. »

Sentant qu'il perdait de l'assurance (de l'assurance ? Quelle assurance ?), disons, de l'élan dans sa diction, il gonfla les joues et s'étira d'une manière somme toute peu naturelle.

« Après, c'est vrai que c'est pas super simple... souffla-t-il en laissant retomber ses bras et en lorgnant la réaction du Green. Ça pèse un peu. Et y'a toujours des coins où je peux rien faire. »

N'ayant aucune manière de jauger sa propre subtilité, il crut bon d'ajouter quelques mots, afin de dédramatiser la situation.

« Enfin, c'est moi qui ai choisi d'être tout seul, hein, j'vais pas m'en plaindre ! »



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Mer 24 Fév - 13:09

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L'EPAVE ET SES ROIS

Le dénommé Ashley ne semblait pas très adroit, ce qui rassura Spiza en quelques sortes. Il préférait ce genre de rencontre à celles qui l'opposaient à des personnes qui paraissaient tout droit sorties d'une autre réalité. Le polonais ressentit une sorte de satisfaction à savoir deux de ses possessions délivrées à Ashley. Les offrandes avaient une connotation, un sous-entendu qui impliquait que les hommes étaient à présent dans les faveurs l'un de l'autre — c'est du moins ce que concluait l'esprit simplet du Green, qui voyait toujours ses relations d'une manière très binaire : c'était tout ou rien, le vagabond venait d'être invité dans le tout.
Ashley tendit la main, et Spiza crut instantanément qu'il entra dans le tout relationnel de son interlocuteur, alors qu'il lui serra la main après avoir retiré son gant avec la même hésitation pensive que le vagabond. Pourtant, il ne se douta pas un instant que les relations ne marchaient pas de la même façon pour tout le monde ; même quand on le lui rappelait, il l'oubliait à la prochaine rencontre, comme un automate qu'on formatait à chaque nouvelle activation.

Il tiqua. Son sourcil troué se releva un peu plus que l'autre. Pizza ? Il aurait probablement cru à une blague si Ashley n'avait pas prononcé le mot avec tant de sérieux, et une sorte de distraction ou de nonchalance, qui lui donnait l'air ailleurs bien qu'il fut bien présent devant le polonais. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire maladroit, pas très joli, de ceux qui balaient la beauté d'un visage et qui donnent l'air crispé et mal à l'aise. Mais les mots qui venaient de grimper dans sa gorge se tapirent sous sa langue, il lui était toujours difficile de contredire quelqu'un, même lorsque il savait avoir raison. Et ses pensées avaient tendance à oublier l'existence de Spiza : ce qu'elles firent à nouveau, à l'instant où Ashley se mit à parler de lui. Alors, le polonais pouvait bien être nommé Spiza, Pizza, ce n'était pas très important, parce qu'il n'existait que pour les autres, et l'important n'était pas qui il était, mais ce qu'il était pour eux.
Spiza voulait être pour le vagabond. Au moins l'espace d'un moment, juste de quoi le remplir de cette satisfaction d'être utile.

Le Green entendit le « je suis tout seul » comme une recherche informulée à recevoir de la compagnie. Aussi, il sentit la chaleur envahir son corps, et son sourire s'étira, plissant ses yeux en une expression bienveillante qui pourrait faire peur à n'importe quelle personne victime de peur de l'engagement. Ses bras se balançaient légèrement le long de corps, jusqu'à ce que ses doigts attrapent le pan de sa manche déchirée pour jouer avec. Ses pupilles n'avaient pas quitté le blond alors que ce dernier se lança dans une tirade maladroite qui sonna, aux oreilles de Spiza, comme une nouvelle invitation à passer du temps ensemble.
Ashley avait l'air ouvert à la conversation. Ce qui était, globalement, la seule qualité que Spiza recherchait chez un interlocuteur. Il revêtit son gant, et, poussé par la bonne humeur de s'être trouvé un nouveau camarade — il n'avait pas prévu ça en se levant le matin, et il était rare qu'il puisse apprécier une bonne surprise, il s'empressa de tirer sur la manche du blond sans sourcil pour lui indiquer.
(Il avait lâché la manche aussitôt, mais il tourna son regard vers le solitaire pour l'inciter à le suivre.)

— On fait un peu pareil, sauf que moi je suis plus tout seul quand je rentre chez les Greens. On peut chercher des trucs ensemble si tu veux, et on verra comment on partage nos récoltes. Ce sera probablement plus facile à deux. Sa voix, qui s'était montrée plutôt monotone, s'envola cette fois un octave plus haut. Il lui avait fallu tout son courage pour formuler les mots, mais il était décidément plus facile d'aborder un solitaire que quelqu'un qui était lié à un groupe. La perspective d'être accompagné lors de son exploration urbaine l'enchantait ; celle de ne pas se faire juger par son manque d'intérêt pour la politique discutée des Greens le galvanisait. Il réfléchissait déjà à la façon dont ils allaient diviser leurs trouvailles, sans se soucier un seul instant de l'éventualité que son enthousiasme ne soit pas partagé. Il ne se préoccupa pas non plus des contingences qui impliquaient, par exemple, qu'Ashley préfère explorer tout seul, ou qu'il s'avère en réalité être un voleur de denrées. De toute évidence, un voleur ne lui aurait pas demandé si gentiment un livre illustrés pour enfants. Quoi qu'il en soit, n'importe quelle personne ayant côtoyé Spiza l'espace de quelques jours savait que sa méfiance ne durait qu'un instant — un réel instant, de ceux qui ne durent que deux secondes.

— Tu cherches des choses en particulier ? À part des livres. Il y a une bibliothèque dans le bâtiment au fond de la rue, je l'ai pas vidée parce que les livres sont très lourds, et je doute qu'on ait tant de lecteurs avides. Son anglais aurait pu être très bon, si son accent d'Europe de l'est ne déformait pas certains des mots. La dureté de ses syllabes concordait avec la dureté de ses traits, mais contrastait avec la bienveillance évidente qui le constituait. C'était quelque chose dont on devait prendre l'habitude si on souhaitait parler à Spiza, il pouvait s'avérer très bavard lorsque il pensait partager un moment significatif avec quelqu'un.
Tandis qu'il parlait, il déblaya un tas de cagettes de la pointe du pied, mais n'y trouva rien de plus qu'une boîte de conserve déjà vidée. Ils n'étaient définitivement pas les premiers à passer par là, le contraire aurait été plus qu'étonnant.

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Jeu 25 Fév - 3:17
et nous serons les rois de l'épave


Si notre vagabond avait dû, à cet instant précis, se reconvertir professionnellement (ne lui dites surtout pas que, pour changer de métier, il faudrait déjà en avoir un), il se serait vu pêcheur.
Le poisson a mordu, ajoutait-il mentalement, au cas où la métaphore aurait échappé à quelqu'un dans son public imaginaire. Plus que victorieux, il se sentait profondément malin, tel l'enfant qui ne se rend pas compte qu'on le laisse gagner. Il ne s'imaginait pas un seul instant que son interlocuteur puisse trouver son compte dans l'affaire ; pour Ashley, l'Aziza s'était fait avoir.
Ainsi, le blond ne releva pas la mention de « partage » dans la proposition du Green. Il se connaissait déjà un premier avantage ; ce qu'il recherchait, pas grand monde n'en voulait, alors « partager » ça avec Pizza serait du gâteau (vous l'avez ?). Le deuxième, c'était que les négociations semblaient assez aisées avec cet énergumène.

A dire vrai, dans son entrain, il ne releva pas non plus l'action de l'énergumène en question – si cela avait été le cas, il se serait encore posé mille questions sur cette potentielle coutume inconnue du tirage de manches, et le public imaginaire mentionné plus tôt aurait pu faire une pause tant il aurait pris son temps pour recommencer à penser à autre chose.
Au lieu de ça, il se concentrait déjà sur l'avantage qu'il venait de gagner. De toute façon, ça va, s'il est chez les Greens ça veut dire qu'il a d'autres accès aux ressources. C'est moi qui suis dans une mauvaise situation, c'est normal qu'on veuille m'aider...

« Tu cherches des choses en particulier ? À part des livres. Il y a une bibliothèque dans le bâtiment au fond de la rue, je l'ai pas vidée parce que les livres sont très lourds, et je doute qu'on ait tant de lecteurs avides », ajouta Dr. Oetker.

Après quelques secondes de réflexion, Ashley comprit l'énième confusion entre les deux hommes – à croire qu'ils étaient faits pour ne pas se comprendre –, et afficha sans vraiment en prendre conscience une moue perplexe. Oui, en effet, il avait bien dit qu'il cherchait des livres ; et maintenant que cette fausse vérité était devenue un fait établi, difficile de faire marche arrière, à moins de se lancer dans une autre explication. Mais, il le savait, contrairement aux autres, celle-là ne serait pas juste empreinte d'une maladresse touchante ; elle aurait au contraire le tranchant des choses qu'on ne veut pas avouer, pas tout de suite, pas à un inconnu, pas dans cette situation. Était-ce si grave, que l'autre cherche à satisfaire ce besoin de livres fictif ? A l'inverse, cela ne faisait que démontrer, s'il le fallait encore, son altruisme. Une personne altruiste, c'est une personne qui pense aux autres, et pour l'instant, les autres, c'est moi ; alors c'est tout bénèf'.

Ashley n'était pas franchement du genre à réfléchir avant de se lancer ; mais en plus, il craignait un peu de faire fuir le Green à coups de refus. Si je fais pas d'efforts, il va se dire que je suis un con ingrat et il va se barrer.

« Ah, ben ça peut être un bon début, oui ! Je te rassure, je suis pas un grand lecteur, en fait je cherche surtout des objets sympas, un peu tape-à-l’œil, des babioles. Dans les bouquins, j'aime surtout les couvertures, alors si tu dis que c'est des gros livres, y'a moyen qu'ils soient jolis ? En gros je récupère les bouquins beaux mais barbants, pis toi tu prends ceux qui t'intéressent. Si y'en a qui t'intéressent. »

Tant qu'on n'y est pas, de toute manière, compliqué de se faire une idée.
Le vagabond observa Tisane renverser des cageots et révéler une conserve vide. Il dut se retenir d'aller, mécaniquement, jeter ladite conserve, en marmonnant des banalités sur le respect de l'environnement même dans les périodes les plus difficiles. On n'est pas des animaux, merde – ah mais attends elle était pas à moi celle-là ?
Au lieu de ça, il roula des épaules comme pour s'échauffer avant un marathon (après tout, il avait choisi cette rue exprès car elle n'était pas loin de chez lui, et il fallait désormais se déplacer) ; replaçant correctement sa sacoche, il agrippa son sac poubelle quasi vide, baissa enfin le t-shirt qu'il gardait sur son nez depuis le début, et jeta un regard à... son nouveau partenaire ? Associé, peut-être ? Pour ne pas tout de suite le qualifier de servant (on n'est pas des animaux).

« Tu me guides ? J'ai pas vraiment l'habitude d'entrer dans les bâtiments », suggéra-t-il avec un haussement de sourcils fantômes pour accompagner sa confession.

Confession qu'il mit du temps à, lui-même, analyser. Il avait commencé à marcher, à une allure convenant à ses petites jambes (c'est-à-dire plutôt lentement), et qui, il en était sûr, ne dérangerait pas le Green, qui n'était pas plus grand que lui, il s'en rendait à présent compte. Une légère brise s'était mise à souffler sur son visage, envoyant quelques-unes de ses mèches mal taillées dans ses yeux, comme l'incarnation même de sa fainéantise voulant l'empêcher de s'éloigner.
Pas l'habitude de rentrer dans les bâtiments... Oui, ça faisait sens, les immeubles par ici étaient dangereux. Beaucoup s'étaient effondrés, et parmi ceux qui n'avaient été que partiellement détruits, les risques étaient ailleurs ; dans les sols menaçant de céder, par exemple.
Mais alors, pourquoi diable avoir accepté ? Était-il stupide ? (Oui, il l'était.) Pas vraiment prévoyant non plus. Et Spirale avait un je-ne-sais-quoi d'apaisant – bien sûr, c'était surtout la volonté de le garder comme bénéfice qui avait poussé le blond à le suivre, mais pas seulement. Il était égoïste, oui, certainement, mais pas sans cœur ; et, bien qu'il refusait encore de l'admettre, Ashley trouvait presque touchante l'attitude de l'explorateur. (Une pensée quelque peu condescendante, qui ne tranchait finalement pas avec son comportement global.)

« Euh, par contre... Je tiens pas non plus à risquer ma vie pour des bouts de papier. C'est pas risqué, ton truc ? » lança-t-il en enjambant une flaque de boue. Il observait son nouveau camarade, mi-inquiet, mi-intrigué. « D'habitude je reste dehors, donc c'est un peu nouveau pour moi », continua-t-il d'une voix mal assurée, le tremblement de celle-ci accentuant sa hauteur (il avait toujours tendance à partir dans les aigus quand il s'inquiétait), afin d'essayer de le convaincre (et de se convaincre) qu'il n'avait absolument pas peur de finir en morceaux.



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Jeu 25 Fév - 17:46

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L'EPAVE ET SES ROIS

Si il y avait quelque chose que Spiza aimait particulièrement dans les relations, c'était l'espoir qui naissait après une nouvelle rencontre : celui de penser qu'il allait vivre des tas d'aventures avec un nouvel arrivant dans sa vie, qu'ils échangeraient des conversations diverses et intenses, qu'ils deviendraient inséparables. Au contraire, s'il existait quelque chose qui lui nouait la gorge et le rendait nauséeux, c'était de savoir que ça ne finissait jamais comme ça, pas pour lui. Il avait peut-être quelque chose de repoussant.

La voix d'Ashley lui parvint, balayant pour le moment les pensées anxieuses qui venaient de monter en lui sans qu'il ne les y autorise. Il tourna la tête vers le vagabond, signalant inconsciemment que l'homme avait toute son attention. Cette fois, il se contenta de hocher la tête, ses lèvres scellées, comme s'il avait peur que les prochains mots qu'il prononce laissent entendre son manque d'assurance —il n'avait, de toute façon, pas l'air de quelqu'un de confiant. Son interlocuteur n'eut pas besoin de clarifier son désintérêt pour les livres, Spiza comprit de lui-même. La bibliothèque fut rayée de ses plans, même s'il n'avait, réellement, aucun plan digne de ce nom. Lui-même n'était pas un fin connaisseur du coin, qu'il évitait généralement pour ne pas tomber sur quelqu'un d'autre. Les ruines urbaines invitaient quiconque les voyait, avec leur nombreux bâtiments et la perspective d'endroits pas encore fouillés, vestiges de journées bien remplies et maintenant enterrés. Spiza se fit la remarque que le vagabond devait être bien plus courageux que lui, pour rester seul dans un environnement plus ou moins hostile.

Courageux ou prudent. Ashley annonça qu'il ne rentrait habituellement pas dans les bâtiments. Le polonais ne sut pas quoi penser suite à cette remarque. L'homme sans sourcil lui paraissait quelque peu mystérieux, et il arrêta de se poser des questions. C'était une habitude qu'il avait pris ici, à Arcadia Bay. Tout le monde semblait dissimuler, sous trois couches de silence et deux autres de mensonges, toute leur personnalité. C'étaient peut-être là des couches que les humains avaient toujours bâti, même à l'Extérieur, mais que Spiza n'avait pas remarqué jusque là. Sa naïveté lui faisait défaut, même alors qu'il avait conscience de son existence. Aussi, alors qu'il leva la jambe pour passer par une fenêtre cassée, (Attention aux bouts de verre sur le côté, passe ici, ça coupe pas là, il conseilla mais sa voix parut être celle de quelqu'un d'autre), il n'imagina pas un seul instant qu'Ashley essayait surtout de tirer un intérêt matériel de leur collaboration.

Une fois à l'intérieur du bâtiment, il se frotta les mains sur le pantalon, balaya la pièce du regard. Ça avait été une chambre, et à en juger par les rideaux écrasés au sol et la couette à motifs pleine de poussière, c'était probablement la chambre d'une ou de deux personnes âgées. Il posa son regard sur Ashley, pour surveiller son entrée dans la pièce.
— On peut voir si il y a d'autres trucs cool que des livres, si tu veux. On fera attention, si on évite les escaliers ça ira. Si tu veux.
Alors qu'il parlait, son regard avait commencé à se balader. Le mur. Le cadre de la fenêtre. La main d'Ashley. Son visage à présent découvert. Le mur. Le cadre de la fenêtre. Prendre des décisions, les imposer à quelqu'un étaient des comportements dont il n'avait pas l'habitude. C'était un peu plus facile dans ces situations, quand il avait l'impression d'être celui qui pouvait guider. Mais ça n'arrivait jamais. Sa nervosité le poussa à bouger, rester immobile demandait un contrôle de soi que ses nerfs lui interdisaient d'avoir. Il fureta, aventura ses doigts sur un bureau en bois sombre, les referma sur la poignée circulaire d'un tiroir. Sourire triomphant, il sortit un collier du tiroir. Il n'était pas de très bonne qualité, ce qui expliquait probablement qu'il soit si solitaire dans ce tiroir desert, et il pensa que personne ne voudrait d'un collier dont le pendentif était une croix chrétienne, mais il lança le collier en direction d'Ashley. Son lancer, mal calculé puisqu'il avait à peine regardé dans la direction, tomba un peu trop loin. Spiza s'empressa de le ramasser pour le tendre cette fois-ci correctement à Ashley.
— Tiens, si jamais ça peut t'intéresser. J'aimerais bien trouver des trucs à manger, ou des trucs plutôt utiles, si t'en vois. Je te laisse le reste. Il avait murmuré, comme s'il avait peur que sa voix ne soit trop forte et fasse vibrer le plafond, duquel tomberait un tas de poussière, ou peut-être même un morceau de plâtre leur tombe sur la tête.

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Sam 27 Fév - 0:09
et nous serons les rois de l'épave


La confiance, c'était ce qu'il manquait à Ashley en pénétrant dans l'immeuble. Quand on se crée un rituel, difficile d'en sortir ; et bien que plus d'un an s'était écoulé depuis que cette zone avait été ravagée, il s'imaginait toujours l'un des bâtiments commencer à s'affaisser, faire trembler le sol, et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, l'engloutir (lui et son nouveau collègue) sous un monceau de béton.
La confiance, c'était aussi ce qui semblait avoir animé ledit nouveau collègue pendant un cours instant. Ashley peinait à se faire une idée de lui – il faut dire qu'ils venaient de se rencontrer ; mais il existe des personnes qui savent faire connaître leur tempérament et leurs valeurs dès les premières secondes. Le Green n'avait pas l'air de ces gens-là ; à vrai dire, il semblait tout à fait ordinaire, derrière ses prononciations un peu hachées (selon le vagabond lui-même, qui avait visiblement bien du mal à trouver de bons adjectifs pour décrire les accents) et son air fermé.

Et puisque notre blond avait expressément demandé à être guidé, il dut accepter de suivre des indications qui ne l'attiraient pas spécialement (comment ça « ça coupe pas là », c'est littéralement une ancienne fenêtre, doit y'avoir du verre partout, tiens bah je l'avais bien dit, je vais me trancher un doigt, je vais vraiment me trancher un doigt, je jure que si je me tranche un doigt je te le fais bouffer), et ce qui n'était pourtant pas une tâche difficile s'apparenta à une mission d'agent du FBI pour le jeune homme.
Fort heureusement, cette fenêtre n'étant après tout qu'une fenêtre, l'introduction dans le bâtiment fut un succès ; et après la couardise vint l'émerveillement.

Ashley ne plaisantait pas en disant qu'il n'avait jamais pénétré dans des appartements depuis qu'ils avaient été détruits. Il avait fait des halls, oui, et ça lui avait suffi ; mais face à lui s'étendait désormais un tout nouveau monde. Tel une Jasmine des temps modernes, il se sentait tout léger, et il dut admettre que son âme d'enfant était plus excitée par cette visite que par Noël. Pour remplacer le silence, et parce qu'il espérait secrètement ne pas être le seul à se sentir enjoué, il se mit à fredonner l'air du thème d'Indiana Jones, en survolant la pièce des yeux.

Les mots de Spiza (faut vraiment que je lui demande si c'est ça) accompagnèrent sa découverte. Il fut heureux, pour une fois, de constater que son manque assez clair de subtilité avait pu faire passer un message, et que ce dernier n'avait pas fait reculer le Green. Il acquiesça (de manière un peu trop exagérée, ce qui lui donna l'air stupide – oui, encore – ainsi qu'une légère douleur dans la nuque), sans trop savoir quoi ajouter à cette proposition, un peu moins affirmée que les conseils précédemment offerts sur la manière d'entrer (Ashley ne remarqua pas la différence).
L'habitude du travail en extérieur le fit se pencher d'abord sur ce qui était à ses pieds (sinon, il ne saurait jamais par quoi commencer) tandis que son camarade s'aventurait près d'un bureau ; sans surprise, il n'observa que du verre brisé et des gravats, alors il fit un pas en direction de ce qui lui semblait être une petite étagère renversée. Avant qu'il ne puisse se pencher pour la soulever et en découvrir le contenu, il entendit un léger sifflement, puis un petit « poc ». Tournant la tête pour comprendre, il vit l'autre blond ramasser un objet et le lui tendre. Un pendentif ?

Sans rien dire, Ashley enroula ses doigts dans la chaîne et la leva à hauteur de regard, comme il avait vu faire tant de personnages fictifs. Il n'avait aucune idée du matériau utilisé pour la fabriquer ; puisque c'était gris, il se l'imaginait faite d'argent (en réalité, c'était probablement du toc). Une croix, petite et sans fioritures, y était accrochée. C'est vrai que ça existe, ce truc. Il avait grandi sans religion, mais il connaissait quelques personnes croyantes, dans sa vie d'avant. Est-ce que ce mec est chrétien ? Est-ce qu'il veut me convertir ? Ce furent là ses premières interrogations, celles, indélicates, qui venaient comme un réflexe ; il les balaya et, plutôt que de fourrer le bijou dans son sac, il le mit autour de son cou (ce qui lui demanda plus de temps qu'il ne voulut l'admettre, l'ouverture étant vieille et un peu bloquée, et Ashley étant...Ashley).
Il répondit à nouveau par un hochement de tête au Green – un peu en retard, comme à son habitude.

« J'suis pas sûr que tu trouves grand chose de comestible ici », glissa-t-il cependant, d'un air distrait. « Y'a ptet une cuisine pas loin. »

Cette dernière suggestion servait plus de remplissage que de véritable aide ; s'il y avait une cuisine, il serait peut-être compliqué d'y accéder – s'il n'était pas compliqué d'y accéder, quelqu'un se serait déjà servi. Il ne prit donc pas la peine d'accompagner ses mots par un geste (en se levant pour aller voir, par exemple).
Retrouvant son objectif initial, il s'accroupit près de l'étagère qu'il avait voulu inspecter. Elle n'était pas plus large qu'Ashley, et n'avait pas dû faire plus d'un mètre vingt lorsqu'elle était encore entière.
Il la souleva sans trop de difficultés, laissant découvrir quelques livres (ah ben !), une figurine en bois représentant un éléphant (il lui manquait toutefois la trompe ainsi qu'une patte), et... une boîte à gâteaux ?

Oh, le vagabond n'espérait pas grand chose, d'autant qu'il n'aimait pas vraiment ça, les gâteaux. Mais c'est la curiosité de découvrir leur état, couplée à l'amusement de trouver à manger juste après s'être dit que cela serait impossible, qui le poussa à ouvrir, vite, la boîte métallique. La déception fut grande, puisqu'elle ne révéla que du matériel à couture (des aiguilles, quelques bobines de fil coloré, un dé rouillé, et des boutons tous différents les uns des autres).

« Euh...par 'trucs utiles', tu sous-entends ça ? » interpella Ashley d'une voix qui laissait poindre le dépit.

Il le savait, c'était probablement une bonne chose de trouver de quoi coudre ; et il se blâma de ne pas avoir pensé à garder la boîte et son contenu, afin de l'échanger plus tard. Mais, pour lui qui ne savait pas coudre (et ne voyait pas l'intérêt d'apprendre), c'est de l'ennui en barres.
En tendant la boîte vers Spiza de sa main gauche, il chercha à passer en position assise, ses genoux commençant à le tirailler ; mais il calcula mal son coup, ses talons glissant sur le sol, et dut se rattraper en posant la paume droite à terre.
Il se figea le temps d'une seconde, afin d'analyser ce qui venait de se passer ; puis il ramena sa main droite à lui, sans trop réaliser qu'elle lui faisait mal. Ce n'est en vérité qu'à la vue du sang qu'il comprit avoir appuyé contre les morceaux de verre observés plus tôt. Eh ben super.

En inspectant les entailles, Ashley put constater qu'elles n'avaient pas l'air très profondes (enfin j'espère, j'suis pas infirmier). Quelques éclats, nettement plus petits que ceux qui avaient causé les coupures, jonchaient sa peau ; il souffla dessus dans le but de les faire partir (eux et les particules de poussière s'étant invitées à la fête), mais certains s'étant probablement enfoncés dans l'épiderme refusèrent de décoller. Il soupira bruyamment.

« Dis moi que t'as une pince à épiler. »



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Sam 27 Fév - 10:47

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L'EPAVE ET SES ROIS

La voix d'Ashley s'éleva dans les airs, remplissant la pièce d'un fredonnement mélodieux. La musique interprétée rappela aussitôt des souvenirs à Spiza, dont la voix se joint à celle du vagabond quelques instants, avant de se faire silence à nouveau. C'était la première fois qu'il explorait avec un camarade autre qu'un Green. Son travail ne ressemblait plus tellement à du travail, mais plutôt à une expédition entre amis. La perspective lui plut.

Il observa Ashley examiner le collier puis le porter. Le coin de ses lèvres s'étira, affichant un petit sourire timide. Spiza ne s'était pas attendu à ce qu'Ashley porte le bijou, il avait eu l'impression que l'homme revendait les objets de valeur qu'il trouvait. Ce n'était peut-être pas le cas —il ne pensa pas que c'était probablement parce que le collier semblait bien trop vieux et abîmé par le temps pour avoir une quelconque valeur. Lucjusz appréciait le moment. C'était autre chose que les conversations politiques chez les Greens, autre chose que les « Hey l'explorateur, tu tombes bien, j'ai un service à te demander ». Spiza aimait être utile, mais pas n'importe comment. Il aimait que cette utilité se métamorphose en relation, en attention positive, en quelque chose qui lui donnerait l'impression d'exister. Ce n'était pas le cas chez les Greens. On l'oubliait après chaque service rendu. Il se demanda un instant si Ashley l'oubliera aussi après cette expédition. Le vagabond attira son attention à cet instant, lui présentant une boîte à biscuits en métal dans laquelle on avait mis des outils de couture. Il avait tendu le cou, les sourcils relevés et les yeux légèrement arrondis, intrigué par l'objet, et en voyant l'intérieur, il présenta son pouce levé à Ashley.

— C'est parfait, j'avais besoin de nouveaux trucs pour coudre. annonça-t-il, attrapant la boîte au métal froid entre ses doigts. C'était un peu présomptueux de dire qu'il en avait besoin, puisque sa couture n'était ni très utile, ni très performante, ni très esthétique — elle n'était donc pas grand chose. Mais il avait promis de s'y remettre sérieusement et d'apprendre de nouveaux patrons, d'autant plus qu'il avait réussi à trouver un magazine de couture il y a peu. On n'allait généralement pas très loin avec des gants de cuisine et des dessous de verre. Le polonais examina la boîte, elle était assez grande pour accueillir d'autres matériaux. Il espérait qu'ils trouvent autre chose. À nouveau, la voix du vagabond bouscula ses pensées. Il releva les yeux, bientôt écrasés par la pression de ses sourcils. Spiza détestait la vue du sang, mais il se fit violence en plantant ses dents à l'intérieur de sa lèvre inférieure. Hochant la tête silencieusement, parce que les mots se tapissaient au fond de son esprit quand il était pris de panique, il s'accroupit près du vagabond et laissa descendre son sac à dos de son épaule. Le sac à dos noir qui s'apparentait à un sac de voyage, ne semblait pas très rempli. Le haut du sac s'affaissait sur le vide de l'intérieur. Spiza l'ouvrit et en sortit une petite trousse de secours. Il ne l'avait jamais utilisée pour lui, en témoigne la griffure qui serpentait le long de son avant bras à l'air libre. Un « zip » plus tard, la trousse carrée fut ouverte. Il en sortit une petite bouteille d'eau et un chiffon propre. Sa trousse de secours était constituée du strict minimum, c'étaient des éléments qu'il avait trouvé ici ou là, ou préparé à l'avance chez les Greens. Sans un mot, il attrapa la main d'Ashley. Il n'avait pas eu souvent l'occasion de s'occuper de quelqu'un de cette façon, mais il se rappela comment Corvin l'avait fait pour lui : silencieux, méticuleux, les sourcils froncés, comme s'il avait été prêt à sermonner Spiza d'un moment à l'autre. Il sembla réfléchir un moment, puis posa la bouteille pour attraper une petite pince à épiler dorée, qu'on aurait pu penser sorti tout droit d'un kit offert par un cabinet d'esthéticien.

— Bouge pas. Et pose pas tes mains sur le sol sans regarder. L'urgence de la situation lui donna une assurance rare — une assurance un peu bête, surtout, puisque Ashley n'avait pas pu éviter de poser la main sur le sol, mais Spiza n'avait pas vu l'action. 'Fin, fais attention. L'assurance s'était dissipée aussi rapidement qu'elle s'était matérialisée. Le polonais avait l'habitude des travaux méticuleux, mais le sang rendait ses doigts fébriles. Il rata à plusieurs reprises les bouts de verre, dut s'y prendre à plusieurs fois pour réussir à les attraper. Régulièrement, il relevait la main d'Ashley, la tirait un peu plus à gauche, un peu plus en haut, un peu plus en bas, et les yeux plissés il tentait de déceler le brillant caractéristique des bouts de verre dans la peau. Finalement, satisfait de son travail, il rangea la pince à épiler et attrapa la bouteille dont il vida un peu du contenu sur le chiffon. Il essuya la main du vagabond.
— Tu veux que je mette un bandage ? J'en ai.
Le polonais glissa ses yeux noisettes sur le visage d'Ashley, tout à coup intimidé par la situation. Sa voix s'était faite plus discrète, et il s'éclaircit la gorge, baissant les yeux à nouveau vers la main d'Ashley, puis vers une de ses poches. Il songea un instant à lui subtiliser un de ses gants pour le lui remettre à la main, mais le geste lui parut bien trop confiant et intime pour être réalisable. Il s'imagina ensuite lui donner son propre gant, mais le vagabond aurait probablement trouvé ça étrange. Ses pensées restèrent sans écho.


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Lun 1 Mar - 19:14
et nous serons les rois de l'épave


Ashley n'avait pas une chance miraculeuse, aussi lui arrivait-il souvent de se faire un peu mal (échardes dans le pied, bleus aux genoux, et saignements de nez en tous genres lui étaient familiers). Cette coupure n'était pas une exception : pour une personne peu habituée, les plaies avaient l'air de beaucoup saigner, mais ce n'était en réalité pas si méchant.
Et donc, de par sa maladresse (qui ne pouvait malheureusement pas être entièrement contrée par sa prudence), Ashley faisait partie des personnes habituées. Ce dont il avait moins l'habitude, c'était les soins qui venaient après – puisque tout ce qu'il avait subi jusqu'à maintenant ne nécessitait qu'une simple attente en guise de guérison.

Ainsi, quand Spiza répondit à sa requête rapidement et efficacement, c'est une admiration enfantine qui illumina une nouvelle fois le regard d'Ashley. L'air concentré, presque professionnel, l'homme en face de lui semblait presque avoir prévu le coup tant ses gestes semblaient précis. Le vagabond, lui, était incapable d'une telle réaction (il aurait suggéré à un blessé de se rendre à l'hôpital, tout au plus), et il faillit se demander pourquoi l'aide était le premier réflexe du Green – puis il se souvint, justement, qu'il vivait en communauté, et que c'était sans doute ce que faisaient les gens là-bas pour éviter que quelqu'un crève bêtement du tétanos.

Cette conclusion n'interrompit cependant pas son questionnement sur ce type qui venait de sortir une trousse de secours (mais pourquoi j'ai pas ce genre de trucs moi) de son sac, déclenchant un « wow » muet chez Ashley, qui commençait à penser qu'il avait sous-estimé la personne. Et en même temps, un gars comme ça qui fait tomber des trucs, qui offre de la bouffe sans rien demander en retour, et qui accepte d'être exploité, on m'excusera, mais ça a tout du pigeon.
(Il ne pensa pas un instant que, jusqu'à présent, aucune « exploitation » n'avait été effectuée – et que la prétendue position de supériorité du vagabond ne prenait place que dans son imagination.)

Et quand Spiza lui prit la main, il ne pipa mot, trop impressionné (et intimidé) pour chercher à faire le malin. Il lui fallut d'ailleurs serrer les dents très fort lorsque le Green, armé de sa pince, vint retirer les bouts de verre restants. L'action fut réalisée délicatement, mais le ressenti d'Ashley ne suivit pas totalement cette réalité (pourquoi il appuie là c'est quoi son problème putain ça fait mal arrête de me secouer mais t'es bigleux C'EST PAS DU VERRE CA C'EST MA PEAU) ; pour ne pas jurer, il balança la tête en arrière et se mordit l'intérieur des joues. S'il avait fallu choisir un mot pour le décrire, en cet instant, il aurait choisi « souffrant » ; pour le reste du monde, il était simplement « douillet ».
Quelle idée à la con de retirer ses gants pour marcher, on n'a pas idée d'être aussi con, c'est pas avec mes mains que je marche, pourquoi j'ai retiré mes gants, en plus je le sais que c'est casse-gueule ici, bordel.

Les paroles de l'infirmier improvisé rejoignirent ses propres pensées, et il pinça les lèves de vexation. Comme s'il avait besoin qu'on lui fasse la morale... enfin, à vrai dire, il avait besoin qu'on lui fasse la morale, puisqu'il était incapable d'appliquer de simples mesures de sécurité (qu'il s'était, de surcroît, lui-même imposées). Cette constatation l'agaça ; il serait assez mal placé pour rétorquer, d'autant qu'il était toujours reconnaissant de ne pas avoir à se soigner lui-même.
Le second conseil vint après une pause de quelques secondes, et calma un peu le blond boudeur. Il ne sut identifier le manque de confiance, et le prit pour une envie de s'adoucir. Il eût envie de répondre un « oui papa » ironique, mais il se ravisa, songeant que ça n'augmenterait pas son capital sympathie. D'autant que ce changement de ton avait piqué sa curiosité ; le vagabond n'était habituellement pas doué pour décrypter les personnalités, mais celle-ci lui paraissait encore plus troublante que les autres. D'un coup ferme et assurée, de l'autre douce et effacée – cherchait-il à brouiller les pistes ? Sa confiance en lui le lâchait-elle toutes les minutes impaires ? Ou bien Ashley avait-il enfin appris à faire peur aux autres ? Balayant cette dernière possibilité (trop irréaliste, même pour un arrogant comme lui), il écouta la proposition de Spiza.

« Ah, euh, non merci, c'est bon, j'ai ce qu'il faut. »

Il n'avait pas réalisé que la tâche était finie ; de la main gauche, il tâtonna dans son sac pour en sortir un chiffon qu'il pensait propre, et entama de l'enrouler autour de la blessure désormais nettoyée. Il aurait pu accepter le pansement, aussi nonchalamment qu'il avait accepté le pot de miel un peu plus tôt ; mais la honte de s'être fait réprimander, couplée à celle d'avoir glissé aussi bêtement, le poussa à se débrouiller, nouant le tissu avec ses dents.
S'il y avait bien une chose que l'embarras n'avait pas pu chasser, c'était la curiosité. Un mec aussi organisé qui ne s'était pas encore moqué des balbutiements d'Ashley, c'était déjà assez rare pour être signalé ; mais en plus, cela réveillait en lui une sorte d'envie d'essayer (essayer d'en apprendre plus, essayer de s'intéresser à l'autre, peut-être – pas excessivement, non plus, juste assez pour comprendre).
Et puis, si on traîne ensemble, ça arrivera bien sur le tapis un jour.

« Tu bossais à l'hôpital, avant ? » Il marqua une pause. « Parce que t'as l'air de t'y connaître. Enfin, te sens pas obligé de répondre, si ça te dérange. J'aime bien parler de moi donc on peut aussi faire ça », s'empressa-t-il d'ajouter, constatant que sa question pouvait sembler brutale.

Sans réaliser que sa suggestion pouvait sonner comme une assertion (« je vais de toute façon finir par parler de moi parce que c'est la seule chose que j'aime dans la vie »), il laissa planer un silence ouvert ; et, pour ne pas réitérer son erreur (mais aussi afin de se donner l'air occupé), le vagabond s'empara des gants qu'il avait rangés plus tôt, lorsque les deux compères se dirigeaient vers le bâtiment. Il enfila le gauche sans problème, mais il dut constater que le droit allait lui poser plus de soucis au vu de l'épaisseur du bandage qu'il avait créé. Il admit que refuser celui de Spiza, qui aurait probablement été plus sain et mieux réalisé, avait été une erreur (mais, qu'à cela ne tienne, il rangea le second gant en se promettant de continuer la journée en gaucher).
Tournant désormais le dos au Green, il récupéra son sac poubelle, afin d'aller se pencher vers les coupables de sa douleur, et entreprendre de les jeter (plus par vengeance que par bienveillance envers le prochain qui s'aventurerait par ici).


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Jeu 4 Mar - 12:11

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L'EPAVE ET SES ROIS

Lucjusz se sentit soudainement fatigué, comme si la concentration que lui avait nécessité les soins venait de le vider entièrement de toute son énergie. Il ne s'était même pas rendu compte que tous ses muscles s'étaient tendus, presque figés, comme s'il avait peur que le moindre tressaillement puisse enfoncer un bout de verre encore plus profondément dans la peau du blond. Il l'observa du coin de l'oeil nouer un chiffon autour de sa main alors qu'il rangeait sa trousse de soins, se félicita de toujours en prendre une bien qu'il ne l'ait jamais utilisé sur lui jusque là. Le chiffon paraissait encombrant et mal noué mais Spiza ne fit rien remarquer. La certitude qu'il avait raison à quoi que ce soit ne restait jamais présente bien longtemps, et elle était rapidement balayée par la pensée que les Autres avaient toujours un peu plus raison que lui, leurs pensées paraissaient plus légitimes. Aussi, si Ashley avait décidé de nouer un chiffon de cette façon, c'est que c'était tout à fait légitime.

Il se tut et se releva, glissant son sac à dos à sa place initiale. Il déglutit, le bruit lui paru bien trop présent et il se remit à marcher. Le bruit de ses pas contre le sol de la chambre avait quelque chose d'apaisant, il lui donna l'impression d'être actif et utile à quelque chose, apaisa ses pensées.
Jusqu'à ce que le vagabond l'interroge sur son passé. Lucjusz n'aimait pas tellement en parler ; il n'avait pas grand chose à dire d'un passé qui s'était centré sur l'oubli de la même personne et la tentative de se construire une identité — ni l'un, ni l'autre n'avait été une réussite, et même enfermé dans une dôme sorti tout droit d'un roman de science-fiction, les progrès se faisaient minuscules. Spiza ne fit aucune remarque sur son aversion à son passé. Ashley avait demandé, et il obtiendrait. Il quitta la pièce pour rejoindre le couloir, où il entreprit de fouiller une grande commode en bois sombre. Sa voix s'éleva, poussant sur ses abdominaux pour qu'elle porte dans la pièce d'à côté :
— Non, mais je suis né dans une écurie puis j'ai travaillé en boulangerie, ça arrive souvent les blessures alors j'ai l'habitude, je suppose. L'hôpital, ce serait trop... trop de pression, je pense. Et toi, tu faisais quoi ?
Comme à son habitude, il s'empressa de retourner la question, cherchant à écourter l'attention qu'on lui avait donné. Si Ashley pouvait parler de lui, il l'écouterait aussi longtemps qu'il le voulait. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire timide alors qu'il finit de parler : il venait de penser à une remarque qu'il trouvait amusante, mais il n'osa pas la formuler et l'idée mourut dans son esprit aussi vite qu'elle y était apparue. L'image d'Ashley, travaillant le verre, lui resta néanmoins dans la tête un petit instant. C'aurait été un comble.

Nouveau déchirement d'un tissu. C'était visiblement le dernier jour de la courte vie du manteau, dont la manche en lambeau venait à nouveau de se prendre dans une vis qui dépassait de la surface de la commode. Spiza murmura un « kurde » en polonais avant de se relever, tourner les talons et entrer à nouveau dans la chambre.
— Il me faut un manteau. il murmura en relevant légèrement son bras pour mettre sa manche en évidence. L'idée de changer de manteau ne l'enchantait pas, il était ce genre de personne qui n'avait que trois tenues différentes et qui était réticent à l'idée d'en changer. Son regard ne se posa pas sur le vagabond cette fois-ci, alors qu'il plongea ses mains dans un tas de vêtements qu'il avait aperçu plus tôt, posés au pied d'une penderie qui avait été visiblement vidée. Il fit voler sur le lit une longue jupe orange, une veste velours verte. À chaque fois qu'il soulevait un tissu, un nuage de poussière s'élevait, comme si le tas de vêtements toussait, recrachait tout ce surplus qu'il avait accumulé depuis une bonne dizaine de mois.

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Sam 6 Mar - 3:38
et nous serons les rois de l'épave

Né dans une écurie ? Comme Jésus ?
La pensée fit ricaner le vagabond. Lui qui peinait à déchiffrer le personnage qui l'accompagnait, cette information ne l'avançait pas beaucoup ; et il se demanda s'il était surpris ou non. Il s'imaginait toutes sortes d'activités mêlant ces deux endroits qui auraient pu faire un tabac, à l'époque, sur internet, comme le pétrissage de pâte à pain à dos de cheval – à bien y réfléchir, cela existait sans doute déjà.

Cependant, en entendant le reste de la phrase (portée par la voix, rendue plus forte par l'éloignement, de Spiza), Ashley eut un nouveau haussement de sourcils invisibles. Trop de pression ? C'est lui qui dit ça ? Lui qui avait adopté cet air concentré, appliqué (sermonneur, un peu) ? Cette remarque concernait sans doute l'ambiance de l'hôpital, qui avait effectivement l'air tendue, du peu que le blond avait pu observer (il n'y avait jamais passé de séjour prolongé). Mais c'est pas un peu comme ça, chez les Greens ? (Il garda cette question pour lui.)

Jetant le dernier morceau de verre, il revint vers la figurine d'éléphant délaissée plus tôt. Avec un effort conscient, le droitier attrapa le bibelot de la main gauche et le glissa dans son sac, sans réussir à penser à ce qu'il en ferait (comme d'habitude).
Il préparait mentalement sa réponse à Spiza quand celui-ci pénétra à nouveau dans la chambre. Le ton avait changé ; il avait l'air presque penaud, avec son manteau déchiré (Ashley ne le remarquait que maintenant que l'autre le montrait). Il porta sa main à sa bouche, frottant ses joues là où de la barbe aurait poussé, s'il avait hérité de gènes poilus ; d'abord par circonspection, et puis, un peu, pour camoufler un sourire – pas moqueur, non, tout juste taquin. C'est quoi ce mec.
Ne pourrait-il pas recoudre le tissu déchiré avec le fil trouvé plus tôt ? Le vagabond n'en savait rien ; il partit du principe que si l'idée n'avait pas germé dans l'esprit du Green, ce ne serait pas dramatique, et il se contenta de l'observer fouiller une pile de vêtements poussiéreuse.

En s'approchant du lit, le blond se mit à tousser. Les nuages de particules lui chatouillaient les narines et lui irritaient la gorge ; il remonta sa chemise sur son nez pour protéger ses voies respiratoires et posa sa main libre sur sa hanche, l'air songeur. Ces fringues étaient sales, et probablement un peu abîmées par leur temps passé ici (ainsi qu'assez démodées, il fallait l'avouer) ; mais elle semblaient encore portables.
Ashley ne faisait pas grand chose de non-nécessaire. S'il n'avait pas été d'humeur, il aurait probablement laissé Spiza se débrouiller avec ce qu'il trouvait – mais puisque sa curiosité avait été éveillée, il voulait en savoir plus. Et comme ce type ne semblait après tout pas plus doué que lui (à en juger l'état de son coupe-vent), le risque de passer pour un naze effrayait un peu (rien qu'un peu) moins le blond qu'auparavant.

« On part sur une séance d'essayage ? » demanda-t-il – rhétoriquement, car il avait déjà décidé de la suite (que cela plaise au Green ou non).

Il zieuta la première veste sortie du tas. Elle était verte, un vert qui tirait vaguement sur le marron (kaki, peut-être ?), et douce. Ashley était incapable de retenir le nom de chaque matière – il ne sut identifier le velours, mais il se souvint s'être assis sur plusieurs canapés d'un textile similaire. Le genre qu'on s'amuse à caresser du bout des doigts pour y tracer des dessins. Ça ne suffirait pas à protéger des intempéries ; il attrapa un bout de tweed brun et le leva, pour distinguer sa forme et deviner l'origine du vêtement. Un manteau.
S'il aimait se vêtir, Ashley n'avait aucun sens du style (il se faisait plaisir avant tout). Mais il avait entendu dire que le tissu était tendance ; aussi, il le lança à son collègue.

« C'est bien, ça, non ? »

Même sa voix n'avait pas l'air convaincue – pourtant il ne s'en soucia pas (au pire, il n'aurait qu'à le reposer), et il passa les quelques autres pièces de tissu en revue.
Une jupe orange trônait dans un coin ; elle était couverte de motifs, c'était certain, mais lesquels ? Des fleurs, peut-être ? Impossible à identifier. Elles lui rappelaient les vieilles tapisseries qu'on pouvait observer chez les couples de grand-parents.

« J'ai jamais porté de jupe », il lâcha, comme une confession – ou comme un avertissement. Il comptait essayer.

Pour la même raison qui faisait qu'il ne portait plus de talons, Ashley savait qu'il ne garderait pas ce bout de tissu. Mais il était trop tard ; il avait presque annoncé son intention, et il ne voulait pas faire marche arrière (cela impliquerait de passer du temps, encore, à s'expliquer, encore, à bafouiller, encore). Alors il tenta de prendre un pas assuré jusqu'au couloir précédemment occupé par Spiza.
Perpendiculaire à la chambre, il était bloqué d'un côté par un mur effondré ; l'autre était un cul-de-sac, où trônaient, empilées, des planches de bois épaisses (probablement vestiges d'un meuble quelconque). Il y avait, sur la gauche, une grosse commode, qui avait eu le mérite de rester debout (à défaut d'être intacte). Le blond jeta la jupe dessus, et se souvint n'avoir pas répondu à la question que Spiza lui avait retournée : comme pour faire écho à la scène précédente, une fois caché dans le petit corridor, à gauche du cadre de porte, il s'éclaircit la gorge et reprit, en défaisant la boucle de sa ceinture.

« Ah euh, au fait. J'étais serveur. » Il fit une pause, n'ayant pas réellement pensé à la suite. « C'était pas mal de pression aussi. Enfin, pas la même, hein. Mais je suis pas super réactif donc c'était stressant. J'ai pas été à la fac donc j'ai pris ce qui venait, et au moins les horaires étaient sympas. Ça permet de profiter de la famille. »

Après avoir ôté ses chaussures et son jean, il fit glisser la jupe vétuste le long de ses jambes, et dut constater que son manque de hanches n'allait pas l'aider à la garder en place. Il attrapa deux cordelettes qui pendaient sur le devant et les resserra, espérant que le problème se réglerait ; et de justesse, le vêtement vint se serrer contre lui.
Après avoir remis ses bottines (pour s'éviter un autre accident), il revint dans la chambre, ses lèvres étirées en un grand sourire.

« En vrai. Avec un autre haut, peut-être, je sais pas trop. J'ai jamais vu personne avec une jupe et une chemise. Mais en vrai de vrai, ça me va pas trop mal ? J'ai un peu un flow incroyable. »

Il était presque trop fier pour quelqu'un portant une jupe que n'importe qui d'autre jugerait laide.
Et dans cet élan de fierté un peu con, comme ceux ressentis par un ado qui sécherait un cours nul, il s'assit sur le lit, tibias repliés sous ses cuisses.

« Ton tour maintenant. Enfin si ça te tente. »

Si l'autre ne suivait pas ; s'il décidait que c'était trop bizarre, comme situation, qu'il valait mieux partir, là, maintenant, alors l'élan susmentionné disparaîtrait sans doute, et Ashley irait probablement s'enterrer, quelque part, au dehors.


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Mar 9 Mar - 11:48

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L'EPAVE ET SES ROIS

Ashley se moquait de lui, d'un sourire dissimulé derrière une main. Mais Spiza avait jeté un coup d’œil au vagabond au même moment et il ne sut pas s'il dut se sentir ridiculisé avec malveillance ou moqué avec la bienveillance d'un ami. Il n'en fit rien : la neutralité et l'indécision étaient des outils de fuite très efficaces, et il n'hésitait pas à y avoir recours. Ses mains replongèrent dans le tas de tissus, mais à nouveau, la présence du vagabond le déconcentra et il jeta un second regard vers Ashley. Ce dernier toussait cette fois-ci, et Spiza balaya l'air avec son bras, comme pour faire fuir la poussière — il ne fit que la brasser, et elle resta omniprésente, chatouillant leurs nez.

À la surprise du Green, qui s'était attendu à devoir faire ses recherches seul pendant qu'Ashley continuerait les fouilles de son coin, son partenaire d'exploration le rejoint pour observer les vêtements. Ses doigts se refermèrent par réflexe sur le tissu que lui offrit le vagabond, et il examina l'objet d'un regard concentré. Le manteau en tweed n'était pas des plus pratiques pour les explorations, mais il était certainement chaud. Et, parce qu'il ne viendrait jamais à l'esprit du polonais de refuser un cadeau, il acquiesça silencieusement et glissa le manteau sous son bras, avec un « merci » presque inaudible. Réaction tardive à la proposition de son interlocuteur, il attrapa un chapeau empalé sur la tête de lit, comme si quelqu'un l'y avait posé là dans un souci d'esthétisme, et le posa sur sa tête avant d'enfiler le manteau tout juste acquis.

Son sourcil troué s'arqua lorsque la voix d'Ashley lui parvint aux oreilles. Il releva les yeux vers lui, alors que ses doigts s'affairaient à tenter de refermer le manteau — il manquait un bouton et, ne l'ayant pas remarqué, le blond venait de glisser les autres boutons dans les mauvais trous. Le vagabond quitta la pièce, avec comme compagnon, une jupe orange. Les lèvres de Spiza s'étirèrent, la beauté approximative de son visage s'effaça, laissant place à un sourire amusé et crispé, comme s'il n'avait jamais beaucoup souri.
La disparition d'Ashley ne le rassura pas ; il imagina ce dernier se blesser et fut sur le point de rejoindre le couloir pour pouvoir être plus proche de lui mais il se ravisa à l'entente de sa voix. Ses mains disparurent à nouveau dans le tas de vêtements, en extirpa un bonnet qu'il porta sur sa tête, au dessus du chapeau — c'était un borsalino en feutre, mais Spiza n'en avait aucune idée — dans une combinaison de couvre-chefs ridicule. Dans le même temps, Ashley répondit enfin à la question du polonais. La maladresse évidente du vagabond ne convenait pas à un métier de serveur, et Spiza se demanda s'il avait cassé beaucoup de vaisselle. Il tut ses pensées alors que le blond entra dans la pièce — sa tour de couvre-chef lui tomba de la tête à cet instant. Ses pupilles furent aussitôt attirées par la couleur de la jupe et il ne put s'empêcher d'étouffer un rire contre sa main. Il avait pris l'essayage comme une blague, mais Ashley s'était prêté au jeu et avait réellement enfilé une jupe qui jurait totalement avec le reste de sa tenue. Spiza lui offrit un pouce levé, alors que sa voix s'écrasa contre sa main, étouffant un nouveau rire disgracieux. Le polonais s'approcha du vagabond, maintenant installé sur le lit, et tapota doucement sa hanche.
— Tu devrais mettre la chemise dans la jupe, ça fait joli et ça fait ressortir les hanches. Je pense qu'on pourrait trouver une meilleure jupe pour toi, ceci dit. Il fit remarquer, portant un nouveau regard sur la jupe vieillotte, les yeux plissés et rieurs. Il releva son regard vers le visage de l'homme suite à sa proposition, resta interdit un moment, porta à nouveau le bleu de ses yeux sur le tas de vêtements. Un « mmh » fit vibrer sa gorge, en pleine réflexion. Ses yeux se posèrent à nouveau sur le visage d'Ashley, pupilles frénétiques. L'idée que quelqu'un ne l'avait pas autant surpris et amusé depuis un long moment provoqua quelque chose en lui, et il tourna le dos au blond, agacé par sa propre pensée — c'était pourtant ce qu'il avait cherché.
(Que voulait-il vraiment ?)

Le silence pesant l'encouragea à agir. Il s'approcha du tas de vêtements, attrapa ce qui était visiblement une chemise de nuit de grand-mère ; épaisse, grise, lui arrivait au milieu des cuisses, de la dentelle brodée sur les rebords et le col du tissu. Il posa son index sur sa lèvre, toujours en pleine réflexion, et finit par attraper un short de pêche, bien trop large pour lui.
— Je me mets derrière la porte, viens pas voir. murmura-t-il, sans regarder Ashley cette fois. Il sortit de la pièce et se glissa entre le mur et la porte de la chambre, dans le couloir, comme s'il tentait de rester le plus proche d'Ashley. L'idée de se changer dans un endroit où n'importe qui pouvait entrer était trop intimidante et il s'empressa de se changer, les doigts fébriles, maladroits. Bruissements de tissus, semelle de chaussure qu'on retire, qu'on remet, qu'on pose au sol dans un bruit assourdissant, jurons étouffés d'une personne qui ne contrôle ni le tissu, ni ses propres doigts. Le short jurait avec ses bottes de combat, ses mollets mordillés par le froid le maudirent d'avoir choisi ce vêtement. La chemise de nuit, qu'il avait à moitié glissée dans le short pour mettre en avant le bas de sa tenue, était assez large et chaude mais la dentelle du col et de l'extrémité des manches tranchait avec le reste de sa tenue. Il revêtit à nouveau le manteau en tweed, dont le marron eu au moins le bénéfice de s'accorder avec le beige du short, et enfonça son couvre-chef sur la tête — le borsalino chevauché par un bonnet acheva de décrédibiliser la tenue, qui ressemblait à ce qu'un enfant de quatre ans aurait pu accorder après une expédition dans la penderie de ses grands-parents.

Le bois de la porte craqua alors qu'il la repoussa, sortant de sa cachette pour entré à nouveau dans la chambre, les foulées longues et élancées, comme s'il était le protagoniste d'un ballet élégant.
— Ta-daaam. Sa voix s'était faite joyeuse et il fredonna l'air du Lac des Cygnes alors qu'il pivota sur lui-même, manquant de tomber à la fin de sa pirouette. Impressionné par mon style, vagabond ?
Le ridicule de la situation lui insuffla un souffle de confiance et il sauta sur le lit, continuant sa réédition du ballet. Il regretterait probablement son acte à la seconde où son regard rencontrera celui d'Ashley, mais l'euphorie du moment prit le pas sur les pensées intrusives d'une anxiété qui se faisait savoir sa présence par vagues, tantôt douces, tantôt déferlantes.

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Mar 16 Mar - 16:08
et nous serons les rois de l'épave

Deux phrases avaient suffi à ramener la pudeur dans un petit coin de la tête d'Ashley, qui, comme coincé dans une éternelle boucle, recommençait à se questionner, encore.
Ressortir les hanches ? Quelles hanches ? Pourquoi elles doivent ressortir ? Est-ce qu'elles peuvent ressortir si elles n'existent pas ? Il se moque de moi ? Ou bien il me prend de haut ? C'est vraiment moche, chemise sortie ? Il baissa les yeux, mi-abattu, mi-paniqué. Ça va, j'ai pas l'air d'un hippie non plus, si ?
Penaud, il s'exécuta (la position assise ne lui facilitait pas vraiment la tâche, mais il refusa de bouger).

Jetant un coup d’œil vers le Green, il perçut sur son visage une lueur d'amusement, et alors il se déraidit un peu (puisqu'il était toujours touché dans sa fierté, même s'il commençait à comprendre qu'il lui faudrait se détendre un peu plus s'il voulait avoir l'air adulte) (il pensait cela, mais il n'en ferait rien) (pourquoi diable voudrait-on avoir l'air adulte).
Comme discrète vengeance pour cette minuscule humiliation, tandis que Spiza pénétrait à son tour dans le couloir, il marmonna muettement, sans entendre que l'autre faisait de même : « Ah ben super, grosse ambiance, j'te trouve un manteau et c'est comme ça que tu me remercies... »

Chemise rentrée, honte effacée (plutôt reportée ; car le vagabond repenserait probablement à cette scène, un soir, avant de s'endormir, et il se giflerait alors en se remémorant le ridicule ressenti), Ashley s'adossa négligemment à la parure de lit, qui grinça à son contact, en attendant le retour de l'autre blond. Il ne savait pas réellement ce dans quoi il l'avait embarqué (il lui était déjà difficile d'évaluer ce dans quoi il s'était lui-même embarqué), ni à quoi s'attendre : alors, quand son collègue revint, c'est la surprise qui bloqua le fonctionnement de son cerveau.

Il cligna plusieurs fois des yeux, d'abord, pour décortiquer les différentes composantes de sa tenue. Spiza avait opté pour un short (par ce temps ?), une sorte de haut gris fluide (n'ayant pas observé le choix initial des vêtements, il se demandait ce que ça pouvait bien être – mais même s'il l'avait eu sous les yeux, le vocabulaire lui aurait manqué pour décrire ce dont il s'agissait), et le manteau qu'Ashley lui avait jeté quelques minutes auparavant (il se sentit presque touché par ce choix, mais ne put s'empêcher de se demander pourquoi mettre un manteau s'il fait assez chaud pour se foutre en short).

Alors, après deux ou trois secondes d'incrédulité, durant lesquelles l'autre s'était avancé en dansant (est-ce bien de la danse ?), le vagabond eut un rire (et il comprit alors cette réaction, quand il était lui-même revenu dans la chambre, vêtu comme une mamie). Un rire, qu'il pensait d'abord singulier ; mais comme un train en cache toujours un autre, les sursauts de ses épaules se multiplièrent, et il vint poser sa main gauche sur sa tempe, d'un air qui aurait pu avoir l'air consterné s'il n'était pas en plein fou rire (ce genre de fous rires que l'on voudrait maîtrisés, pas un de ceux qui donnent l'air vulnérables) (mais Ashley ne réussissait jamais ce qu'il entreprenait, alors il échoua à cela aussi).

Et comme pour y faire écho, l'autre se mit à chantonner un air (quel air?), un air connu (mais quel air ?), dont le porteur de jupes se souvenait bien (peut-être dans une pub) mais sur lequel il peinait à mettre un nom. Il se tâta à demander, mais il ricanait encore bêtement, et il ne voulait pas réellement interrompre la scène surréaliste qui se déroulait. Quand la question du Green lui parvint, il se contenta de hocher la tête exagérément, de peur de le copier en lui rendant le pouce levé qu'il lui avait plus tôt envoyé.
Et quand il sauta sur le lit, déséquilibrant un peu notre blond, il fallut se mettre à applaudir, par respect et par émerveillement. Est-ce qu'il vient vraiment de faire ça ?

« C'est les Greens, les chevaux ou les baguettes qui t'ont appris à danser comme ça ? » laissa-t-il échapper en essuyant brièvement le coin de son œil.

Ashley n'était ni productif, ni ambitieux ; et il appréciait la rencontre entre son postérieur et un matelas, un vrai. Alors il se surprit à regretter de ne pas avoir de quoi faire un pique-nique ou un jeu de cartes, là, juste histoire de se poser un peu avec cet énergumène (ce qui le surprenait là n'était pas tant l'envie de manger et de ne rien faire, mais plutôt celle, inhabituelle, de ne pas rester seule). Était-il vraiment en train de s'amuser ?

« Mais ça marche comment, là-bas ? Chez les Greens. Pas les chevaux. Même si j'aime bien les chevaux, enfin ça a l'air un peu con, pas plus con que les lapins, après c'est sûr que c'est classe, moi j'aurais pas confiance. » Il inspira comme pour reprendre là où il fallait. « C'est pas un peu flippant d'être avec d'autres gens ? Dans les séries, c'est toujours dans les groupes organisés que ça devient le bordel en premier. Enfin je touche du bois pour vous- » (il glissa sa main sur le côté pour attraper le cadre de lit) « mais tu vois, je suis curieux, ça a pas l'air super marrant. »

Et, parce que l'idée lui revenait plus que par peur que l'autre n'apprécie pas ses questions, il compléta :

« Au fait ! C'est quoi que tu chantais ? »



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Jeu 18 Mar - 11:53

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L'EPAVE ET SES ROIS

Pendant un instant, l'esprit de Spiza fut occupé à sentir le matelas s'affaisser sous son poid, à voir la lumière du soleil pointer le bout de son nez au coin de la fenêtre pour se soucier de quoi que ce soit. Il n'avait pas ressenti cette impression de liberté et d'insouciance depuis un moment, et la sensation était si étrangère qu'elle sembla le rendre encore plus léger. Entendre le rire d'Ashley s'élever dans la pièce lui réchauffa la creux de l'estomac, et le coeur avec. Il n'était pas certain de se rappeler de la dernière fois où il avait fait rire quelqu'un — un rire sincère, pas le genre de rire qui oscille entre la moquerie et la nervosité. Son visage se transforma, métamorphosé par un grand sourire et il finit par s'asseoir à côté du vagabond, posant les vêtements qu'il avait dû retiré dans le couloir sur le matelas, contre lui.

À ses côtés, le vagabond semblait avoir lâché tout un traîneau de questions. C'était, encore une fois, inhabituel, qu'on lui pose autant de questions. Ashley semblait réellement intéressé, et si Spiza douta un instant de la probabilité de ce fait, son optimisme légendaire face aux autres individus et à ses relations prit le pas sur le reste. Ses doigts attrapèrent un oreiller qui était adossé contre la tête du lit. Il posa l'oreiller sur ses cuisses et ses phalanges se refermèrent sur le coin de l'oreiller pour le tordre dans tous les sens alors qu'il s'apprêtait à parler, débutant par la fin ;
C'était le lac des cygnes. Pas que je connaisse beaucoup, j'avais juste fait un spectacle à cheval en utilisant cette musique quand j'étais plus petit.
Sa langue glissa sur sa lèvre inférieure avec nervosité — il se sentait toujours intru lorsque il parlait de lui, c'était comme s'il avait l'impression que ce n'était pas sa place. Il éclaircit sa gorge, car les mots semblaient se coincer au fond de celle-ci, mais le silence pesa un instant alors qu'il calculait ses paroles dans son esprit. L'expression de son visage, ses sourcils froncés ne laissaient aucun doute sur le fait qu'il s'apprêtait à répondre, il lui fallut juste un temps qui aurait pu sembler interminable à quiconque à l'habitude des discussions au tac au tac.
Premièrement, les chevaux sont plutôt intelligents. Ils ont leur intelligence à eux. et s'il tut ces pensées, il songea un instant qu'il aurait préféré que les humains aient la même intelligence que des animaux qu'on qualifie d'idiot, c'aurait été préférable à une utilisation discutable d'une intelligence réputée pour être supérieure à la plupart des animaux. Sa main passa dans ses cheveux sans même qu'il n'y pensa, comme si son esprit et le reste de son corps venaient de se séparer et qu'il lui restait juste assez de contrôle sur lui-même pour à peu près garder la mainmise ses pensées. T'as raison. C'est effrayant, il jeta un coup d'oeil à Ashley, mais je peux pas dire que je suis assez... je sais pas. Parfois j'ai pas l'impression d'être un Green, juste... de la main d'oeuvre, comme ça, tu vois ? Il haussa les épaules, les lèvres pincées entre elles.
« Il y a beaucoup de... trucs qui se passent chez les Greens et j'ai l'impression d'être dans un autre monde qu'eux. J'aurais probablement eu ma place chez les vagabonds, plutôt. Chez les Greens, il y a des gens qui pensent plus qu'à la politique, aux conflits, à qui doit nous diriger, qui peut, qui est bien, qui l'est pas. Je crois pas que j'aime tellement ça. J'aimais bien la perspective qu'on soit bien organisé, qu'il y ait beaucoup de personnes qui veuillent retrouver une vie plus proche de la nature. J'ai l'impression qu'ils se sont un peu éloignés de ça, mais bon. (petit rire amer, pensée morose envers le forgeron des Greens.) Mon avis est pas partagé par tous. Tu sais, ça faisait longtemps que j'avais pas ri.
Nouveau regard lancé vers les yeux océan d'Ashley. Il se demanda si sa vie à Arcadia Bay n'aurait pas été bien différente, s'il avait rencontré le blond avant tous les autres, s'il n'avait pas intégré les Greens — s'il avait été assez courageux pour ne pas entrer dans le premier groupe qui lui ouvrit les bras.
« T'as probablement fait le bon choix, en restant un vagabond. Ah, et... Et toi, t'es bien là où t'es ? Sa voix meurt sur les dernières syllabes, comme s'il avait atteint son quota. Il se sentit tout à coup coupable d'avoir autant parlé de lui, donné son avis et ses doigts s'enfoncèrent dans l'oreiller. Ashley l'avait simplement interrogé sur le fonctionnement du groupe et il en avait profité pour parler de lui, ses pupilles se posaient à présent partout, sauf sur Ashley. Il n'avait pas tellement envie de voir le visage ennuyé de son pauvre interlocuteur.

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Dim 21 Mar - 5:35
et nous serons les rois de l'épave


Le lac des cygnes ? Non, jamais entendu parler. Il n'était pas certain de vouloir connaître (ça avait l'air joli, dit comme ça, mais un peu pompeux, aussi). En revanche, les spectacles de chevaux – ça, il voulait découvrir. En quoi cela pouvait-il bien consister ? Un cheval pouvait-il danser ? La vision d'un équidé devenu bipède et twerkant en rythme illumina les pensées du vagabond. Hype.

Cette image lui échappa cependant bien vite, interrompue par un silence qui, à défaut d'être inhabituel, lui sembla étrange, dans une conversation qui avait l'air si bien partie. Avait-il dit quelque chose de mal ? Il a qu'à pas répondre. Se sentait-il mal à l'aise ? C'est bon, la fenêtre est ouverte, il peut toujours partir. Il fut heureux que le vert ne puisse pas lire dans ses pensées, car cette dernière idée le chiffonnait (après tant d'efforts fournis, simplement se barrer ? Non, mauvais suggestion, très mauvaise suggestion).

Alors il attendit ; observa l'oreiller attrapé plus tôt, et qui se faisait désormais triturer dans tous les sens. Ashley était familier avec ces gestes parasites ; et même s'il était loin d'avoir deviné la nervosité de son interlocuteur, il avait ce sentiment, à cheval entre la fierté et l'amusement, de celui qui pouvait enfin s'imaginer dans la position du meneur dans une situation sociale. Du jamais vu. Aucune once de peine ou de compassion cependant ; il ne connaissait pas l'âge de cet homme à côté de lui, mais il le devinait adulte, alors il peut se débrouiller comme un grand.

Laissant ses pensées de côté un instant, il l'écouta en opinant silencieusement. Il n'avait pas l'habitude de se concentrer sur le discours d'autrui ; mais celui-ci le confortait dans l'idée qu'il faisait – et avait fait – les bons choix, d'une certaine manière, et il appréciait cela. Être un petit bonhomme, qui fait des petites tâches, au service d'autres petits bonhommes ; qui ne tire pas grand chose de plus de l'expérience que s'il avait été tout seul ; qui s'accroche au mot « débat », comme si c'était celui qui pourrait convaincre le monde entier d'aller en son sens. C'était, assez grossièrement, tout ce qu'il détestait dans la vie d'avant, alors il n'eut aucune peine à comprendre les plaintes de Spiza.
Il manqua d'intervenir pour y adhérer ; mais les derniers mots le firent tiquer. Ils sonnaient sincères, et il n'y avait rien de plus grisant que les confessions sincères pour Ashley, qui les interprétait comme des compliments sous-entendus. Regarde, maman, j'ai fait rire un Green !!

« Welp... j'espère au moins qu'ils t'ont filé des chevaux, sinon ça pue un peu l'arnaque. »

Et face au dernier commentaire, le blond ne put que hocher frénétiquement la tête. Il pouvait même supprimer ce « probablement », qui faisait tache dans la phrase : Ashley avait définitivement fait le bon choix en restant vagabond. Pas de gens, de règles, d'ennuis. Il se sentait comme le personnage principal dans Maman, j'ai raté l'avion.

« Bien ? » C'était son tour, maintenant. Il fallait donc réfléchir (ou peut-être pas tant que ça, finalement, ouvrir la vanne des paroles et laisser faire). « Euh. Je commence par où. Je dors sur du carton et je bouffe des boîtes alors des fois c'est pas super fun » (c'était si facile, de démarrer sur une note négative) « en plus souvent je m'arrange pas bien et je dois zapper des repas parce que j'ai oublié d'aller troquer des trucs. Y'a aussi des fois où je m'arrange bien, c'est juste que les gens s'en foutent de ce que je ramasse, en même temps je peux pas les blâmer, puis c'est tout l'intérêt » et il s'arrêta pour reprendre son souffle. « Mais ouais, au moins, j'ai pas toutes ces affaires. J'aimais déjà pas la politique avant, c'est pas pour m'embrouiller avec maintenant. »

Encore et toujours, l'impression de parler pour ne rien dire. Au moins, lui, il a des trucs à raconter. Peut-être était-ce pour cela qu'Ashley voulait en savoir plus ; parce qu'il aimait parler, mais qu'il lui manquait le sujet. Il travaillerait cela, à l'avenir.
Il plissa légèrement les yeux, comme pour scanner son voisin. Et puis il secoua la tête.

« Nan. T'aurais pas pu être vagabond. Pas en suivant un inconnu qui compte t'exploiter quand il aura la flemme de faire des trucs tout seul. » Cacher la vérité dans de l'humour, pour qu'elle n'ait plus l'air plausible (avait-il honte ?) (non, Ashley n'avait pas honte) (mais ça lui donnait bonne conscience, cette impression d'avoir à moitié averti). Sans se soucier de l'ironie de son affirmation, et galvanisé par son imaginaire qui le convainquait qu'il menait la danse (quelle danse ?), il poursuivit, presque comme pour lancer un défi : « Après, si t'aimes bien parler de toi, on peut faire un test de personnalité, ou un truc du genre. Savoir chez qui t'aurais vraiment dû postuler. »

Sa main se perdit dans son sac pour en sortir un bic sans bouchon et au niveau d'encre assez bas, ainsi qu'un petit tas de feuilles blanches abîmées.
Il entreprit d'y noter des questions (sans propositions, car il n'avait jamais réellement passé de test de personnalité, alors il ne savait pas que c'était nécessaire ; et puis le processus était déjà suffisamment long), mais comme son imagination n'était pas son point fort, il se contenta de basiques qui n'avaient, tout compte fait, pas grand chose en rapport avec le caractère d'une personne. Ça, il ne s'en rendait bien sûr pas vraiment compte ; aussi, c'est toujours très fier qu'il s'éclaircit la gorge pour poser les premières questions de sa liste, tout en la tendant à Spiza pour qu'il puisse en prendre connaissance.

« T'es né où ? Tes parents ils faisaient quoi ? T'as des frères et soeurs ? Tu parles combien de langues ? T'aimais bien l'école ? T'as quel âge ? Tu fumes ? Tu bois ? C'est quoi ta couleur préférée ? »



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Dim 21 Mar - 19:03

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L'EPAVE ET SES ROIS

Le manque de réponse et de jugement envers les Greens de la part d'Ashley rassura Spiza en quelque sorte : le vagabond ne prenait pas position et ne cherchait pas à l'influencer dans sa vision des choses. Silverfish pouvait aller se faire voir — Spiza pensait encore à sa conversation désagréable avec l'homme, il l'avait blessé et il était difficile de blesser l'explorateur qui cherchait toujours à voir le positif chez les autres. C'était impossible de voir le positif chez Silverfish, c'était néanmoins bien trop simple de le voir chez Ashley.
Son coeur se serra, alors que les yeux rivés sur le vagabond, il l'écouta énumérer les difficultés de sa vie quotidienne. Son interlocuteur était courageux de vivre ainsi, sans se blottir dans les bras confortables d'un groupe organisé et développé. Lucjusz ne se sentit pas mal à l'aise d'être différent, il aimait que sa vie ne soit pas si compliquée et il ne souhaitait pas devoir se débrouiller seul. Il se demanda si la vie chez les Greens serait différente si Ashley en faisait partie. Bobtail et lui s'entendraient probablement bien — il était difficile de ne s'entendre ni avec l'un, ni avec l'autre.

Spiza se sentit un peu vexé, au moment où son le vagabond affirma qu'il ne pourrait pas faire partie des vagabonds. Et son être tout entier sembla se paralyser suite à la blague d'Ashley. Son coeur sombra cette fois — son organe semblait bien trop présent, trop réactif à chaque mot qu'on prononçait à son égard, à chaque regard qu'on lui adressait ; il n'était pas certain de comprendre ce que l'homme avait voulu dire. Sa subjectivité aveuglante tenta de contrebalancer ses doutes. Le vagabond n'avait pas tenté de se servir de lui. Spiza avait certes était plutôt généreux, mais il l'avait fait de bon coeur. Ses pupilles, à l'image de ses pensées qui se bousculaient, se déplacèrent frénétiquement d'un bout à l'autre de la pièce, d'un mur à un autre, du plafond au sol, du lit au bureau.
— J'ai l'habitude qu'on m'exploite. s'entendit-il murmurer, dans une spontanéité qui ne le caractérisait pas, alors qu'il se penchait vers le journaliste et son carnet. Ashley ne pouvait pas être une mauvaise personne, et ne pouvait pas avoir de mauvaises intentions envers lui : personne n'avait cherché à le connaître autant que lui l'avait fait en l'espace de quelques dizaines de minutes. Les lèvres de Lucjusz s'étirèrent en un nouveau sourire timide et ses doigts se refermèrent sur le carnet. L'idée d'être au centre de l'attention était étrange, l'emplit d'une sensation qui chatouilla ses entrailles.
— Alors... Ah. Sa bouche resta ouverte alors qu'il laissa son dos tomber contre le matelas du lit, étala ses jambes sur le matelas et leva le bras pour que le carnet soit en face de son visage. La position l'empêcha de projeter sa voix correctement, et elle sembla plus voilée qu'habituellement encore.
— Je suis né en Pologne. Mes parents sont propriétaires d'une écurie. Ma mère était monitrice, ça veut dire qu'elle faisait des cours. Et mon père lui il était cavalier professionnel, ça veut dire qu'il faisait des compétitions. Régulièrement, entre quelques mots, il glissait un regard vers Ashley comme pour s'assurer qu'il écoutait encore. Je parle le Polonais et l'Anglais, j'ai pris des cours de Français au collège et au lycée mais je me souviens de rien. J'ai vingt-six ans. L'école, mmh... Corvin lui vint à l'esprit. C'était bien pour voir les gens, les cours en soi c'était... sans plus. Je buvais et je fumais avant, maintenant c'est difficile. J'aime le vert, le vert foncé surtout.
Un « mmmh » vibra le long de sa gorge, comme il aimait le faire à chaque fois qu'il n'était pas certain d'avoir le droit de laisser planer le silence. Après s'être redressé légérement pour subtiliser le crayon de son interlocuteur, il rajouta quelques questions : « qu'est-ce que tu aimes le plus dans la vie ? (la vie d'avant ou maintenant) ; ton animal préféré ? ; le vêtement préféré que tu possèdes ? est-ce que tu veux que je te donne des vivres que j'ai obtenu chez les greens quand t'as plus rien à manger ? »
La main tenant le crayon se reposa sur son torse dans une position inconfortable alors qu'il relit la liste de questions avec les sourcils froncés comme s'il s'agissait d'une lettre très importante, et il tendit la liste à son interlocuteur, silencieux, prêt à entendre ses réponses à lui — c'était ce qui l'intéressait le plus, pas le partage de ses propres souvenirs, de ses propres pensées, mais celles d'Ashley.


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Lun 22 Mar - 14:19
et nous serons les rois de l'épave

Il n'était pas attentif, Ashley, aux nuances, aux variations. Quand l'autre papillonna du regard, il se dit que ça devait être pour chercher ses mots ; il n'osait plus faire d'assomption trop radicale, en se disant que, peut-être, il avait pu rendre son interlocuteur nerveux. Il risquait moins à ne rien dire, et à ne pas remarquer, en attendant que ça passe ; et quand Spiza affirma avoir l'habitude d'être exploité, il continua sur ce principe. Ne pas poser de questions. D'autant qu'il disait sans doute cela à cause de sa position peu enviée de Green : ça avait l'air d'être le principe, l'exploitation des gens.

Après que le questionnaire improvisé eut quitté ses mains, le vagabond sentit le matelas remuer, et il se tourna un peu pour mieux faire face à celui qui venait tout simplement de s'allonger. Après la mini-séance d'essayage, c'était donc parti pour les quizz sur le lit ; une ambiance soirée pyjama qui ne déplaisait pas au blond, lui qui n'en avait vu que dans des séries.

Toujours très fier ainsi qu'animé par cette curiosité peu usuelle, il tendit l'oreille ; le vert ne parlait pas fort, alors, sans cesser sa tentative d'être attentif, il s'approcha légèrement, vraiment trop peu pour améliorer son écoute, s'inclina tout doucement aussi, en espérant être comme un ninja imperceptible (il ne voulait pas interrompre l'autre, car il ne connaissait que trop bien la gêne liée à l'idée de devoir répéter une phrase spontanée).

Il parle polonais ?? C'est ça l'accent ? Comment il fait pour parler deux langues, une c'est déjà trop ?
Assis en tailleur, jupe repliée jusque sous ses jambes, le coude sur le genou et le menton posé dans sa main, Ashley se sentait comme face à un documentaire animalier du dimanche soir. Les traits de son visage s'animaient au fil des réponses ; vingt-six ans ? Lui ? Petit ?? (car du haut de ses vingt-sept ans, le vagabond était de toute évidence bien plus grand). Le vert ? C'était assez fidèle, pour le coup.

Presque dans l'appréhension (que pouvait se demander le Green sur lui ?), Ashley attendit le retour de la liste (l'autre se prenait au jeu) (ce n'était pas nouveau, mais toujours aussi rassurant). Quand le carnet lui revint, comme souvent, il dut relire plusieurs fois les questions avant de réellement les intégrer. La première vint couper son excitation, car elle était simple et compliquée, et qu'il faudrait aborder le sujet qui avait, jusqu'ici, savamment été esquivé.
Faisant mine de réfléchir, il se redressa un peu.

« Je vais avoir une réponse super banale à la première, ricana-t-il, comme pour introduire le sujet de manière un peu plus détendue. C'est ma fille. Elle est haute comme ça, continua-t-il en positionnant une main à hauteur de matelas, l'autre un poil plus haute que sa tête – et pour ne pas laisser de doute mélodramatique, il enchaîna. Elle est en Pennsylvanie, avec sa mère. »

Il songea un instant qu'il aurait dû parler d'autre chose ; mais Ashley n'avait pas d'intérêts, et il n'aurait pas eu l'air crédible en abordant un amour fictif pour les longues promenades sur la plage ou les voyages méditatifs. Pour expédier le sujet, il se pencha à nouveau sur le questionnaire, en évitant soigneusement le regard du vert.

« Ok, donc, je pense pas que j'ai d'animal préféré, parce que j'y ai jamais réfléchi. Mais j'aime bien les serpents. Tout le monde a peur d'eux, ils sont trop classes, alors que concrètement c'est des vers améliorés. » Il s'arrêta un instant, pour réfléchir, toujours. « Je pense que mon nouveau vêtement préféré c'est cette jupe » - fier de sa connerie, il afficha un large sourire – « et... »

Le blond, qui n'avait pas lu la dernière question, trouva à nouveau son élan brisé. Il avait pour ainsi dire l'habitude de quémander et de soutirer ; c'était justement pour cette raison qu'on ne lui proposait jamais rien. Etait-il touché ? Quand même pas. Mais il appréciait le geste.

« Si vous êtes tous aussi généreux, vous allez vite finir à court », sourit le vagabond. Pour ne pas faire passer cette réponse pour un refus, il précisa : « Mais je prends ! Je vais pas cracher sur de la bouffe gratuite. »

Pour accompagner ces paroles, Ashley vint à son tour usurper le stylo, qu'il tapota contre son front comme pour déclencher son processus créatif (complètement inexistant). Dans une envolée maléfique qui lui ressemblait plus qu'il ne l'aurait cru, il se mit à écrire ; en premier lieu, il n'y avait pas de raison pour que le vagabond soit le seul à avoir des questions difficiles – et puis il fallait détendre l'atmosphère, pour de vrai, ne pas revenir sur un sujet qu'il n'aimait pas aborder.

En silence, cette fois, et avec cet air de défiance qui lui donnait quinze ans à nouveau, il rendit le carnet et le stylo à son collègue.

T'es maqué ?
Filles ou mecs ?
C'était qui ton premier crush ?
C'est quoi le pire truc que t'as fait bourré ?
Ton pire date ?



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Lun 22 Mar - 17:36

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L'EPAVE ET SES ROIS

Le regard de Lucjusz se posa sur Ashley, et il glissa un bras sous sa tête pour la suréveler davantage. Ses lèvres s'arrondirent en un "o" surpris à la première réponse du vagabond, qu'il imaginait jeune, et il fut étonné de savoir qu'il avait une fille. Avoir un enfant. C'était une pensée que Spiza n'avait jamais réellement cultiva. Il se demanda si la fille d'Ashley l'apprécierait, si elle le voyait, mais la question parut futile puisqu'il ne la rencontrerait probablement jamais. Poussé par la curiosité, il s'apprêta à poser des questions relatives à l'enfant, mais il crut deviner que le vagabond n'avait pas envie d'en parler plus — il fallait voir la façon dont il fermait ses phrases, courtes, synthétiques, contrastant étonnament avec le reste de ses paroles qui avaient été jusque là ornées d'une multitude de détails.
Pendant que le vagabond répondait aux questions, le regard du polonais dévala la silhouette de l'homme, escalada la pente de son dos, pris un peu plus de soin à observer les traits de son visage qu'il parvenait à voir depuis sa position.
Hochement de tête approbateur suite à la réponse d'Ashley concernant les serpents; ils étaient de très beaux animaux et Lucjusz avait longuement hésité à s'en offrir un en tant qu'animal de compagnie, avant la tempête. Il souffla, un rire silencieux fit tréssaillir ses épaules alors qu'il posa son regard sur la jupe du vagabond. Puis, son regard se glissa sur le plafond — non, tous les Greens n'étaient probablement pas si généreux, mais Spiza ne le réalisa pas et il se contenta d'acquiescer de nouveau ; bien sûr que tout le monde ferait comme lui.

— Très bonnes réponses. Ah, tout à l'heure j'ai oublié de dire que j'ai ni frère, ni soeur. affirma-t-il, les yeux rivés devant lui alors qu'il patientait pour les prochaines questions. Quand il parlait à quelqu'un, les pensées de Spiza s'emmêlaient tant qu'il lui arrivait souvent d'oublier de dire tout ce qu'il avait à dire, et les questions, trop nombreuses, la curiosité, trop pressante, avaient cette capacité à lui faire oublier même les choses les plus simples.
L'idée qu'avait eu Ashley avec ce carnet était amusante, il aurait souhaité faire de cette chambre leur pièce à eux, celle où ils pourraient échanger d'autres conversations semblables à celle-ci, mais le vent qui chatouillait ses jambes lui rappela que la fenêtre à l'ouverture béante ne leur laissait pas une intimité satisfaisante ; n'importe qui qui passait dans la rue pouvait les entendre discuter. Il se refusa cependant à faire la remarque, pour ne pas briser la singularité du moment partagé.
Le carnet et le stylo furent à nouveau tendus vers lui, et Spiza apprécia le regard espiègle qu'Ashley lui lança. Il s'empressa de refermer les doigts sur le carnet, se redressa avec une certaine hâte pour parcourir le carnet du regard. Les questions réveillèrent quelque chose en lui, et le coin de ses lèvres remonta, s'abaissa, avec une confusion apparente.

Eclaircissement de la gorge, le silence brisé laissa place aux réponses de Lucjusz, les mots écrasés par la timidité.
— Non. Toute personne capable d'amour. (regard nerveux vers le visage d'Ashley et son coeur se brise à la question suivante.) Mon meilleur ami. ((((ami)))) Mmh... Tomber dans la rivière avec le vélo de mon meilleur ami. Et mon meilleur ami sur le guidon du vélo. Et... J'ai jamais eu de mauvais date. S'il avait été totalement objectif, Lucjusz aurait dit qu'il n'a jamais eu de rencard à proprement parlé ; que les moments en tête à tête que Corvin et lui ont partagé n'avaient pas été rendus spéciaux par des sentiments romantiques partagés et qu'il n'avait jamais réussi à trouver la force de proposer un rendez-vous à qui que ce soit car personne n'est Corvin. Il aurait peut-être fait référence à toutes ces fois où Corvin et lui devaient passer un moment seuls, mais que leur bulle avait été éclatée par l'arrivée d'invités appelés par Corvin. Il aurait probablement parlé de— il tendit à nouveau le carnet vers Ashley, dans un mouvement brusque, mettant fin à sa torture mentale. Les pensées amères n'avaient pas leur place dans la bouche du polonais, ni dans son esprit. S'il savait qu'il s'enfermait dans ses illusions, elles étaient plus confortables que la rigidité de la réalité.
— À toi. Cette fois, il ne posait pas de nouvelles questions — il en avait des tas d'autres, souhaitait rebondir sur les réponses que le vagabond avait donné aux questions précédentes mais il y avait trop à demander et l'indécision de Spiza lui donnait des difficultés à donner un ordre de priorité à ses interrogations. Mais ces questions l'intéressaient tout particulièrement et son indécision laissa place à une curiosité intéressée. Une chaleur étrangère se propaga dans le haut de son corps, flamme attisée par l'expectation alors que son regard noisette se posa à nouveau sur le visage de son interlocuteur.

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Ven 26 Mar - 1:56
et nous serons les rois de l'épave

Ni frère ni sœur. Ok. Pour tout avouer, Ashley avait déjà oublié avoir posé cette question. Mais c'était bon à savoir. Peut-être. Ça devait leur faire un point commun (il n'était pas certain de l'influence du statut de fils unique sur sa vie, et il ne s'était jamais vraiment demandé ce que cela aurait donné, s'il avait eu un frère ou une sœur).

L'effet des nouvelles questions sur son interlocuteur (ce sourire aussitôt effacé) fit presque jubiler le vagabond. Oh, il n'était pas cruel, du moins il ne pensait pas l'être ; et puis elles n'avaient rien de trop méchant. Mais c'était amusant de tester, les limites, les caractères – il se souvenait avoir fait ça, quelques fois, avec ses collègues, pour les taquiner, parce qu'il y avait quelque chose de grisant dans le fait d'embêter, un peu.

Célibataire, donc. En même temps, qui pouvait bien avoir envie de s'emmerder à entretenir un couple dans un moment pareil ? (Il se garda bien de songer que, tout de même, quelqu'un avec qui s'endormir le soir – ou, à l'inverse, vivre de belles insomnies – pourrait lui être agréable.)
Tout le monde ? C'était une bien jolie formulation. Ashley ne s'attarda pas dessus.
Le meilleur ami. Oof. Douloureux. Ou peut-être pas ? Avec les affirmations suivantes, le vagabond se rassura (en plus de ricaner en imaginant la scène). Ça avait dû bien tourner, s'il n'y avait jamais eu de mauvais date. Après, s'il est tout seul, ça a ptet pas si bien tourné que ça. La confusion animait son regard, et, décalant le sujet dans un coin de sa tête, il se promit d'y revenir, un peu plus tard.

Retour à l'envoyeur, un peu brutal (il mit ça sur le compte de la maladresse – ou bien Spiza était-il aussi pressé d'en savoir plus ?) ; fair enough, il avait démarré ce jeu, il ne pouvait pas s'en retirer (si, en fait, il aurait pu, mais c'était marrant).

« Ok, ok, ok. Donc. J'ai personne dans ma vie parce que c'est trop de taff et puis parce que c'est un peu l'apocalypse. » Il prit une grande inspiration, le souffle manquant après sa phrase sans pause. « J'aime bien ta vision du truc, moi j'avais tendance à essayer partout où je pouvais, ça me faisait plus de chances de trouver, annonça-t-il avec un sourire crâneur. Premier crush... je crois que c'était une fille au collège. Me souviens plus de son nom. » Il se gratta la tête. « J'ai pas de gros souvenirs de mes relations, elles se sont toujours finies vite. Je crois qu'elle m'a gonflé parce que j'aimais pas sortir, et le lendemain de notre rupture elle m'a jeté un brocoli à la gueule pendant le repas. C'était sympa. »

Ashley voulait se donner un air cool et détaché, alors il ne précisa pas qu'en fait, si, son nom lui revenait. De toute façon, ce n'était pas réellement nécessaire, et puis ce genre d'amourettes d'adolescents, ça semblait vraiment moins hardcore que de tomber amoureux de son meilleur ami. Déjà, rien que pour en avoir un, faut se lever tôt.

« Euh. Bourré, j'ai fait ma fille. » Il se gratta le menton en laissant échapper un petit rire (il aurait peut-être mieux valu parler d'autre chose) (encore). « Évidemment si tu me demandes aujourd'hui je te dirai pas que c'était une connerie, au contraire, mais à l'époque c'était la panique. J'avais trop bu, je me souviens plus de grand chose, c'était vraiment une soirée nulle. Je voulais pas d'enfants mais sa mère voulait la garder, j'ai hésité plein de fois à me barrer, et puis y'a eu sa naissance et c'était wow. »

Le vagabond savait qu'il venait de rouvrir une porte qu'il s'était précipité de fermer ; pour autant, il savait aussi qu'il n'était pas capable de l'ignorer, de laisser tout ce pan de sa vie de côté. Il n'aimait pas avoir l'air vulnérable (encore moins maintenant qu'il se découvrait une manière d'être un peu moins gêné dans les conversations) ; il voulut empêcher le silence de s'installer, alors en coupant un peu court à son propre flot de pensées, il poursuivit l'étalage de ses secrets.

« Et mon pire date... Je sais pas tout à fait si ça compte comme un date, mais je me souviens d'un mec que j'avais rencontré sur Tinder et que j'avais invité à boire un verre. Il est arrivé, il m'a fixé, et il est juste. Parti. Genre ok, d'accord, je suis pas mannequin, mais trouve quand même une excuse avant de te barrer par pitié pour mon ego ? »

Ashley se frotta l'œil d'une main, amusé par ses propres histoires (il était du genre à rire à ses blagues, alors il avait l'habitude). Il n'avait pas bougé depuis quelques minutes, et il sentait que la position engourdissait ses jambes ; sans oser s'allonger comme son compère (n'aurait-ce pas été un peu bizarre ?) (par cela, il entendait plus bizarre que la scène qui se déroulait actuellement) (qui était déjà assez bizarre en soi), il déplia ses genoux et vint à son tour appuyer son dos contre la tête de lit.

Il n'avait pas oublié ce qu'il avait voulu approfondir un peu plus tôt.

« Mais attends, du coup, si t'as jamais eu de mauvais date, c'est que ça s'est bien passé, non ? Avec lui ou quelqu'un d'autre, tu me diras, les premiers ça dure jamais. Puis ça peut bien commencer et mal finir, c'est pas moi qui irai dire le contraire. Il était comment ? »

Par contre, il avait oublié le carnet qui avait jusqu'ici servi de prétexte aux interrogations. Comme pour se reprendre, il attrapa le tas de papier, et vint y griffonner les questions qui lui venaient, rendant son discours relativement haché.

« C'était ton genre ? (Parce que je comprends ton côté bisounours, mais t'as bien un genre ?) Il s'appelait comment ? Tu l'as rencontré où ? »

Avec toute la joie du monde, presque obnubilé par les révélations (faire des découvertes juste pour se sentir un peu plus puissant, un peu plus à l'aise), le vagabond s'enfonçait un peu plus dans l'indélicatesse, sans vraiment s'en apercevoir.


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Mar 6 Avr - 15:36

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L'EPAVE ET SES ROIS

Les premiers mots que la voix d'Ashley éleva dans la pièce intriguèrent Spiza. C'était un concept difficile à saisir, pour lui, qu'une relation puisse être du travail, une corvée — y avait-il autre chose à faire de ses journées que de se concentrer sur la personne qui faisait battre son coeur ? Sa vie à lui ressemblait à un cratère béant depuis le départ de Corvin, que personne n'avait voulu remplir. Il envia l'indépendance d'Ashley autant qu'il la rejeta. S'il savait que son envie de centrer sa vie sur d'autres personnes, qui, souvent, ne lui accordaient aucune attention particulière était problématique ; sa psychologue lui en avait tant parlé qu'il avait l'impression d'entendre sa voix le réprimander même à présent, il ne parvenait tout de même pas à voir la beauté du monde s'il était tout seul. C'était cette mélancolie là qu'il l'enveloppait depuis la tempête.
L'explorateur se redressa, remonta ses genoux contre son torse et posa sa joue contre ceux-ci en écoutant le vagabond. « Essayer partout » était une formulation assez vaste, mais Spiza l'interpréta comme une succession de relations courtes. (l'idée qu'Ashley était le genre de personne insaisissable le frappa alors et donna à son interlocuteur un charme inattendu)
Ses épaules se soulevèrent et il souffla du nez : c'était un rire destiné à l'anecdote du broccoli et il se demanda dans quel genre de relation on lançait des broccolis sur son partenaire. Ennuyés, ses doigts se glissèrent sur le pan de son short sur lequel il s'amusa à faire un ourelet avant de le retirer et de le refaire. Concept étranger, pour lui, que d'enchaîner des relations et il se demanda s'il avait été une personne différente, si tout son monde ne s'était pas mis à tourner autour d'une même personne, si ses tentatives d'exister n'avaient pas incomber qu'à un seul regard.

Nouvelle surprise qui lui fit remonter la tête un instant, avant qu'il repose sa joue contre son genou. Ashley était papa. C'était difficile, pour lui, de réaliser que lui-même était en âge d'être parent. Il tenta de se pencher légèrement sur le côté, comme pour chercher le regard de son interlocuteur, intercepter les expressions de son visage ; mais il ne vit rien qu'il ne sut analyser. Un tas de questions germa dans son esprit, mais il y avait tant à dire et tant à répondre qu'il ne sut pas organiser tous les mots qui s'amoncelaient et il resta muet, se contenta d'un « mmh » régulier comme pour attester qu'Ashley ne l'avait pas perdu et qu'il suivait le fil de ses paroles avec grand intérêt. Et il rit à nouveau, un rire discret, soufflé, suite à l'anecdote de Tinder.
— Il avait probablement mauvais goût, ça arrive souvent. Compliment murmuré, de ceux dont on ne veut pas de réponse, qui existent juste pour espérer provoquer un petit feu chaleureux dans l'esprit de l'autre.

Et ses sourcils se froncèrent. L'origine de son malaise ne fut pas si claire à son esprit, mais les questions du vagabond venaient de déterrer quelque chose en lui. La nostalgie, il la côtoyait tous les jours. Le sentiment de solitude, il l'enlaçait pour s'endormir sous la forme d'un oreiller écrasé par toutes ces nuits interminables. C'était quelque chose de s'enfermer dans ses propres illusions, de tenter de balayer les souvenirs qui lui crient qu'il s'était trompé sur Corvin. Mais entendre ce genre de questions ne faisaient que le pousser vers la réalité. Tout le corps de Lucjusz s'était tendu, sa gorge nouée, comme si elle refusait de laisser la voix du polonais témoigner de la vérité. Ses discussions n'avaient pas fait référence à Corvin depuis bien longtemps — parce que personne n'avait jamais pensé à lui demander.

— Ça s'est bien passé, oui. Le mensonge était plus facile à accepter, mais ses yeux ne sourirent pas lorsque ses lèvres s'étirèrent. La nausée le gagna, ses yeux rivés sur la pointe de ses chaussures tentèrent de l'ancrer dans la réalité mais ses pensées s'emmêlaient déjà et il lui fit impossible de déduire ce qui était du domaine de l'illusion et ce qui avait appartenu à leur réalité. Ses syllabes se firent moins articulées, comme si le poids de la tristesse ne lui permettait pas d'ouvrir la bouche correctement. Tu l'aurais probablement aimé, tout le monde l'aimait. Il s'appelle Corvin et on était à l'école ensemble en Pologne, on a passé toute notre adolescence ensemble, du coup. C'est le genre de personne qui entre dans une salle, dit bonjour à tout le monde en souriant et hop, rien que comme ça, il capture l'attention de tout le monde. Il était toujours prêt à rire, à faire le con. Puis... J'sais pas, il avait un truc. Tu sais, dans les livres ou dans les films, souvent il y a une fille qui fait un peu, comment on dit... Electron libre ? Esprit indépendant. Quelque chose comme ça. Elle tire toujours le protagoniste pour lui faire découvrir des trucs super cool, bah c'était un peu ça. Puis il avait aussi un côté un peu plus sombre, qu'il montrait qu'à moi. J'aimais bien ça, d'avoir l'impression d'être spécial, tu vois ? Chaque mot semblait l'entailler un peu plus l'intérieur de la gorge et ses lèvres se scellèrent un instant. Le physique n'était pas important à ses yeux, aussi il ne donna aucun détail à ce sujet, et il attrapa le carnet d'Ashley. En y réfléchissant, il se fit la remarque que le vagabond n'avait sûrement pas tort. Spiza était ce qu'on pouvait appeler un « bisounours » et si la susceptibilité empoigna son coeur, il ne fit aucune remarque. C'était après tout la vérité, et on le lui avait assez répété pour qu'il sache qu'il n'y avait rien de plus à y faire. Mais, pour la forme, il attrapa le crayon et donna un petit coup sur la tête d'Ashley, pour se donner l'air d'une personne qui prenait tout à la rigolade. Cette fois, il lâcha le carnet sur le matelas, et se contenta de donner un petit coup d'épaule à son interlocuteur.
Pour mon genre, je sais pas trop à vrai dire. Je pense que c'est surtout quelqu'un qui me parait très différent des autres. Je sais pas. Et toi, alors, t'aimes quel type de personne ? Et, bien entendu, la question ne lui inspira aucun intérêt particulier. C'était de la curiosité tout à fait désintéressée qui le poussa à poser la question en retour.

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Sam 24 Avr - 18:58
et nous serons les rois de l'épave

Le froid de la brise provenant de la fenêtre cassée vint mordre les chevilles d'Ashley, découvertes malgré la longueur de la jupe. Lui vint alors une nouvelle constatation ; les femmes devaient être de vraies guerrières, pour s'imposer ces choses là par un temps pareil. (Jupes hivernales ? Collants chauds ? Inconnus au bataillon.)
La cruauté de février (celle qui laisse à penser qu'il commence à faire meilleur alors que c'est loin d'être le cas) piqua tout de même moins l'intérêt d'Ashley que cette remarque glissée l'air de rien. Ibiza avait-il seulement dit ça pour le rassurer ? Par politesse, on en dit, des conneries. Ou bien disait-il simplement vrai, puisque, après tout, Ashley ne se trouvait pas désagréable ? (On ne lui dirait pas qu'il n'était pas tout à fait mannequin non plus.) Ou bien ses tout premiers instincts étaient fondés, et le Vert se mettait à flirter (bien que flatté, il dut rayer assez vite cette possibilité de la liste, car l'homme n'avait pas sincèrement l'air de posséder la dégaine de l'extraverti qui drague tout ce qui bouge) (pouvait-on seulement draguer pendant une apocalypse ? Comment les gens faisaient-ils, pour conserver une vie sociale décente – ça semblait déjà bien assez compliqué avant, non ?)

Les sourcils froncés de son interlocuteur le tirèrent de son questionnement. Avait-il gaffé ? Où ? Quand ? Les traits durcis de l'autre lui donnaient des airs de méchant russe dans un film d'action cliché, il pensa, sans pour autant que ça ne le fasse rire – il ne fallait pas prendre les méchants russes à la légère (et se moquer alors qu'il n'avait pas l'air bien serait sans doute un peu trop mesquin). Alors il patienta, il attendit qu'on lui dise ce qu'il avait bien pu faire ou dire de mal, triturant un coin de sa chemise entre ses doigts. Le reproche n'arriva pas.
A la place, le Green marmonna une confirmation. C'est pas le genre de tronche qu'on tire quand ça s'est bien passé. Cela dit, qu'en savait-il, lui ? Il souriait. Oh. Ça devait être la tempête qui rendait le sujet douloureux. Très probablement. C'était certain, à cent pourcent. Le vagabond avait souvent du mal à se souvenir que les autres aussi l'avaient vécue, avant d'atterrir là.

Essayant (sans succès) d'oublier la bourde qu'il pensait avoir commise, il s'attela à écouter un peu mieux (sans vraiment savoir comment). La description était simple, mais efficace. Ashley se le représentait comme le personnage d'une série populaire, à la Riverdale, avec la mèche au vent et un blazer aux couleurs de son université. Et, en effet, il avait tendance à aimer ce genre de personnages – peut-être un peu moins dans la vraie vie.

« Ah ouais, j'aime bien les gens extravertis, ça demande moins d'effort de leur parler. Mais ils sont crevants à force. J'imagine même pas si tu devais gérer ses problèmes en plus. »

Il comprenait bien le dernier sentiment décrit : Ashley aimait se sentir spécial. Surtout à ne rien foutre. Être l'objet de la fascination et des confessions de quelqu'un. (Puis, quand le charme ternit un peu, au bout de quelques semaines ou quelques mois, passer à autre chose, se renouveler ; ça, Pizza n'en parlait pas, mais il était certain qu'il devait penser la même chose.)
Le vagabond se vit voler son carnet à nouveau, et il croisa les bras, intrigué, avant de recevoir un léger coup de crayon sur le crâne. Ah ben super, on me maltraite, il pensa en souriant bêtement (mais sans savoir trop quoi dire, car il avait toujours un peu peur que ses remarques soient prises au premier degré). Il n'avait donc pas ravivé de souvenirs trop déprimants. Tant mieux. Après un coup d'épaule, une réponse, et une autre question – sans carnet ? Sans carnet. Oh.

« Différent ? Dans quel sens ? » Il insistait beaucoup, Ashley, pas vraiment pour embêter les gens ; plutôt parce que c'est comme ça qu'il avait appris à tenir des conversations (poser le plus de questions possibles, pour faire comme si le sujet l'intéressait, même lorsque ce n'était pas le cas) (pour le coup, c'était le cas) (il s'estimait chanceux de ne pas être tombé sur Jocelyne, 37 ans, responsable de la compta des Greens). « Moi... je suis pas sûr d'avoir un type. Toutes les nanas avec qui je suis sorti avaient des lunettes, mais je suis pas certain d'avoir fait exprès... J'aime bien les gens divertissants, en fait. Ceux qui peuvent t'apprendre plein de choses sur des trucs que tu pensais pas intéressants. Même si, au bout du compte j'oublie toujours tout. Enfin tu sais ce qu'on dit, mieux vaut regarder la couverture qu'ignorer le résumé. »

Un nouveau sourire idiot (encore un) (les seuls qu'il savait faire) se posa sur son visage, et il s'étira de tout son long pour ponctuer sa phrase.
Le regard pétillant, il attrapa négligemment le stylo à son tour, ainsi que le poignet de son camarade. Une sorte de vengeance pour les deux terribles coups portés à son atteinte.
Concentré sur sa tâche (et sans demander la permission au propriétaire de la main en question), il se mit en tête de gribouiller une tête de chat.

« Et du coup, après monsieur bg, t'en as eu d'au- »

La phrase se coupa au moment même où, souhaitant sans doute imiter les chutes du Niagara, l'encre du stylo se mit à dégouliner de sa pointe, aspergeant le dessin – et bien plus encore.

« Meeerde pardon pardon pardon attends- »

Et, dans la panique, sans vraiment y réfléchir, il enfonça sa main dans sa manche, avant de tamponner celle-ci pour tenter d'éponger le massacre avec. (Bien joué, champion.)


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