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[01/11] we should be dancing in the sun (bloody mary)

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Bloody Mary
Le Chaos en talons hauts
Le Chaos en talons hauts
Métier Gros Bras (spaghettis)
Avatar Julian Devorak/Sackloth and Ashe/Ilja Van Vuuren (irl) - Vava de Nugget/Luci/Icare ♥
Bloody Mary
Bloody Mary
Mar 9 Mar - 13:03
we should be dancing in the sun « I don't know what you mean about nasty feelings, it's
Let me help you out of this, you were starting to feel a
Certain way, violence, resentful.
How do you know that? I told you? I told you that?
That's right, remember yesterday?
I don't want to talk about that, I don't want to talk about it. »

( Alice Cooper → Dada )

Chantalle était de dos à seulement quelques pas, et elle avait dans la tête autant de comédies que de taquineries. Son sourire était revenu dès que le bruit des pas avait indiqué sa venu, et voilà qu'elle s'interrogeait ; c'est qu'elle avait des choses à lui dire au creux de l'oreille. Plein ! Des secrets à ne plus savoir quoi en faire, des saveurs à disperser au creux du cou. Alors quoi ? C'est qu'elle a repensé à la carte,  et son rôle dans le tour de magie. Alors Chantalle se retourna, le sourire s'agrandit, et le coeur qui tambourine. Un instant, on se croirait dans une idylle que les films américains vendent ! Ah... elle n'y croit plus depuis longtemps.

Peut-être que pour lui, elle fera semblant.
Elle fit battre ses cils qui brillent de la rosée nocturne.

Minuit sonna son terrible glas, la dernière seconde s'écoula avec lenteur, telle une goutte de sang.

Et brusquement, Chantalle se retrouva dans les haillons de Terrence.

Un battement de cil, et elle retrouva ces affreux habits inconfortables, qui grattent, grattent, démangent jusqu'à la démence. Sa pantoufle de vair laissa place au cuir des chaussures, sa jupe fut remplacée par un jeans troué aux genoux, et son pull par un affreux sweat d'un vert bouteille salit par la poussière. Dans un dernier soupir d'agonie, Chantalle avait offert à son vis-à-vis les dernières poussières de sa magie. Et Terrence se retrouvait là, gigantesque et plus maigre encore, sans maquillage pour tromper les bleus au visage. Seule subsistait l'écharpe autour de son cou, mais l'étoffe était de moindre qualité, en comparaison à celle dont Chantalle s'était parée. Telle Cendrillon, Chantalle avait senti la seconde fatidique la frapper en pleine poitrine, une lame assassine qui pénètre jusqu'au fond de ses entrailles. Et alors que les pensées tourbillonnent, que son parfum se fait enfouir par celui de l'alcool et de la clope, Terrence contemple.

Non pas la fin du monde, mais la fin d'un rêve, où Chantalle existe autant que lui, où Chantalle subsiste sans craindre de disparaître. Et dans la peau de Bloody Mary, c'est la douleur qui s'étend en tumeur, dans son torse, dans ses viscères ; Terrence pourrit depuis l'intérieur. Fini le crayon pour rendre mutin ses pupilles de chat, adieu le fond de teint qui sert à sa peau de poupée, adieu l'écarlate sur ses lèvres, et le rouge innocent aux joues. Minuit lève le voile sur les artifices, et Chantalle révèle la vraie figure de Terrence. Celle où Bloody Mary a les iris délavés par la fatigue, l'une injectée de sang depuis sa rencontre mythique avec Icare. Le mauve habille sa chair comme un fard particulier, il est partout ; sa face est un crépuscule de drames silencieux.

Ses cheveux de feu tombent en chaos sur ellui, cachent quelques bleus, contournent les coups dans leurs courbes. L'incompréhension est totale, son ventre se serre, sa gorge est sciée par le rêve qui se dissipe. Le regard est confus, rempli de désolation, tandis que Bloody Mary comprend que Chantalle n'est qu'un songe. Cela lui fait bien plus mal que d'épier l'apocalypse autour d'eux. C'est plus horrible encore, la rancœur l'oppresse, et Chantalle étouffe dans les vêtements de Terrence. Il bredouille, coupable de ce sort si soudain levé ; Chantalle ne peut pas exister. Tout est faux chez ellui, tout n'est qu'une question de dissimulation ; à choisir, il aurait préféré que cet instant dure une éternité.

Que voulait-elle dire, déjà ?

On ne saura jamais.

Le bout de ses doigts se remet à trembler, sa peau sous l'écharpe le brûle. Son cou garde la trace de strangulation, elle se bat avec l'avancée de l'eczéma. Une constellation rougeoyante que Terrence cache tant bien que mal sous l'écharpe, qui gémit sous le passage nerveux de ses ongles. Bloody Mary avale sa salive.

Monsieur se tourne aussitôt, et Terrence pense que c'est de sa faute ; voilà qu'il fuit l'anomalie.

Et c'est là qu'elle la voit, la Grande Roue.

Elle s'érige en carcasse dans le paysage nocturne, son ombre tentaculaire s'étend dans les restes de la fête foraine. Elle a survécu à la tempête ? Survivra-t-elle assez longtemps pour que des adolescents se donnent rendez-vous tout en haut ? À graver leurs titres en épitaphe pour le témoignage d'une enfance terminée trop tôt, trop vite ? Et ses yeux s'agrandissent, c'est deux trous dans la glace, alors que Chantalle Bloody Mary constate le véritable drame.

Ah... elle ne peut pas nier ce douloureux rappel.

(Tu n'as pas le droit d'exister en tant que tel)

Mais peut-être décide-t-elle de reporter son attention ailleurs, ce n'est pas une fuite, la peur ne la cloue plus sur place ; c’est qu’elle est bien plus féroce que ça. Et elle surpasse cette émotion, ressasse ses terreurs, elle s'est retrouvée loin de la prison des pirates et Icare pourrait se cacher dans les recoins de la fête foraine.

Et de Monsieur, elle ne voit que le dos.


Oui, mais non.


Elle n'aurait jamais trouvé le courage de sortir d'elle-même, elle le sait.

Mais elle voit l'aveu dans l'horizon sombre et détruit de la fête foraine, elle voit tout ce que Loyal Monsieur le Magicien a perdu. Et les pensées morbides viennent à elle, et ce serait terrible de ne pas les accepter. Il vaut mieux les confronter pour comprendre (lui).

Aaah... Loyal Monsieur le Magicien, voilà que Chantalle Bloody Mary montre un peu d'empathie. Elle se demande à quoi tu as survécu. Tu sais ? Ce soir-là, elle s'interroge et elle aperçoit : ton drame à toi. Elle mesure ton fardeau, dans cette nuit, et combien il doit t'écraser dans le silence dès lors.

Combien de personnes as-tu vues mourir ?

Combien d'employés as-tu perdus ? Et combien dans ces noms qu'on a rayé de la liste étaient des amis - et même un peu plus - ?

Combien d'enfants as-tu entendu hurler à pleins poumons ? Combien ont été emportés par la tempête ?

(Chantalle se souvient que Loyal préfère les enfants aux parents.)

(La première victime était celle de trop.)

Alors Terrence fait le calcul, il décide que ce qu'il a perdu ce soir-là ne vaut pas les souffrances que tu as traversées. Ce n'est pas qu'il veut s'oublier pour toi, c'est qu'il est de nouveau de ce pragmatisme glacial, celui qui le pousse toujours à se relever et à réagir.

Tu sais, quand il faut penser à l'éventualité de tuer pour se sauver.

Bloody Mary (Chantalle) pense à ce travail de toute une vie - qu'importe si elles ont été nombreuses tes vies - qui a été balayé par la tempête. S'il n’avait pas dû plusieurs fois nettoyer les insultes homophobes taguées sur la devanture de The Georges, s'il n’avait pas vu Fredda laver le sol en silence après le passage des clients, et si Chantalle n'avait pas dansé sur scène pour apporter un peu de rêve, Terrence n'y aurait pas songé. Mais il contemple les conséquences, il y pense,

À tout ce que la tempête a pu te prendre.

Il aimerait empêcher les émotions de revenir en lui, à choisir, il ne veut pas de ce bout d'empathie. Mais... Ah ! C'est de toi, Monsieur dont il s'agit, de toi et de toi seul. Et Terry peut bien faire ça pour toi, ne serait-ce que pour cette fleur qu'on confie (se débarasse).

Alors Bloody Mary referme la porte à ses rêves passés, aux costumes et aux paillettes. Son pragmatisme juge que ce n'est rien comparé à ce que tu as vécu. Lui, il a juste entendu cette fille qu'il pensait suivre au bout du monde lui dire qu'il était plus comme sa bonne copine que comme un homme.

La violence de ces mots, ah, i(e)l en est si usé qu'elle n'y prête plus attention. Mais le constat, elle lui a rappelé qu'il était une anomalie, et lui a brisé le coeur.

Alors tant pis pour elle.
Et tant mieux pour toi.

(Quel sacrifice odieux, hein, Terry ?)

Chantalle inspire, elle se redresse et gonfle le torse ; ses yeux glissent de la Grande Roue, l'égérie d'espoirs et de rêves brisés à Monsieur.

Et Monsieur s’écroule.

Ce n'est pas Loyal qui chute, c'est un homme. Ce n'est pas un mythe qui se fracasse en plein milieu de la nuit, ce n'est qu'un homme face aux souvenirs violents. Terrence ne bouge pas, il reste à fixer la silhouette endeuillée dans le décor dévasté, et quelque part, cette image lui serre tellement le coeur qu'il peine à respirer. Il doit agir. Ce n'est pas parce que tu avais honte ou que tu étais dégoûté d'elle que tu as changé de route.

À deux doigts de retrouver la vérité.

(Arrête de penser que ce n'est que toi, Terry.)

Bloody Mary n'a pas besoin de (sa)voir l'expression de son visage pour saisir ; il n'a fait que pressentir, deviner. Il est sauté d'une conclusion à une autre, et la voilà la vérité. Terrence a eu raison. Le temps lui prouve encore encore, et dans ce décor, il y a sans doute des corps enterrés. Alors Terrence se redresse, ses yeux sont froids et éteints, mais ce n'est qu'une impression. Le feu se tient tranquille dans la maison, il sera léger, mais chaud. Il ne s'imposera pas.

Terrence décide de laisser Bloody Mary de côté, c'est qu'iel peut être cruel, c'est qu'iel pourrait l'abandonner et refuser de (sous)tenir Loyal dans cette seconde épreuve. Le véritable apocalypse n'est-il pas dans ton ventre et dans ta tête qu'autour de vous ?

Le bout de ses doigts continue de trembler. Et Terrence serre la mâchoire, il leur ordonne d'arrêter.


Alors un pas après l'autre, c'est Terrence qui s'en va rejoindre Loyal.

Son pas est sonore, il s'annonce comme on frappe une scène au théâtre pour en déclarer le début. Son pas claque, ses semelles couinent sur le goudron, mais il n'est pas envahissant. À chaque fois que ça résonne, ça dit « je suis là ».

Terrence contourna Loyal, son ombre enveloppa son imposante silhouette fracassée. Il se tient d'abord debout, et son regard ne fait que constater ; la Grande Roue c'est comme un corps qui tient à peine debout. Puis quand ses yeux se reposent sur lui, ils cherchent son attention, ils se fixent dans les siens. Il n'y a rien dans ce regard-là.

Mais ils sont là.

Terrence avale sa salive, puis il posa un genou à terre, bientôt rejoint par l'autre. Comme un chevalier qui s'agenouille face à un prince. Mais de chevalier, Terrence n'a que l'armure abîmée et lourde. Et de prince, Loyal n'a que l'abandon laissé par Cendrillon. Terrence ne dit rien, ah et il pourrait, prétendre que ça va aller, mais ce serait hypocrite, n'est-ce pas ? Comment ça pourrait aller quand on affronte une seconde fois la mise à mort d'un travail de toute une vie ?

(Qu'importe leurs nombres)

Terrence glisse ses doigts dans son écharpe, ses cheveux sont attachés dans une grossière queue de cheval et se font fouetter par le vent frais. La fête foraine a perdu de sa vivacité, et ne reste que ce silence semblable à celui qu'on cueille dans les cimetières. L'écharpe coule le long de son cou, et les voilà, les bleus et l'eczéma sur sa peau qu'il exhibe presque comme des peintures de guerre. Ce ne sont que les couleurs de sa survie.

Terrence étend correctement l'écharpe. Entre eux, elle est un drap, presque un linceul, mais il refuse cette idée-là. Alors il fait du linceul une couverture, et il vient soigneusement recouvrir les larges épaules. Le tissu sent la cigarette, sa sueur, et un peu de son parfum. Dans les mailles, il y a toute sa chaleur qui reste, et elle n'est pas là pour cacher, mais bien pour envelopper. Il en enlève les plis, attentif aux réactions ; Terrence est prêt à tout moment d'arrêter si Loyal n'en veut pas. Il la replace bien comme il faut autour de son cou. Elle est sur tout le dos, comme la serviette avec laquelle tu t'étais couvert.

(Ce détail, Terrence ne l'oubliera pas.)

Il sait que ce n'est qu'un pansement pour le trou béant dans la poitrine, il sait que ça ne soignera jamais la blessure, et il ne dit rien. À quoi bon ? Tous les deux vous savez que les mots sont mensonges, et que s'il jouait à ce jeu-là, ce serait minimiser tout le déchirement dans  tes entrailles.

Et peut-être que vous n'en avez pas besoin, des mots.

Terrence pourrait dire : je suis là, mais il est bien placé pour savoir qu'on est jamais ce qu'on prétend.

Terrence n'a pas besoin de le souffler au bout de ses lèvres asséchées. Il est là, c'est tout. Sa mince carcasse est féroce, et elle sera là pour (sous)tenir l'homme face à lui.

Il pourrait sourire, le prendre dans ses bras, au lieu de ça, il mesure la gravité de la situation. Les mots sont superflus, inutiles et trompeurs. Il se contente d'un ferme :

« Loyal. »

C'est un rappel, Terrence exige et le monde consent ; ce simple mot, c'est une encre dans la réalité distordue de cette ville merdique. Et avec ce mot-Prénom, Terrence présente une autre encre. Ce sont ses deux mains qu'il ouvre, les paumes tournées vers le ciel. Ses doigts ne tremblent plus, ils sont même glacés, mais il saura empêcher le froid à l'intérieur de s'étendre. Il saura les réchauffer.

Terrence se rappelle à toi, et il n'exige qu'une seule chose, Loyal.

Laisse-le être là.
Laisse au moins une fois, quelqu'un se soucier de toi.
Terrence ne partira pas, il n'abandonnera pas.

Pas cette fois.



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Spoiler:
Monsieur Loyal
typical boomer
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Métier gérant de la fête foraine
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Monsieur Loyal
Monsieur Loyal
Dim 11 Avr - 19:12
Loyal n'aime pas la nuit. Il sait ce qu'on fait sous le couvert des ombres. Il se disait qu'il avait le droit, si c'était pour tout ramener à la lumière. La réalité, c'est qu'on ne part jamais de la nuit. Elle nous suivra toujours, imprimera sous les paupières des détails qui nous enfoncerons doucement dans notre matelas (jusqu'à ce qu'on s'y noie, et que le cœur ne s'en débatte pas).
Sous la lune, les peaux sont grises, et le sang est noir. Chaque silhouette est un cauchemar. Chaque bruit de pas peut annoncer le glas. Tu sais, Mary, il y avait des lumières, mais ce n'était jamais une très bonne nouvelle quand elles s'allumaient.
N'allumez pas les étoiles. Laissez-les tranquilles.
Il sait qu'ils sont morts.
Laissez-les tranquilles.
Il aimerait avoir tord. Il essaie probablement de marchander dans sa tête, de se convaincre qu'il est possible que ce soit faux. L'envie est rarement plus forte que la raison, chez Loyal. La voilà qui se déchaîne. Il a pourtant l'air si calme. Le front contre le macadam fissuré, la main abandonnée et écorchée, les jambes sous lui comme un enfant.
Ils étaient là juste avant.
Et lui, il n'était pas avec eux.
Ce n'est pas comme s'il y avait un espoir. Il sait où ils se trouvaient, sous quel décombre précisément. Il y a des signes, si on regarde ; et pour ceux que l'on n'a pas retrouvé, il y a des gravures sur la place aux souvenirs.
Mais peut-être pas, hein ?
Qu'est-ce qui prouve que maintenant, ce n'est pas un autre rêve ?
Ce n'est pas lui. Il se convainc avec ses propres logiques, et se piège avec ces envies rageuses. Il refuse. Il refuse. Son poing se referme sur un bout de goudron. Il serre les phalanges jusqu'à blanchir les jointures. S'il ouvrait les doigts, probablement y aurait-il du noir. Le même noir que la Nuit.
Il n'entend pas les pas. Il y a trop de bruits entre ses oreilles (c'est ses pensées qui se disputent). Il ne voit pas l'ombre. Il y en a trop dans la nuit (le regard au sol).
Il se coupe de tout. Peut-être espère-t-il qu'une ombre l'emmènera, peu importe là où elle va. Peut-être attend-t-il qu'ils reviennent, ceux qui allumaient les lumières. Peut-être veut-il se revoir comme avant, tout en blanc -comme s'il pouvait y arriver. Qu'importe. Prenez-le. Donnez-lui d'autres malheurs pour lesquels il pourra vous blâmer. Des choses qui font moins mal.
Il sursaute à peine, quand le tissu vient. Il attend la suite. Comme là-bas. Allez. Donnez-lui d'autres douleurs, qu'il arrête de penser à l'éruption qui s'enclenche, au myocarde plat, à l'acouphène de ses débats stériles. Il a envie de vomir. Il serre toujours plus fort le caillou dans sa main (le noir coule). Allez. Allez ! Ils ne sont pas si longs, normalement. Il devrait déjà avoir la rouille au fond de la gorge.
L'appel semble si lointain. Peut-être que, l'espace d'un instant, il n'était plus Monsieur Loyal. Peut-être que, en cet instant, rien qu'en cet instant, il ne voulait pas être Loyal. Il voulait être le fils de son père, l'amour de sa mère, le préféré des chevaux, le fouineur de première et le surdoué des cartes. Il aurait voulu ne jamais grandir, et rester avec elle toute sa vie : même les boucles de l'infini ne sauraient rendre ennuyeuse une vie faite d'eux deux.
Mais toi t'es bien là. Et Loyal est un homme de certitudes.
Il doit aller voir.
Il lâche le caillou. La paume est ensanglantée. Il la pause sur le sol, s'en sert pour mécaniquement remonter son buste. L'écharpe succombe légèrement à la gravité. Ses yeux sont incroyablement secs. Les émotions sont trop fortes pour faire surface. Ca s'accumule. Tu ferais mieux de fuir avant. Si tu restes, c'est que t'es avec eux (mais non, Loyal, rappelles-toi).
Dans les deux cas, tu viens. Tu viens ou il t'emmène (te traîne te force te demande te --).
Il voit tes mains. Son visage est froid. C'est une statue de marbre (gris), même quand il bouge. Ses décisions sont rapides. Il n'en a rien à faire, de ce drap; il ne sent plus le monde extérieur. Mais toi, par contre, toi tu viens. Tu viens. (Tu n'as rien à lui offrir, Mary. A vrai dire, tu lui as déjà pris sans que personne ne le sache -ah ! ne t'en veux pas trop, c'est aussi lui qui a donné. Mais voilà : tu viens.)
Il attrape ton écharpe, te la rend directement. De l'autre main, il accroche ton poignet. Il n'est pas sûr de pouvoir se relever. Ce n'est pas qu'il n'en a pas la force, c'est qu'il ne sent plus rien. Il n'a plus conscience de la gravité terrestre, de l'énergie dans ses muscles, du rythme de son cœur. Impression fantôme. Corps spectral.
Il fait pression, s'accroche, tire pour remonter. Il ne dose pas sa force, ne sait pas s'il impose trop de poids ou non. Ses genoux quittent le sol. Il se redresse. Froid. Statue. Marbre.
Sa main poisseuse ne te lâche pas. Elle glisse, doucement, jusqu'à sa jumelle. Il s'arrête à nouveau un instant. Ca tourne, là-haut. Il y a tellement de choses qu'il en devient difficile de voir.
Et pourtant, après une minute ou deux, le voilà qui se met en marche. Loyal est mécanique. Chaque mouvement est le même enchaînement d'étape (genou, pied, sol, appui), mais le rythme est saccadé. Il ne regarde pas où il marche. Pas besoin. Il sait très bien où il va.
résumé:
Bloody Mary
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Bloody Mary
Bloody Mary
Dim 11 Avr - 22:25
we should be dancing in the sun « Avec la tête
Elle danse aussi très bien
Et son visage
Danse avec tout le reste
Elle a cherché une nouvelle façon
Et l'a inventée »

( Marcia Baila → Rita Mitsouko )

Bloody Mary n'a jamais eu peur de la nuit,
Vois-tu, Loyal, c'est que c'est son élément.
Il y a tellement d'évènements, durant la nuit :
Les choses, les anomalies qui sont de sorties,
Il y a les monstres, ceux qui fuient le jour se levant,
Et il y avait Terrence, tu sais, seize ans.

Et quand l'écharpe tombe, il la laisse faire. Il ne la rattrape pas, et il n'empiète pas dans l'espace personnel. Il aimerait être sûr de lui, savoir exactement quoi faire, mais les faits sont là : lui aussi, il souffre. Mais ce ne sera pas la dernière fois, c'est ça qu'il y a de bon avec la résilience ; elle érode les émotions, et éteint ce qu'il reste d'humanité. Alors Terrence a laissé ses sentiments de côté, pourtant ! Ah. Quand il voit la main abîmée, quand il la sent sur son poignet, ça fait remonter ses propres démons.

Pour une fois, Terrence aimerait qu'on pose des questions sur son visage tuméfié, il aimerait partager la douleur, et qu'on pense un peu à ce qu'il ressent. Peut-être qu'il raconterait, peut-être que la croix serait moins lourde, si vous la portiez à deux. Ah... et Terrence sait : l'homme qui se noie ne se soucie que de la profondeur de l'océan, et non pas de sa grandeur. Il sait et ce n'est pas grave !

Tu vois, dans sa tête, il y a le silence.
Il est si usé de ça, Terrence.

(Si tu savais)

Quand le bourdonnement s'arrête,
C'est là qu'il se rend compte : sa tête,
Elle est séparée de son corps.

Et Terrence reconnait, encore, et encore.

Quand on presse son corps, quand la peur s'enfonce si profondément dans ses nerfs qu'un instant, il oublie ce qu'il se passe. Si Icare ne l'avait pas passé à tabac deux semaines plus tôt, ses doigts ne se seraient pas mis à trembler quand Loyal se lève, et que lui, il est obligé de le suivre. Ce n'est pas contre Loyal, c'est que son cerveau examine toutes les éventualités. Ce n'est pas contre Loyal, mais en quelques secondes, Terrence pense ! Et ce qu'il y a dans sa caboche, c'est terrible.

Il a peur.

Il se demande quel est le poids de Loyal.

Est-ce qu'il a déjà étranglé quelqu'un ?
Icare avait refermé sur son cou, ses mains.

L'armure est si usée que l'on pourrait croire qu'elle ne tient plus en place, c'est que Terrence l'a trop de fois utilisé. Ah... mais elle est solide, bien plus qu'on le ne croit.

(Et si Loyal décidait de le coincer, Terrence n'aurait aucune chance. Il pèse plus lourd, il est large, et la manière dont il serre sa main lui fait mal. Est-ce que tu veux lui broyer les doigts ? Est-ce que toi aussi, tu vas te mettre à lui arracher ses plumes ? Est-ce que toi aussi,

tu vas

tu vas

Danser comme Marcia

Lui écraser la cervelle avec tes jambes-couperets
Est-ce que tu vas danser sur du polystérène
Regarde ! Regarde comment elle était belle en scène
La voir danser
me transforme en exciter

(Quel est ce froid qu'on sent en toi ?)

)

Ses yeux s'écarquillent, pourtant, il suit sagement Loyal, soudain glacé. Son écharpe est jeté sur son épaule, Terrence se rappelle.

Il a seize ans, et il fait le tapin à la sortie des boîtes gays.
Et il y a ce mec qui lui propose de prendre une chambre.
Terrence ne sait pas dire pourquoi, mais il le sent pas.
Pourtant, Terrence accepte, c'est qu'il a la dalle, et il est las de ses fringues pleine de sueur et d'humidité.

(La sirène en mal d'amour)

Dis Loyal, est-ce que tu t'es déjà retrouvé enfermé avec un monstre ? Est-ce que tu as déjà fait face à quelque chose d'aussi peu humain que tu dissocie la réalité ? C'est comme un miroir qui se brise, tu sais. Les éclats font à peine du bruit quand ils s'éclatent au sol.

Et quand tu ris, je ris aussi
(Tu aimes tellement la vie)

Ce n'est qu'un épisode parmi tant d'autres, tu sais à cette époque, Chantalle n'existait pas encore. Et Mary n'était pas Mary.

Mais Bloody...

Ah... c'est une histoire pour plus tard plus tard.

Est-ce que tu serres si fort parce que tu crains de le voir s'enfuir ? Est-ce que tu serres si fort, parce que tu veux éviter qu'il se détache de toi ? Est-ce que tu veux lui faire du mal, Loyal ? Tu ne saurais jamais, jamais, tout ce à quoi Terrence pense, c'est qu'il reste si naturel. Sa démarche n'est pas aussi vide et entrecoupée que la tienne, ses pas sont silencieux peut-être.

Terrence songe qu'il doit partir, s'enfuir.
(Il le sent vraiment pas, et il ne saurait pas dire pourquoi)
Des mecs bizarres, il s'en est tapé des tas.
Mais lui.
Il n'aurait pas été si méfiant, si quelques mois plus tôt,

Marcia ne s'était pas mis à danser — quel ce froid que l'on sent en toi toi en toi en toi toi toi

C'est la mort qui t'a consumé.

(C'est peut-être parce qu'il marmonne et ne le regarde pas dans les yeux)
Terrence se dit : je ne dois pas montrer que j'ai compris.

Alors il joue, à cette innocence, celle qui les fait tomber à ses pieds, celle qui leur fait croire qu'il peut être sauvé.

Terrence se mouille les lèvres, il aurait aimé que tu gardes l'écharpe, tu sais. Tu dois avoir froid. Il sait, il sait, il sait.

(Comme ta bouche est immense)

Comment est-ce qu'on va désinfecter la plaie ? Il ne doit pas s'abandonner aux pensées parasites, il doit rester ancré dans ce réel, où ce qu'il reste de la fête foraine, c'est les silhouettes des attractions ayant survécu et des bâtisses. Ce qu'il reste, c'est le silence qu'il règne après une fête qui a fini tard dans la nuit. Alors Terrence contemple, l'obscurité ne lui fait jamais peur. Si tu savais, quel genre de monstre il est. Lui.

A ton âge, tu bois, tu fumes autant, c'est un peu triste.
Dis Terry, quel est ce froid qu'on sent en toi ?

Tu te protèges au moins ?

Oh tu sais, le nombre de connards qui enlèvent la capote avant, j'ai arrêté de les compter.
Non... ce n'est pas de ça dont je veux parler.
Ce n'était pas la première fois, hein ?

Pas la première fois

pas la première fois

première fois

Ses pensées bourdonnent, et pourtant, il leur ordonne le silence. Il lutte, mais c'est que ça remonte, et ça lui serre la gorge. Il fixe Loyal, enfin, il n'est plus très certain de voir Loyal, à cet instant, juste une ombre, triste et seule.

S'il te plait.


Ne lui fais pas de mal.

Pas comme...

Surtout, surtout ne restez pas seules, soyez toujours au minimum deux. Faites attention à vous, on ne sait jamais sur qui on peut tomber.
Penser à toutes les éventualités.

(Comme ta bouche est immense quand tu souris, et quand tu ris, je ris aussi, tu aimes tellement la vie)

Ne vous éloignez pas trop.

Ne...

Terrence fixe le sol, il ne sait plus ce qu'il y a de vraiment noir. Il doit. Il doit [...]

C'est quelle était sage, sa Fredda.

Terrence inspira, il fit rentrer tout ce qu'il y avait de possible d'air dans ses poumons. C'est glacial, ça fait mal, mais ça lui rappelle qu'il est en vie. Et qu'il survivra, encore et encore. Dans son cerveau, il y a tellement de souvenirs qui remontent, le choc ramène tant de cadavres — c'est sa mémoire qui remonte à la surface.

Si jamais je vous revois traîner par ici, je vous jure, je vais vous buter.

(Tapette)

Je suis
désolédésolédésolédésolé
Ce n'est pas de ta faute, on est là. On est là. Est-ce que tu veux je te prenne dans mes bras ?
Non (oui)
Tu veux que je te laisse tranquille ?
Oui.

(Et malgré tout, Fredda reste.)

Ah... c'est qu'il en était terriblement amoureux. Il n'y avait qu'elle pour réellement comprendre ce qu'il traversait, et dans ses longs silences, elle semblait tout lire. Alors Terrence bloqua sa respiration, et soudain, il se rappelle de la suite. Il fait jour, et lui, il n'aime pas le jour. Chantalle a le nez en sang, et elle n'arrête pas de trembler.

Et elles sont là.
Donna, Miss Red, Fredda

et [/////]

Terrence sourit en coin. Ah... il ne sait pas si elle est encore en vie, s'il y a quelque chose au-delà de la bulle. Il ne sait pas qu'elle est devenu, mais... Ah... Fredda, toujours là quand il le faut. Alors Terrence se détend, il ne sait toujours pas où Loyal veut le mener, il pense d'abord à sa caravane et songe qu'il n'en sortira pas.

Si c'est ça.


Le danger qu'il représente est toujours palpable.
Mais Terrence ne va pas le laisser faire.

Alors ses doigts s'entrelacent aux siens. Oui, Terrence est là, et il le restera. Ça bourdonne dans sa tête, c'est le chaos qui explose de partout, et pourtant, pourtant ! Il est si calme. Ses doigts ne tremblent plus, il ne faut pas que la peur prenne le dessus. Alors Terrence se racle la gorge, et il dit d'un ton ferme :

« Attention, tu me fais mal. »

Il faut d'abord poser ses limites. D'accord ? Mais il ne lâche pas la main pour autant, il la presse un peu, il n'a pas besoin de mots ni de magie. Tu le sens, n'est-ce pas ? Qu'il est là, et qu'il le restera un peu plus longtemps. C'était quoi la suite ?

Fredda qui recouvre Chantalle avec son châle, elle s'accroupit, et elle parle.
Chantalle ne sait plus trop ce qu'elle dit, mais Fredda semble discuter de tout et de rien.
Sa voix est tranquille, maternelle, et elle sent le froid être repoussé un petit peu.
Elle sait donner de sa voix, et ce jour-là, sa voix est une encre.

Chantalle est incapable de restituer tout ce qu'elle a raconté, mais Terrence décide : on va essayer. On va essayer. Ce silence est un linceul, il refuse de le laisser seul.

Son pas se cala sur celui de Loyal, sa main ne le lâchait pas, et il songea qu'on allait mettre les questions pratiques pour plus tard (il faut désinfecter la plaie). Ce n'est pas grave, si sa main est sale, ce n'est rien. Ce n'est rien. Ce n'est pas grave, les bleus au visage, et la douleur qui broie sa gorge, ce n'est rien. Parce que Terrence sent comme quelque chose qui bloque les cordes vocales, lorsqu'il parle.

Ce n'est pas grave si Loyal n'écoute pas, en fait, il s'en fout.
Il doit juste l'empêcher de partir plus loin, le ramener, peu à peu.
Déblayer les pensées, les couvrir avec ce qu'il va raconter.

Son coeur battait vite dans sa poitrine, sa main est un peu moite, mais elle est là, et il est toujours là. Parmi toutes les histoires qu'il choisit de raconter, c'est une fenêtre ouverte sur son enfance. Tu te souviens, Loyal ? Terrence, et Terensis, et Turlough.

L'Irlande.

« Je ne pense pas que ce soit connu en dehors de l'Irlande, sa voix est terriblement rauque, il n'y a plus de magie digne d'une chanson de Paris, c'est que ça fait horriblement mal - tu as déjà été étranglé, Loyal ? Les cordes vocales ont du mal à se remettre. Mais est-ce que tu connais l'origine des brownies ? Je parle bien des gâteaux, et son ton est toujours serein, chaque syllabe se détache — un peu difficilement — et se décolle de sa trachée. Quand j'étais petit, et que j'allais chez ma grand-mère, elle faisait souvent des brownies. Elle en prenait un qu'elle gardait dans une assiette, et qu'elle mettait de côté avec un verre de lait, elle le rompait à la main. Terrence marque une pause, ses yeux scrutaient la nuit. En vérité, le brownie, ce n'est pas le gâteau, c'est... mh... comme ça qu'elle appelait les petites créatures qui vivent dans les maisons, et aident aux tâches ménagères. Pour les remercier, on fait ce gâteau avec un verre de lait, mais attention : il ne faut pas le couper en deux avec un couteau, mais à la main, car ça les mets en colère. Terrence avala sa salive, son souffle manque un peu, ça démange dans sa gorge. Ils aident les nouvelles mamans, et évidemment, ils brassent de la bière. »

Terrence ne sait pas dire ce que tu ressens, Loyal, il ne peut que l'imaginer. On le traite souvent de monstre, et on dit souvent qu'il n'a pas de coeur. C'est qu'il sait si bien faire semblant. C'est qu'il préfère être un tocard que d'admettre que ça va mal.

Bambi ne saura jamais toutes les pensées qui l'ont traversé — des milliers de poignards — avant qu'il ne vienne.
AKN a cru qu'il n'en faisait qu'à sa tête, et que l'alcool c'était suffisant. Pourtant... il ne devinera jamais ce qu'il voulait.

(Le frapper, entendre ses propres phalanges se briser dans sa mâchoire)

Terrence ne sait pas dire ce que tu ressens, Loyal, qui serait assez imbus de lui-même pour prétendre ça ? On le traite souvent de monstre, et on dit souvent qu'il n'a pas de coeur. C'est qu'il sait si bien faire semblant. Et c'est qu'il ne veut plus le montrer, son coeur. Si on lui posait la question, Terrence répondrait que c'est un bout de viande en train de pourrir.

Bobtail lui avait demandé pourquoi il était cruel, lui qui connaissait la cruauté d'autrui.

Ah... il n'avait toujours pas compris.
C'est Terrence contre le reste du monde.
Mais pour ce soir, c'est toi et lui.
Contre le reste du monde ? Ça, il ne le sait pas encore.
Mais ce dont il est certain, c'est que ses doigts restent liés, entrelacés, et qu'il doit avancer.

Alors il marche.


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Monsieur Loyal
typical boomer
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Métier gérant de la fête foraine
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Monsieur Loyal
Monsieur Loyal
Dim 21 Nov - 22:37
Le cœur emmuré et l'esprit fermé, il avance. La nuit est noire, c'est comme si on y avait collé toutes les ombres qu'il avait jamais croisé, celles qu'il aime et celles qu'il aurait voulu oublier. C'est qu'il a presque l'impression de les sentir, lui qui fend l'air (l'inverse du vide, atmosphère providentielle), c'est qu'il se souvient des parfums, des présences, des substances.
Est-ce qu'ils le regardent ?
C'est certain qu'ils sont là. Il sent sur son échine l'effroi de leur réalités. Ca glisse sur tout son épiderme, le glace. Les arrecteurs s'actionnent. Tout son cerveau lui dit que c'est réel.
Pourtant, il ne fait pas froid là d'où ils viennent. Lui et eux.
Lui et eux et toi. Tu suis. T'as pas le choix, et si tu l'avais, t'aurais choisi pareil. Il avance vite. Ses grandes jambes ne sont pas un soucis pour toi. Tant mieux. Si tu trébuches, il te traînera. Mécanique. Automate.
Il connaît le chemin par cœur, qu'importe ses yeux mouillés d'autres choses que des larmes (du choc, de la colère, de la surprise). L'hésitation n'existe que dans le fond de son esprit ; elle demande : est-ce vraiment une bonne idée ?
Oui. Il doit savoir. Il doit voir de ses propres yeux, parce que ses propres souvenirs semblent s'être perdus dans le brouillard -que faisait-il ici ? pourquoi étais-tu là ? où est partie la femme ? où est parti le bonheur, l'insouciance ?
Il repasse en boucle les pauvres vestiges de sa mémoire. Il se doit de s'en souvenir. De tout noter. Oui, tout documenter, et enquêter, et trouver. Et alors, peut-être, peut-être qu'il arriverait à tout refaire. A revenir deux ans en arrière.
Si ça arrive, il te connaîtra pas. Mais c'est pas si grave, non ? (si.)
Tu peux parler mais il t'entend pas. Son cerveau enregistre mais son esprit ignore. Il est trop loin. Ailleurs. T'es qu'un corps qu'il trimballe. Un check sur la réalité, un suspect possible, un témoin pour sûr. Il ne se rend pas compte de sa force, de son pas cadencé seconde après seconde, de ses délires qui pointent le bout de leurs nez.
Il avance. Tourne, continue, évite un cadavre de métal, continue, continue, tourne, marche, avance, progresse, chemine, gagne du terrain. Le temps est long. Veut-il vraiment savoir ? Non. Non il ne veut pas, mais ce qui lui reste de sanité l'oblige à y aller.
Il ne saura jamais pour les brownies. Tu devra lui re-dire. Tu le fera ? Promis ? Plus tard ?
C'est que là, il est occupé. Il s'arrête. Devant vous, il y a un tapis de macadam. On dirait qu'il est déroulé exprès pour cette petite caravane. Pas très grande, oui. Il y a un toit bleu, un soleil dessiné dans un coin avec un pinceau pas très sûr de lui. Le logo de la fête foraine brille fort, de son rouge et or. Des bonhommes bâton peuplent la carcasse froissée. Chacun d'entre eux a son nom. On a du mal à les lire. C'est que les plantes sont venues enlacer cette maison, et probablement qu'elles ne voulaient que lui apporter un peu de réconfort. Elles ont grimpé du sol au métal en passant par le tronc d'arbre en travers du véhicule. Il n'y a pas de fleurs. C'est parce qu'on est en novembre. Sinon, sois-en sûr, il y aurait des fleurs. Il y avait toujours plein de fleurs dans sa caravane. Là, on ne les voit pas parce que d'habitude elles sont derrière la vitre, et la vitre est cassée. Elle a dû les emmener ailleurs. Les mettre à l'abris. Au chaud. C'est certain.
Il avance. Il veut juste vérifier qu'elle n'a oublié aucun pot. Ca serait dommage. Très dommage ! Vraiment dommage.
Il s'arrête. Le squelette de métal est juste à quelques pas. L'arbre l'a coupé en deux. Net. On voit la tôle qui s'est fendue, les pneus qui ont rendu l'âme. Les seules choses encore vivantes ici, c'est les souvenirs.
Et, devant tout cet amas froid, il y a une petite montagne de pierre. Il le sait très bien parce que c'est lui qui l'a fait. Ah, il devrait changer les fleurs. Celles-ci sont presque fanées. Mais ne t'inquiètes pas, Serah. Au printemps il en plantera, et tu en aura toujours. Il en mettra des jaunes, et des blanches, et des rouges. Il continuera de venir, comme avant, le matin à l'aurore. Il n'aura pas de café à la main, parce qu'il n'y en a plus beaucoup, mais ce n'est pas grave, parce qu'il n'y a plus de comptabilité à faire. Il ne te tirera plus du lit, ne t'inquiète pas. Repose-toi bien. Dors bien, comme ça quand vous vous retrouverez, vous ne perdrez plus aucun instant. Il te racontera ses journées, et toi tu pourra en rêver. Il ne te dira pas tout, probablement. Il ne veut pas que tu te tourmentes. Il va bien. Promis. Tout les forains aussi ! Dis-leur bonjour de sa part, à ceux qui sont avec toi.
Il s'assoit. Tu lui manques.
Il pleure. Il pleure avec des larmes.
résumé:
Bloody Mary
Le Chaos en talons hauts
Le Chaos en talons hauts
Métier Gros Bras (spaghettis)
Avatar Julian Devorak/Sackloth and Ashe/Ilja Van Vuuren (irl) - Vava de Nugget/Luci/Icare ♥
Bloody Mary
Bloody Mary
Lun 22 Nov - 8:43
we should be dancing in the sun « Avec la tête
Elle danse aussi très bien
Et son visage
Danse avec tout le reste
Elle a cherché une nouvelle façon
Et l'a inventée »

( Marcia Baila → Rita Mitsouko )

Bloody Mary n'entend que sa voix, celle de la peur.
Elle recouvre ses certitudes, même sa douceur.
Il songe qu'il doit à tout prix la cacher.
Dis Loyal, as-tu déjà pour ta vie, lutter ?
Qu'est-ce que tu as pu faire pour cela ?
C'est d'un monstre dont tu tiens la main,
Mais peut-être que pour ce mal de chien,
Qui ronge ta poitrine, c'est lui dont tu as besoin.

Alors voilà.
Terrence avance d'un pas.

Dans ce silence de mort, Bloody Mary observait les carcasses de la fête foraine. Il avait l'esprit encore entaché du rêve éveillé qu'ils avaient fait. Son esprit était sous le choc, et il se concentrait sur Monsieur. Ses pensées bourdonnaient dans sa boîte crânienne, et il en perdait le sens en cours de route. Interférence, grésillement, parasite, et parfois une voix qui sonnait : et s'il te tuait ?

Tu sais bien, Bloody Mary,
Qu'il ne faut pas suivre les hommes la nuit.
Tu n'as donc rien appris ?

Les bleus lui font mal, le froid lui brûle la peau, et Loyal lui broie la main. C'est à peine qu'il bouge les doigts dans la sienne ; il sent les fourmis grimper depuis ses ongles, remonter dans ses phalanges. Terrence ne panique pas, malgré les pensées cacophoniques. Il se fait confiance (c'est un survivant). Il saura réagir.

Après tout.
C'est un meurtrier.

Bloody Mary avale sa salive, il ferme les yeux, se concentre sur la situation. Il reprend alors la parole, repense à tous les bons conseils de Fredda. Il ne répondait pas toujours, mais ce n'était pas le but ; sa voix doit être un point d'ancrage. Un phare dans l'obscurité, une source de sa chaleur. Il joue de sa voix, cherche à la rendre plus grave ou plus aiguë, cherche le ton qu ramènera Loyal à lui. Et il s'aperçoit que trop tard de la caravane, fendue en deux par un arbre. Il se serait arrêté net, si Loyal n'avait pas continué à marcher. Son corps se tend, mais le voilà obligé de suivre le forain.

Ah.

Oui.

Ses épaules se relâchent soudain, Bloody Mary s'enfonce dans ses pensées. Il se coupe du monde, dissocie soudain. Ses yeux se fixent sur le sol, c'est à peine qu'il contemple les plantes, les peintures sur le métal. C'est à peine qu'il perçoit Loyal s'asseoir. Il sent juste le mouvement de sa main. Pourtant, il ne réagit pas.

Il est là, sans vraiment être là.

L'on dirait l'un de ces fantômes, qui rend visite aux humains, ou qui n'ont pas conscience d'être mort. Les souvenirs remontent en lui, la voix qui le moque et lui dit qu'il ne sera jamais vraiment un garçon. Mais que ça fait de lui « une bonne copine ».

C'est vrai, ils sont enfermés dans cette bulle. Ils sont coincés dans ce souvenir, et le vent est glacé. Terrence frissonne. Il n'avait pas l'intention de les revoir, de toute façon. Sa mère, ses frères, son père. Et c'est là qu'il contemple la fraude qu'il est. Ah. Chantalle est si belle, n'est-ce pas ? Si délicate. À promettre le monde derrière un battement de cils, et à ne jamais se donner pour la nuit. Terrence est une salope, en comparaison. Loyal ne semblait pas lui donner d'importance, tant mieux.

Pourtant, ça coince dans sa gorge, cette impression d'être un mensonge. Un songe morcelé dans la nuit glacée de novembre. Alors Terrence balance :

« Quand j'étais petit... »

Loyal n'écoutera pas de toute façon.

« Et qu'on retrouvait ma grand-mère chez elle, on avait un jeu avec ma cousine : on échangeait nos vêtements pour nous moquer des adultes. Quelle jolie manière d'avouer une part de la vérité ? Je devais avoir six ans ? Elle en avait sept. Puis, on descendait, c'est qu'on se ressemblait bien elle et moi. Elle est lui. Ça faisait sourire ma mère, et rire ma tante, ma grand-mère, et elle a compris, ce jour-là que son fils n'était pas vraiment son fils. Elles me disaient que j'étais plutôt une jolie petite fille, Terrence sourit et fixe Loyal. Et le masque tombe, le regard s'éteint quand il ajoute : puis mon père est arrivé. »

Terrence soupira. Il secoua la tête, laissant les boucles se loger contre les marques dans le cou, ou voiler son regard. Il jette dans un coin de son esprit, ce demi-aveu de sa vraie nature. Les brownies, il en reparlera. Pas cette histoire. Plus jamais.

Terrence se racle la gorge, puis il contemple leurs deux mains liées. Loyal ne semble même pas s'apercevoir qu'il est là. Il soupire.

« Hey. »

Sa main serre celle de Loyal, doucement. Puis Terrence avance. Il le contourne, mais ne lui masque pas totalement la vue de la caravane. Il lui jette un coup d'oeil, et songe que l'arbre lui était tombé dessus comme un coup de hache. Alors il bloque sa respiration, puis fixe Loyal. Il s'assoit à son tour.

À seize ans, Terrence a arrêté d'avoir peur de son père.
Pour lui, ce n'était même pas un (re)père.
Juste un gros con alcoolique qui le battait.
Et un jour, Terrence a fini par lui rendre les coups.
Tous les deux ont su, à cet instant, qu'il aurait pu :
Tu sais, le buter.
Ah. Si son frère ne l'avait pas empêché,
Il n'aurait pas longtemps hésité.

Son père l'avait eu, tu vois, cette seconde d'hésitation. Il lève son pied vers le ventre gonflé, sa mère est allongée au sol, le visage défiguré.

Ce n'est même pas la peur qu'elle perde le bébé, qui a poussé Terrence à bondir sur son géniteur.
C'était sa douleur à elle, si elle le perdait.

La silhouette de Bloody Mary est friable, fatiguée, les coups dans son cou ont cette couleur dramatique, ce fard le drape de drame. Pourtant, il le porte comme un roi. Qu'importe. Loyal est à peine plus grand que lui, mais il est plus large. Pourtant, c'est lui le plus vulnérable. Terrence bat des cils, et pose son autre main sur la sienne. Elle est emprisonnée entre ses paumes, sa peau se réchauffe à son contact. Il voit les larmes, ne les juge pas — l'envie un peu, lui ne sait pas pleurer.

Il rapproche la main de Loyal vers sa bouche, souffle dessus pour tenter de la réchauffer. Finalement, Bloody Mary la déposa un peu au dessus de son coeur. On peut en sentir les battements rapides, la virulence avec laquelle il s'écrase contre sa poitrine. Il replace correctement l'écharpe, prêt à recouvrir Loyal encore. Mais au final, il demande simplement :

« Hé, Loyal ? »

Sa voix est forte, grave, il est assis en tailleur et il a terriblement froid dans cette nuit noire. Son pantalon est troué aux genoux, il nage dans le sweat, et il ressemble plus que jamais à cet adolescent qu'il a été. Celui qui est parti chez lui en trombe. Est-ce que tu sens ? Le squelette sous les vêtements ? Les os de sa cage thoracique quand il gonfle la poitrine ?

Il ouvre un bras, ne s'impose pas. Il est juste là en soutien.

« Est-ce que... ses yeux errent dans le décor ravagé de la fête foraine, il n'y a que l'odeur de l'humidité, les restes d'un rêve. Il fixe alors Loyal : est-ce que tu veux que je te prenne dans mes bras ? »

Il saura, Terrence, faire face à la terreur du contact qui lui broie l'estomac.

Il saura.


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[01/11] we should be dancing in the sun (bloody mary)
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